Cour constitutionnelle
Arrêt n° 4/2024
du 11 janvier 2024
Numéros du rôle : 7535, 7581 et 7585
En cause : les recours en annulation totale ou partielle du décret de la Communauté française du 12 novembre 2020 « modifiant le décret du 12 janvier 2017 concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal, en vue de la transposition de la Directive européenne 2018/822/UE sur la coopération administrative », introduits par l’association de fait « Belgian Association of Tax Lawyers » et autres, par l’Ordre des barreaux francophones et germanophone et par l’Institut des Conseillers fiscaux et des Experts-comptables.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, D. Pieters, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier N. Dupont, présidée par le président P. Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I. Objet des recours et procédure
a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 16 mars 2021 et parvenue au greffe le 17 mars 2021, un recours en annulation du décret de la Communauté française du 12 novembre 2020 « modifiant le décret du 12 janvier 2017 concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal, en vue de la transposition de la Directive européenne 2018/822/UE sur la coopération administrative » (publié au Moniteur belge du 24 novembre 2020) a été introduit par l’association de fait « Belgian Association of Tax Lawyers », Paul Verhaeghe et Gerd Goyvaerts, assistés et représentés par Me P. Malherbe, avocat au barreau de Bruxelles.
b. Par deux requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 19 et 21 mai 2021 et parvenues au greffe les 21 et 26 mai 2021, des recours en annulation totale ou partielle (articles 3 et 5) du même décret ont été introduits respectivement par l’Ordre des barreaux francophones et germanophone, assisté et représenté par Me S. Scarnà, avocat au
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barreau de Bruxelles, et par l’Institut des Conseillers fiscaux et des Experts-comptables, assisté et représenté par Me F. Judo et Me L. Proost, avocats au barreau de Bruxelles.
Ces affaires, inscrites sous les numéros 7535, 7581 et 7585 du rôle de la Cour, ont été jointes.
Le Gouvernement de la Communauté française, assisté et représenté par Me P. Legros et Me J. Sohier, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit des mémoires, les parties requérantes ont introduit des mémoires en réponse et le Gouvernement de la Communauté française a également introduit des mémoires en réplique.
Par ordonnance du 17 mai 2023, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs K. Jadin et W. Verrijdt, a décidé :
- que les affaires étaient en état,
- d’inviter les parties à exposer, dans un mémoire complémentaire à introduire le 15 juin 2023
au plus tard et à communiquer dans le même délai aux autres parties, leur point de vue concernant l’incidence de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 8 décembre 2022 en cause de Orde van Vlaamse Balies e.a. (C-694/20, ECLI:EU:C:2022:963) sur les recours en annulation,
- qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et
- qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos le 28 juin 2023 et les affaires mises en délibéré.
Les parties requérantes ont introduit des mémoires complémentaires.
À la suite des demandes des parties requérantes dans les affaires nos 7581 et 7585 à être entendues, la Cour, par ordonnance du 31 mai 2023, a fixé l'audience au 28 juin 2023.
À l'audience publique du 28 juin 2023 :
- ont comparu :
. Me P. Malherbe, pour les parties requérantes dans l’affaire n° 7535;
. Me S. Scarnà et Me J. Noël, avocat au barreau de Bruxelles, pour la partie requérante dans l’affaire n° 7581;
. Me F. Judo, pour la partie requérante dans l’affaire n° 7585;
. Me S. Rodrigues, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me P. Legros, et Me S. de Schrevel, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me J. Sohier, pour le Gouvernement de la Communauté française;
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- les juges-rapporteurs K. Jadin et W. Verrijdt ont fait rapport;
- les avocats précités ont été entendus;
- les affaires ont été mises en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. En droit
-A-
Quant à la recevabilité
A.1.1. Le Gouvernement de la Communauté française conteste la recevabilité du recours dans les affaires nos 7535, 7581 et 7585, au motif que ce n’est en réalité pas le décret de la Communauté française du 12 novembre 2020 « modifiant le décret du 12 janvier 2017 concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal, en vue de la transposition de la Directive européenne 2018/822/UE sur la coopération administrative » (ci-après : le décret du 12 novembre 2020) qui est attaqué, mais bien la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018
« modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration » (ci-après :
la directive (UE) 2018/822). La Cour n’est pas compétente pour se prononcer sur un recours en annulation dirigé contre cette directive. Les parties requérantes ne peuvent pas non plus rechercher un constat d’invalidité de la directive (UE) 2018/822 par le truchement d’une demande de renvoi préjudiciel, étant donné qu’elles se sont abstenues d’attaquer cette directive directement devant la Cour de justice de l’Union européenne.
A.1.2. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 répondent qu’elles demandent en temps utile et de manière recevable l’annulation du décret du 12 novembre 2020, décret qui constitue effectivement l’unique objet de leur recours. La partie requérante dans l’affaire n° 7581 répond de manière analogue. Elle n’aurait pas pu demander elle-
même l’annulation de la directive (UE) 2018/822 devant la Cour de justice, étant donné que cette directive n’a pas d’effet direct et individuel à son égard. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 aussi se joint à ces positions.
Quant au fond
En ce qui concerne le premier moyen dans l’affaire n° 7535
A.2.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un premier moyen de la violation, par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 143, § 1er, 170 et 172 de la Constitution, de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et de l’article 1erter de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions. Elles font valoir qu’il est possible d’interpréter l’article 5 du décret du 12 novembre 2020 de telle manière que les contribuables et les intermédiaires ne sont soumis à l’obligation de déclaration contestée que lorsqu’ils ont des points de rattachement personnels avec la Communauté française. Selon les parties requérantes, cela conduit à une différence de traitement injustifiée au sein de l’union économique et monétaire belge, qui compromet les objectifs des dispositions invoquées. Elles se réfèrent à cet égard à l’avis de la section de législation du Conseil d’État qui, selon elles, a été suivi à tort.
A.2.2. Le Gouvernement de la Communauté française répond que le moyen est incompréhensible. Les critères attaqués ont été introduits pour permettre à un intermédiaire de déterminer quand il est soumis à une obligation de déclaration à l’égard de la Communauté française. À cet égard, la disposition attaquée offre justement
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plus de sécurité juridique. Selon le Gouvernement de la Communauté française, on n’aperçoit pas en quoi cette disposition limiterait ou rendrait impossible l’exercice de leurs compétences par le législateur fédéral ou par d’autres législateurs décrétaux ou ordonnanciel. L’hypothèse à laquelle se réfèrent les parties requérantes, dans laquelle un intermédiaire pourrait échapper à l’obligation de déclaration, n’existe pas, étant donné que la disposition attaquée concerne précisément la situation dans laquelle des obligations multiples sont applicables.
En ce qui concerne le deuxième moyen dans l’affaire n° 7535
A.3.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un deuxième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution, en ce que le décret transpose la directive (UE) 2018/822 dans des matières autres que l’impôt des sociétés, sans qu’une justification raisonnable soit fournie à cet effet. Dans le cadre de leurs deux premiers moyens, les parties requérantes dans l’affaire n° 7535
demandent à la Cour de poser la question suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« Est-ce que la Directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, prise en son entièreté, viole les articles 2, 4(3), 5
et 6 TUE, lus ensemble ou pas avec les articles 2(5), 6(g), 16(1), 26(2), 49, 56, 63, 65(3) et 115 TFUE et les articles 7, 8.1 et 47 de la Charte, en ce que cette directive,
- Primo, instaure des obligations pour son but poursuivi qui sont déjà visées par la Directive (UE) 2016/1164
du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur et en se faisant viole l’objectif de l’Union européenne en ce qui concerne la répartition des compétences,
- Secundo, instaure des dispositions qui ont pour effet de nuire au fonctionnement du marché unique alors qu’un effet stimulant est une exigence indispensable pour l’application de la disposition du traité sur base de laquelle cette directive a été adoptée par le Conseil et en se faisant viole les objectifs de l’Union européenne en ce qui concerne la répartition des compétences, la protection de la sphère privée contre des ingérences arbitraires des autorités et du marché unique ? ».
A.3.2. Le Gouvernement de la Communauté française fait valoir que les affirmations des parties requérantes sont erronées en fait. Il ressort clairement de l’article 2 de la directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011
« relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE » (ci-après :
la directive 2011/16/UE) que le champ d’application de cette directive ne se borne pas à l’impôt des sociétés. Le moyen n’est donc manifestement pas fondé.
En ce qui concerne le troisième moyen dans l’affaire n° 7535
A.4.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un troisième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 22, 29, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 5 et 6 du Traité sur l’Union européenne (ci-après : le TUE), avec les articles 16, paragraphe 1, 26, paragraphe 2, 49, 56, 63, 65, paragraphe 3, et 115 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après : le TFUE), avec les articles 7, 8, paragraphe 1, 20 et 51 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Elles reprochent aux obligations d’information instaurées dans le décret d’être basées sur des présomptions de planification fiscale agressive qui ne peuvent pas être raisonnablement déduites des marqueurs élaborés dans la directive. Elles reprochent par ailleurs à certains des marqueurs d’instaurer une présomption irréfragable en ce qu’ils ne permettent pas au contribuable concerné de démontrer que le but du dispositif n’est pas principalement fiscal.
Elles demandent à la Cour de poser les questions préjudicielles suivantes à la Cour de justice de l’Union européenne :
« 1. Convient-il d’interpréter les articles 4(3), 5(4) et 6 TUE, lus ensemble avec les articles 2 (5), 6 (g), 16
(1), 26 (2), 49, 56, 63, 65 (3) et 115 TFUE et les articles 7, 8, 20, 47 à 53 de la Charte, qui doivent organiser une protection d’un niveau qui est minimal égal à celui de l’article 8 CEDH, en ce sens qu’ils s’opposent à la mise en
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œuvre de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, en son entièreté, ou des dispositions reprises aux articles 1er 1 b), 1, 2 et son annexe IV, qui obligent les États membres à transposer dans des normes nationales ou régionales :
- Des obligations de déclaration par rapport à des renseignements qui peut déjà être connue par ces autorités nationales sous les règles européennes existantes d’échange d’information ou peuvent être demandées pour contrer des abus ?
- Est-ce qu’une telle obligation peut alors concerner d’autres impôts nationaux que l’impôt des sociétés sans qu’il n’est démontré que la planification fiscale transfrontière cause des pertes sévères de revenus pour ces autres impôts ?
- Est-ce qu’une telle obligation peut être activée par la simple présence d’un des critères visés en annexe IV
à la directive, aussi lorsqu’ils ne sont pas dans un rapport logique ou nécessaire avec un risque d’évasion fiscale ou d’une présence de pratiques fiscales abusives ?
- Est-ce que les personnes concernées par une obligation de déclaration en application d’un des critères visés dans l’annexe IV de la directive peuvent être exclues du droit d’apporter la preuve que le dispositif transfrontière a un autre but principal que fiscal lorsqu’ils se font interpeller suite à une absence de déclaration du dispositif transfrontière ?
