PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE NIKOLOUDAKIS c. GRÈCE
(Requête no 35322/12)
ARRÊT
Art 6 § 1 (civil) • Procédure d’exécution • Litige entre particuliers • Jugement reconnaissant la propriété d’un terrain et ordonnant aux occupants sa restitution et la démolition de constructions illégales • Refus d’exécution de la part des particuliers concernés • Exécution devant être assurée indépendamment du droit interne ou de la qualité, privée ou publique, de la partie devant s’exécuter • Nécessité du concours de la force publique • Intervention de l’autorité publique mais absence d’effet concret • Inexécution prolongée • Autorités en défaut de proposer des solutions alternatives
STRASBOURG
26 mars 2020
DÉFINITIF
26/07/2020
Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Nikoloudakis c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une Chambre composée de :
Ksenija Turković, présidente,
Krzysztof Wojtyczek,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Aleš Pejchal,
Armen Harutyunyan,
Pere Pastor Vilanova,
Tim Eicke, juges,
et de Renata Degener, greffière adjointe de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 3 mars 2020,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
INTRODUCTION
1. La présente affaire concerne la non-exécution des arrêts des juridictions civiles et administratives qui reconnaissaient les ascendants des requérants propriétaires d’un terrain et qui ordonnaient à ceux qui occupaient illégalement celui-ci de le restituer et de démolir les constructions illégales qui s’y trouvaient.
EN FAIT
2. Les requérants sont nés respectivement en 1939 et en 1946 et résident à La Canée, en Crète. Ils ont été représentés par Mes Ch. Chrysanthakis et E. Nikoloudis, avocats à Athènes et à La Canée respectivement.
3. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les déléguées de son agent, Mme G. Papadaki, assesseure au Conseil juridique de l’État, et Mme S. Papaïoannou, auditrice au Conseil juridique de l’État.
4. Le 28 juillet 1989, les frères I.O., P.O. et E.O. saisirent le juge de paix de La Canée d’une action visant à faire reconnaître qu’ils étaient copropriétaires d’un terrain situé à Sfakia, lequel était occupé par huit autres personnes. Les sœurs Chryssi Nikoloudaki (la mère des requérants), E.M. et A.P. intervinrent dans la procédure en demandant à être reconnues comme copropriétaire indivises avec les huit personnes susmentionnées.
5. Par la décision no 7/1991, le juge de paix reconnut les frères I.O., P.O. et E.O. propriétaires indivis du terrain en question.
6. Les sœurs Chryssi Nikoloudaki, E.M. et A.P. ainsi que les huit personnes susmentionnées introduisirent des appels contre la décision du juge de paix devant le tribunal de première instance de La Canée. Par l’arrêt no 367/1995, le tribunal de première instance accueillit l’appel des trois sœurs et ordonna aux trois frères de leur restituer le terrain. Par l’arrêt no 361/1997, la Cour de cassation confirma l’arrêt no 367/1995.
7. Le 1er mars 1995, le service de l’urbanisme de la préfecture de La Canée avait constaté, dans un rapport établi à la suite d’une inspection des lieux, que P.O. avait construit sans permis quatre bâtiments sur le terrain en question. Le 3 mai 1995, la Commission chargée de se prononcer sur le caractère illégal de bâtiments (Επιτροπή Κρίσεων Αυθαιρέτων) rejeta une opposition (ένσταση) que P.O. avait introduite contre le rapport d’inspection précité. Le 1er septembre 1995, P.O. se vit aussi infliger une amende pour construction illégale.
8. Se fondant sur la décision de la Commission susmentionnée et sur l’arrêt no 367/1995 de la Cour de cassation, le préfet de La Canée ordonna, le 13 janvier 1998, la démolition des constructions illégales par une équipe de la préfecture ou par P.O., les frais de démolition devant être à la charge de ce dernier (décision no 61/1998). Cette décision fut notifiée aussi à P.O., au requérant et au commissariat de police local.
9. Vers la fin de l’année 1998, les trois sœurs qui étaient intervenues dans la procédure initiale demandèrent aux autorités de faire accélérer la démolition des constructions illégales et la restitution du terrain. Par le jugement no 400/1999 et par l’arrêt no 50/2000, le tribunal de première instance de La Canée et la cour d’appel de Crète rejetèrent l’opposition formée par I.O., P.O. et E.O. contre la demande précitée.
