Ordonnance n° 2
-------------------------7 Novembre 2017------------------------- RG no16/ 00038----------------------- La société X...X..., La société GARAGE DU GRAND PRE, La société TSM ESPORT, La Société INTERTRAC SP ZOO, La Société TRACPOL SP ZOO, La Société TRANSESTRA LDA, La Société TRANSPOL FRIGO SP ZOO C/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES-----------------------
R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRÉSIDENT
Recours en matière fiscale
Rendue publiquement le sept novembre deux mille dix sept par Mme Isabelle CHASSARD, présidente de chambre, agissant sur délégation du premier président de la cour d'appel de Poitiers, assistée de Mme Inès BELLIN, greffier,
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le neuf mars deux mille dix sept, mise en délibéré au premier juin deux mille dix sept, délibéré prorogé au six juillet deux mille dix sept, puis au dix neuf septembre deux mille dix sept, puis au sept novembre deux mille dix sept.
ENTRE :
La société X...X..., SAS au capital de 900 000 €, immatriculée au RCS de LA ROCHE SUR YON sous le no ..., prise en la personne de son Président Monsieur Philippe X...domicilié en cette qualité audit siège ...Représentant : Me Xavier BOREL, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
La société GARAGE DU GRAND PRE, SAS au capital de 100 000 €, immatriculée au RCS de LA ROCHE SUR YON sous le no 321 659 625, prise en la personne de son Président Monsieur Franck X...domicilié en cette qualité audit siège ...Représentant : Me Xavier BOREL, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
La société TSM ESPORT, SAS au capital de 100 000 €, immatriculée au RCS de LA ROCHE SUR YON sous le no 438 126 724, prise en la personne de sa Présidente personne morale la société TRANSPORT DE SAINT MICHEL EN L'HERM, elle-même représentée par son Président personne physique Monsieur Franck X...domiciliée en cette qualité au ...Représentant : Me Xavier BOREL, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
La Société INTERTRAC SP ZOO (SPOLKA Z OGRANICZONA POWIEDZIALNOSCIA), société de droit polonais inscrite sous le numéro KRS 0000260933, prise en la personne de son représentant légal Monsieur Emmanuel Y..., dont le siège social est sis Ul. Mszczonowska nr36, Rawa Mazowiecka Kod 96-200 POLOGNE Représentant : Me Anne LOEFF de la SELAS ACTY, avocat au barreau de DEUX-SEVRES
La Société TRACPOL SP ZOO (SPOLKA Z OGRANICZONA DPOWIEDZIALNOSCIA), société de droit polonais inscrite sous le numéro KRS 0000229552, prise en la personne de son représentant légal Monsieur Emmanuel Y..., dont le siège social est sis Ul. Mszczonowska nr36, Rawa Mazowiecka, kod 96-200 (POLOGNE) Représentant : Me Anne LOEFF de la SELAS ACTY, avocat au barreau de DEUX-SEVRES
La Société TRANSESTRA LDA (TRANSESTRA ACTIVIDADES TRANSITARIAS INTERNACIONAIS LDA), société de droit portugais inscrite sous le numéro NIPC 501952438, prise en la personne de ses représentants légaux Monsieur Frédéric Yves Pierre Z...et Madame Rose Marie Gilbert A..., dont le siège social est sis Zona industrial Louriçal, Distrito : Leiria Concelho : Pombal Freguesia : Louriçal, 3100 LOURICAL (PORTUGAL) Représentants :- Me Anne LOEFF de la SELAS ACTY, avocat au barreau de DEUX-SEVRES-Me Cristina GARCIA BERTRAND, avocat au barreau de Lisbonne (PORTUGAL)
La Société TRANSPOL FRIGO SP ZOO (SPOLKA Z OGRANICZONA ODPOWIEDZIALNOSCIA), société de droit polonais inscrite sous le numéro KRS 0000458377, prise en la personne de son représentant légal Monsieur Emmanuel Y..., dont le siège social est sis Ul. Mszcaonowska nr36, Rawa Mazowiecka, kod 96-200 (POLOGNE) Représentant : Me Anne LOEFF de la SELAS ACTY, avocat au barreau de DEUX-SEVRES
Appelants,
D'une part,
ET :
DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES 6 bis rue Courtois 93695 PANTIN CEDEX Représentant : Me Jean DI FRANCESCO substitué par Me Hadrien Hahn de Bykhovetz de la SCP URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Intimé,
D'autre part,
Sur la jonction
Attendu qu'il y a lieu, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice de joindre les dossiers no16/ 00039, 16/ 00040, 16/ 00041, 16/ 00042, 16/ 00043 et 16/ 00044 à la procédure déjà pendante devant la cour sous le no16/ 00038 ;
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I) SUR LA PROCEDURE ET LES PRETENTIONS DES PARTIES
A) DECISION dont appel
Par ordonnance en date du 06/ 07/ 2016, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de LA ROCHE SUR YON a autorisé les agents de l'administration des Finances publiques à procéder à des opérations de visites domiciliaires à l'encontre des sociétés suivantes :
- société de droit polonais TRACPOL SP ZOO (Société TRACPOL) représentée par Emmanuel Y...-société de droit polonais TRANSPOL FRIGO SP ZOO (société TRANSPOL) représentée par Emmanuel Y..., François B...et Szymon C...-société de droit polonais INTERTRAC SP ZOO (Société INTERTRAC) représentée par Emmanuel Y...et Szymon C...-société de droit portugais TRANSESTRA-ACTIVIDADES TRANSITARIAS (société TRANSESTRA) représentée par Mme GUILBERT A..., M Frédéric Z...et Mme D...
La requête présentée le 28/ 06/ 2016 précise que les sociétés sont présumées exercer sur le territoire national une activité professionnelle sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et ainsi omettre de passer les écritures comptables y afférentes.
37 pièces ont été communiquées à l'appui de la requête.
L'ordonnance du 06/ 07/ 2016 a autorisé les visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve des agissements présumés dans les lieux désignés ci après où des documents et supports d'informations illustrant la fraude présumée sont susceptibles de se trouver à savoir :- locaux et dépendances sis 1-3 rue du Grand Pré 85700 LA MEILLERAIE TILLAY susceptibles d'êtres occupés notamment par différentes sociétés dont notamment la SAS X..., la SAS GARAGE DU GRAND PRE et la société TSM ESPORT et les trois sociétés polonaises susvisées et la société portugaise appelantes-locaux et dépendances sis ZI Moatifaut 85700 POUZAUGES susceptibles d'êtres occupés notamment par différentes sociétés dont notamment les trois sociétés polonaises susvisées et la société portugaise ainsi que des sociétés du groupe X...
