ARRÊT N R. G : 11/ 03672
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS 10 août 2011
X... C/ A...
APPELANT : Monsieur Jean-François X... né le 31 Août 1954 à GASSIN (8358O) Chez Mme Monique Y...-...... 06400 CANNES Rep/ assistant : la SCP POMIES-RICHAUD VAJOU DISSOUTE représentée par ses co liquidateurs Me G. POMIES RICHAUD et Me E. VAJOU, Plaidant/ Postulant (avocats au barreau de NÎMES)
INTIMÉE : Madame Christiane Annie Michelle A... épouse X... née le 03 Juillet 1951 à AIN TAYA (ALGÉRIE)... 84190 BEAUMES DE VENISE Rep/ assistant : la SCP RAMEL SEBELLINI MOULIS, Plaidant (avocats au barreau de NÎMES) Rep/ assistant : la SCP CURAT JARRICOT, Postulant (avocats au barreau de NÎMES)
Statuant sur appel d'un jugement rendu par le Juge de l'Exécution
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Mme Isabelle THERY, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. Dominique BRUZY, Président M. Serge BERTHET, Conseiller Mme Isabelle THERY, Conseiller
GREFFIER : Mme Jany MAESTRE, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS : à l'audience publique du 25 Janvier 2012, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Mars 2012. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 06 Mars 2012, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
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FAITS et PROCÉDURE-MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES Vu l'appel interjeté le 22 août 2011 par M. Jean-François X... à l'encontre du jugement prononcé le 10 août 2011 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Carpentras. Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 12 décembre 2011 par M. Jean-François X..., appelant et le 20 janvier 2012 par Madame Christiane A..., intimée, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé du litige et des prétentions respectives. * * * * * Selon procès verbal du 10 juin 2011, M. Jean-François X..., agissant en vertu d'un arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 29 mars 2006, a fait pratiquer à l'encontre de son épouse, Madame Christiane A..., une saisie attribution auprès de la SA BNP Paribas pour obtenir le règlement de somme de 2866, 13 euros correspondant aux pensions alimentaires d'avril, mai et juin 2011. Cette saisie a été régulièrement dénoncée le 16 juin 2011 à la débitrice. Par acte du 12 juillet 2011 Madame Christiane A... a fait assigner M. X... devant le juge de l'exécution aux fins principalement d'obtenir la main levée des saisies pratiquées et des dommages-intérêts. Par jugement du 10 août 2011, le juge de l'exécution a :- ordonné la mainlevée de la saisie attribution pratiquée par M. X... sur les comptes bancaires de Madame A... sur procès-verbal de saisie du 16 juin 2011,- condamné M. X... à payer à Madame A... une somme de 104, 80 euros au titre du remboursement des frais bancaires,- déclaré irrecevable la demande de délais formée à titre subsidiaire par M. X...,- débouté les parties de leurs autres demandes et condamné M. X... aux dépens. * * * * * M. X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement demandant à la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter Madame X... de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer les sommes de 3000 euros à titre de dommages intérêts pour préjudice moral et financier ainsi que la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. À titre subsidiaire, si par impossible le juge de l'exécution considérait que la créance de Madame X... est exécutoire malgré le pourvoi, il sollicite au visa des articles 8 du décret du 31 juillet 1992 et 1244-1 du Code civil le report du paiement de la créance à la date à laquelle le divorce passera en force de chose jugée dans la limite de deux ans. En tout état de cause, il sollicite la condamnation de Madame X... à régler rétroactivement :- l'arriéré de l'indexation sur la pension fixée à 760 euros par l'arrêt du 29 mars 2006, outre les intérêts au taux légal depuis la date d'exigibilité de chaque pension, lesdits intérêts étant majorés de 5 points en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier à compter du 10 août 2011,- l'arriéré de la pension alimentaire depuis le mois d'avril 2011 jusqu'au prononcé de l'arrêt, outre l'indexation des intérêts au taux légal depuis la date d'exigibilité de chaque pension, lesdits intérêts étant majorés de 5 points en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier à compter du 21 mai 2011, et à reprendre le règlement de la pension alimentaire indexée pour la période postérieure au prononcé de l'arrêt jusqu'à ce que le divorce soit passé en force de chose jugée. Il argue de la violation par le premier juge des dispositions des articles 1086 et 1087 du code de procédure civile par dénaturation de l'esprit de la loi et considère que l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes qui, vidant sa saisine sur le divorce et ses conséquences, n'a pas pu avoir pour effet de mettre fin au devoir de secours alors qu'un pourvoi a été inscrit. Il soutient l'absence de titre exécutoire et le caractère suspensif du pourvoi de Madame X... sur le règlement de sa propre créance de restitution considérant que la pension alimentaire qui lui a été allouée par la cour d'appel reste due tant que le divorce n'est pas définitif et que l'arrêt de la cour d'appel du 16 mars 2011 ne précise pas que la créance de restitution de Madame X... est l'expression d'un devoir de secours par M. X... à l'égard de son épouse ou qu'elle aurait été accordée pour assurer son existence. Il ajoute que le chef de l'arrêt du 16 mars 2011 qui fixe la créance de restitution de Madame X... à 21. 280 euros et ordonne compensation ne correspond à aucune des exceptions visées par l'article 1087 du code de procédure civile et n'est donc pas immédiatement exécutoire au sens de l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991. Il explicite sa demande de délais rappelant que la compensation n'est qu'un mode d'extinction des obligations et que le juge de l'exécution est compétent pour accorder des délais même sur le règlement de créances compensées. * * * * * Madame Christiane A... conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 4000 € pour ses frais irrépétibles. Elle affirme en substance le caractère exécutoire et l'autorité de la chose jugée de la disposition de l'arrêt du 16 mars 2011 relative à la compensation et soutient l'irrecevabilité tant de la demande de délais s'agissant d'une dette alimentaire que celle concernant les arriérés.