2. En cas de réponse affirmative à la première question, est-ce que les articles 1, 1 b), 1, 2 et l’annexe IV de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration doivent être interprétés en ce sens que :
- La norme nationale qui a transposé cette norme européenne ne peut recevoir application, ni la norme européenne elle-même, en conformité avec le droit primaire de l’Union européenne ?
- La norme nationale qui a transposé cette norme européenne ne peut recevoir d’application qu’en matière de l’impôt des sociétés ou des impôts ayant le même effet qu’une taxe directe sur le chiffre d’affaires d’une personne morale, sans avoir démontré que dans cette autre matière des dispositifs transfrontières ont pour effet de réduire sensiblement les recettes ?
- La norme nationale ou régionale qui a transposé cette norme européenne est tenue de limiter l’obligation de déclaration à la présence d’un ou plusieurs indices combinés d’un avantage fiscal issu d’une planification fiscale agressive et de recours à un montage artificielle reprises dans la recommandation du 6 décembre 2012 de la Commission européenne ?
- La norme nationale ou régionale qui a transposé cette norme européenne autorise en cas de non-déclaration la possibilité d’apporter dans tous les cas la preuve de ce que le dispositif transfrontière n’avait pas pour but principal un avantage fiscal né d’une planification fiscale agressive ou avait une réalité économique ? ».
A.4.2. Selon le Gouvernement de la Communauté française, il n’y a aucune raison de poser les questions préjudicielles suggérées, étant donné que les raisonnements qui les sous-tendent n’ont même pas une apparence de fondement. La première branche du moyen n’est pas fondée, étant donné que la directive 2011/16/UE a de toute évidence un champ d’application plus étendu que ce que prétendent les parties requérantes. Ceci ressort également des considérants de la directive (UE) 2018/822. On n’aperçoit pas non plus en quoi la directive (UE) 2018/822
ferait double emploi avec la directive 2011/16/UE, étant donné qu’elle vise justement à modifier celle-ci.
En ce qui concerne les quatrième, cinquième et sixième moyens dans l’affaire n° 7535
A.5. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un quatrième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 5 et 6 du TUE, avec les articles 26, paragraphe 2, 49, 56, 63 et 65, paragraphe 3, et 115 du TFUE, avec les articles 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 17 du Pacte international
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relatif aux droits civils et politiques, en ce que la notion d’intermédiaire n’a pas été définie assez clairement en ce qui concerne les personnes qui ne sont pas des promoteurs. Étant donné que les définitions contenues dans le décret sont basées sur la directive, celle-ci viole également, selon les parties requérantes, les dispositions précitées.
A.6. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un cinquième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 5 et 6 du TUE, avec les articles 26, paragraphe 2, 49, 56, 63 et 115 du TFUE, avec les articles 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les articles 6, paragraphes 1 et 2, et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le début et la fin du délai pour satisfaire à l’obligation de déclaration n’ont pas été définis de manière suffisamment claire.
A.7. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un sixième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 170, 172 et 190 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, et 6 du TUE, avec les articles 49, 56 et 63 du TFUE, avec les articles 20 et 47
à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les articles 6, paragraphes 1 et 2, et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le décret du 12 novembre 2020 entre en vigueur le 1er juillet 2020, alors qu’il n’est paru au Moniteur belge que le 24 novembre 2020.
A.8. En ce qui concerne leurs quatrième, cinquième et sixième moyens, les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 demandent de poser les questions préjudicielles suivantes à la Cour de justice :
« 1. Les articles 20, 47 à 53 de la Charte, lus ensemble avec l’article 6 TUE, qui doivent organiser une protection d’un niveau qui est minimal égal à celui des articles 6.1, 6.2 et 7 CEDH, sont-ils incompatibles avec les dispositions des articles 1er 1, b) (20), 1er 1, 2), chacun lu ensemble avec l’article 1er 1, 6) de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, qui obligent individuellement ou pris ensemble, les États membres de transposer dans leur législation nationale ou régionale une obligation de déclaration pour leurs justiciables :
- Dans des termes imprécis et/ou subjectifs des obligations de déclaration à des personnes qui dépendent de l’information d’autrui sans un accès propre à toutes les informations nécessaires pour pouvoir remplir valablement leur propre obligation de déclaration ?
- Dans des termes imprécis et/ou subjectifs de fixer un point de départ de l’obligation de déclaration qui ne dépend pas d’une action entreprise par la personne elle-même qui est tenue par l’obligation de déclaration activée en son chef ?
2. En cas de réponse affirmative à la première question, les articles 1er 1 b), 1er 1, 2) et 1er 1, 6) de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, doivent-ils être interprétés en ce sens que :
- Les intermédiaires qui fournissent dans l’État membre des services critiques avec l’intermédiaire qui conçoit, promeut ou vend un dispositif transfrontière qui doit être déclaré peuvent être tenus par une obligation personnelle de déclaration envers cet État membre ? Et qu’à tout le moins, l’absence de déclaration ne peut être sanctionnée envers des personnes non impliquées par des prestations critiques à la fourniture d’un dispositif transfrontière ?
- Le point de départ d’une phase ne peut donner lieu à une obligation personnelle de l’intermédiaire de déclaration qu’à partir du moment où l’intermédiaire lui-même a posé un acte qui nécessite logiquement en son chef la réalisation qu’une nouvelle phase de la constructive est activée ? Et qu’une sanction dissuasive appliquée en transposant cette norme européenne doit tenir compte des circonstances propres à la cause pour n’appliquer qu’une seule sanction en cas d’intervalles courts entre les phases d’un même dispositif transfrontière ?
- L’obligation de déclaration doit se limiter dans le temps à la phase en cours au jour de l’entrée en vigueur de la loi nationale qui transpose la norme européenne ?
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- La norme nationale ne peut pas sanctionner rétroactivement et doit dans sa transposition de la norme européenne tenir compte des circonstances propres à la cause qui peuvent justifier selon la pratique administrative nationale de limiter ou de renoncer à des sanctions dans les cas de non-respect des obligations de déclaration pour des dispositions fiscales nationales ? ».
A.9. Selon le Gouvernement de la Communauté française, les quatrième, cinquième et sixième moyens dirigés contre le décret du 12 novembre 2020 ne sont pas fondés. Toute confusion quant à la définition des notions d’« intermédiaire » ou d’« obligation de déclaration » serait surtout créée par les parties requérantes elles-mêmes.
En ce qui concerne le septième moyen dans l’affaire n° 7535
A.10. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 prennent un septième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 18, 22, 29, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 6 et 19 du TUE, avec l’article 16, paragraphe 1, du TFUE, avec les articles 7, 8, paragraphe 1, 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les articles 6, paragraphe 3, 8 et 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le décret du 12 novembre 2020 lèverait le secret professionnel propre aux avocats en leur imposant l’obligation de déclaration.
Elles critiquent le fait que même les exceptions prévues sur la base du secret professionnel vont de pair avec des obligations d’informer, de manière motivée, d’autres intermédiaires ou des contribuables du fait que le secret professionnel est invoqué.
Elles font valoir que le décret du 12 novembre 2020 viole ces dispositions en ce qu’il exclut qu’un avocat qui agit en tant qu’intermédiaire au sens du décret invoque son secret professionnel pour être dispensé de l’obligation de déclaration périodique en matière de dispositifs commercialisables. L’avocat ne peut toutefois pas satisfaire à cette obligation de déclaration sans violer son secret professionnel.
Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 critiquent également le fait que l’avocat-intermédiaire qui souhaite invoquer son secret professionnel est tenu d’informer les autres intermédiaires concernés par écrit et de façon motivée qu’il ne peut satisfaire à son obligation de déclaration.
Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 demandent à la Cour de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« 1. Est-ce que les articles 2, 4(3), 6 et 19 du Traité de l’Union européenne, combinés avec les articles 7, 8.1, 20, 47 à 53 de la Charte, qui doivent organiser une protection d’un niveau qui est minimal égal à celui des articles 6, 3 et 8 CEDH, et l’article 16(1) du Traité de fonctionnement de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE
en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, en son entièreté, qui oblige les États membres de transposer des obligations envers des avocats qui sont inscrits à des barreaux établis dans cet État-membre et envers leurs clients et d’autres intermédiaires pour :
- Soumettre des obligations de déclaration à des avocats lorsqu’ils agissent dans cette fonction ?
- Soumettre le secret professionnel propre aux avocats selon la tradition juridique dans l’État membre concerné au même régime que le secret professionnel d’autres professions et de les obliger ainsi, tenu compte de l’exigence accrue d’absence d’ambiguïté dans des normes qui imposent des obligations à des avocats :
. A exclure l’exonération à l’obligation de déclaration en matière de dispositifs commercialisables ?
. A notifier à des autres personnes que leur client l’identité de son client, l’objet des entretiens avec ce client et les avis et les prestations rendues ?
. A se renseigner auprès d’autres personnes que leurs clients sur la nature, l’objet et l’étendue de leurs pourparlers, les avis ou prestations données à leurs clients ?
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. A introduire à cause d’autres personnes qui ont manqué à leurs obligations de déclaration, une déclaration qui méconnait toute notion de secret professionnel ?
. A présenter à la demande de l’autorité compétente la preuve de l’identité de leurs clients ou d’autres personnes à qui l’avocat a fait des notifications et la preuve de l’introduction d’une déclaration valable par aux moins une de ces personnes ?
- Obliger aux clients des avocats ou aux intermédiaires à déclarer envers des autorités le fait et le contenu de leurs pourparlers avec leur avocat ?
2. En cas de réponse affirmative à la première question, est-ce que l’article 1, 2) (5) (6) (9) de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, peut encore recevoir application par rapport à des avocats et leurs clients dans les État membres qui organisent un secret professionnel pour des avocats ?
3. En cas de réponse affirmative à une application entière ou partielle, est-ce que les normes de droit primaire violées imposent alors une application qui doit observer au minimum une ou plusieurs des modalités suivantes ?
- Le secret professionnel propre aux avocats ne souffre pas d’exclusion et s’oppose à un traitement égal de l’avocat et de son client sous le régime d’exonération instauré pour le secret professionnel d’autres professions.
- Le secret professionnel propre à des avocats s’oppose à toute divulgation d’information par un avocat à une autre personne que son client. Afin de permettre au client de l’avocat d’accomplir ses propres obligations de déclaration, le client ou l’intermédiaire qui déclare doit être autorisé à déposer un schéma abstrait sans obligation quelconque d’identifier dans ce schéma l’identité de l’avocat ou le contenu des informations et documents échangés avec lui.
- Pour autant que de quelconques obligations peuvent toujours être imposées aux avocats envers leurs clients, le contrôle du respect de ces obligations doit obligatoirement se faire par l’intervention du Bâtonnier de l’avocat, qui veillera sur le respect du secret professionnel propre aux avocats selon la tradition juridique de l’État membre concerné ».