B) Procédure RG 16/ 00038 : SAS X...X...(société X...)/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES
Un procès verbal de visite a été dressé le 07/ 07/ 2016 dans les locaux sis 1-3 rue du Grand Pré 85700 LA MEILLERAIE TILLAY. Le procès verbal de visite mentionne que les agents ont pénétré dans les locaux occupés par la société SAS X...seule et n'ont pas pénétré dans les autres bâtiments désignés par M Franck X...comme étant occupés par la SAS GARAGE DU GRAND PRE (2 autres bâtiments) ni dans un 4ème bâtiment inoccupé. Les opérations se sont déroulées en présence de Franck X...désigné pour cette mission par Philippe X...représentant légal de la SAS X.... La liste des documents saisis est mentionnée au procès verbal.
L'information a été donnée de ce que le déroulement des opérations de visite ou de saisie peut faire l'objet d'un recours devant le premier président de la cour d'appel de POITIERS.
= La société X...a formé un recours effectué par lettre recommandée le 19/ 07/ 2016 contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON et contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie à la suite de l'ordonnance contestée. Par acte d'huissier en date du 29/ 07/ 2016, la société X...a dénoncé le recours à Mme E..., inspectrice des finances publiques à la direction nationale des enquêtes fiscales.
= Dans le dernier état de ses écritures du 23/ 12/ 2016, elle présente les observations suivantes :
" Vu les dispositions de l'article L16B du LPF Vu la requête de la DNEF du 22 juin 2016 enregistrée le 24, l'ordonnance pré-rédigée du 08/ 07/ 2016 et les pièces
INFIRMER l'ordonnance du 08/ 07/ 2016 en ce qu'elle a admis sur la base des éléments d'appréciation fournis par la DNEF qu'il existait des indices suffisants de présomption de fraude fiscale.
Statuant de nouveau
Dire et juger que les éléments produits par l'administration inexacts, incomplets, empreints d'erreurs d'analyse et/ ou d'interprétation sont insuffisants pour présumer la fraude alléguée. Dire et juger que l'administration a manqué à son devoir de loyauté Dire et juger nul et de nul effet les actes subséquents de visites domiciliaire et saisies documentaires. Condamner l'administration fiscale aux dépens "
C) Procédure RG 16/ 00040 : SAS TSM ESPORT/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES
Un procès verbal de visite et de saisie a été effectué le 07/ 07/ 2016, dans les locaux sis ZI de Montifaut 85700 POUZAUGES dans un bâtiment occupé par la société TSM ESPORT et par la Société ANFOR. Le procès verbal précise que les 2 bureaux distincts occupés par la société ANFOR ne sont pas visités.
L'information a été donnée de ce que le déroulement des opérations de visite ou de saisie peut faire l'objet d'un recours devant le premier président de la cour d'appel de POITIERS.
= La société TSM ESPORT a formé un recours effectué par lettre recommandée le 19/ 07/ 2016 contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON et contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie du 07/ 07/ 2016 à la suite de l'ordonnance contestée.
Par acte d'huissier en date du 29/ 07/ 2016, la société TSM ESPORT a dénoncé le recours à Mme E..., inspectrice des finances publiques à la direction nationale des enquêtes fiscales.
= Dans le dernier état de ses écritures du 23/ 12/ 2016, elle présente les observations suivantes :
" Vu les dispositions de l'article L16B du LPF Vu la requête de la DNEF du 22 juin 2016 enregistrée le 24, l'ordonnance pré-rédigée du 08/ 07/ 2016 et les pièces
INFIRMER l'ordonnance du 08/ 07/ 2016 en ce qu'elle a admis sur la base des éléments d'appréciation fournis par la DNEF qu'il existait des indices suffisants de présomption de fraude fiscale.
Statuant de nouveau
Dire et juger que les éléments produits par l'administration inexacts, incomplets, empreints d'erreurs d'analyse et/ ou d'interprétation sont insuffisants pour présumer la fraude alléguée. Dire et juger que l'administration a manqué à son devoir de loyauté
En conséquence, INFIRMER l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON Dire et juger nul et de nul effet les actes subséquents de visites domiciliaire et saisies documentaires.
Condamner l'administration fiscale aux dépens "
D) Procédure RG 16/ 00039 : SAS GARAGE DU GRAND PRE/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES
Un procès verbal de visite et de saisie a été effectué le 07/ 07/ 2016, dans les locaux sis1-3 rue du Grand Pré 85700 LA MAILLERAIE-TILLAY dans un bâtiment occupé par la société GARAGE DU GRAND PRE. Le procès verbal précise que les agents désignés n'entrent pas dans les locaux de la SAS X...et que, sur déclaration de M Franck X..., représentant légal de la société, ceux visités sont exclusivement occupés par la société GARAGE DU GRAND PRE.
L'information a été donnée de ce que le déroulement des opérations de visite ou de saisie peut faire l'objet d'un recours devant le premier président de la cour d'appel de POITIERS.
= La société GARAGE DU GRAND PRE a formé un recours effectué par lettre recommandée le 19/ 07/ 2016 contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON du 06/ 07/ 2016 et contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie du 07/ 07/ 2016 à la suite de l'ordonnance contestée.
Par acte d'huissier en date du 29/ 07/ 2016, la société GARAGE DU GRAND PRE a dénoncé le recours à Mme E..., inspectrice des finances publiques à la direction nationale des enquêtes fiscales.
= Dans le dernier état de ses écritures du 23/ 12/ 2016, elle présente les observations suivantes :
" Vu les dispositions de l'article L16B du LPF Vu la requête de la DNEF du 22 juin 2016 enregistrée le 24, l'ordonnance pré-rédigée du 08/ 07/ 2016 et les pièces
INFIRMER l'ordonnance du 08/ 07/ 2016 en ce qu'elle a admis sur la base des éléments d'appréciation fournis par la DNEF qu'il existait des indices suffisants de présomption de fraude fiscale.
Statuant de nouveau
Dire et juger que les éléments produits par l'administration inexacts, incomplets, empreints d'erreurs d'analyse et/ ou d'interprétation sont insuffisants pour présumer la fraude alléguée.
Dire et juger que l'administration a manqué à son devoir de loyauté
Dire et juger nul et de nul effet les actes subséquents de visites domiciliaire et saisies documentaires.