10. Répondant à une question de la Région de Crète quant à la possibilité de procéder à la démolition des constructions illégales, la direction de l’urbanisme de La Canée répondit, le 16 octobre 2000, par une lettre notifiée entre autres au requérant Ioannis Nikoloudakis, qu’elle n’avait ni l’équipement ni le personnel nécessaires pour procéder à la démolition. Elle indiqua en outre que le décret no 267/1998 prévoyait la possibilité pour les propriétaires du terrain de procéder eux-mêmes à la démolition des constructions illégales.
11. En 2001, la direction de l’urbanisme de La Canée procéda à la publication d’un appel d’offres afin de trouver un maître d’ouvrage qui serait chargé de la démolition des constructions illégales dans le département de La Canée. Toutefois, lors des adjudications qui eurent lieu le 10 septembre et le 7 novembre 2001, aucun soumissionnaire ne se présenta et l’appel fut déclaré infructueux.
12. Par la suite, la Commission préfectorale de La Canée décida de remettre en adjudication le projet en s’adressant à l’Union des contractants des marchés publics du département de La Canée, mais aucun membre de cette union ne manifesta d’intérêt pour le projet. La Commission préfectorale considéra alors qu’il n’y avait pas lieu de faire un troisième appel d’offres et, le 10 décembre 2001, elle informa le requérant Giorgos-Iakovos Nikoloudakis qu’elle n’était pas en mesure, à cette date, de procéder à la démolition des constructions illégales. En outre, dans le cadre de la constitution d’une équipe de démolition par la famille Nikoloudakis, la direction de l’urbanisme demanda à Giorgos-Iakovos Nikoloudakis de lui communiquer l’identité des ouvriers engagés et le type des machines qui seraient utilisées pour la démolition. Toutefois, il ne fut pas possible à nouveau de disposer d’ouvriers pour la démolition.
13. Lors d’une nouvelle tentative de démolition faite cette fois par la Région de Crète, la direction de l’urbanisme de La Canée publia, le 28 août 2002, un nouvel appel d’offres pour trouver un maître d’œuvre chargé de la démolition des constructions illégales. Toutefois, cet appel d’offres n’eut pas de suite faute d’intérêt de la part des entreprises spécialisées dans les travaux publics. L’Union des contractants des marchés publics du département de La Canée informa la Région de Crète que ce manque d’intérêt était dû aux difficultés présentées par le projet de démolition (pente escarpée, inaccessibilité des véhicules et des machines, etc.).
14. Le 18 août 2003, la direction du maintien des ouvrages informa le directeur général de la Région de Crète qu’elle était dans l’impossibilité d’entreprendre des mesures en vue de la démolition.
15. En 2005, la direction de l’urbanisme de La Canée publia un nouvel appel d’offres pour trouver un maître d’œuvre chargé de la démolition des constructions illégales mais cet appel s’avéra également infructueux.
16. Entre-temps, le 2 février 1998, P.O. avait saisi la cour d’appel administrative de La Canée d’un recours en annulation de la décision no 61/1998 par laquelle le préfet de La Canée avait ordonné la démolition des constructions illégales. Par l’arrêt no 27/2007, la cour d’appel administrative rejeta le recours pour irrecevabilité au motif que la décision précitée n’était pas exécutoire en elle-même mais était prise en exécution de la décision du 3 mai 1995 de la Commission chargée de se prononcer sur le caractère illégal de bâtiments, qui, elle, ne faisait pas l’objet du recours.
17. P.O. se pourvut en cassation contre cet arrêt devant le Conseil d’État.
18. Le 19 novembre 2008, le Conseil d’État rejeta ce pourvoi pour des raisons de forme (arrêt no 3355/2008 mis au net et certifié conforme le 30 mars 2009). Dans le but de soutenir la décision du préfet, les requérants intervinrent dans la procédure devant le Conseil d’État en qualité d’héritiers ab intestat de l’intervenante initiale Chryssi Nikoloudaki, qui était leur mère. Estimant que les requérants avaient qualité pour agir, le Conseil d’État déclara que leur intervention était recevable.
19. À la demande des requérants, la direction de l’urbanisme de La Canée explora à nouveau, les 6 avril et 6 et 21 mai 2010, la possibilité d’adjudication de la démolition des constructions illégales dans le département de La Canée, ce qui incluait aussi les constructions situées sur le terrain des requérants.
20. Le 5 novembre 2010, les requérants demandèrent une nouvelle fois à la préfecture de La Canée de procéder à la démolition des constructions susmentionnées. Toutefois, à la suite de l’adoption de la loi no 3852/2010 qui transféra la compétence pour la démolition des constructions illégales à l’Administration décentralisée de la Crète, la préfecture leur répondit qu’elle avait transféré le dossier à cette Administration.