A.11. Le Gouvernement de la Communauté française estime que ce moyen n’est pas fondé non plus. Il constate que la Cour a déjà posé une question préjudicielle concernant ce moyen et estime que, dans un souci de bonne administration de la justice, il serait souhaitable que la Cour pose la même question dans cette affaire-ci également, de sorte que les affaires soient jointes devant la Cour de justice. À tout le moins, les parties dans cette affaire devraient pouvoir, par le biais d’un mémoire complémentaire, s’exprimer sur l’arrêt éventuel de la Cour de justice.
En ce qui concerne le premier moyen dans l’affaire n° 7581
A.12. La partie requérante dans l’affaire n° 7581 prend un premier moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 12, 14 et 190 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec l’article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les principes fondamentaux de la sécurité juridique et de la non-rétroactivité des lois.
Tout d’abord, elle observe que le non-respect des obligations imposées par le décret du 12 novembre 2020 est sanctionné par des amendes administratives de 2 500 à 25 000 euros et, en cas d’intention frauduleuse ou de dessein de nuire, de 5 000 à 50 000 euros. Se référant à la jurisprudence de la Cour et à celle de la Cour européenne des droits de l’homme, elle affirme que ces amendes administratives revêtent un caractère pénal, de sorte que les dispositions du décret du 12 novembre 2020 sont soumises au respect du principe de la légalité dans ses dimensions formelle et matérielle, du principe de la sécurité juridique et du principe de la non-rétroactivité des lois.
Ensuite, elle observe qu’en vertu de l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, un intermédiaire est tenu de transmettre à l’autorité compétente les informations dont il a connaissance, qu’il possède ou qu’il contrôle en ce qui concerne les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration. Selon elle, les dispositions attaquées sont
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volontairement énoncées en des termes et concepts flous et imprécis, de sorte que les destinataires du décret sont privés de toute sécurité juridique. Premièrement, elle observe que le décret ne définit pas la notion de « dispositif », qui est pourtant centrale. Selon elle, la précision apportée par le décret selon laquelle « un dispositif peut comporter plusieurs étapes ou parties » laisse penser qu’un dispositif peut également ne comporter qu’une seule étape ou partie, ce qui renforce l’incertitude quant au sens à donner à cette notion. En outre, elle affirme que, contrairement à ce que les travaux préparatoires suggèrent, la notion de « dispositif » ne peut pas être définie à l’aide des « marqueurs » identifiés par le décret.
Deuxièmement, elle soutient que ni le texte du décret du 12 novembre 2020, ni les travaux préparatoires du décret du 12 novembre 2020, ni les travaux préparatoires de la loi fédérale transposant la même directive européenne ne permettent de comprendre la portée du qualificatif « transfrontière » et de la notion de « participant » à un dispositif.
Troisièmement, la partie requérante observe que le décret du 12 novembre 2020 prévoit cinq catégories de marqueurs pour déterminer si un dispositif transfrontière doit être déclaré ou non. Selon elle, ces marqueurs sont imprécis et manquent de pertinence.
Quatrièmement, selon la partie requérante dans l’affaire n° 7581, le destinataire des informations à communiquer n’est pas clairement défini à l’article 5/2 du décret de la Communauté française du 12 janvier 2017 « concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal » (ci-après : le décret du 12 janvier 2017), tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020.
Cinquièmement, selon la partie requérante, les informations à communiquer sont imprécises et obscures. À cet égard, elle affirme notamment que la définition d’« entreprise associée » n’est pas rédigée en des termes suffisamment clairs et précis. Elle souligne qu’il est pourtant indispensable que les informations devant faire l’objet d’une déclaration soient définies de manière précise, puisqu’une déclaration incomplète est sanctionnée par des amendes administratives de nature pénale.
De plus, elle affirme que l’article 9 du décret du 12 novembre 2020 prévoit une application rétroactive des obligations de déclaration qu’il impose. Elle souligne également qu’alors que le décret a été voté le 12 novembre 2020, l’article 5/2 du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, prévoit que les intermédiaires et, le cas échéant, les contribuables concernés transmettent, le 31 août 2020 au plus tard, les informations relatives aux dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dont la première étape a été mise en œuvre entre le 25 juin 2018 et le 1er juillet 2020. Selon elle, il aurait fallu que les intermédiaires et les contribuables concernés puissent déterminer, au moment de la mise en œuvre d’un dispositif transfrontière, si celui-ci doit faire l’objet d’une déclaration. La partie requérante fait valoir que la rétroactivité du décret du 12 novembre 2020
n’est pas indispensable à la réalisation d’un objectif d’intérêt général. À cet égard, elle observe notamment que la directive (UE) 2020/876 du Conseil du 24 juin 2020 « modifiant la directive 2011/16/UE afin de répondre au besoin urgent de reporter certains délais pour la déclaration et l’échange d’informations dans le domaine de la fiscalité en raison de la pandémie de COVID-19 » a autorisé les États membres à reporter au 28 février 2021 au plus tard le délai pour la déclaration des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dont la première étape a été mise en œuvre entre le 25 juin 2018 et le 1er juillet 2020. Selon la partie requérante, cette faculté de report offerte par le législateur européen démontre que la rétroactivité du décret du 12 novembre 2020 n’est pas nécessaire.
En outre, dès lors que le décret du 12 novembre 2020 transpose la directive (UE) 2018/822, la partie requérante se réfère aux questions préjudicielles qu’elle invite la Cour à poser à la Cour de justice de l’Union européenne afin que celle-ci se prononce en urgence sur la conformité de ladite directive aux principes fondamentaux de la sécurité juridique et de la légalité.
Enfin, à titre de comparaison, la partie requérante se réfère à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de la Cour quant à l’obligation faite aux avocats de dénoncer, dans certaines circonstances, les infractions de blanchiment d’argent. Elle se réfère aussi à l’arrêt de la Cour n° 167/2020 du 17 décembre 2020
(ECLI:BE:GHCC:2020:ARR.167).
A.13. Le Gouvernement de la Communauté française répond que le décret est effectivement suffisamment clair et prévisible. En ce qui concerne l’entrée en vigueur du décret, le Gouvernement de la Communauté française répond qu’il ne saurait y avoir d’application rétroactive dans la pratique, étant donné que la Communauté française
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n’assure pas encore elle-même le service des impôts concernés. L’hypothèse à laquelle se réfèrent les parties requérantes est donc inexistante.
En ce qui concerne le second moyen dans l’affaire n° 7581
A.14.1. La partie requérante dans l’affaire n° 7581 prend un second moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11 et 22 de la Constitution, des articles 7, 8, 20 et 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 1er et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, lus en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec les articles 47, 48, 49, 51 et 52 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec les principes généraux du droit en matière de droits de la défense et avec l’article 6, paragraphe 2, du TUE. Dans la requête en annulation, elle divise ce moyen en trois branches et elle demande à la Cour de poser plusieurs questions préjudicielles à la Cour de justice.
A.14.2. Dans la première branche, elle fait valoir que le décret du 12 novembre 2020 viole le droit au respect de la vie privée, le droit à un procès équitable et le secret professionnel de l’avocat.
Après avoir rappelé la jurisprudence de la Cour et celle de la Cour européenne des droits de l’homme quant au droit au respect de la vie privée, la partie requérante fait valoir que les informations qui sont visées par l’obligation de déclaration imposée par le décret du 12 novembre 2020 relèvent de la sphère de la vie privée, qui inclut notamment les activités commerciales et professionnelles. Selon elle, la communication de ces informations constitue une violation du droit au respect de la vie privée tant de l’avocat-intermédiaire que du contribuable concerné, quelle que soit la personne qui divulgue ces informations à l’autorité compétente.
Ensuite, après avoir rappelé la jurisprudence de la Cour relative au secret professionnel de l’avocat, la partie requérante fait valoir que l’article 2 de la directive (UE) 2018/822 a laissé aux États membres toute latitude en ce qui concerne l’imposition de l’obligation de déclaration aux intermédiaires soumis au secret professionnel. Selon la partie requérante, puisque le décret du 12 novembre 2020 prévoit un régime de dispense lorsque l’intermédiaire est soumis au secret professionnel, le législateur décrétal considère que l’obligation de déclaration constituerait une violation du secret professionnel de l’avocat-intermédiaire. La partie requérante estime que le régime de dispense mis en œuvre par le décret du 12 novembre 2020 viole tout de même le secret professionnel de l’avocat. Tout d’abord, elle constate que la seule distinction opérée par le décret du 12 novembre 2020 entre les différentes professions soumises au secret professionnel réside dans l’application du régime de dispense aux seuls dépositaires d’un secret dont la divulgation est pénalement sanctionnée. Ensuite, elle souligne que l’intermédiaire qui se prévaut de cette dispense est tenu de notifier à un autre intermédiaire le fait qu’il ne peut satisfaire à son obligation de déclaration. Selon elle, une telle notification à un autre intermédiaire, qui n’est pas tenu au même secret et aux mêmes règles déontologiques, viole le secret professionnel. La partie requérante en conclut que le décret du 12 novembre 2020 prévoit un simple transfert de l’obligation de déclaration vers un autre intermédiaire qui n’est pas soumis au secret professionnel ou, en l’absence d’un autre intermédiaire, vers le contribuable concerné. Selon elle, la divulgation d’informations relevant du secret professionnel par un autre intermédiaire ou par le contribuable concerné lui-même viole le secret professionnel de l’avocat. Enfin, la partie requérante souligne que le secret professionnel de l’avocat est moins bien protégé par le décret du 12 novembre 2020, qui concerne des dispositifs licites, que par la législation anti-blanchiment, qui a pour but de lutter contre des infractions particulièrement graves. Se référant à la jurisprudence de la Cour, elle conclut que le secret professionnel de l’avocat doit en toute hypothèse être protégé lorsque l’avocat agit dans le cadre de ses activités essentielles que sont la représentation en justice et le conseil juridique.
A.14.3. Dans la deuxième branche, la partie requérante critique l’absence de dispense en ce qui concerne les dispositifs commercialisables. Elle se réfère à cet égard à l’arrêt de la Cour n° 167/2020, par lequel celle-ci a jugé que l’impossibilité pour les avocats de se prévaloir du secret professionnel en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs transfrontières commercialisables n’est pas raisonnablement proportionnée à l’objectif poursuivi.
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A.14.4. Dans la troisième branche, la partie requérante fait valoir que le décret du 12 novembre 2020 viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’il traite de la même manière tous les intermédiaires tenus au secret professionnel et ne prévoit pas de règles distinctes pour les avocats.
A.15. Le Gouvernement de la Communauté française relève que ce moyen aussi est principalement dirigé contre la directive (UE) 2018/822. Dans ce contexte, et renvoyant aux arrêts que la Cour a déjà rendus en la matière, il fait valoir qu’il conviendra de permettre aux parties de faire part de leurs observations quant à la réponse de la Cour de justice.