Condamner l'administration fiscale aux dépens "
E) Procédure RG 16/ 00041 à RG 16/ 00044 RG 16/ 00041 : Société INTERTRAC SP ZOO/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES RG 16/ 00042 : Société TRACPOL SP ZOO/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES RG 16/ 00043 : Société TRANSPOL FRIGO SP ZOO/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES RG 16/ 00044 : SOCIETE TRANSESTRA LDA/ DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES
Suite aux notifications de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON du 06/ 07/ 2016 et aux procès verbaux de visites et saisies du 07/ 07/ 2016, les appelantes susvisées ont fait appel dans les délais de l'ordonnance et des visites effectuées dans les locaux de la société TSM ESPORT, de la société X...et de la société GARAGE DU GRAND PRE.
Les sociétés polonaises susvisées ont présenté les demandes suivantes dans leurs dernières conclusions en date du 03/ 03/ 2017 : " Vu la présente requête vu le présent recours Vu les pièces à l'appui
Dire et juger que les présomptions de l'administration reposent sur des éléments d'information qui sont incomplets et inexacts
Dire et juger que la suspicion de fraude alléguée par l'administration fiscale repose sur des affirmations qui sont fausses
Dire et juger que l'administration a manqué à son devoir de loyauté dans la présentation des éléments d'information à l'appui du dossier qu'elle a remis au juge des libertés et de la détention
En conséquence,
Prononcer la nullité de l'ordonnance dont appel et de tous actes de visites domiciliaires et de saisies pratiqués en vertu de celle-ci.
Condamner l'administration fiscale au paiement d'une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Condamner l'administration fiscale aux entiers dépens de l'instance. "
La société portugaise susvisée a présenté le 15 février 2016 les demandes suivantes :
" Dire et juger que les présomptions de l'administration sont inexactes et incomplètes et qu'en conséquence, elles ont donné lieu à une présentation déloyale des faits. Prononcer la nullité de l'ordonnance dont appel et de ses suites Condamner l'administration fiscale aux entiers dépens de l'instance. "
F) Conclusions DNEF en réponse à l'ensemble des parties
Par ses dernières conclusions en réponse en date du 06/ 03/ 2017, le Directeur Général des Finances Publiques présente les demandes suivantes en réponse à l'ensemble des parties :
" Vu l'article L 16B du Livre des procédures fiscales, Déclarer les appelants non fondés en leur appel.
Dire que l'appelante n'est pas fondée à invoquer une insuffisance de présomptions à l'encontre des sociétés visées par les présomptions de fraude.
Confirmer l'ordonnance rendue le 06 juillet 2016 par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de LA ROCHE SUR YON
Rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions.
Condamner l'appelante au paiement de la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens. "
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II) MOTIFS RELATIFS AU CADRE JURIDIQUE ET PROCEDURE
A) Sur le cadre juridique de la présente décision
Il résulte de l'article L 16Bis du livre des procédures fiscales dans sa version applicable à la date de l'ordonnance rendue à la suite de la modification résultant de l'ordonnance du 27/ 06/ 2013 (applicable jusqu'au 01/ 01/ 2017) que " I.- Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts,
elle peut, (...), autoriser les agents de l'administration des impôts (...), à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support. " (souligné ajouté)
Le juge apprécie souverainement l'existence d'une présomption de fraude, sans être tenu de s'expliquer sur les éléments qu'il écarte, ni de justifier autrement de la proportionnalité de la mesure qu'il confirme (Com 08/ 12/ 2009 précité). Il n'est pas tenu de constater l'existence de ces agissements frauduleux.
Il s'agit donc, ainsi que l'administration fiscale le soutient, non pas d'apprécier des preuves au vu des éléments remis dans le cadre de l'appel mais d'apprécier, au vu des moyens soulevés par les appelantes et des pièces qu'elles produisent à l'appui, si les documents remis par l'administration fiscale au juge des libertés et de la détention établissent des présomptions suffisamment sérieuses de soustractions au paiement de l'impôt en France pour que soit autorisée une atteinte aux données privées par la mesure domiciliaire autorisée. Les présomptions fournies par l'administration s'apprécient globalement.
En application de l'article 209 du code général des impôts (CGI), seuls les bénéfices « réalisés dans les entreprises exploitées en France » sont en principe imposés à l'impôt sur les sociétés. Dès lors, les sociétés étrangères sont soumises à l'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices tirés de leurs exploitations en France ce qui suppose l'exercice habituel d'une activité en France.
L'exercice habituel d'une activité peut être établi notamment :- par la présence d'un établissement au sens fiscal présentant un certain degré de permanence et une autonomie propre-en l'absence d'établissement, par l'intermédiaire de représentants permanents sans personnalité professionnelle indépendante. Il faut donc que le représentant soit dépendant de la société qui l'envoie, soit du fait d'un lien de subordination juridique, soit économiquement, du fait notamment de ses modalités de rémunération.- par le biais de la réalisation d'opérations formant un " cycle commercial complet ". Ainsi, dans l'hypothèse où une société étrangère exploite exclusivement des établissements en France, réalise toute son activité commerciale en France et n'a à l'étranger que son siège social, la jurisprudence rattache l'ensemble des bénéfices de cette société à l'activité imposable en France.
Si l'un de ces cadres est établi en France, les bénéfices de la société étrangère sont imposables en France.
Les conventions fiscales bilatérales peuvent cependant faire référence à la notion d'établissement stable pour déterminer le lieu d'imposition comme suit : « Les bénéfices d'une entreprise d'un État contractant ne sont imposables que dans cet État, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre État contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices qui sont attribuables à l'établissement stable conformément aux dispositions du paragraphe 2 sont imposables dans l'autre État. ».
Les sociétés concernées, quand l'activité est partiellement exercée à l'étranger, ne sont pas pour autant dispensées d'obligations déclaratives.
En matière de TVA, il est recouru à la notion de siège économique et dans certains cas à celle d'établissement stable, spécifique à ce type d'imposition.
Pour apprécier le lieu du siège de l'activité économique d'un assujetti, il est nécessaire de prendre en considération un faisceau d'indices, tels que le siège statutaire de la société, le lieu de son administration centrale, le lieu de réunion de ses dirigeants sociaux et celui, habituellement identique, où est arrêtée la politique générale de cette société. D'autres éléments, tels que le domicile des principaux dirigeants, le lieu de réunion des assemblées générales, le lieu où sont tenus les documents administratifs et comptables ou celui du déroulement principal des activités financières, notamment bancaires, peuvent également être pris en compte. En cas de contradiction d'indices, le lieu du siège de l'activité économique peut être retenu là où sont adoptées les décisions essentielles concernant la direction générale de la société, ou encore là où sont exercées les fonctions d'administration centrale de celle-ci. Il en résulte que la présence d'une société « boîte aux lettres » ou « écran », ne saurait conférer à un lieu le statut de siège d'une activité économique d'un assujetti s'il ne satisfait pas aux conditions précitées.