21. Les 20 juillet, 27 octobre, 31 octobre et 15 décembre 2011, les requérants envoyèrent une lettre par huissier de justice à la Région de Crète, à l’Administration décentralisée de la Crète, à la direction de l’urbanisme de la commune de La Canée et à la commune de Sfakia. Ils se plaignaient de l’inactivité de l’administration et les invitaient à prendre les mesures nécessaires en vue de la démolition des constructions illégales.
22. Les requérants indiquent que des agents de police avaient été appelés pour procéder à l’éloignement des occupants des constructions illégales mais qu’ils avaient essuyé des tirs de la part de ceux-ci et qu’un des agents avait été blessé.
LE CADRE JURIDIQUE ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
23. Les articles pertinents du code de procédure civile sont ainsi formulés :
Article 927
« L’exécution forcée est réalisée par celui qui a le droit de la mettre en œuvre. Celui-ci donne (...) mandat à un huissier de justice et fixe la manière de procéder ainsi que les objets sur lesquels portera l’exécution forcée (...) »
Article 929 § 2
« L’huissier de justice peut demander l’assistance de l’autorité qui est compétente pour le maintien de l’ordre et qui a l’obligation de l’accorder. »
24. L’article 17 de la loi no 1337/1983 intitulée « Extension des plans des villes, développement résidentiel et réglementation y afférente » prévoit que :
« 1. Les constructions, illégales ou non, érigées après le 31 janvier 1983 sur ou en dehors des plans des villes agréées ou d’agglomérations existant avant 1923 (...) sont obligatoirement démolies par leurs propriétaires (...) même si la construction est achevée ou si le bâtiment est habité ou occupé (...).
2. En sus de la démolition est infligée : a) une amende pour avoir érigé une construction illégale ; b) une amende pour avoir conservé la construction illégale.
(...)
5. L’autorité d’urbanisme compétente peut même d’office procéder à la démolition de la construction illégale. Dans ce cas, les frais de démolition (...) sont à la charge des personnes redevables selon le paragraphe précédent.
(...) »
25. Le Gouvernement soutient que l’utilisation dans le paragraphe 5 de l’article 17 de l’expression « l’autorité d’urbanisme compétente peut même d’office procéder à la démolition de la construction illégale » sous-entend que l’administration a un pouvoir discrétionnaire, et non une compétence liée, de décider ou non de procéder à la démolition. Il convient donc de distinguer ce cas de ceux où l’administration est obligée d’agir lorsqu’il s’agit de démolir des constructions illégales dans les espaces publics, dans les espaces à usage collectif ou sur le littoral.
26. L’article 6 du décret no 267/1998 intitulé « Procédure de qualification et de démolition de nouvelles constructions illégales, mode d’évaluation et fixation du montant des amendes y afférentes » est ainsi libellé :
« 1. La démolition de constructions illégales est effectuée par une équipe du service de l’urbanisme compétent, composée du personnel adéquat et de l’équipement nécessaire. Le préfet peut approuver la constitution de plusieurs équipes, leur renforcement par du personnel issu d’autres services et l’apport de toute aide possible. En cas d’impossibilité de constituer une équipe par département, il est possible, sur décision motivée du préfet, de constituer une équipe relevant du service de l’aménagement du territoire, de l’habitat et de l’environnement compétent de la Région par décision du Secrétaire général de la Région.
2. La démolition de constructions illégales peut se faire également par sous-traitance spéciale selon les dispositions du décret législatif relatif à « l’exécution des travaux publics ». Lorsque la construction illégale relève des cas de l’article 15 § 2 de la loi no 1337/1983, des moyens peuvent être mis à disposition pour la démolition par n’importe quel tiers, à la suite d’une décision du préfet concerné.
3. Lors de la démolition d’une construction illégale, des organes de police peuvent être présents afin de prévenir ou de réprimer des actes illégaux. Au cas où l’accès à la construction illégale est empêché (...), le concours du procureur est requis. Au cas où l’éloignement des occupants est exigé, cette mesure est mise en œuvre par les forces de police et l’équipe de démolition vide ensuite la construction. (...) »
EN DROIT
1. SUR LES VIOLATIONS ALLÉGUÉES DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION ET DE L’ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1
27. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, les requérants dénoncent la non-exécution des arrêts des juridictions civiles et administratives et se plaignent notamment que les autorités n’ont pris aucune mesure afin d’évincer de leur propriété ceux qui l’occupaient illégalement et de démolir les constructions illégales qui s’y trouvaient. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention, les requérants se plaignent aussi que la non-exécution des arrêts rendus en leur faveur a aussi porté atteinte à leur droit au respect de leurs biens.