MOTIFS DE LA DÉCISION Tout créancier peut pratiquer une saisie attribution pourvu qu'il soit muni d'un titre exécutoire défini par l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991 comme étant une décision des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elle a force exécutoire et ce titre doit constater une créance liquide et exigible en vertu de l'article 42 de la loi précitée. Pour solliciter la mainlevée de la saisie, Madame A... se prévaut de la disposition de l'arrêt du 16 mars 2011 relatif à la compensation pour considérer qu'elle est créancière de M. X... et qu'il ne dispose donc pas de créance exigible. En l'occurrence la saisie a été pratiquée sur le fondement d'un arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 29 mars 2006 qui a fixé à 760 euros par mois la pension alimentaire due par Madame Christiane A... initialement fixée par ordonnance de non-conciliation du 27 octobre 2004 à 2000 euros par mois. Le procès-verbal de saisie mentionne au titre des sommes dues les pensions alimentaires des mois d'avril, mai et juin 2011, soit 760 euros par mois. S'agissant d'une pension alimentaire octroyée au titre du devoir de secours, cette pension est due jusqu'au prononcé du divorce qui met précisément fin à ce devoir de secours. Cette pension était donc due jusqu'à l'arrêt du 16 mars 2011 qui a statué sur le divorce et en a réglé les conséquences, étant observé que la pension alimentaire dont Madame A... avait sollicité la suppression a été maintenue puisque dans le dispositif de cette décision, il est indiqué : « dit n'y avoir lieu à suppression de la pension alimentaire telle que sollicitée par Madame A... en son incident du 22 septembre 2010 ». Dans la mesure où il est établi au regard de la notification du pourvoi en cassation que Madame A... a déféré à la censure de la Cour de Cassation dans toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 16 mars 2011, les dispositions de l'article 1087 doivent trouver application en ce qui concerne cette pension alimentaire. Aux termes de cet article, l'effet suspensif qui s'attache au pourvoi et à son délai en matière de divorce ne s'applique pas aux dispositions de la décision ou de la convention homologuée qui concernent les pensions, la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant et l'exercice de l'autorité parentale. L'exécution immédiate de l'article 1087 ne concerne que les mesures accessoires c'est-à-dire les mesures prises à l'occasion du divorce. La pension alimentaire allouée pour la durée de l'instance cesse d'être due uniquement, lorsque mettant fin au devoir de secours, la décision qui a prononcé le divorce des époux est devenue irrévocable. Il ressort des dispositions de l'arrêt du 16 mars 2011 frappé de pourvoi que la pension alimentaire a été maintenue jusqu'au prononcé de l'arrêt statuant sur le divorce. Il existe donc bien un titre constitué par l'arrêt du 29 mars 2006 qui ne peut être anéanti par l'arrêt du 16 mars 2011 au regard de l'exception visée par l'article précité, une créance liquide correspondant aux trois mois de pension alimentaire postérieurs à l'arrêt du 16 mars 2011 et exigible car postérieure à ce dernier arrêt et ne pouvant être au demeurant incluse dans la compensation ordonnée par celui-ci. Madame A... en l'état de la rédaction de l'article 1087 du code de procédure civile se prévaut vainement à cet égard du caractère exécutoire de la disposition de l'arrêt du 16 mars 2011 relatif à la compensation. Il ne s'agit pas d'une mesure prise à l'occasion du divorce mais d'une compensation qui constitue un mode d'extinction d'une obligation et n'a en elle-même aucun caractère alimentaire ainsi que le conclut à bon droit l'appelant sauf à ajouter au texte. La disposition concernant la compensation n'est donc pas immédiatement exécutoire au sens de l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991 de sorte qu'il ne peut être fait état d'une créance de restitution dans le cadre de la présente procédure. Dans la mesure où Madame A... ne conteste pas avoir cessé de régler la pension alimentaire, la procédure de saisie a été valablement diligentée ce qui justifie d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions. * * * * * Il ne peut être réclamé la condamnation de Madame A... à régler l'arriéré d'indexation, l'arriéré de la pension alimentaire et le règlement de la pension alimentaire indexée pour la période postérieure au prononcé de l'arrêt dès lors que M. X... dispose déjà d'un titre et que la cour saisie de l'appel du jugement du juge de l'exécution ne peut statuer sur une demande d'indexation, étrangère au litige qui lui est soumis. Ces chefs de prétention ne peuvent qu'être rejetés. * * * * * La procédure ne peut être considérée comme dilatoire alors qu'il a été fait droit aux prétentions de Madame A... en première instance. La demande de dommages-intérêts de l'appelant ne peut en conséquence prospérer.
Sur les frais de l'instance Madame A... qui succombe devra supporter les dépens de l'instance et devra payer à M. X... une somme équitablement arbitrée à 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort, Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau et y ajoutant, Déboute Madame Christiane A... de l'ensemble ses demandes, Rejette le surplus des demandes formulées par M. Jean-François X..., Condamne Madame Christiane A... aux dépens de première instance et d'appel dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Pomiès Richaud Vajou, avocat qui en a fait la demande et la condamne à payer à M. Jean-François X... la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Arrêt signé par Monsieur BRUZY, Président et par Madame MAESTRE, greffier présent lors du prononcé.