En ce qui concerne le premier moyen dans l’affaire n° 7585
A.16. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 prend un premier moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 128, 143, § 1er, 170 et 172 de la Constitution et des règles répartitrices de compétences contenues dans l’article 6, § 1er, VI, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et dans l’article 1erter de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions. Elle reproche au décret du 12 novembre 2020 d’imposer des obligations à des intermédiaires qui exercent des professions intellectuelles, alors qu’il s’agit d’une compétence réservée au législateur fédéral. Pour le surplus, le moyen rejoint le premier moyen dans l’affaire n° 7535.
A.17. Le Gouvernement de la Communauté française répète en substance la réponse qu’il a donnée au premier moyen dans l’affaire n° 7535.
En ce qui concerne le deuxième moyen dans l’affaire n° 7585
A.18. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 prend un deuxième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 5 du TUE et avec l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle reproche au décret du 12 novembre 2020 d’être basé sur une directive qui viole les principes fondamentaux du droit de l’Union européenne. Le moyen rejoint les deuxième et troisième moyens dans l’affaire n° 7535 et le deuxième moyen dans l’affaire n° 7581. Elle demande à la Cour de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice :
« Est-ce que la Directive 2018/822/UE du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, est compatible avec le droit primaire de l’Union, et notamment avec les articles 49, 56, 63 et 115 TFUE et les articles 7, 8 et 52 de la Charte des droits fondamentaux, dans la mesure où elle peut entraîner l’obligation pour les intermédiaires de lever leur secret professionnel sur la base de présomptions fondées sur le droit secondaire ? »
A.19. Le Gouvernement de la Communauté française renvoie en substance à la réponse qu’il a donnée au troisième moyen dans l’affaire n° 7535.
En ce qui concerne le troisième moyen dans l’affaire n° 7585
A.20. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 prend un troisième moyen de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11 et 22 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Elle fait valoir que, sans qu’existe une justification raisonnable, les dispositions attaquées font naître une différence de traitement entre les intermédiaires, selon qu’ils collaborent avec d’autres intermédiaires ou non. Elle souligne qu’en présence de plusieurs intermédiaires, un intermédiaire qui se prévaut du secret professionnel doit en informer les autres intermédiaires de façon motivée : soit les autres intermédiaires ne sont pas soumis au secret professionnel et l’obligation de notification motivée viole alors le secret professionnel, soit les autres intermédiaires sont également soumis au secret professionnel et le dernier intermédiaire est alors tenu, en violation du secret professionnel, de procéder à la déclaration. Selon elle, il s’ensuit que, lorsqu’un intermédiaire collabore avec d’autres intermédiaires, les dispositions attaquées aboutissent nécessairement à une violation du secret professionnel.
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A.21. Le Gouvernement de la Communauté française répète en substance la réponse qu’il a donnée aux autres moyens.
Quant à la demande de suspension du décret du 12 novembre 2020
A.22.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 demandent à la Cour de suspendre le décret du 12 novembre 2020 dans l’attente de la réponse de la Cour de justice aux questions préjudicielles qu’elles ont suggérées.
A.22.2. Le Gouvernement de la Communauté française répond que cette demande est irrecevable.
Quant à l’incidence de l’arrêt de la Cour de justice du 8 décembre 2022
A.23. Par son arrêt n° 167/2020 précité, la Cour a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne. La Cour de justice a répondu à cette question par son arrêt du 8 décembre 2022 en cause de Orde van Vlaamse Balies e.a. (C-694/20, ECLI:EU:C:2022:963).
Par ordonnance du 17 mai 2023, la Cour a invité les parties à exposer, dans un mémoire complémentaire, leur point de vue concernant l’incidence de l’arrêt de la Cour de justice sur les recours en annulation. Les points de vue des parties quant à l’incidence de l’arrêt de la Cour de justice sur les recours en annulation sont reproduits dans ce qui suit.
A.24.1. Dans leur mémoire complémentaire, les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 procèdent principalement à un examen plus détaillé des arguments qu’elles ont déjà mentionnés dans leur requête. Elles proposent par ailleurs d’apporter plusieurs adaptations aux questions préjudicielles qu’elles ont suggérées. Elles étendent en outre leur requête par plusieurs demandes supplémentaires.
A.24.2. Dans son mémoire complémentaire, la partie requérante dans l’affaire n° 7581 fait valoir que l’arrêt de la Cour de justice, ainsi que les arrêts que la Cour constitutionnelle a déjà rendus en la matière, ont pour effet que l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, doive être annulé. Elle argue que les mentions obligatoires doivent elles aussi être annulées en ce qu’elles aboutissent à ce que l’identité de l’avocat ou l’existence ‒ et a fortiori le contenu ‒ de la consultation juridique doivent être mentionnés. Elle allègue, enfin, que le décret du 12 novembre 2020 doit être annulé dans sa totalité sur la base de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ainsi que sur la base d’une possible violation du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 « relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) ».
A.24.3. Dans son mémoire complémentaire, la partie requérante dans l’affaire n° 7585 souligne que toutes les conclusions de la Cour de justice sont purement et simplement transposables à tous les intermédiaires qui sont tenus au secret professionnel, qu’il s’agisse ou non d’avocats. L’arrêt de la Cour de justice comporte à tout le moins une indication très utile pour analyser la situation des intermédiaires, autres que les avocats, qui sont tenus au secret professionnel. À titre très subsidiaire, la partie requérante demande qu’il soit sursis à statuer jusqu’au moment où la Cour de justice aura répondu aux questions préjudicielles qui lui ont été posées par l’arrêt de la Cour n° 103/2022 du 15 septembre 2022 (ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.103).
A.24.4. Le Gouvernement de la Communauté française n’a pas introduit de mémoire complémentaire.
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-B-
Quant aux dispositions attaquées
B.1.1. Les parties requérantes demandent l’annulation du décret de la Communauté française du 12 novembre 2020 « modifiant le décret du 12 janvier 2017 concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal, en vue de la transposition de la Directive européenne 2018/822/UE sur la coopération administrative » (ci-après : le décret du 12 novembre 2020).
Ce décret transpose la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 « modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration » (ci-après : la directive (UE) 2018/822).
La directive (UE) 2018/822 modifie la directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011
« relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE » (ci-après : la directive 2011/16/UE).
L’objet de la directive 2011/16/UE consiste à établir « les règles et procédures selon lesquelles les États membres coopèrent entre eux aux fins d’échanger les informations vraisemblablement pertinentes pour l’administration et l’application de la législation interne des États membres relative aux taxes et impôts [qui relèvent du champ d’application de la directive] » (article 1er, paragraphe 1, de la directive 2011/16/UE).
Il ressort du considérant 2 de la directive (UE) 2018/822 que celle-ci s’inscrit dans le cadre des efforts de l’Union européenne visant à faciliter la transparence fiscale au niveau de l’Union :
« Les États membres éprouvent de plus en plus de difficultés à protéger leur base d’imposition nationale de l’érosion car les structures de planification fiscale sont devenues particulièrement sophistiquées et tirent souvent parti de la mobilité accrue tant des capitaux que des personnes au sein du marché intérieur. De telles structures sont généralement constituées de dispositifs qui sont mis en place dans différentes juridictions et permettent de transférer les bénéfices imposables vers des régimes fiscaux plus favorables ou qui ont pour effet de réduire l’ardoise fiscale totale du contribuable. En conséquence, les États membres voient souvent leurs recettes fiscales diminuer de façon considérable, ce qui les empêche d’appliquer des politiques
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fiscales propices à la croissance. Il est par conséquent essentiel que les autorités fiscales des États membres obtiennent des informations complètes et pertinentes sur les dispositifs fiscaux à caractère potentiellement agressif. De telles informations leur permettraient de réagir rapidement contre les pratiques fiscales dommageables et de remédier aux lacunes par voie législative ou par la réalisation d’analyses des risques appropriées et de contrôles fiscaux.
[…] ».
Concrètement, les États membres doivent désigner une autorité compétente chargée de l’échange, entre les États membres, des informations relatives à des dispositifs fiscaux transfrontières « à caractère potentiellement agressif ». Pour que les autorités compétentes disposent de ces informations, la directive instaure une obligation de déclaration concernant de tels dispositifs.
B.1.2. L’obligation de déclaration incombe en premier lieu aux « intermédiaires », qui participent généralement à la mise en œuvre de tels dispositifs. Toutefois, en l’absence de tels intermédiaires, ou lorsque ceux-ci peuvent invoquer le secret professionnel légalement applicable, l’obligation de déclaration incombe alors au contribuable :
« (6) La déclaration d’informations sur des dispositifs transfrontières de planification fiscale à caractère potentiellement agressif peut contribuer efficacement aux efforts déployés pour créer un environnement fiscal équitable dans le marché intérieur. À cet égard, faire obligation aux intermédiaires d’informer les autorités fiscales de certains dispositifs transfrontières susceptibles d’être utilisés à des fins de planification fiscale agressive constituerait un pas dans la bonne direction. […]
[…]
(8) Afin de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur et de prévenir les lacunes dans le cadre réglementaire proposé, l’obligation de déclaration devrait incomber à tous les acteurs qui participent généralement à la conception, la commercialisation, l’organisation ou la gestion de la mise en œuvre d’une opération transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ou d’une série de telles opérations, ainsi qu’à ceux qui apportent assistance ou conseil. Il convient de noter que, dans certains cas, l’obligation de déclaration ne serait pas applicable à un intermédiaire en raison du secret professionnel applicable en vertu du droit ou lorsqu’il n’existe pas d’intermédiaire, par exemple parce que le contribuable conçoit et met en œuvre un schéma en interne. Il serait donc essentiel que, dans ces circonstances, les autorités fiscales ne soient pas privées de la possibilité de recevoir des informations sur les dispositifs fiscaux potentiellement liés à la planification fiscale agressive. Il serait donc nécessaire que l’obligation de déclaration incombe alors au contribuable qui bénéficie du dispositif dans ces cas particuliers » (considérants 6-8).
B.1.3. Afin de transposer cette obligation de déclaration en ce qui concerne la Communauté française, le décret du 12 novembre 2020 apporte un certain nombre de modifications au décret
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de la Communauté française du 12 janvier 2017 « concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal » (ci-après : le décret du 12 janvier 2017).
