Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 août 1986 et 5 décembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Guy X..., demeurant à Pessan (Auch 32810) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 mai 1986 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part de l'arrêté en date du 16 avril 1984 par lequel le maire de Pavie n'a autorisé les marchands forains et ambulants à pratiquer leur commerce que sur la place de l'Eglise et le mercredi matin seulement, d'autre part de la décision du 15 juin 1984 par laquelle le préfet commissaire de la République du département du Gers a refusé d'annuler ledit arrêté ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 ;
Vu la loi n° 82-623 du 22 juillet 1982 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lasvignes, Auditeur,
- les observations de Me Copper-Royer, avocat de M. Guy X...,
- les conclusions de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 3 de la loi du 2 mars 1982 sur les droits et libertés des communes, des départements et des régions dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi du 22 juillet 1982 : "Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés au paragraphe II de l'article précédent qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission." ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 4 de la même loi : "Sans préjudice du recours direct dont elle dispose, si une personne physique ou morale est lésée par un acte mentionné aux paragraphes II et III de l'article 2, elle peut, dans le délai de deux mois à compter de la date à laquelle l'acte est devenu exécutoire, demander au représentant de l'Etat dans le département de mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article 3 ci-dessus." ;
Considérant que la saisine du préfet, sur le fondement desdites dispositions de la loi du 2 mars 1982, par une personne qui s'estime lésée par l'acte d'une collectivité locale, n'ayant pas pour effet de priver cette personne de la faculté d'exercer un recours direct contre cet acte, le refus du préfet de déférer celui-ci au tribunal administratif ne constitue pas une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'en revanche, la demande ainsi présentée au préfet, si elle a été formée dans le délai du recours contentieux ouvert contre l'acte de la collectivité locale, a pour effet de proroger ce délai jusqu'à l'intervention de la décision explicite ou implicite par laquelle le préfet se prononce sur ladite demande ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 16 avril 1984 par lequel le maire de Pavie n'a autorisé les marchands ambulants à pratiquer leur commerce que sur la place de l'Eglise et le mercredi matin seulement a été affiché en mairie le 27 avril 1984 ; que la demande adressée le 5 mai 1984 par M. X... au préfet du Gers, laquelle doit être interprétée comme tendant à mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article 3 de la loi susvisée du 2 mars 1982, a été rejetée par une décision du 15 juin 1984 ; que le pourvoi formé par M. X... devant le tribunal administratif de Pau le 11 juillet 1984 tendait à l'annulation tant de l'arrêté du 16 avril 1984 du maire de Pavie que de la décision préfectorale du 15 juin 1984 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus d'une part que les conclusions dirigées contre la décision du préfet étaient irrecevables et ont été rejetées à bon droit par le tribunal administratif de Pau, d'autre part que les conclusions dirigées contre l'arrêté du maire de Pavie, présentées moins de deux mois après la notification à M. X... de la décision du préfet, n'étaient pas tardives ; que M. X... est donc fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté lesdites conclusions comme irrecevables ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Pau tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 1984 ;
Considérant que, comme il a été dit, la décision litigieuse a eu pour effet de limiter à la place de l'Eglise et au mercredi matin seulement la pratique du commerce ambulant dans la commune de Pavie ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'une telle restriction a été motivée, non par les nécessités de la circulation ni pour des motifs tirés de l'ordre et de la sécurité publics mais par le souci de protéger les intérêts de certains commerçants de la localité et est, par suite, entachée de détournement de pouvoir ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, M. X... est fondé à en demander l'annulation ;
Article 1er : Le jugement en date du 13 mai 1986 du tribunal administratif de Pau est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. X... dirigées contre l'arrêté du 16 avril 1984 du maire de Pavie.
Article 2 : L'arrêté du 16 avril 1984 du maire de Pavie est annulé.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au maire de Pavie et au ministre de l'intérieur.