Les articles susmentionnés sont ainsi libellés :
Article 6 de la Convention
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
Article 1 du Protocole no 1
« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. »
1. Sur la recevabilité
28. En premier lieu, le Gouvernement invite la Cour à rejeter la requête pour défaut de qualité de victime des requérants. Il soutient que, si les requérants se prévalent des arrêts no 367/1995 du tribunal de grande instance et no 361/1997 de la Cour de cassation, rendus dans le cadre d’une procédure dans laquelle leur mère était intervenue et dont l’issue avait été favorable à celle-ci, ils ne soumettent aucun document de nature à prouver qu’ils sont réellement les héritiers ab intestat de leur mère.
29. En deuxième lieu, le Gouvernement invite la Cour à rejeter la requête pour non-respect du délai de six mois. Il argue que les requérants ont saisi la Cour plus de six mois après la décision no 61/1998 du préfet de La Canée qui a ordonné la démolition des constructions illégales, plus de six mois après l’arrêt no 361/1997 de la Cour de cassation et plus de six mois après l’arrêt no 3355/2008 du Conseil d’État.
30. En troisième lieu, le Gouvernement soutient que les requérants n’ont pas épuisé les voies de recours internes car ils n’auraient pas introduit le recours en dommages-intérêts prévu par les articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil. Or, selon le Gouvernement, cette action leur aurait permis de faire reconnaître par les tribunaux l’omission des autorités de leur rendre le terrain et de démolir les constructions illégales ainsi que de demander une indemnité pour dommages matériel et moral.
31. En quatrième lieu, le Gouvernement avance que la requête est incompatible ratione personae avec les dispositions de la Convention. Il considère que le litige entre la mère des requérants et les frères I.O., P.O. et E.O. était un litige entre personnes privées et que la responsabilité de l’exécution de l’arrêt qui ordonnait de rendre le terrain litigieux à la mère des requérants incombait aux parties et non à l’État.
32. Les requérants contestent toutes les exceptions soulevées par le Gouvernement.
33. En ce qui concerne la première exception, la Cour note que les requérants sont les héritiers en indivision de leur mère, Chryssi Nikoloudaki, qui a été partie à toutes les procédures concernant le terrain en question. Elle note aussi que c’est en cette qualité qu’ils sont intervenus dans la procédure devant le Conseil d’État, qui prit fin par l’arrêt no 3355/2008, et que le Conseil d’État a déclaré leur intervention recevable.
34. En ce qui concerne la deuxième exception, la Cour relève, d’une part, que l’arrêt no 361/1997 de la Cour de cassation a reconnu la mère des requérants propriétaire en indivision du terrain en question et a ordonné aux parties adverses de le lui restituer, et, d’autre part, que l’arrêt no 3355/2008 du Conseil d’État a confirmé la décision du préfet de La Canée ordonnant la démolition des constructions illégales. Elle note cependant que, à ce jour, aucun des deux arrêts n’a été suivi d’effet. Elle estime qu’il s’agit en l’espèce d’une situation continue et que le délai de six mois ne peut commencer à courir tant que cette situation perdure (Călin et autres c. Roumanie, nos 25057/11, 34739/11 et 20316/12, §§ 58-60, 19 juillet 2016).
35. En ce qui concerne la troisième exception, la Cour note que le recours prévu aux articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil a un caractère indemnitaire et ne permet pas à celui qui l’exerce de demander à l’administration d’agir dans le but de rendre un bien ou de faire démolir une construction illégale. À cet égard, la Cour rappelle qu’une personne qui a obtenu un jugement contre l’État n’a normalement pas à ouvrir une procédure distincte pour en obtenir l’exécution forcée (Sharxhi et autres c. Albanie, no 10613/16, § 93, 11 janvier 2018, Burdov c. Russie (no 2), no 33509/04, § 68, 15 janvier 2009, Metaxas c. Grèce, no 8415/02, § 19, 27 mai 2004).