L’article 3 du décret du 12 novembre 2020 insère dans l’article 2, alinéa 7, du décret du 12 janvier 2017 plusieurs définitions :
« 20° ‘ dispositif transfrontière ’ : un dispositif concernant plusieurs Etats membres ou un Etat membre et un pays tiers si l’une au moins des conditions suivantes est remplie :
a) tous les participants au dispositif ne sont pas résidents à des fins fiscales dans la même juridiction;
b) un ou plusieurs des participants au dispositif sont résidents à des fins fiscales dans plusieurs juridictions simultanément;
c) un ou plusieurs des participants au dispositif exercent une activité dans une autre juridiction par l’intermédiaire d’un établissement stable situé dans cette juridiction, le dispositif constituant une partie ou la totalité de l’activité de cet établissement stable;
d) un ou plusieurs des participants au dispositif exercent une activité dans une autre juridiction sans être résidents à des fins fiscales ni créer d’établissement stable dans cette juridiction;
e) un tel dispositif peut avoir des conséquences sur l’échange automatique d’informations ou sur l’identification des bénéficiaires effectifs.
Aux fins de l’application du 20° au 27° du paragraphe 2 et de l’article 5/2, on entend également par dispositif une série de dispositifs. Un dispositif peut comporter plusieurs étapes ou parties;
21° ‘ dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ’ : tout dispositif transfrontière comportant au moins l’un des marqueurs;
22° ‘ marqueur ’ : une caractéristique ou particularité d’un dispositif transfrontière qui indique un risque potentiel d’évasion fiscale, telle que recensée au paragraphe 2;
23° ‘ intermédiaire ’ : toute personne qui conçoit, commercialise ou organise un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, le met à disposition aux fins de sa mise en œuvre ou en gère la mise en œuvre. On entend également par ce terme toute personne qui, compte tenu des faits et circonstances pertinents et sur la base des informations disponibles ainsi que de l’expertise en la matière et de la compréhension qui sont nécessaires pour fournir de tels services, sait ou pourrait raisonnablement être censée savoir qu’elle s’est engagée à fournir, directement ou par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils concernant la conception, la commercialisation ou l’organisation d’un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, ou concernant sa mise à disposition aux fins de mise en œuvre ou la gestion de sa mise en œuvre. Toute personne a le droit de fournir des éléments prouvant qu’elle ne savait pas et ne pouvait pas raisonnablement être censée savoir
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qu’elle participait à un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration. A cette fin, cette personne peut invoquer tous les faits et circonstances pertinents ainsi que les informations disponibles et son expertise et sa compréhension en la matière.
Pour être un intermédiaire, une personne répond à l’une au moins des conditions supplémentaires suivantes :
a) être résidente dans un Etat membre à des fins fiscales;
b) posséder dans un Etat membre un établissement stable par le biais duquel sont fournis les services concernant le dispositif;
c) être constituée dans un Etat membre ou régie par le droit d’un Etat membre;
d) être enregistrée auprès d’une association professionnelle en rapport avec des services juridiques, fiscaux ou de conseil dans un Etat membre;
24° ‘ contribuable concerné ’ : toute personne à qui un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration est mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, ou qui est disposée à mettre en œuvre un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, ou qui a mis en œuvre la première étape d’un tel dispositif;
25° ‘ entreprise associée ’ : une personne qui est liée à une autre personne de l’une au moins des façons suivantes :
a) une personne participe à la gestion d’une autre personne lorsqu’elle est en mesure d’exercer une influence notable sur l’autre personne;
b) une personne participe au contrôle d’une autre personne au moyen d’une participation qui dépasse vingt-cinq pour cent des droits de vote;
c) une personne participe au capital d’une autre personne au moyen d’un droit de propriété qui, directement ou indirectement, dépasse vingt-cinq pour cent du capital;
d) une personne a droit à vingt-cinq pour cent ou plus des bénéfices d’une autre personne.
Si plusieurs personnes participent, comme indiqué à l’alinéa 1er du présent 25°, a) à d), à la gestion, au contrôle, au capital ou aux bénéfices d’une même personne, toutes les personnes concernées sont assimilées à des entreprises associées.
Si les mêmes personnes participent, comme indiqué à l’alinéa 1er du présent 25°, a) à d), à la gestion, au contrôle, au capital ou aux bénéfices de plusieurs personnes, toutes les personnes concernées sont assimilées à des entreprises associées.
Aux fins du présent point, une personne qui agit avec une autre personne en ce qui concerne les droits de vote ou la détention de parts de capital d’une entité est considérée comme détenant une participation dans l’ensemble des droits de vote ou des parts de capital de ladite entité détenus par l’autre personne.
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En ce qui concerne les participations indirectes, le respect des critères énoncés à l’alinéa 1er, c), est déterminé en multipliant les taux de détention successivement aux différents niveaux. Une personne détenant plus de cinquante pour cent des droits de vote est réputée détenir cent pour cent de ces droits.
Une personne physique, son conjoint et ses ascendants ou descendants directs sont considérés comme une seule et unique personne;
26° ‘ dispositif commercialisable ’ : un dispositif transfrontière qui est conçu, commercialisé, prêt à être mis en œuvre, ou mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, sans avoir besoin d’être adapté de façon importante;
27° ‘ dispositif sur mesure ’ : tout dispositif transfrontière qui n’est pas un dispositif commercialisable ».
B.1.4. L’article 5 du décret du 12 novembre 2020 insère un article 5/2 dans le décret du 12 janvier 2017. Cette disposition règle la transmission obligatoire, par les intermédiaires ou par les contribuables concernés, d’informations relatives aux dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, ainsi que l’échange automatique de ces informations par l’autorité compétente. Le nouvel article 5/2, §§ 1er et 2, du décret du 12 janvier 2017 dispose :
« § 1er. Les intermédiaires sont tenus de transmettre à l’autorité compétente les informations dont ils ont connaissance, qu’ils possèdent ou qu’ils contrôlent concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dans un délai de trente jours, commençant :
1° le lendemain de la mise à disposition aux fins de mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration; ou
2° le lendemain du jour où le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration est prêt à être mis en œuvre; ou
3° lorsque la première étape de la mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration a été accomplie, la date intervenant le plus tôt étant retenue.
Nonobstant le premier alinéa, les intermédiaires visés à l’article 2, alinéa 7, 23°, deuxième alinéa, sont également tenus de transmettre des informations dans un délai de trente jours commençant le lendemain du jour où ils ont fourni, directement ou par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils.
§ 2. Dans le cas de dispositifs commercialisables, les intermédiaires sont tenus d’établir tous les trois mois un rapport fournissant une mise à jour contenant les nouvelles informations devant faire l’objet d’une déclaration visées au § 14, 1°, 4°, 7° et 8°, qui sont devenues disponibles depuis la transmission du dernier rapport ».
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L’article 5/2, § 3, détermine l’autorité qui doit être informée lorsque plusieurs autorités entrent en considération. L’article 5/2, § 4, règle l’obligation de déclaration lorsque plusieurs intermédiaires participent au même dispositif :
« Lorsque, en application du § 3, il existe une obligation de déclaration multiple, l’intermédiaire est dispensé de la transmission des informations s’il peut prouver que ces mêmes informations ont été transmises dans un autre État membre ».
B.1.5. L’article 5/2, § 5, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5
du décret du 12 novembre 2020, définit le rapport entre l’obligation de déclaration et le secret professionnel auquel certains intermédiaires sont tenus. En vertu de cette disposition, un intermédiaire tenu au secret professionnel n’est dispensé de l’obligation de déclaration que s’il informe tout autre intermédiaire ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, le contribuable des obligations de déclaration qui leur incombent en vertu de l’article 5/2, § 6. Selon l’article 5/2, § 5, alinéa 3, le secret professionnel ne peut en aucun cas être invoqué à l’égard de l’obligation de déclaration de dispositifs commercialisables. L’article 5/2, § 5, du décret du 12 janvier 2017
dispose :
« Les intermédiaires sont dispensés de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel auxquels ils sont tenus et dont la violation est sanctionnée pénalement. En pareil cas, les intermédiaires sont tenus de notifier sans retard à tout autre intermédiaire, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du § 6.
Les intermédiaires ne peuvent avoir droit à une dispense en vertu du premier alinéa que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leurs professions, et qu’à partir du moment où ils ont rempli l’obligation de notification visée à l’alinéa 1er.
Aucun secret professionnel visé au présent paragraphe ne peut être invoqué concernant l’obligation de déclaration des dispositifs commercialisables qui donnent lieu à un rapport périodique conformément au § 2 ».
B.1.6. S’il n’y a pas d’intermédiaire ou si l’intermédiaire notifie au contribuable concerné ou à un autre intermédiaire l’application d’une dispense en vertu de l’article 5/2, § 5, l’obligation de transmettre des informations relatives à un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration relève de la responsabilité de l’autre intermédiaire qui a reçu cette notification ou, en l’absence de celui-ci, de celle du contribuable concerné (article 5/2, § 6, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020).
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B.1.7. L’échange automatique, par l’autorité compétente, des informations relatives aux dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration est réglé à l’article 5/2, §§ 13 à 16, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020 :
« § 13. L’autorité compétente visée à l’article 2, § 1er, alinéa 7, 6°, à qui les informations ont été transmises conformément aux §§ 1 à 12, communique, par voie d’un échange automatique, les informations visées au § 14 aux autorités compétentes de tous les autres Etats membres, selon les modalités pratiques arrêtées conformément à l’article 8, § 8.
§ 14. Les informations qui doivent être communiquées par l’autorité compétente visée à l’article 2, § 1er, alinéa 7, 6°, conformément au § 13, comprennent les éléments suivants, le cas échéant :
1° l’identification des intermédiaires et des contribuables concernés, y compris leur nom, leur date et lieu de naissance pour les personnes physiques, leur résidence fiscale, leur numéro d’identification fiscale et, le cas échéant, les personnes qui sont des entreprises associées au contribuable concerné;
2° des informations détaillées sur les marqueurs recensés à l’annexe IV de la Directive selon lesquels le dispositif transfrontière doit faire l’objet d’une déclaration;
3° un résumé du contenu du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, y compris une référence à la dénomination par laquelle il est communément connu, le cas échéant, et une description des activités commerciales ou dispositifs pertinents, présentée de manière abstraite, sans donner lieu à la divulgation d’un secret commercial, industriel ou professionnel, d’un procédé commercial ou d’informations dont la divulgation serait contraire à l’ordre public;
4° la date à laquelle la première étape de la mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration a été accomplie ou sera accomplie;
5° des informations détaillées sur les dispositions nationales sur lesquelles se fonde le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration;
6° la valeur du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration;
7° l’identification de l’Etat membre du ou des contribuable(s) concerné(s), ainsi que de tout autre Etat membre susceptible d’être concerné par le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration;
8° l’identification, dans les Etats membres, de toute autre personne susceptible d’être concernée par le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration en indiquant à quels Etats membres cette personne est liée.
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§ 15. Le fait qu’une autorité fiscale ne réagit pas face à un dispositif devant faire l’objet d’une déclaration ne vaut pas approbation de la validité ou du traitement fiscal de ce dispositif.
§ 16. L’échange automatique d’informations est effectué dans un délai d’un mois à compter de la fin du trimestre au cours duquel les informations ont été transmises. Les premières informations sont communiquées le 31 octobre 2020 au plus tard ».