La notion d'établissement stable spécifiquement applicable en matière de TVA, peut être utilisée dans certains cas. L'établissement stable est alors caractérisé notamment par un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l'équipement humain et technique (CJCE, 20 février 1997, aff. C 260/ 95, « DFDS A/ S » ; CJCE, 17 juillet 1997, aff. C 190/ 95, « Aro Lease »), à rendre possible :- soit la fourniture par cet établissement d'un service au sens de l'article 259- 2odu CGI-soit l'utilisation par cet établissement des services qui lui sont rendus au sens de l'article 259- 1o du CGI
En l'espèce, l'activité, s'agissant cette fois de la TVA, obéit à des règles particulières relatives aux transports internationaux, l'imposition dépendant notamment du critère d'assujettissement et du caractère ou non intracommunautaire du transport.
Le fait pour un assujetti de disposer d'un numéro d'identification à la TVA en France n'est pas suffisant en soi pour considérer qu'il y dispose d'un établissement stable. Dès lors qu'un assujetti a son siège dans un État, il n'y a pas lieu de considérer l'existence d'un établissement stable distinct dans ce même État.
C'est donc principalement au regard des règles susvisées qu'il y a lieu d'examiner l'existence des présomptions permettant à l'administration de procéder aux visites domiciliaires prévues par l'article L 16B du LPF. Le type précis d'imposition (IS ou TVA) est, pour l'application de l'article L 16 B du LPF, peu déterminant. Les éléments précédemment rappelés montrent que les présomptions de fraude sur l'IS ou la TVA ou les taxes sur le chiffre d'affaires vont principalement dépendre du lieu d'activité économique réel de la société étrangère qu'il soit un siège économique effectif, un lieu d'établissement stable au sens des conventions internationales ou du droit applicable en matière de TVA ou encore un lieu d'exploitation au sens de l'imposition des IS.
B) Sur la fin de non recevoir opposée aux sociétés X..., GARAGE DU GRAND PRE et TSM'ESPORT.
Les sociétés françaises susvisées demandent la nullité des procès verbaux de saisies au seul motif de la privation de base légale de l'ordonnance les autorisant consécutif à leur demande d'infirmation de celle-ci.
Il résulte de la requête que les présomptions de soustraction au paiement de l'impôt sont alléguées par l'administration fiscale, exclusivement à l'encontre des trois sociétés polonaises sus-énoncées et de la société portugaise TRANSESTRA-ACTIVIDADES TRANSITARIAS INTERNACIONALES (ci après société TRANSESTRA).
L'occupant des locaux visités (domicile ou le local professionnel du contribuable concerné ou tout autre lieu où les pièces et documents sont susceptibles d'être détenus) est titulaire d'un recours contre l'ordonnance et y a intérêt dès lors que c'est l'ordonnance qui fonde légalement les procès verbaux de visites domiciliaires et opérations de saisies consécutives.
Leur recours sera donc déclaré recevable.
C) Sur la régularité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON du 06/ 07/ 2016
Il est argué que le système des ordonnances " pré rédigées " représente une faveur exorbitante en lien avec les objectifs poursuivis par l'administration fiscale et un manquement au devoir de loyauté qui devrait exclure toute pratique ayant pour objet et pour effet de surprendre la religion du juge et de trahir la confiance sur laquelle repose ce " modus operandi ".
Cependant, les motifs et le dispositif de l'ordonnance rendue en application de l'article L 16B du Livre des procédures fiscales sont réputés établis par le juge dès lors que celui-ci a rendu et signé l'ordonnance.
La circonstance que l'ordonnance attaquée soit rédigée dans les mêmes termes que l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance concernant les mêmes sociétés est sans incidence sur la régularité de l'ordonnance entreprise (Com 14/ 12/ 2010 no10-13601). Elle ne peut pas plus, de ce fait, induire un comportement par principe déloyal de la part de l'administration qui devrait automatiquement conduire à l'infirmation de l'ordonnance pour ce motif.
Le délai entre la date à laquelle la requête a été déposée, et celle à laquelle l'ordonnance a été prononcée ne peut laisser présumer que le premier juge s'est trouvé dans l'impossibilité d'examiner les pièces produites et d'en déduire l'existence de présomptions de fraude fiscale. Aucun élément ne permet pas aux appelants de présumer que le juge a fait l'économie de l'examen de la cause et des pièces qui lui ont été fournies.
Ce moyen sera donc écarté.
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III) MOTIFS RELATIFS A L'EXISTENCE DE PRESOMPTIONS SUFFISANTES
Les présomptions alléguées concernent en l'espèce les trois sociétés polonaises et la société portugaise dans le cadre d'activités de transports internationaux routiers de fret.
A) A L'EGARD DES TROIS SOCIETES POLONAISES
Les liens des 3 sociétés polonaises appelantes avec le groupe X...ne sont pas contestés par les appelantes puisqu'elles précisent elle mêmes que :- elles sont " l'émanation d'une diversification à l'international du groupe X...".- elles sont constituées de capitaux français-leur principal associé est M Franck X..., par ailleurs actionnaire du groupe X....- M Y...Emmanuel, président de TRACPOL est fiscalement domicilié en France à titre personnel au moins jusque décembre 2015 ainsi que le reconnaissent les appelantes.
La société le garage GRAND PRE exerce l'activité de garage relevant du groupe X...et assure le suivi et l'entretien des camions (tracteurs et remorques). La société BRESSE INTER FRIGO (non appelante) est également une filiale du groupe X....
Il résulte des pièces produites que les sociétés TRANSPOL FRIGO SP ZOO, TRACPOL SP ZOO et INTERTRAC SP ZOO appartiennent à un même groupe économique, la société mère étant la société TRANSPOL FRIGO SP ZOO (pièce 1).
1) S'agissant de TRACPOL SP ZOO
L'historique des actionnaires de TRACPOL SP ZOO (pièce 1 page 5/ 11 et 10/ 11 source AMADEUS date du 09/ 06/ 2016) montrent que :- M Y...Emmanuel en est le président (information reçue le 10/ 05/ 2016)- M Franck X...a également la fonction de président et est actionnaire-la société TRANSPOL FRIGO SP ZOO, de droit polonais, détient deux filiales à savoir INTERTRAC SP ZOO et TRACPOL SP ZOO selon information de août 2014 et ce respectivement pour 70 % et 68 %- Cette participation à 68 % maintenue à la date de clôture du 31/ 12/ 2015 n'existait pas au 31/ 12/ 2013 dès lors que c'est la société TSM TRANSPORTS DE ST MICHEL EN L'HERM qui était actionnaire direct à hauteur de 68 % au 31/ 12/ 2012 alors que M Franck X...et M B...détenaientt chacun 15 %. Cette situation avait évolué par rapport à 2009 puisqu'au 31/ 12/ 2009 M X...détenait 55 %, M B...15 % et TSM 30 %.
a) sur la domiciliation effective en Pologne
Selon document pièce 1 " KRS " daté de novembre 2015 (page 2/ 5), la société TRACPOL SP ZOO était domiciliée à RAWA MAZOWIECKA.
