A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au siège de la Cour à Lomé, le jeudi vingt-deux décembre deux mille seize, est intervenu l’arrêt suivant :
LA COUR,
Sur le rapport de monsieur Koffi KODA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ;
Vu l’arrêt N°045/99 rendu en matière civile, le 27 mai 1999, par la Cour d’appel de Lomé ;
Vu la requête à fin de pourvoi de maître Kodjo-Messan AGBANZO suppléé par maître Robert DOVI, conseil du demandeur au pourvoi ;
Vu le mémoire en réponse de la SCP Martial AKAKPO, société d’avocats à Lomé, conseil de la défenderesse au pourvoi ;
Vu le mémoire en réplique de maître Robert DOVI, conseil du demandeur au pourvoi ;
Vu les conclusions écrites de madame le premier avocat général près la Cour suprême ;
Vu les autres pièces de la procédure ;
Vu la loi organique N°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret N°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ;
Ouï le conseiller Koffi KODA en son rapport ;
Ouï maître Robert DOVI, conseil du demandeur au pourvoi ;
Nul pour la SCP Martial AKAKPO, absente et non représentée, conseil de la défenderesse au pourvoi ;
Le ministère public entendu ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant en matière civile et en état de cassation sur le pourvoi formé le 7 décembre 1999 par maître Kodjo-Messan AGBANZO, avocat à la cour à Lomé, agissant au nom et pour le compte du sieur A Ac Aj, contre l’arrêt N°045 rendu le 27 mai 1999 par la Cour d’appel de Lomé qui a confirmé en toutes ses dispositions le jugement N°159/97 du 15 octobre 1997 par lequel le Tribunal de première instance d’Aného a :
-déclaré parfaite et régulière la vente intervenue entre le sieur A Ac Aj et dame WILSON Ayélé portant sur une parcelle de terrain sise à Ab dans la préfecture des Lacs, ayant la forme d’un quadrilatère irrégulier, d’une superficie de 24 ares 67 centiares, limitée au Nord par une rue en projet de 14 mètres, au Sud par la propriété de A Ac Aj, à l’Est par une rue en projet de 16 mètres et à l’Ouest par la route de Gbodjomè, acquise au prix d’un million quatre cent mille (1.400.000) francs CFA ;
EN LA FORME
Attendu que tous les actes de procédure ont été faits dans les forme et délai de la loi ; qu’il y a lieu de recevoir le pourvoi ;
AU FOND
Attendu, selon l’arrêt attaqué et les éléments du dossier, que suivant requête en date du 10 septembre 1997, dame WILSON Ayélé a saisi le tribunal de première instance d’Aného aux fins de confirmation de vente d’une parcelle de terrain sise à Gbodjomè, dans la préfecture des Lacs, ayant la forme d’un quadrilatère irrégulier, d’une contenance de 24 ares 67 centiares, limitée au Nord par une rue en projet de 14 mètres, au Sud par la propriété de A Ac Aj, à l’Est par une rue en projet de 16 mètres et à l’Ouest par la route de Gbodjomè ;
Qu’à l’appui de son action, la requérante a soutenu avoir versé l’intégralité du prix convenu, soit la somme d’un million quatre cent mille (1.400.000) francs CFA entre les mains du sieur X Af Ai à qui l’immeuble dont s’agit a été attribué suivant un paiement en nature, en raison des travaux de lotissement effectués par celui-ci au profit du sieur A Ac Aj ; qu’elle a sollicité par conséquent qu’il plaise au tribunal déclarer régulière et parfaite la vente dudit immeuble en vu de l’inscrire au livre foncier de la République Togolaise ;
Qu’au cours des débats, le sieur A Ac Aj a déclaré avoir effectivement reconnu la vente de la parcelle de terrain à dame Aa Ag et a dit n’avoir aucune objection à opposer à la demande ;
Que par jugement N°159 rendu le 15 octobre 1997, le Tribunal a :
-déclaré parfaite et régulière la vente,
-dit que ledit jugement vaut contrat de vente,
-dit qu’au vu de l’expédition du jugement dont s’agit, monsieur le conservateur de la propriété foncière sera tenu d’inscrire au livre foncier de la République Togolaise, les droits de propriété de dame WILSON Ayélé ;
Que suivant l’arrêt N°045 rendu le 27 mai 1999, la Cour d’appel de Lomé a confirmé le jugement susvisé en toutes ses dispositions ;
Sur le premier moyen : pris de la violation des articles 7, 11 et suivants de l’ordonnance N°78-35 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire ;