B.1.8. L’article 9 du décret du 12 novembre 2020 règle de la manière suivante l’entrée en vigueur de celui-ci, ainsi que la date à laquelle celui-ci produit ses effets :
« Le présent décret entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
Les articles 2 à 8 du présent décret produisent leurs effets au 1er juillet 2020 ».
En vertu de l’article 5/2, § 12, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, les intermédiaires et les contribuables doivent transmettre, au plus tard le 31 août 2020, les informations sur les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dont la première étape a été mise en œuvre entre le 25 juin 2018 et le 1er juillet 2020.
Quant à la recevabilité
En ce qui concerne la compétence de la Cour
B.2.1. Le Gouvernement de la Communauté française conteste la recevabilité du recours dans les affaires nos 7535, 7581 et 7585, au motif que ce n’est en réalité pas le décret du 12 novembre 2020 qui est attaqué, mais la directive (UE) 2018/822.
B.2.2. En vertu de l’article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la Cour est compétente pour statuer sur les recours en annulation d’une loi, d’un décret ou d’une règle visée à l’article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l’autorité fédérale, des
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communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.
B.2.3. Les recours dans les affaires nos 7535, 7581 et 7585 ont pour objet le décret du 12 novembre 2020. Le fait que les moyens des parties requérantes renvoient à la directive (UE) 2018/822, dont ce décret assure la transposition, ne modifie pas ce constat.
L’exception est rejetée.
En ce qui concerne le mémoire complémentaire des parties requérantes dans les affaires nos 7535 et 7581
B.3. Dans leur mémoire complémentaire, les parties requérantes dans les affaires nos 7535
et 7581 formulent plusieurs ajustements et compléments à leur requête. Il n’appartient pas aux parties requérantes de modifier, dans un mémoire complémentaire, les moyens qu’elles ont elles-mêmes formulés dans la requête. Un grief qui, comme en l’espèce, est formulé dans un mémoire complémentaire, mais qui diffère de celui qui a été formulé dans la requête, constitue dès lors un moyen nouveau et est irrecevable.
Quant aux moyens pris de la violation des règles répartitrices de compétences (premier moyen dans l’affaire n° 7535 et premier moyen dans l’affaire n° 7585)
B.4. L’examen de la conformité d’une disposition législative aux règles répartitrices de compétences doit en règle précéder celui de sa compatibilité avec les dispositions du titre II et des articles 170, 172 et 191 de la Constitution.
B.5.1. Le premier moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 143, § 1er, 170 et 172 de la Constitution, de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et de l’article 1erter de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, en ce qu’il est possible d’interpréter le décret du 12 novembre 2020 de telle
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manière que les contribuables et les intermédiaires ne sont soumis à une obligation de déclaration que lorsqu’ils ont des points de rattachement personnels avec la Communauté française. Cela entraînerait une différence de traitement qui va à l’encontre de la loyauté fédérale et de l’union économique et monétaire.
Le premier moyen dans l’affaire n° 7585 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 143, § 1er, 170 et 172 de la Constitution et des règles répartitrices de compétences contenues dans l’article 6, § 1er, VI, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 reproche au décret du 12 novembre 2020 d’imposer des obligations à des intermédiaires qui exercent des professions intellectuelles, alors qu’il s’agit d’une compétence réservée au législateur fédéral.
Pour le surplus, le moyen rejoint totalement le premier moyen dans l’affaire n° 7535.
B.5.2. L’article 5/2, §§ 3, 4, 7 et 8, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, dispose :
« § 3. Lorsque l’intermédiaire a l’obligation de transmettre des informations concernant des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration aux autorités compétentes de plusieurs Etats membres, il ne fournira ces informations à l’autorité compétente visée à l’article 2, § 1er, alinéa 7, 6°, que si la Communauté française occupe la première place dans la liste ci-après, lorsque l’objet du dispositif en question relève d’un impôt dont la Communauté française assure le service :
1° l’intermédiaire est résident à des fins fiscales d’un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service;
2° l’intermédiaire possède un établissement stable dans un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service, et par l’intermédiaire duquel les services concernant le dispositif sont fournis;
3° l’intermédiaire est constitué dans un territoire ou est régi par le droit d’un territoire où
est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service;
4° l’intermédiaire est enregistré auprès d’une association professionnelle en rapport avec des services juridiques, fiscaux ou de conseil, établie dans un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service.
§ 4. Lorsque, en application du § 3, il existe une obligation de déclaration multiple, l’intermédiaire est dispensé de la transmission des informations s’il peut prouver que ces mêmes informations ont été transmises dans un autre Etat membre.
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[…]
§ 7. Le contribuable concerné à qui incombe l’obligation de déclaration transmet les informations dans un délai de trente jours, commençant le lendemain du jour où le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration est mis à la disposition du contribuable concerné aux fins de mise en œuvre, ou est prêt à être mis en œuvre par le contribuable concerné, ou lorsque la première étape de sa mise en œuvre est accomplie en ce qui concerne le contribuable concerné, la date intervenant le plus tôt étant retenue.
Lorsque le contribuable concerné a l’obligation de transmettre des informations concernant le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration aux autorités compétentes de plusieurs Etats membres, il ne fournira ces informations à l’autorité compétente visée à l’article 2, § 1er, alinéa 7, 6°, que si la Communauté française occupe la première place dans la liste ci-après, lorsque l’objet du dispositif en question relève d’un impôt dont la Communauté française assure le service :
1° le contribuable concerné est résident à des fins fiscales d’un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service;
2° le contribuable concerné possède un établissement stable qui bénéficie du dispositif dans un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service;
3° le contribuable concerné perçoit des revenus ou réalise des bénéfices dans un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service, bien qu’il ne soit résident à des fins fiscales et ne possède d’établissement stable dans aucun Etat membre;
4° le contribuable concerné exerce une activité dans un territoire où est prélevé un impôt dont la Communauté française assure le service, bien qu’il ne soit résident à des fins fiscales et ne possède d’établissement stable dans aucun Etat membre.
§ 8. Lorsque, en application du § 7, il existe une obligation de déclaration multiple, le contribuable concerné est dispensé de la transmission des informations s’il peut prouver, conformément au droit national, que ces mêmes informations ont été transmises dans un autre Etat membre ».
B.5.3. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 n’expose pas en quoi les dispositions précitées peuvent avoir la moindre incidence sur la compétence fédérale relative aux conditions d’accès aux professions intellectuelles prestataires de services. Le premier moyen dans l’affaire n° 7585 est irrecevable dans cette mesure.
B.5.4. Il peut se déduire de l’exposé des moyens que les parties requérantes dans les affaires nos 7535 et 7585 supposent que les critères sont formulés de telle sorte qu’ils permettent
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qu’un intermédiaire ou un contribuable puisse échapper à l’obligation de déclaration lorsqu’il ne remplit pas les critères énumérés dans les dispositions précitées.
Les dispositions précitées ne sont applicables que lorsqu’un intermédiaire ou un contribuable est tenu de transmettre des informations aux autorités compétentes de plusieurs États membres. Lorsque, sur la base des critères précités, qui sont fondés sur l’article 8bis ter, paragraphes 3, 4, 7 et 8, de la directive 2011/16/UE, inséré par l’article 1er, point 2), de la directive (UE) 2018/822, aucune information ne doit être transmise à l’autorité compétente visée à l’article 2, § 1er, alinéa 7, 6°, du décret du 12 janvier 2017, cela implique nécessairement que ces informations doivent être transmises à une autre autorité.
B.5.5. Le premier moyen dans l’affaire n° 7535 et le premier moyen dans l’affaire n° 7585, dans la mesure où il est recevable, reposent sur une lecture erronée des dispositions qu’ils attaquent et ne sont, par conséquent, pas fondés.
Quant aux autres moyens
En ce qui concerne le deuxième moyen dans l’affaire n° 7535
B.6.1. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution, en ce que le décret transpose la directive (UE) 2018/822 dans des matières autres que l’impôt des sociétés, sans qu’une justification raisonnable soit donnée à cet égard.
B.6.2. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 n’exposent pas en quoi les dispositions attaquées violeraient l’article 170 de la Constitution. Le moyen est irrecevable en ce qu’il est pris de la violation de l’article 170 de la Constitution.
B.6.3. Le moyen est identique pour le reste au troisième moyen que les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 invoquent dans l’affaire n° 7407 à l’égard des articles 2 à 60 de la loi du 20 décembre 2019 « transposant la Directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018
modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire
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d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration » (ci-après : la loi du 20 décembre 2019). Par son arrêt n° 103/2022
du 15 septembre 2022 (ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.103), la Cour a jugé qu’il ne peut pas être statué sur ce moyen avant de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« La directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 ‘ modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration ’ viole-t-elle l’article 6, paragraphe 3, du Traité sur l’Union européenne et les articles 20 et 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et plus spécifiquement le principe d’égalité et de non-discrimination que ces dispositions garantissent, en ce que la directive (UE) 2018/822 ne limite pas l’obligation de déclaration des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration à l’impôt des sociétés, mais la rend applicable à tous les impôts rentrant dans le champ d’application de la directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 ‘ relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE ’, ce qui inclut en droit belge non seulement l’impôt des sociétés mais aussi des impôts directs autres que l’impôt des sociétés et des impôts indirects, tels que les droits d’enregistrement ? ».
B.6.4. La question précitée se pose également dans le cadre du moyen présentement examiné. Dans l’attente de la réponse de la Cour de justice à la première question préjudicielle qui lui a été posée par l’arrêt n° 103/2022, il y a lieu de surseoir à statuer sur le moyen mentionné en B.6.1.
En ce qui concerne le troisième moyen dans l’affaire n° 7535 et le second moyen, première branche, dans l’affaire n° 7581
B.7.1. Le troisième moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 22, 29, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 5 et 6 du Traité sur l’Union européenne (ci-après :
le TUE), avec les articles 16, paragraphe 1, 26, paragraphe 2, 49, 56, 63, 65, paragraphe 3, et 115 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après : le TFUE), avec les articles 7, 8, paragraphe 1, 20 et 51 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les parties requérantes reprochent aux obligations d’information instaurées dans le décret d’être basées sur des
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présomptions de planification fiscale agressive qui ne peuvent pas être raisonnablement déduites des marqueurs élaborés dans la directive. Elles reprochent par ailleurs à certains des marqueurs d’instaurer une présomption irréfragable en ce qu’ils ne permettent pas au contribuable concerné de démontrer que le but du dispositif n’est pas principalement fiscal.
Dans son second moyen, première branche, la partie requérante dans l’affaire n° 7581 fait valoir, entre autres, que le décret du 12 novembre 2020 entraîne une ingérence injustifiée dans le droit au respect de la vie privée des intermédiaires et des contribuables concernés.