La pièce 2 (DNEF) démontre qu'à cette adresse 36 RAWA MAZOWIECKA 33 sociétés sont domiciliées (sur DUN et BRADSTREET) et 18 sociétés sont domiciliées sur Orbis au 9 juin 2016 dont TRAC POL SP ZOO, TRANSPOL FRIGO ZOO (source D et B) et INTERTRAC SP ZOO et TRACPOL SP ZOO avec le même numéro de téléphone 226308444 (source ORBIS).
La pièce 3 résultant de l'interrogation de l'annuaire inversé démontre que le numéro 226308444 correspond à la société EUROPESKIE CENTRA HANDLOWE SP ZOO Centre commercial qui est une société ayant pour activité la location et l'exploitation de biens immobiliers propres ou loués (pièce 4).
Ces éléments rapportés au nombre de salariés figurant sur les documents sociaux de la société TRACPOL SP ZOO (625) sont invoqués par l'administration fiscale comme constituant un siège social fictif. La société TRACPOL SP ZOO le conteste en soutenant qu'une simple recherche par GOOGLE MAP aurait permis de s'apercevoir que le numéro 36 correspondait non à une adresse mais à une zone dans laquelle figurent bien les trois sociétés polonaises. Elle précise qu'elle a quitté VARSOVIE pour RAWA où elle a transféré ses locaux en 2012.
Si les photos produites semblent accréditer la thèse d'un espace d'implantation de sociétés, elles ne remettent pas sérieusement en question la présomption relative à localisation effective des 3 sociétés concernées.
En effet :- les 3 petits cadres portant les noms de trois sociétés, paraissent accrochés chacun sur deux petits crochets, perdus sur un grand mur-ce bâtiment et les entourages ne montrent pas l'existence de 18 à 33 sociétés présentes sur le site-le mur du bâtiment principal ne comporte que très peu d'enseignes-les photos de bureaux montrent deux personnes en activité alors que l'administration fiscale relevait que le nombre de salariés mentionnés sur les documents sociaux de TRAC POL était de 625 salariés et ce, même en prenant en compte qu'une partie de ces salariés puissent être des chauffeurs-ces photos montrent une quasi absence de poids lourds sur le site à proximité immédiate du bâtiment censé accueillir les 3 sociétés.
En outre, le numéro de téléphone résultant de la pièce 4 sus-évoquée ne correspond pas à la société TRACPOL SP ZOO ce qui interroge à juste titre l'administration requérante dès lors que le chiffre d'affaires de la société est conséquent et qu'elle oeuvre dans plusieurs pays. Les explications des appelantes tirés de changement de baux et d'indicatifs à des dates non compatibles avec les données recueillies ultérieurement par l'administration fiscale ne peuvent remettre en question le fait que le numéro téléphonique officiel n'est pas celui résultant de l'annuaire téléphonique inversé polonais. Les appelantes ne peuvent utilement à cet égard reprocher à l'administration de n'avoir pas poussé ses recherches pour retrouver des documents privés ou des modalités techniques embrouillées de contacts téléphoniques.
La société TRACPOL soutient à juste titre que la facture sur laquelle se fonde l'administration fiscale (pièce 12) n'est pas une facture adressée par la société TRACPOL mais à la société TRACPOL SP ZOO par le garage du grand pré. Cette erreur ne peut suffire à caractériser une attitude déloyale de l'administration ainsi que le soutiennent les appelantes et ce d'autant que le numéro retenu est bien celui inscrit sur cette facture par la société du GARAGE GRAND PRE, laquelle corrobore l'existence de liens entre le groupe TRANSPOL et le garage Grand Pré du Groupe X....
Dès lors, la présomption résultant des pièces produites par l'administration et selon laquelle le siège de la société en POLOGNE pourrait être un siège sans établissement ou ne disposant que de moyens très limités peu compatibles avec l'activité établie par les données chiffrées justifiées n'est pas efficacement combattue par les appelantes.
b) sur la détention d'une licence communautaire de transport
La société TRACPOL invoque le fait qu'elle détient une licence communautaire de transport laquelle est délivrée sur justificatif d'établissement dans le pays d'origine.
Cet élément est insuffisant pour écarter une présomption selon laquelle elle effectue la quasi-totalité de son chiffre d'affaires en France avec un centre décisionnel effectif en France sans souscrire aux déclarations exigées.
c) sur la présomption relative à l'existence d'un centre décisionnel
Les appelantes soutiennent que l'administration présume à tort que la société TRACPOL SP ZOO (comme les deux autres sociétés polonaises) serait dirigée par une société de droit français : la société BRESSE INTER FRIGO du groupe X....
Le capital de la société BRESSE INTER FRIGO (BIF) est détenu à 98, 57 % par la SAS SOCIETE TRANSPORTS X.... Il apparaît que cette société est une filiale de la société TSM, elle même filiale du groupe X....
Relevant initialement du régime des SARL, elle est devenue une SAS en juin 2014 soit concomitamment aux modifications capitalistiques du groupe TRANSPOL FRIGO SP ZOO inscrites en août 2014 et écartant la société TSM des détentions du capital de TRACPOL au profit de la tête de groupe polonaise (TRANSPOL FRIGO SP ZOO).
L'administration invoque un procès-verbal de la DREAL du Rhône du 19 février 2015. Elle considère qu'il permet de présumer que les deux sociétés (TRACPOL et BIF) exercent la même activité, sont représentées par la même personne, M. Franck X...et ont des relations commerciales privilégiées. Les appelantes le contestent.
