ARRET N° 19/341
CKD/MF
COUR D'APPEL DE BESANCON
ARRET DU 11 JUIN 2019
CHAMBRE SOCIALE
Audience publique
du 07 mai 2019
N° de rôle : N° RG 18/01963 - N° Portalis DBVG-V-B7C-EA2Q
S/déclaration de saisine d'une décision
de la Cour de Cassation de PARIS
en date du 08 novembre 2018
Code affaire : 89A
A.T.M.P. : demande de prise en charge au titre des A.T.M.P.
APPELANTE
CPAM DE HAUTE-MARNE, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Julie DUFOUR, avocat au barreau de BESANCON
INTIMEE
SARL CASTENETTO BTP, dont le siège social est sis [Adresse 2]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats du 07 Mai 2019 :
Mme Christine K-DORSCH, Président de Chambre
M. Jérôme COTTERET, Conseiller
Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller
qui en ont délibéré,
Mme Magali FERREC, Greffier lors des débats
Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt sera rendu le 11 Juin 2019 par mise à disposition au greffe.
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Exposé du litige
Monsieur [B] [Z] employée par la SARL CASTENETTO BTP en qualité de maçon - chef d'équipe a le 16 décembre 2013 adressé à la Caisse Primaire d'Assurance-Maladie de la Haute Marne une déclaration de maladie professionnelle pour « rupture de coiffe épaule gauche - opéré le 21/11/2013 ».
Le certificat médical initial du 6 décembre 2013 mentionnait « tendinopathie épaule gauche avec rupture de la coiffe sus et sous épineux opéré le 21 novembre 2013'», et comme date de première constatation médicale le 13 mai 2013.
Aux termes de l'instruction, la caisse a par courrier du 12 mars 2014 informé l'employeur de la clôture de l'instruction, et de la possibilité de consulter le dossier avant la décision du 1er avril 2014.
Puis par décision du 1er avril 2014, la Caisse a pris en charge la pathologie au titre du tableau 57 des maladies professionnelles.
la SARL CASTENETTO BTP a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, qui par décision du 24 juin 2014 a rejeté la demande pour défaut d'intérêt à agir du fait de la tarification collective des sinistres professionnels, ainsi que du respect des conditions visées au tableau N°57.
L'employeur a dès lors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Marne d'une contestation du caractère professionnel de la maladie, et à titre subsidiaire de l'inopposabilité de la décision pour violation du principe du contradictoire caractérisée par l'enquête, l'absence d'information sur l'I.R.M, et l'absence de vérification des postures professionnelles.
Par jugement du 22 juillet 2015 le tribunal a :
- Infirmé la décision de la commission de recours amiable du 24 juin 2014,
- Déclaré inopposable à la société CASTENETTO BTP la décision de prise en charge de la maladie professionnelle,
- Débouté l'employeur de ses autres demandes.
La Caisse Primaire d'Assurance-Maladie de Haute-Marne a relevé appel de cette décision.
Par arrêt du 22 juin 2017 la cour d'appel de Dijon a, par motifs substitués, confirmé le jugement déféré.
La Caisse Primaire d'Assurance-Maladie de la Haute Marne a interjeté un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision.
Par arrêt du 8 novembre 2018 la Cour de Cassation a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, en toutes ses dispositions, a remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et a ordonné le renvoi devant la cour d'appel de Besançon, condamnant la société CASTENETTO BTP aux dépens.
La Cour de Cassation relève que pour déclarer la décision de prise en charge inopposable à l'employeur, la cour d'appel retient que le colloque médico administratif retient la date du 6 décembre 2013 comme date de la première constatation médicale, alors que la caisse ne conteste pas que l'employeur n'a pas eu connaissance du compte rendu de l'I.R.M. sur laquelle elle s'est fondée pour fixer la date de première constatation médicale au 13 mai 2013.
Or la Cour de cassation juge qu'en statuant ainsi alors que tant le certificat médical initial, que le colloque médico administratif indiquent que la date de la première constatation médicale de la maladie est le 13 mai 2013, la cour a dénaturé les termes clairs et précis les écrits qui lui étaient soumis.
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La caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Marne a saisi la cour d'appel de renvoi le 13 novembre 2018.