36. En ce qui concerne la quatrième exception, la Cour note que, si le litige entre les requérants et les parties adverses est un litige privé, le grief des requérants porte sur l’omission ou le refus de l’administration de faire exécuter des décisions judiciaires qui reconnaissaient leurs ascendants propriétaires d’un bien et ordonnaient aux parties adverses de le leur rendre (voir, mutatis mutandis, Fuklev c. Ukraine, no 71186/01, §§ 67 et 84, 7 juin 2005).
37. En conclusion, la Cour rejette la totalité des exceptions soulevées par le Gouvernement.
38. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour la déclare recevable.
2. Sur le fond
1. Article 6 § 1 de la Convention
a) Arguments des parties
39. Les requérants soutiennent que l’État défendeur a totalement manqué à son obligation d’organiser un système efficace d’exécution des décisions judiciaires. Ils exposent que la décision no 61/1998 du préfet de La Canée, qui a été considérée comme légale par les arrêts no 27/2007 de la cour d’appel administrative et no 3355/2008 du Conseil d’État, a créé l’obligation de démolir les constructions illégales qui portaient atteinte à leur droit de propriété et que cette obligation incombait à l’administration car, selon eux, de telles constructions portent aussi atteinte à l’environnement.
40. Les requérants, arguant qu’il n’est pas permis de se faire justice soi-même, estiment qu’il leur était impossible de procéder eux-mêmes à la démolition sans le concours des forces de police.
41. Le Gouvernement soutient, en premier lieu, que l’omission de l’administration d’exécuter des actes émis dans le cadre de son fonctionnement, comme la décision no 61/1998 du préfet de La Canée, et non dans le cadre d’une procédure judiciaire, ne viole pas le droit des requérants à un procès équitable. Il estime qu’il en va de même en ce qui concerne les arrêts no 27/2007 de la cour d’appel administrative et no 3355/2008 du Conseil d’État, dont il ne résulterait aucune obligation pour l’administration de s’y conformer compte tenu des motifs par lesquels ces juridictions ont mis fin aux actions dont elles avaient été saisies. En troisième lieu, le Gouvernement estime qu’il ne pourrait y avoir violation de l’article 6 § 1 de la Convention qu’en cas de compétence liée de l’administration et non dans les cas où celle-ci a un pouvoir discrétionnaire de procéder elle-même à la démolition ou de confier cette tâche aux propriétaires lorsqu’elle est dans l’impossibilité d’agir.
42. Le Gouvernement avance en outre que la responsabilité de la démolition des constructions illégales n’incombait pas exclusivement à l’administration, mais aussi aux requérants eux-mêmes, qui n’auraient pas engagé les procédures d’exécution forcée des décisions des juridictions civiles les reconnaissant propriétaires du terrain en question et n’auraient pas non plus procédé eux-mêmes à la démolition. Or, aux yeux du Gouvernement, l’impossibilité de l’administration d’assurer elle-même la démolition était objectivement justifiée par les efforts infructueux de trouver une entreprise de travaux publics apte à assumer cette tâche.
b) Appréciation de la Cour
43. La Cour rappelle que le droit d’accès à un tribunal garanti par l’article 6 § 1 de la Convention serait illusoire si l’ordre juridique interne d’un État contractant permettait qu’une décision judiciaire définitive et obligatoire reste inopérante au détriment d’une partie. L’exécution d’une telle décision, de quelque juridiction que ce soit, doit être considérée comme faisant partie intégrante du « procès » au sens de l’article 6 de la Convention. La Cour rappelle aussi avoir déjà reconnu que la protection effective du justiciable et le rétablissement de la légalité impliquent l’obligation pour l’administration de se plier à un jugement ou arrêt prononcé par la plus haute juridiction administrative de l’État en la matière (voir, notamment, Hornsby c. Grèce, §§ 40 et suivants, 19 mars 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997–II, et Karahalios c. Grèce, no 62503/00, § 29, 11 décembre 2003). De surcroît, elle souligne l’importance particulière que revêt l’exécution des décisions de justice dans le contexte du contentieux administratif (Iera Moni Profitou Iliou Thiras c. Grèce, no 32259/02, § 34, 22 décembre 2005).
44. La Cour rappelle aussi qu’à l’origine de la très grande majorité des affaires grecques dans lesquelles elle a été appelée à examiner des griefs tirés de la non-exécution des arrêts rendus par différentes juridictions se trouvaient des litiges qui opposaient, devant ces juridictions, les requérants à différents organes de l’État. Dans ces affaires, la Cour a conclu à la violation de l’article 6 § 1 de la Convention après avoir constaté que, en dépit d’arrêts favorables aux requérants, l’administration refusait de se conformer à ces arrêts ou tardait à le faire.