Il résulte de la pièce no8 (page 4) que :
- entre le 01/ 09/ 2013 et le 01/ 09/ 2014 la société BIF a sous-traité 2939 opérations de transports dont 2815 soit 95, 78 % sont des opérations de traction effectuées exclusivement par la société polonaise TRACPOL.- les transports contrôlés montrent des trajets FRANCE-FRANCE-s'agissant du différentiel de liasse fiscale (page 9/ 12), l'expert comptable a indiqué que le sous traitant " TRACPOL en l'occurrence, après avoir effectué la prestation de transport, facture séparément la prestation de transport des frais annexes. "- M B..., actionnaire de TRACPOL était présent en tant qu'attaché de direction du groupe X...et si le contrat de sous traitance était évoqué, il était également argué de faux par Mme F..., directrice générale, celle-ci contestant sa signature-le contrat de sous-traitance était par ailleurs modifié au moment des modifications capitalistiques au sein du groupe polonais TRANSPOL.- M F...indiquait également avoir à faire aux mêmes interlocuteurs et que les conducteurs et véhicules sont les mêmes.
Le procès verbal relève en outre que Mme F..." ne semble pas disposer du pouvoir et des moyens nécessaires à sa fonction, mais se conformer aux directives et contrôles du groupe ".
Ce procès verbal a été communiqué au juge des libertés et de la détention.
Il résulte en outre du procès verbal de contrôle effectué le 11/ 12/ 2014 d'un tracteur polonais et d'une semi remorque française (pièce 9) :- la fiche de congé des chauffeurs était éditée le 10/ 12/ 2014 par M Y...de TRACPOL-les chauffeurs polonais ont récupéré l'ensemble routier en France (dans l'AIN) aux entrepôts de BIF et déclaraient avoir effectué le déplacement depuis RAWA MAZOWIEKA (1525 kilomètres) les 10 et 11 décembre 2014 en tant que passagers avec 4 autres conducteurs dans un véhicule de liaison de la société TRACPOL-l'amende a été réglée par un salarié de BIF.
Ces éléments caractérisent suffisamment la présomption de l'existence d'un centre décisionnel desdites sociétés polonaises.
d) sur les autres éléments allégués
Si comme le soutient les appelantes, le seul fait d'avoir des relations privilégiées ne peut suffire à constituer une présomption au sens de l'article L 16 Bis, les éléments susvisés suffisent à caractériser de telles présomptions dès lors que :
sur le niveau de vérifications préalables des présomptions recueillies
-l'objet de la présente procédure est dès lors de rechercher des présomptions suffisantes de soustraction au paiement de l'impôt sans qu'il puisse être exigé de l'administration fiscale une vérification approfondie des premiers éléments recueillis étant rappelé que l'objectif est précisément de rechercher les preuves utiles pour confirmer ou non les présomptions.- la vérification approfondie que les appelantes opposent à l'administration est manifestement de nature à mettre en péril la conservation des preuves recherchées-l'administration a en l'espèce poursuivi ses investigations préalables à un niveau suffisant et compatible avec les objectifs de la procédure de l'article L 16 Bis du livre des procédures fiscales-les exigences de vérification invoquées par les parties dépasserait les objectifs de l'article 16 B
sur la loyauté des présomptions soumises
-l'administration fiscale a parfaitement et loyalement caractérisé ces présomptions au regard des éléments qui précèdent en montrant la cohérence, à ce stade de la procédure, des éléments caractérisés par les pièces. Ainsi en est il : = de l'imbrication étroite entre les deux groupes avec des modifications de structures et de capitaux dans un calendrier recoupant des données de groupe et des données de terrain (au sein de la société BIF notamment en 2014) = la démonstration de présomptions suffisantes de l'existence :- d'un côté de structures matérielles et opérationnelles conséquentes d'activités de transports en France impliquant l'ensemble des sociétés étrangères concernées par l'objet de la requête-et de l'autre, en regard, la faiblesse des structures polonaises-les auditions menées par l'administration dans le cadre d'autres procédures diligentées au vu de dispositions du code des transports et du code de la route (pièces 8 et 9) confortant lors de trajet ou de contrôles les présomptions plus générales déduites des éléments susvisés.
l'existence de cadres juridiques ou structurels expliquant les relations entre les différentes sociétés
L'objet de la recherche de preuves est précisément d'apprécier au vu des présomptions factuelles apportées si les cadres juridiques mis en place sont conformes à la réalité économique pratiquée, pour en tirer les conclusions utiles quand aux conséquences fiscales qui en résultent au vu de la réglementation fiscale applicable. L'objet de la procédure est d'apprécier si les présomptions sont suffisantes pour que soit autorisée cette recherche de preuve par le biais de visites domiciliaires.
Dès lors, les sociétés appelantes ne peuvent utilement s'appuyer sur les éventuels contrats de sous-traitance ou sur les divisions juridiques structurelles en différentes sociétés des activités relevant sur le plan économique d'une même entité à savoir en l'espèce l'activité économique de transport de fret international (commissionnaire, transporteur, commercial, prestations de garage ou achat et revente de poids lourds etc...).
Il n'en va différemment que si les moyens soulevés permettent d'établir, au delà du cadre juridique, que les présomptions fournies par l'administration ne permettent pas de considérer que la réalité économique nécessaire à l'application des règles d'imposition en France soit différente de la réalité juridique.
Il résulte des motifs qui précèdent que les cadres juridiques allégués ne suffisent pas à renverser les présomptions résultant des pièces fournies par l'administration fiscale.
Il sera enfin ajouté que les présomptions retenues sont encore confortées par :
le fait que la société TRACPOL SP ZOO a effectué un chiffre d'affaires conséquent entre 2011 et 2014 (plus de 4 millions d'euros) et l'a fait principalement en France à destination des sociétés du groupe X...a été jusque 2014 le principal actionnaire de TRACPOL SP ZOO avant la modification capitalistique en 2014 plaçant TRANSPOL SP ZOO comme tête du groupe polonais.
A cet égard, les incohérences partielles (pour 2011) de chiffrages ne peuvent suffire à renverser l'ensemble des présomptions retenues.
Enfin, la société TRACPOL SP ZOO ne peut utilement soutenir, pour combattre la présomption invoquée par l'administration que " Les données collectées signifient uniquement que la société TRACPOL ZOO SP a facturé à des clients français des prestations de transport communautaires soit de la France vers d'autres pays de la communauté, soit d'autres pays de la communauté vers la France, soit entre deux pays de la communauté autres que la France " en invoquant que " l'article 259- 1o du CGI pose le principe selon lequel le lieu de prestations de services de transport communautaire est situé au lieu d'établissement du preneur quel que soit le lieu d'établissement du prestataire. ".
En effet, il ne s'agit pas, en l'espèce, d'avoir une certitude absolue que les montants fournis à titre de présomptions soient justes à l'euro près. Le pourcentage important relevé dès lors qu'il est mis en perspective avec les autres présomptions retenues ainsi qu'il en résulte des motifs qui précèdent, suffit en l'espèce. Les éléments recueillis lors des contrôles auprès de la société GIF montrent l'importance de transports intérieurs français.