Par conclusions enregistrées le 11 février 2019, et reprises oralement à l'audience de plaidoirie du 07 mai 2019, la Caisse demande à la cour de :
Infirmer le jugement du 22 juillet 2015 en ce qu'il déclare inopposable à la SARL CASTENETTO BTP la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée le 16 décembre 2013 par Monsieur [Z],
Condamner la SARL CASTENETTO BTP à payer à la Caisse de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Régulièrement convoquée à l'audience de plaidoirie du 07 mai 2019 par courrier recommandé du 29 novembre 2018 dont l'accusé de réception a été signé le 5 décembre 2018, la SARL CASTENETTO BTP n'était ni présente, ni représentée à la procédure.
Il est en application de l'article 455 du CPC renvoyé aux conclusions de l'appelante pour plus ample exposé des faits, moyens, et prétentions.
MOTIFS DE LA DECISION
1) Sur l'absence de l'intimée
Attendu qu'en application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée ;
Qu'il en résulte, ce que confirme une jurisprudence constante, que la cour d'appel qui n'est pas saisie de conclusions par l'intimé doit, pour statuer sur l'appel, examiner la pertinence des moyens par lesquels le premier juge s'étaient déterminés (Cour Cass. 03.12.2015 N° 14-26-676) ;
Attendu qu'en outre en l'espèce la caisse dans ses conclusions à hauteur de cour répond aux arguments soulevés en première instance par l'employeur ;
2) Sur l'intérêt à agir de la SARL CASTENETTO BTP
Attendu que l'intérêt à agir de l'employeur, parfaitement caractérisé par les premiers juges, n'est plus contesté par la caisse à hauteur d'appel ;
3) Sur l'opposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge
Attendu qu'il est constant que la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Marne a le 1er avril 2014 notifié à la SARL CASTENETTO BTP une décision de prise en charge de la pathologie déclarée par son salarié Monsieur [B] [Z] au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles ;
Attendu qu'il convient en premier lieu suite à l'arrêt de cassation de relever que la date de première constatation retenue par la caisse a justement été fixée au 13 mai 2013 par le tribunal puisqu'en effet cette date est indiquée tant par le certificat médical initial, que par le colloque médico administratif ;
Attendu par ailleurs qu'aux termes des articles R. 441-13 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le dossier constitué par les services administratifs de la Caisse primaire d'assurance maladie, dont l'employeur peut demander la communication, doit comprendre la déclaration d'accident, les divers certificats médicaux détenus par la Caisse, les constats faits par la Caisse, les informations parvenues à la Caisse de chacune des parties et les éléments communiqués par la Caisse régionale ;
Que doivent également être communiqués les éléments nécessaires à la réunion des conditions du tableau (Cass. Civ. 2ème, 11 oct. 2018, n° 17-18.901) et que précisément le tableau 57 A mentionne, s'agissant de la désignation de la maladie, « rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM », de sorte que l'I.R.M est bien l'une des conditions prévues au tableau ;
Qu'à défaut, la décision de prise en charge est inopposable à l'employeur, celui-ci ne disposant d'aucun moyen pour contrôler le respect des exigences posées par le tableau ;
Attendu qu'en l'espèce, la Caisse reconnaît ne pas avoir inclus l'IRM au dossier mis à disposition de la SARL CASTENETTO BTP ;
Que c'est en vain que la caisse soutient qu'elle ne peut transmettre les documents relevant du secret médical et détenus par le service médical, tel l'IRM, et que les éléments de diagnostic n'ont pas à figurer dans les pièces du dossier dont l'employeur peut demander la consultation, alors même que dans ce cas précis l'objectivation par IRM est une condition prévue au tableau ;
Attendu par conséquent qu'en l'absence de cet élément nécessaire à la réunion des conditions du tableau n° 57, qui comme tel échappe au secret médical, la décision de prise en charge de la Caisse doit donc être déclarée inopposable à la SARL CASTENETTO BTP ;
Attendu que le jugement déféré est par conséquent confirmé en en toutes ses dispositions puisqu'il déclare recevable le recours de l'employeur, infirme la décision de la commission de recours amiable et lui déclare inopposable la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée le 16 décembre 2013 par Monsieur [B] [Z] ;
Attendu que l'appelante qui succombe en toutes ses prétentions est condamnée aux frais et dépens de la procédure d'appel, et par voie de conséquence débouter de sa demande de frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR statuant publiquement et réputé contradictoirement
Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 8 novembre 2018 ;
Confirme le jugement prononcé le 22 juillet 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Haute-Marne en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant
Condamne la CPAM de Haute Marne aux entiers dépens de la procédure d'appel ;
Déboute la CPAM de Haute Marne de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le onze juin deux mille dix neuf et signé par Mme Christine K-DORSCH, Président de la Chambre Sociale, et Mme Magali FERREC, Greffier.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT DE CHAMBRE,