B.7.2. Les moyens précités rejoignent le second moyen qui est invoqué dans l’affaire n° 7409 à propos de la loi du 20 décembre 2019. Par son arrêt n° 103/2022, la Cour a jugé qu’il ne peut pas être statué sur ce moyen avant de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« La directive (UE) 2018/822 précitée viole-t-elle le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que l’obligation de déclaration des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration entraînerait une ingérence dans le droit au respect de la vie privée des intermédiaires et des contribuables concernés qui ne serait pas raisonnablement justifiée et proportionnée au regard des objectifs poursuivis et qui ne serait pas pertinente au regard de l’objectif d’assurer le bon fonctionnement du marché intérieur ? ».
B.7.3. La question précitée se pose également dans le cadre des moyens présentement examinés. Dans l’attente de la réponse de la Cour de justice à la cinquième question préjudicielle qui lui a été posée par l’arrêt n° 103/2022, il y a lieu de surseoir à statuer sur les moyens mentionnés en B.7.1.
En ce qui concerne le quatrième moyen dans l’affaire n° 7535 et le premier moyen dans l’affaire n° 7581
B.8.1. Le quatrième moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 5 et 6 du TUE, avec les articles 26, paragraphe 2,
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49, 56, 63, 65, paragraphe 3, et 115 du TFUE, avec les articles 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que la notion d’intermédiaire n’a pas été définie assez clairement en ce qui concerne les personnes qui ne sont pas des promoteurs. Étant donné que les définitions contenues dans le décret sont basées sur la directive, celle-ci viole également, selon les parties requérantes, les dispositions précitées. Dans son premier moyen, la partie requérante dans l’affaire n° 7581 fait valoir, entre autres, que les notions de « dispositif », de « participant », d’« entreprise associée », le qualificatif « transfrontière » et les différents « marqueurs » ne sont pas définis de façon suffisamment précise.
B.8.2. Les moyens précités sont quasiment identiques aux moyens que les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 et la partie requérante dans l’affaire n° 7581 invoquent à l’égard des dispositions correspondantes de la loi du 20 décembre 2019 dans l’affaire n° 7407
(cinquième moyen) et dans l’affaire n° 7409 (premier moyen). Par son arrêt n° 103/2022, la Cour a jugé qu’il ne peut pas être statué sur ce moyen avant de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« La directive (UE) 2018/822 précitée viole-t-elle le principe de légalité en matière pénale garanti par l’article 49, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 7, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, viole-t-elle le principe général de la sécurité juridique et viole-t-elle le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que les notions de ‘ dispositif ’ (et dès lors celles de ‘ dispositif transfrontière ’, de ‘ dispositif commercialisable ’ et de ‘ dispositif sur mesure ’), d’‘ intermédiaire ’, de ‘ participant ’, d’‘ entreprise associée ’, le qualificatif ‘ transfrontière ’, les différents ‘ marqueurs ’ et le ‘ critère de l’avantage principal ’, que la directive (UE) 2018/822 emploie pour déterminer le champ d’application et la portée de l’obligation de déclaration des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, ne seraient pas suffisamment clairs et précis ? ».
B.8.3. La question précitée se pose également dans le cadre des moyens présentement examinés. Dans l’attente de la réponse de la Cour de justice à la deuxième question préjudicielle qui lui a été posée par l’arrêt n° 103/2022, il y a lieu de surseoir à statuer sur les moyens mentionnés en B.8.1.
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En ce qui concerne le cinquième moyen dans l’affaire n° 7535
B.9.1. Le cinquième moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 5 et 6 du TUE, avec les articles 26, paragraphe 2, 49, 56, 63 et 115 du TFUE, avec les articles 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les articles 6, paragraphes 1 et 2, et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le début et la fin du délai pour satisfaire à l’obligation de déclaration n’ont pas été définis de manière suffisamment claire.
B.9.2. Ce moyen est quasiment identique au sixième moyen que les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 invoquent dans l’affaire n° 7407 à l’égard des dispositions correspondantes de la loi du 20 décembre 2019. Par son arrêt n° 103/2022, la Cour a jugé qu’il ne peut pas être statué sur ce moyen avant de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« La directive (UE) 2018/822 précitée, en particulier en ce qu’elle insère l’article 8bis ter, paragraphes 1 et 7, de la directive 2011/16/UE précitée, viole-t-elle le principe de légalité en matière pénale garanti par l’article 49, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 7, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, et viole-t-elle le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le point de départ du délai de 30 jours dans lequel l’intermédiaire ou le contribuable concerné doit satisfaire à l’obligation de déclaration d’un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ne serait pas fixé de façon suffisamment claire et précise ? ».
B.9.3. La question précitée se pose également dans le cadre du moyen présentement examiné. Dans l’attente de la réponse de la Cour de justice à la troisième question préjudicielle qui lui a été posée par l’arrêt n° 103/2022, il y a lieu de surseoir à statuer sur le moyen mentionné en B.9.1.
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En ce qui concerne le sixième moyen dans l’affaire n° 7535 et le premier moyen dans l’affaire n° 7581
B.10.1. Le sixième moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 170, 172 et 190 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, et 6 du TUE, avec les articles 49, 56 et 63 du TFUE, avec les articles 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les articles 6, paragraphes 1 et 2, et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le décret du 12 novembre 2020 entre en vigueur le 1er juillet 2020, alors qu’il n’est paru au Moniteur belge que le 24 novembre 2020. Le premier moyen dans l’affaire n° 7581, en ce qu’il est dirigé contre l’article 9 du décret du 12 novembre 2020, rejoint ce qui précède.
B.10.2. L’article 9 du décret du 12 novembre 2020 dispose :
« Le présent décret entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
Les articles 2 à 8 du présent décret produisent leurs effets au 1er juillet 2020 ».
Le décret du 12 novembre 2020 a été publié au Moniteur belge du 24 novembre 2020 et est entré en vigueur le même jour.
B.10.3. Bien que l’article 190 de la Constitution interdise qu’une norme législative devienne obligatoire avant sa publication, cette disposition n’interdit pas, en soi, qu’une norme publiée prenne effet à partir d’une date antérieure à sa publication.
B.10.4. Toutefois, lorsqu’il confère un effet rétroactif à une norme législative, le législateur compétent doit tenir compte du principe de la non-rétroactivité des lois.
B.10.5. La non-rétroactivité des lois est une garantie ayant pour but de prévenir l’insécurité juridique. Cette garantie exige que le contenu du droit soit prévisible et accessible, de sorte que le justiciable puisse prévoir, dans une mesure raisonnable, les conséquences d’un acte
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déterminé au moment où cet acte est accompli. La rétroactivité ne se justifie que si elle est indispensable à la réalisation d’un objectif d’intérêt général.
S’il s’avère que la rétroactivité a en outre pour but ou pour effet d’influencer dans un sens l’issue de procédures judiciaires ou que les juridictions soient empêchées de se prononcer sur une question de droit bien précise, la nature du principe en cause exige que des circonstances exceptionnelles ou des motifs impérieux d’intérêt général justifient l’intervention du législateur, laquelle porte atteinte, au préjudice d’une catégorie de citoyens, aux garanties juridictionnelles offertes à tous.
B.10.6. Une règle doit être qualifiée de rétroactive si elle s’applique à des faits, actes et situations qui étaient définitivement accomplis au moment où elle est entrée en vigueur.
B.10.7. En vertu de l’article 5/2, § 12, du décret du 12 janvier 2017, inséré par le décret du 12 novembre 2020, l’obligation de déclaration concerne les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dont la première étape a été mise en œuvre entre le 25 juin 2018
et le 1er juillet 2020. La même disposition prévoit que les informations relatives à ces dispositifs doivent être communiquées au plus tard le 31 août 2020. L’article 9, alinéa 2, du décret du 12 novembre 2020, lu en combinaison avec l’article 5/2, §§ 1er et 7, du décret du 12 janvier 2017, inséré par le décret du 12 novembre 2020, a pour conséquence que, pour les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dont la première étape a été mise en œuvre après le 1er juillet 2020, les informations doivent être transmises dans un délai de 30 jours. Il s’ensuit que, pour les dispositifs dont la première étape a été mise en œuvre au cours de la période allant du 25 juin 2018 jusqu’à 30 jours avant l’entrée en vigueur du décret du 12 novembre 2020, la date à laquelle ceux-ci doivent être déclarés tombe avant cette entrée en vigueur. Par conséquent, l’obligation de déclaration est rétroactive pour ces dispositifs.
B.10.8.1. Ni les travaux préparatoires, ni les mémoires du Gouvernement de la Communauté française ne permettent de déduire que cette obligation rétroactive de déclaration serait absolument nécessaire pour réaliser un objectif d’intérêt général. Bien que, dans les travaux préparatoires, le législateur décrétal fasse état de la nécessité de transposer la
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directive (UE) 2018/822 dans les délais impartis (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2020-2021, n° 137/1, p. 10), il ressort des mêmes travaux préparatoires que l’obligation de déclaration ne pouvait pas être appliquée en pratique avant cette période (ibid., p. 4).
B.10.8.2. La directive (UE) 2020/876 du Conseil du 24 juin 2020 « modifiant la directive 2011/16/UE afin de répondre au besoin urgent de reporter certains délais pour la déclaration et l’échange d’informations dans le domaine de la fiscalité en raison de la pandémie de COVID-19 » a inséré, dans la directive 2011/16/UE, un article 27bis, dont les paragraphes 1
et 2 disposent :
« 1. Nonobstant les délais de déclaration d’informations sur les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration fixés à l’article 8bis ter, paragraphe 12, les États membres peuvent prendre les mesures nécessaires pour permettre aux intermédiaires et aux contribuables concernés de fournir, pour le 28 février 2021 au plus tard, des informations sur les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dont la première étape a été mise en œuvre entre le 25 juin 2018 et le 30 juin 2020.
2. Lorsque les États membres prennent les mesures visées au paragraphe 1, ils prennent également les mesures nécessaires pour permettre que :
a) nonobstant l’article 8bis ter, paragraphe 18, les premières informations soient communiquées le 30 avril 2021 au plus tard;
b) le délai de trente jours pour déclarer les informations visées à l’article 8 bis ter, paragraphes 1 et 7, commence à courir au plus tard le 1er janvier 2021 lorsque :
i) un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration est mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, ou est prêt à être mis en œuvre, ou lorsque la première étape de sa mise en œuvre a été accomplie entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2020; ou
ii) les intermédiaires au sens de l’article 3, point 21, deuxième alinéa, fournissent, directement ou par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2020;
c) dans le cas de dispositifs commercialisables, le premier rapport périodique conformément à l’article 8bis ter, paragraphe 2, soit établi par les intermédiaires au plus tard le 30 avril 2021 ».
Il s’ensuit que, sans qu’il soit nécessaire de déterminer si cela pourrait justifier la rétroactivité des dispositions attaquées, cette rétroactivité n’est pas nécessaire pour assurer le respect du droit de l’Union européenne.