Les pièces établissent des présomptions suffisantes de maîtrise des coûts grâce au recours à des prestations de la société GARAGE DU GRAND PRE (pièces 12 et 13). Les données impliquant le garage du Grand Pré montrent également des systèmes similaires mis en oeuvre tant pour la société polonaise que pour la société portugaise ainsi qu'il sera détaillé plus loin (cf motifs relatifs à la société portugaise).
La société Garage GRAND PRE a été créée par le groupe X...(pièce 12).
M Franck X...déclare que :- le garage Grand Pré ne travaille que pour le groupe X...lequel s'est diversifié à l'international (Italie Espagne et Portugal (TSM ESPORT))- cette société rachète des matériels en fin de vie aux sociétés du groupe X...et revend avec une petite marge-le groupe centralise les achats et les ventes pour le groupe X...afin de mieux maîtriser les coûts.
Pour autant, force est de constater que les très nombreuses factures produites montrent que le garage facture très régulièrement des prestations aux 3 sociétés polonaises et fournit le carburant pour des montants importants. TRACPOL et INTERTRAC utilisent des comptes bancaires français.
Les pièces établissent ainsi des présomptions sérieuses permettant de considérer que le réel pouvoir décisionnel est concentré en FRANCE sur les sociétés TRANSPORTS X...et SAS X...(pièces 15).
2) S'agissant de TRANSPOL SP ZOO et de INTERTRAC SP ZOO
Il résulte des motifs qui précèdent et qui sont confortés par les pièces correspondantes que les liens entre les deux groupes restent pertinents à l'égard des autres sociétés polonaises. Ce faisant, il n'y a pas lieu de détailler la situation spécifique des deux autres sociétés polonaises.
Les deux groupes ont entendu modifier sa situation juridique des sociétés et l'organisation capitalistique en 2014 soit postérieurement aux différentes années retenues par l'administration fiscale.
Force est de constater d'ailleurs que l'argumentaire est similaire de la part des trois sociétés.
Contrairement à ce qui est soutenu, il n'appartient pas à l'administration de prouver que les conventions passées entre les sociétés françaises et étrangères seraient fictives. Il lui appartient de démontrer des éléments de fait permettant de considérer que tel puisse être le cas.
Les motifs qui précèdent concernant la société TRACPOL SP ZOO s'agissant de la structure polonaise existante (localisation) restent pertinents au regard des deux sociétés susvisées.
La modification des mouvements capitalistiques au sein du groupe polonais justifiée par les documents sociaux produits conduisent à analyser la situation soumise de manière identique à l'égard des trois sociétés polonaises.
L'ensemble des pièces analysées et présomptions fournies par l'administration ont été présentées loyalement y compris à l'égard de ces deux sociétés.
L'administration fiscale satisfait à l'obligation de produire des présomptions de fraude fiscale suffisantes en l'espèce à l'égard des trois sociétés polonaises concernées.
B) A l'EGARD DE TRANSESTRA LDA
La société TRANSESTRA LDA conteste les présomptions de fraudes retenues par l'administration fiscale française. Elle indique être une société portugaise à part entière depuis 1988 date de sa création, être inscrite au registre du commerce portugais, détenir une licence de transport international. Elle a des locaux adaptés à son activité professionnelle (entrepôt, bureaux, salle chauffeur, douche, sanitaire, citerne à gasoil, parking extérieur sur 6700 m2) à Lourical (Portugal) qu'elle loue à Transports X...en vertu d'un acte notarié régulièrement publié et signé lors du renouvellement le 5 octobre 2012 par son co-gérant Monsieur Frédéric Z.... Elle possède une comptabilité (" balancete geral acumulado ") dont elle présente les trois feuillets pour 2014, 2015 et 2016. Elle expose travailler avec les clients qui la sollicitent dans un contexte où le marché national est devenu moins important que le marché communautaire : 49 013 € pour le premier contre 3 093 829 € pour le second en 2014, 60955 € contre 2 943 426 € en 2015, 53 671 € contre 2 917 309 € en 2016. TRANSESTRA a un numéro de téléphone et un numero de fax, possède les véhicules nécessaires à son activité de transport, dont elle communique les cartes grises et les certificats d'immatriculation. Elle exerce son activité de transport sur plusieurs pays dont l'Espagne (96 % de son approvisionnement en GO en juillet 2016), a son propre dépôt de carburant. Elle emploie une trentaine de personnes, 28 chauffeurs et 2 administratifs, dont elle fournit la liste et un extrait de la déclaration de rémunération. Enfin Madame Maria Clara D..., résidente au Portugal dirige la société TRANSESTRA.
M X...Franck, évoquant la SAS Garage Grand Pré, avait déclaré à l'administration (pièce 12) que le groupe X...s'est diversifié à l'international Il a en conséquence créé une entité pour l'Italie (ITAL TSM), pour l'Espagne et pour le Portugal (TSM ESPORT). La pièce 13. 2 montre également d'autres plate forme de " ramasse " par aire géographique concernée (AUDUREAU pour l'OUEST, BIF pour le Rhône Alpes, X...pour la région parisienne et le Nord de la France.
Dès lors s'agissant des liens avec le Portugal est concernée en France, selon les propres sources du groupe, la société TSM ESPORT.
S'agissant de la société TRANSESTRA LDA, l'administration produit une pièce no343 qu'un contrat a été conclu entre le garage du Grand pré sus évoqué et la société TRANSESTRA LDA. Ce contrat concerne la vente de 18 tracteurs Mercedes Actros pour un prix total de 1. 458. 000 euros (cessions entre le 16/ 12/ 2013 et le 09/ 01/ 2014). Le prix a été stipulé réglable par crédit vendeur.
Selon la pièce 349 correspondant au grand livre auxiliaire pour la période de mars 2014 à juin 2014, la société TRACPOL SP ZOO avait un compte débiteur de 1. 592. 449 euros et a été opéré ensuite une compensation comptable pour 1. 554. 000 euros. L'objet de cette compensation interroge dès lors qu'il est précisé pièce 350 que TRACPOL est débitrice, à l'instar de la société portugaise, d'une somme de 1. 554. 000 euros pour l'achat de 21 tracteurs et que la créance de TRACPOL envers le garage du grand pré correspond au même montant correspondant au prêt non versé et que la signature pour les deux entités est la même.
Les procédés susvisés sont donc identiques.