45. La Cour rappelle à cet égard que le droit à un tribunal garanti par l’article 6 protège également la mise en œuvre des décisions judiciaires définitives et obligatoires qui, dans un État qui respecte la prééminence du droit, ne peuvent rester inopérantes au détriment d’une partie. Par conséquent, l’exécution d’une décision judiciaire ne peut être empêchée, invalidée ou retardée de manière excessive (voir les arrêts Fuklev, précité, §§ 83-84, Burdov c. Russie, no 59498/00, § 34, 7 mai 2002, non publié ; Immobiliare Saffi c. Italie précitée §§ 63, 66 et Hornsby c. Grèce du 19 mars 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997‑II, pp. 510-511, § 40).
46. La Cour n’est pas appelée à examiner si l’ordre juridique interne est apte à garantir l’exécution des décisions prononcées par les tribunaux. En effet, il appartient à chaque État contractant de se doter d’un arsenal juridique adéquat et suffisant pour assurer le respect des obligations positives qui lui incombent. La Cour a uniquement pour tâche d’examiner si en l’espèce les mesures adoptées par les autorités grecques ont été adéquates et suffisantes (voir mutatis mutandis l’arrêt Ignaccolo-Zenide c. Roumanie § 108, [GC], no 31679/96, ECHR 2000-I).
47. La Cour estime que, lorsque l’administration refuse ou tarde à se conformer à un arrêt rendu dans une procédure, non seulement entre un particulier et l’État, mais aussi entre deux particuliers, cela peut poser aussi un problème au regard de l’article 6 § 1 de la Convention. En effet, l’État, en sa qualité de dépositaire de la force publique, est appelé à avoir un comportement diligent et à assister le créancier dans l’exécution (Sekulić et Kučević c. Serbie, nos 28686/06 et 50135/06, §§ 54 et 55, 15 octobre 2013). La Cour rappelle en outre que les États ont l’obligation positive de mettre en place un système qui soit effectif en pratique comme en droit et qui permet d’assurer l’exécution des décisions judiciaires définitives entre personnes privées (Fouklev c. Ukraine, no 71186/01, § 84, 7 juin 2005). La responsabilité des États concernant l’exécution d’un jugement par une personne de droit privé peut dès lors se trouver engagée si les autorités publiques impliquées dans les procédures d’exécution manquent de la diligence requise ou encore empêchent l’exécution (Bozza c. Italie, no 17739/09, § 44, 14 septembre 2017).
48. La Cour note que le Gouvernement soutient que l’administration a un pouvoir discrétionnaire, et non une compétence liée, lorsqu’il s’agit de se conformer à un arrêt dont les parties sont deux particuliers. Elle relève que le Gouvernement se fonde à cet égard sur la formulation du paragraphe 5 de l’article 17 de de la loi no 1337/1983 qui précise que « l’autorité d’urbanisme compétente peut même d’office procéder à la démolition de la construction illégale », ce qui sous-entend, selon le Gouvernement, que l’administration a un pouvoir discrétionnaire, et non une compétence liée, de décider ou non de procéder à la démolition.
49. La Cour ne saurait accepter cette analyse du Gouvernement. La garantie relative à l’exécution d’une décision judiciaire est autonome par rapport aux prescriptions du droit national. Force est de constater d’ailleurs que les autorités nationales ont tenté de se conformer aux arrêts rendus en faveur des requérants et de leurs ascendants et qu’elles ne se sont pas déchargées de cette tâche en invoquant la législation mentionnée par le Gouvernement.
50. En outre, la Cour n’aperçoit aucun intérêt prépondérant apte à justifier qu’une personne à l’égard de laquelle une juridiction a rendu une décision favorable bénéficie d’une protection moindre selon que la partie adverse soit un particulier ou l’État. L’État a une obligation positive d’organiser un système d’exécution des arrêts rendus par les juridictions nationales et d’assurer l’exécution de ceux-ci dans un délai raisonnable (Fouklev, précité, § 84). Certes, il peut y avoir des situations où l’exécution d’un arrêt sous forme de restitutio in integrum peut s’avérer objectivement impossible en raison d’obstacles factuels ou juridiques. Toutefois, dans de telles situations, l’État doit, de bonne foi et de sa propre initiative, examiner des solutions alternatives telles que l’octroi d’une indemnité (Cıngıllı Holding A.Ş. et Cıngıllıoğlu c. Turquie (fond), nos 31833/06 et 37538/06, § 41, 21 juillet 2015).