Attendu qu’à l’appui de ce moyen, le demandeur au pourvoi soutient que pour rejeter le moyen de l’appelant tiré de la violation des dispositions de l’ordonnance N°78-35 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire, relatives à la publicité des audiences à leur date, le juge d’appel s’est borné à dire « que dans le jugement entrepris, il est fait état de ce qu’au cours des débats, le sieur A Ac Aj, le vendeur, a déclaré avoir effectivement reconnu la vente de la parcelle de terrain dont s’agit à la dame WILSON Ayélé et n’a aucune objection à opposer à la demande », alors que les audiences doivent être publiques et doivent se tenir à la date habituellement fixée pour les audiences du tribunal ou des cours ; qu’en l’espèce, le jugement N°159 du 15 octobre 1997 du tribunal d’Aného n’a jamais été public et ne s’est jamais tenu publiquement à la date du 15 octobre 1997 comme le premier juge l’a affirmé ; que c’est à tort que les juges de la Cour d’appel ont repris à leur compte l’affirmation gratuite du premier juge ; que la non publicité du jugement N°159 du 15 octobre 1997 résulte de ce que, à la date du 15 octobre 1997, il n’y a eu aucune audience, ni civile, ni correctionnelle, la date du 15 octobre 1997 n’étant pas la date habituelle des audiences du tribunal d’Aného ; que la publicité des audiences est d’ordre public, et toute inobservation de cette règle est sanctionnée par la nullité pure et simple du jugement ; que la Cour d’appel, en statuant ainsi qu’elle l’a fait, a méconnu les dispositions du code de l’organisation judiciaire ;
Mais attendu que l’article 131 du code de procédure civile dispose que « L’omission ou l’inexactitude d’une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s’il est établi par des pièces de la procédure, par le plumitif d’audience ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été, en fait, observées » ;
Attendu qu’il ressort du jugement dont appel que celui-ci a été rendu publiquement et contradictoirement ; qu’au cours des débats, le sieur A Ac Aj, vendeur, a déclaré avoir effectivement reconnu la vente de la parcelle de terrain dont s’agit à la dame WILSON Ayélé et n’a aucune objection à opposer à la demande ;
Qu’il en résulte que l’audience au cours de laquelle a été rendu le jugement est publique et que la cause a été contradictoirement plaidée par les parties au procès ;
Que s’agissant de la date du 15 octobre 1997 à laquelle le jugement a été rendu, le demandeur au pourvoi ne rapporte pas la preuve que le tribunal d’Aného n’a jamais tenu une audience publique à cette date et que le 15 octobre 1997 n’est pas la date habituelle des audiences du tribunal d’Aného ; qu’il s’ensuit que toutes les prescriptions légales destinées à établir la régularité du jugement ont été, en fait observées ; que dans ces conditions, le moyen ne peut prospérer ; qu’il convient de le rejeter purement et simplement comme non fondé ;
Sur le second moyen : tiré de la violation des articles 52,53, et 57 du code de procédure civile ;
Attendu qu’à l’appui de ce moyen, le demandeur au pourvoi soutient que suivant les dispositions susvisées, nul ne peut être jugé s’il n’a été dûment appelé ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel, au lieu de demander à dame WILSON Ayélé de faire la preuve de ce que le demandeur au pourvoi avait été dûment appelé, s’est contentée d’affirmer « qu’aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect du formalisme des articles 52 et 57 du code de procédure civile ; que selon une jurisprudence constante, il n’y a pas de nullité d’un exploit ou d’un acte de procédure sans texte et que celui qui évoque la nullité d’un exploit ou d’un acte de procédure doit démontrer que l’inobservation de la formalité prescrite a porté atteinte à ses intérêts » alors que, contrairement aux affirmations de la Cour d’appel, le respect du contradictoire est un droit fondamental dont l’application et le respect sont d’ordre public ;
Mais attendu qu’il ressort du jugement N°159/97 rendu le 15 octobre 1997 par le Tribunal de première instance d’Ae « qu’au cours des débats, le sieur A Ac Aj, vendeur, a déclaré avoir effectivement reconnu la vente de la parcelle de terrain dont s’agit à dame Aa Ag et n’a aucune objection à opposer à la demande » ;
Que cette déclaration prouve bien que le principe du contradictoire a été respecté ; que si le demandeur au pourvoi estime que ce n’est pas le cas, c’est à lui de prouver le non- respect dudit principe ; que ne l’ayant pas fait, c’est à tort qu’il reproche à la Cour d’appel d’avoir violé les textes susvisés ; qu’il convient de rejeter le moyen ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement, en matière civile et en état de cassation ;
EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ;
AU FOND
Le rejette ;
Prononce la confiscation de la taxe de pourvoi ;
Condamne le demandeur au pourvoi aux dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi vingt-deux décembre deux mille seize (22-12-2016) à laquelle siégeaient :
Monsieur Agbenyo Koffi BASSAH, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ;
Messieurs Koffi KODA, Badjona SAMTA, Koffi DEGBOVI et Kuma LOXOGA, tous quatre conseillers à ladite chambre, MEMBRES ;
En présence de monsieur Ah C, deuxième avocat général près la Cour Suprême ;
Et avec l’assistance de maître Awié ATCHOLADI, attaché d’administration, greffier à ladite Cour, GREFFIER ;
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier
PRESENTS :
MM
BASSAH : PRESIDENT
KODA, SAMTA, DEGBOVI : Membres
KANTCHIL-LARRE: M. Ad
B : GREFFIER
ARRET N°115/16 DU 22 DECEMBRE 2016
POURVOI N°101/RS/99 du 07 DECEMBRE 1999