L'administration produit également un contrat de sous-traitance conclu entre la société TSM ESPORT et la société TRANSESTRA qui a été signé le 01/ 07/ 2014. Ce contrat détermine la nature et le volume des prestations demandées ainsi que les moyens matériels. Ces moyens sont précisément les 18 tracteurs Mercédès susévoqués. Le contrat garantit également un chiffre d'affaires hors taxes mensuel par véhicule de 10050 euros. Un contrat similaire a été conclu à la même date par TSM ESPORT avec la société TRANSPOLFRIGO.
Il résulte également de la pièce 26-1 et de la pièce 26-2 que Mme Maria Clara D...est actionnaire, M Franck X...est également mentionné comme actionnaire (information reçue le 11/ 05/ 2016). La tête de groupe mentionnée est X....
Au 31/ 12/ 2014, X...était actionnaire à 60 % et M Franck X...à 40 % tandis qu'auparavant les actionnaires étaient M Franck X...et la SA TRANSPORTS X....
L'administration justifie qu'à cette adresse de siège social (LOURICAL) 4 sociétés figurent selon la base de donnée Dun et Bradstreet.
En octobre 2014 un camion de la société TRANSESTRA composé d'un tracteur Mercedes et d'un semi CHEREAU a été contrôlé. La licence communautaire a été communiquée. Lors de ce contrôle le véhicule venait de POUZEAUGES (85) et se dirigeait vers l'Espagne. Les lettres de voiture étaient établies au nom du transporteur principal la société TSM ESPORTqui a sous traité à TRANSESTRA qui est au vu des éléments qui précèdent une filiale du groupe X.... Le contrôle montrait que le chargement a été fait à POUZEAUGES et non au point de départ mentionné dans l'une des trois lettres de voitures figurant à bord. Les lettres de voiture ne comportaient pas toutes les mentions exigées s'agissant des adresses de chargement et de déchargement.
L'administration fiscale a constaté que TRANSESTRA a réalisé pour les années 2010 à 2015 des livraisons intracommunautaires en France à destination de trois sociétés : la SAS X..., la SAS GARAGE DU GRAND PRE, la SAS TSM ESPORT et particulièrement avec cette dernière selon le tableau suivant :
Annéechiffres d'affaires (€) livraisons intracommu-nautairesà destination de TSM ESPORT % 20103 069 6762 669 67686, 9 20113 049 3892 944 5222 919 52299, 1 20123 046 4453 025 3193 024 94899, 9 20133 142 8103 557 556 3 052 92485, 8 2014 3 051 5903 036 79999, 5 20152 899 0672 899 067100 duquel il résulte que la société TRANSESTRA LDA a réalisé la quasi totalité de son chiffre d'affaires annuel en développant de manière habituelle une activité de transport routier de fret avec les sociétés du groupe X...et particulièrement TSM ESPORT.
L'administration a également fourni des pièces suivantes :- extrait des bases de données DUN AND BRADSTREET, ORBIS et ... mentionnant que la société avait un siège sans établissement mais qu'elle était répertoriée à l'adresse Zona industrial à Lourical, Portugal, qu'elle avait des lignes de téléphone (... 348) et de fax (... 496) mentionnées comme non attribuées, un numéro de téléphone (... 526) qui lui était attribué, qu'elle dispose d'un effectif d'une trentaine de salariés dont deux sont salariées au Portugal selon les écritures de la société.- un contrat de vente de véhicules de transport entre la SAS Garage du grand pré et TRANSESTRA LDA, en date du 9 février 2014, dans lequel cette dernière est représentée par son gérant français Frédéric Z..., par ailleurs directeur de la SAS X.... Monsieur Z...déclare résider à Pouzauges (85) (adresse d'imposition à l'impôt sur le revenu, pièce no 36 DGFIP).- une procédure de la DREAL d'Aquitaine, dans laquelle le chauffeur de la société TRANSESTRA LDA entendu a indiqué que TRANSESTRA était une filiale de TMS ESPORT.- divers documents montrant que TRANSESTRA LDA n'est pas répertoriée auprès des divers services fiscaux français.
L'ensemble de ces éléments permettent de retenir l'existence de présomptions suffisantes au sens de l'article L 16B du LPF à l'égard de la société TRANSESTRA LDA au regard des règles fiscales applicables en France telles que rappelées en préliminaire de la présente ordonnance (II A).
Les moyens soulevés par la société TRANSESTRA LDA ne peuvent suffire à écarter le caractère suffisant desdites présomptions dès lors qu'il ne suffit pas de soutenir que la société concernée a une existence légale au Portugal et même une activité partielle dans ce pays ou à destination d'autres pays.
C) CONCLUSION
Il résulte des éléments qui précèdent que les présomptions exigées par l'article 16B ont été dûment apportées au juge des libertés et de la détention et ce concernant l'ensemble des sociétés appelantes polonaises et portugaise.
Les éléments produits permettent notamment de retenir des présomptions suffisantes concernant notamment :- des similarités de processus mis en place s'agissant de l'activité du garage du Grand Pré appartenant au groupe X...- des concomitances temporelles de modifications capitalistiques en 2014, à la fois pour la société Bresse Inter Frigo, les sociétés polonaises et même la société portugaise-une activité quasi exclusivement exercée par les sociétés polonaises et portugaise à destination des sociétés du groupe X...-une activité du Garage Grand Pré au carrefour de l'activité globale des différentes sociétés impliquées dans une activité similaire et/ ou complémentaire-un centre décisionnel non établi à l'étranger.
Il est établi que les sociétés concernées n'ont pas souscrit de déclaration en France.
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de La Roche Sur Yon sera confirmée en toutes ses dispositions.
En conséquence, les sociétés françaises qui ne soulèvent aucun moyen spécifique quant aux opérations de saisies, verront leurs prétentions rejetées.
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IV) SUR LES AUTRES PRETENTIONS
Il est équitable d'allouer à la Direction Nationale d'enquêtes fiscales la somme de 1500 euros à la charge de chacune des sociétés appelantes, étrangères ou françaises.
Chacune des appelantes assumera 1/ 7 des dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière fiscale, en dernier ressort et contradictoirement,
- Ordonnons la jonction des dossiers no16/ 00039, 16/ 00040, 16/ 00041, 16/ 00042, 16/ 00043 et 16/ 00044 à la procédure enregistrée sous le numéro 16/ 00038.
- Disons les appels recevables.
- Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de LA ROCHE SUR YON le 06/ 07/ 2016 en toutes ses dispositions.
- Condamnons chacune des sociétés appelantes à payer à la Direction des Enquêtes fiscales la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamnons chacune des sociétés appelantes à 1/ 7 des dépens d'appel.
Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.
Le greffier, La présidente,
I. BELLIN I. CHASSARD