51. En l’espèce, la Cour note que, par le jugement no 367/1995 et l’arrêt no 361/1997 respectivement, le tribunal de première instance et la Cour de cassation ont reconnu la mère des requérants propriétaire en indivision d’un terrain et ont ordonné aux occupants illégaux de celui-ci de le lui restituer. Par le jugement no 400/1999 et l’arrêt no 50/2000, le tribunal de première instance et la cour d’appel de Crète ont rejeté l’opposition formée par les occupants du terrain contre une demande adressée par la mère des requérants à l’administration visant à faire accélérer la restitution du terrain et la démolition des constructions illégales qui s’y trouvaient. L’arrêt no 27/2007 de la cour d’appel administrative, confirmé par l’arrêt no 3355/2008 de la Cour de cassation, a rejeté un recours en annulation qu’avaient introduit les occupant du terrain contre la décision no 61/1998 du préfet qui ordonnait la démolition des constructions illégales sur le terrain.
52. Il ne fait aucun doute que, à la suite de la publication de ces six décisions judiciaires, le statut de propriété du terrain litigieux était clair et que l’obligation pour les occupants illégaux de le restituer et de démolir les constructions illégales qui s’y trouvaient ne faisait aucun doute. Toutefois, il ressort du dossier et des démarches entreprises par les occupants que ceux-ci n’avaient pas l’intention de se conformer par eux–mêmes aux prescriptions de ces arrêts. Le concours de l’État, en sa qualité de dépositaire de la force publique, s’avérait donc nécessaire pour la mise en œuvre des arrêts susmentionnés.
53. La Cour reconnaît que l’administration a pris de sa propre initiative des mesures en vue de l’exécution de ces décisions. Ainsi, le 13 janvier 1998, le préfet a ordonné la démolition des constructions illégales. Afin de mettre en œuvre cette décision, la direction de l’urbanisme de La Canée et la commission préfectorale de La Canée ont lancé en 2001, en 2002, en 2005 et en 2010 plusieurs appels d’offres pour trouver, parmi les entreprises de travaux publics, un maître d’ouvrage qui serait chargé de la démolition des constructions illégales. Toutefois, tous ces appels ont été infructueux car aucune entreprise n’a manifesté son intérêt à participer à l’adjudication.
54. De leur côté, les requérants ont demandé à plusieurs reprises – le 5 novembre 2010, puis les 20 juillet, 27 octobre, 31 octobre et 15 décembre 2011 – les autorités à prendre les mesures nécessaires afin d’accélérer la procédure de démolition. Le Gouvernement ne saurait donc valablement se prévaloir d’une incurie des requérants de demander l’exécution forcée des décisions judiciaires en question.
55. Or cette démolition des constructions illégales constituait un préambule à la restitution de la propriété litigieuse aux requérants car, d’après les allégations de ces derniers, non démenties par le Gouvernement, les occupants illégaux y habitaient et les tentatives des policiers pour les déloger s’étaient soldées par un échec, ceux-ci ayant essuyé des tirs qui avaient blessé un policier. Dans de telles conditions, l’argument du Gouvernement selon lequel il appartenait aux requérants de prendre les mesures nécessaires pour évincer les occupants est totalement dénué de fondement. Qui plus est, la Cour note que suite à la décision no 61/1998 du préfet, aucune mise en demeure intimant P.O. de procéder à la démolition n’a été servi à celui-ci.
56. La Cour rappelle qu’un retard dans l’exécution d’un jugement peut se justifier dans des circonstances particulières, mais le retard ne peut avoir pour conséquence une atteinte à la substance même du droit protégé par l’article 6 § 1 de la Convention (Immobiliare Saffi c. Italie [GC], no 22774/93, § 74, CEDH 1999-V, et Burdov c. Russie, no 59498/00, § 35, 7 mai 2002). Or, en l’espèce, elle constate que les autorités ne sont pas parvenues, pendant une très longue période, à donner effet aux arrêts rendus en faveur des requérants, ni à proposer à ces derniers des solutions alternatives (Cıngıllı Holding A.Ş. et Cıngıllıoğlu, précité).
57. Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention.
2. Article 1 du Protocole no 1
58. La Cour note que les arguments des parties sous l’angle de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention se confondent avec ceux présentés sous l’angle de l’article 6 § 1 de la Convention.
59. Eu égard à la conclusion formulée au paragraphe 53 ci-dessus, la Cour estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner séparément ce grief sous l’angle de l’article 1 du Protocole no 1.
2. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
60. Aux termes de l’article 41 de la Convention :
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
1. Dommage
61. Les requérants demandent 300 000 euros (EUR) au titre du dommage matériel et 100 000 EUR au titre du dommage moral qu’ils estiment avoir subis.
62. Le Gouvernement soutient que les requérants n’ont droit à aucune somme pour dommage matériel ou moral. Il estime que les requérants n’ont pas prouvé qu’ils étaient les héritiers de leur mère pour pouvoir prétendre à une indemnité pour la perte de l’usage de leur propriété pendant la période en cause. À supposer même qu’ils soient les héritiers de leur mère, la superficie pour laquelle les tribunaux ont reconnu leur mère propriétaire ne dépasse pas 166,60 m². Or, selon le Trésor public de La Canée, la valeur au mètre carré de ce terrain est de 3,37 EUR, ce qui signifie que la valeur totale du terrain est de 561 EUR. Selon le Gouvernement, le constat d’une violation éventuelle constituerait une satisfaction suffisante.
63. La Cour rappelle sa jurisprudence bien établie selon laquelle, en cas de violation de l’article 6 de la Convention, il faut placer le requérant, le plus possible, dans une situation équivalant à celle dans laquelle il se trouverait s’il n’y avait pas eu manquement aux exigences de cette disposition (Lungoci c. Roumanie, no 62710/00, § 55, 26 janvier 2006). Un arrêt constatant une violation entraîne pour l’État défendeur l’obligation juridique, non seulement de verser à l’intéressé les sommes allouées à titre de satisfaction équitable, mais aussi à choisir, sous le contrôle du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, les mesures générales et/ou, le cas échéant, individuelles à adopter dans son ordre juridique interne afin de mettre un terme à la violation constatée par la Cour et d’en effacer dans la mesure du possible les conséquences, de manière à rétablir autant que faire se peut la situation antérieure à celle-ci (Ilaşcu et autres c. Moldova et Russie [GC], no 48787/99, § 487, CEDH 2004‑VII).
64. La Cour note que les parties ne lui ont pas fourni assez d’éléments sur lesquels se fonder pour accorder une indemnité pour dommage matériel aux requérants. Toutefois, elle rappelle d’emblée sa position constante que l’exécution d’une décision interne demeure le redressement le plus approprié dans le cas des violations de l’article 6 comme celle constatée en l’espèce (Gerasimov et autres c. Russie, nos 29920/05 et 10 autres, § 198, 1er juillet 2014, et Kalinkin et autres c. Russie, nos 16967/10 et 20 autres, § 55, 17 avril 2012). Compte tenu de sa conclusion au paragraphe 57 ci-dessus elle considère donc que l’État défendeur doit garantir, par des mesures appropriées, l’exécution sans délai des décisions no 367/1995 du tribunal de première instance de La Canée et no 361/1997 de la Cour de cassation.
65. Quant au préjudice moral, la Cour estime que les requérants ont vraisemblablement subi une frustration en raison de la non-exécution des arrêts les concernant. Statuant en équité, la Cour leur octroie conjointement 12 000 EUR pour préjudice moral.
2. Frais et dépens
66. Les requérants réclament 45 000 EUR au titre des frais et dépens qu’ils disent avoir engagés dans le cadre des procédures menées devant les juridictions civiles et administratives ainsi que devant l’administration dans le but d’obtenir l’exécution des arrêts les concernant.
67. Le Gouvernement considère que les requérants n’ont droit à aucun remboursement faute de produire les justificatifs nécessaires.
68. La Cour constate que les requérants n’ont pas satisfait aux exigences découlant de l’article 60 de son règlement, à savoir soumettre des prétentions chiffrées, ventilées par rubrique et accompagnées des justificatifs pertinents. Elle ne leur accorde donc rien à ce titre.
3. Intérêts moratoires
69. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1. Déclare la requête recevable ;
2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
3. Dit qu’il n’y a pas lieu d’examiner séparément le grief formulé sur le terrain de l’article 1 du Protocole no 1 ;
4. Dit
a) que l’État défendeur doit verser conjointement aux requérants, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, la somme de 12 000 EUR (douze mille euros), plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt, pour dommage moral ;
b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
5. Rejette le surplus de la demande de satisfaction équitable.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 26 mars 2020, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Renata DegenerKsenija Turković
Greffière AdjointePrésidente