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B.10.9. À la lumière des éléments précités, le sixième moyen dans l’affaire n° 7535, en ce qu’il critique la rétroactivité des dispositions attaquées, est fondé en ce qu’il est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.
L’article 5/2, § 12, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, et l’article 9, alinéa 2, du décret du 12 novembre 2020 doivent être annulés.
L’examen au regard des autres normes visées dans ce moyen ne saurait aboutir à une annulation plus étendue. Partant, la Cour ne doit pas poser à la Cour de justice de l’Union européenne la question préjudicielle que les parties requérantes dans l’affaire n° 7535
suggèrent. L’examen du premier moyen dans l’affaire n° 7581, en ce que celui-ci est dirigé contre l’article 9 du décret du 12 novembre 2020, ne saurait pas davantage conduire à une annulation plus étendue.
En ce qui concerne le septième moyen dans l’affaire n° 7535
B.11.1. Le septième moyen dans l’affaire n° 7535 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11, 12, 14, 18, 22, 29, 170 et 172 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 2, 4, paragraphe 3, 6 et 19 du TUE, avec l’article 16, paragraphe 1, du TFUE, avec les articles 7, 8, paragraphe 1, 20 et 47 à 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec les articles 6, paragraphe 3, 8 et 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le décret du 12 novembre 2020
lèverait le secret professionnel propre aux avocats en leur imposant l’obligation de déclaration.
B.11.2. Le septième moyen dans l’affaire n° 7535 est quasiment identique au sixième moyen invoqué par les parties requérantes dans l’affaire n° 7443 et coïncide avec les deux premiers moyens invoqués dans l’affaire n° 7429. Par son arrêt n° 111/2023 du 20 juillet 2023
(ECLI:BE:GHCC:2023:ARR.111), la Cour s’est prononcée sur ces moyens.
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B.12.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 font valoir que l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, viole les dispositions mentionnées en B.11.1 en ce qu’il exclut qu’un avocat qui agit en tant qu’intermédiaire au sens du décret invoque son secret professionnel pour être dispensé de l’obligation de déclaration en matière de dispositifs commercialisables.
B.12.2. Une double obligation de déclaration incombe aux intermédiaires en ce qui concerne ces dispositifs. Au moment où, pour la première fois, ils sont mis à disposition aux fins de la mise en œuvre ou qu’ils sont prêts à être mis en œuvre, ces dispositifs doivent, tout comme les dispositifs sur mesure, être déclarés individuellement (article 5/2, § 1er, du décret du 12 janvier 2017).
B.12.3. Dans le cas des dispositifs commercialisables, les intermédiaires ont également l’obligation d’établir tous les trois mois un rapport périodique fournissant une mise à jour contenant les nouvelles informations devant faire l’objet d’une déclaration, qui sont devenues disponibles en ce qui concerne les dispositifs commercialisables (article 5/2, § 2, du décret du 12 janvier 2017). Les informations qui doivent être communiquées comprennent les éléments suivants, s’ils sont applicables :
- l’identification des intermédiaires et des contribuables concernés, y compris leur nom, leur date et lieu de naissance (pour les personnes physiques), leur résidence fiscale et leur numéro d’identification fiscale et, le cas échéant, les personnes qui sont des entreprises associées au contribuable concerné;
- la date à laquelle la première étape de la mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration a été accomplie ou sera accomplie;
- l’identification de l’État membre du ou des contribuables concernés, ainsi que de tout autre État membre susceptible d’être concerné par le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration;
- l’identification, dans les États membres, de toute autre personne susceptible d’être concernée par le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration en indiquant à quels États membres cette personne est liée.
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B.13.1. Par son arrêt n° 111/2023, précité, la Cour a jugé, quant au premier moyen dans l’affaire n° 7429, que ce moyen n’est pas fondé en ce qui concerne l’obligation de déclaration initiale relative aux dispositifs commercialisables, contenue dans l’article 11/3 du décret flamand du 21 juin 2013 « relatif à la coopération administrative dans le domaine fiscal » (ci-
après : le décret flamand du 21 juin 2013), étant donné qu’il peut être admis, en raison de la nature même d’un dispositif commercialisable, que, lors de la déclaration individuelle initiale, les informations à transmettre ne porteront pas sur des données qui relèvent du secret professionnel (B.9.3).
Les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 ne font pas valoir d’arguments qui conduisent à une autre conclusion en ce qui concerne l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, en tant qu’il porte sur l’obligation de déclaration initiale relative aux dispositifs commercialisables.
B.13.2. Pour des motifs identiques à ceux qui sont contenus dans l’arrêt n° 111/2023, précité, le septième moyen dans l’affaire n° 7535 n’est pas fondé en ce qu’il est dirigé contre l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, en tant qu’il porte sur l’obligation de déclaration initiale relative aux dispositifs commercialisables.
B.14.1. En ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique en matière de dispositifs commercialisables, la Cour a jugé par son arrêt n° 111/2023 :
« B.9.4. Contrairement à ce qui a été constaté en ce qui concerne l’obligation de déclaration initiale des dispositifs commercialisables, il n’est pas exclu que, eu égard aux informations citées en B.9.2 qui doivent être communiquées dans le cadre de l’obligation de déclaration périodique, cette obligation de déclaration porte sur des activités qui relèvent du secret professionnel.
S’il est vrai que la règle du secret professionnel doit céder lorsqu’une nécessité l’impose ou lorsqu’une valeur jugée supérieure entre en conflit avec elle, il y a lieu d’observer que l’article 11/6, § 3, du décret du 21 juin 2013, tel qu’il a été inséré par le décret attaqué, établit une levée du secret professionnel absolue et a priori concernant les rapports périodiques relatifs à des dispositifs commercialisables. Dans les travaux préparatoires, cette mesure est justifiée par ‘ le fait que l’obligation de déclaration trimestrielle dans le cas de dispositifs commercialisables ne peut pas être transférée sur un contribuable, celui-ci ne disposant pas des
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informations nécessaires pour effectuer cette déclaration ’ (Doc. parl., Parlement flamand, 2019-2020, n° 322/1, p. 21).
Ainsi qu’il ressort des travaux préparatoires, rien n’empêche toutefois que l’intermédiaire qui, en raison du secret professionnel, ne pourrait pas lui-même remplir l’obligation de déclaration aide le contribuable à satisfaire à l’obligation de déclaration qui lui incombe dans ce cas (ibid.). Il n’apparaît pas pourquoi il serait possible, dans le cadre d’un dispositif sur mesure, de fournir les informations nécessaires au contribuable, mais pas dans le cadre d’un dispositif commercialisable, pour lequel aucun ajustement substantiel n’est nécessaire pour le contribuable, sauf en ce qui concerne des informations dont le contribuable disposera souvent lui-même, ainsi qu’il ressort de l’énumération mentionnée en B.9.2.
B.9.5. Il découle de ce qui précède que l’article 11/6, § 3, du décret du 21 juin 2013, tel qu’il a été inséré par l’article 14 du décret du 26 juin 2020, en ce qu’il prévoit que les avocats ne peuvent pas se prévaloir du secret professionnel en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs commercialisables au sens de l’article 11/4 du décret du 21 juin 2013, n’est pas raisonnablement proportionné à l’objectif poursuivi.
B.9.6. Le premier moyen dans l’affaire n° 7429 est fondé en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs commercialisables ».
B.14.2. L’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, dispose, tout comme l’article 11/6, § 3, du décret flamand du 21 juin 2013, tel qu’il a été inséré par l’article 14 du décret flamand du 26 juin 2020
« modifiant le décret du 21 juin 2013 relatif à la coopération administrative dans le domaine fiscal, en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration », que l’intermédiaire ne peut pas se prévaloir du secret professionnel concernant l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs transfrontières commercialisables. Il ressort des travaux préparatoires de cette disposition que celle-ci est fondée sur la même justification que son pendant flamand :
« […] En parallèle avec l’article 326/7, § 3, du C.I.R. 92, l’article 289bis/7, § 3, du Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe, l’article 146duodecies, § 3, du Code des droits de succession, l’article 211bis/7, § 3, du Code des droits et taxes divers, et l’article 11/6, § 3, du décret flamand du 21 juin 2013 relatif à la coopération administrative dans le domaine fiscal, le Gouvernement propose également que ce secret professionnel ne puisse pas être invoqué concernant l’obligation de déclaration des dispositifs commercialisables qui donnent lieu à un rapport périodique » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2020-2021, n° 137/1, pp. 9 et 10).
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B.14.3. Pour des motifs identiques à ceux qui sont contenus dans l’arrêt n° 111/2023, précité, le septième moyen dans l’affaire n° 7535 est fondé en ce qu’il est dirigé contre l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, en ce qu’il prévoit que l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire ne peut pas se prévaloir du secret professionnel en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs commercialisables au sens de l’article 5/2, § 2, du décret du 12 janvier 2017.
B.15.1. Dans leur septième moyen, les parties requérantes dans l’affaire n° 7535 critiquent également le fait qu’en vertu de l’article 5/2, § 5, du décret du 12 janvier 2017, l’avocat-
intermédiaire qui souhaite invoquer son secret professionnel est tenu d’informer les autres intermédiaires concernés qu’il ne peut satisfaire à son obligation de déclaration. Selon les parties requérantes, il est impossible de satisfaire à cette exigence sans violer malgré tout le secret professionnel.
Le contenu de l’article 5/2, § 5, alinéa 1er, du décret du 12 janvier 2017 est similaire à celui de l’article 11/6, § 1er, alinéa 1er, 1°, du décret flamand du 21 juin 2013. Par son arrêt n° 111/2023, la Cour a jugé, en ce qui concerne l’article 11/6, § 1er, alinéa 1er, 1°, du décret flamand du 21 juin 2013, que si l’autre intermédiaire est le client de l’avocat, le secret professionnel n’empêche pas que l’avocat attire l’attention de son client sur son obligation de déclaration (B.11.3). Quant à la situation dans laquelle l’autre intermédiaire n’est pas le client de l’avocat, la Cour a jugé :
« B.11.2. Comme il est dit en B.5, les informations que les avocats doivent transmettre à l’autorité compétente en ce qui concerne leurs clients sont protégées par le secret professionnel, si ces informations portent sur des activités qui relèvent de leur mission spécifique de défense ou de représentation en justice et de conseil juridique. Le simple fait de recourir à un avocat est soumis au secret professionnel. Il en va a fortiori de même pour l’identité des clients d’un avocat. Les informations protégées par le secret professionnel par rapport à l’autorité le sont également par rapport aux autres acteurs, par exemple les autres intermédiaires concernés.
B.11.3. Comme il est également dit en B.5, il ne peut être dérogé à la règle du secret professionnel que si un motif impérieux d’intérêt général peut le justifier et si la levée du secret est strictement proportionnée. Selon les travaux préparatoires, l’obligation pour un intermédiaire d’informer les autres intermédiaires concernés de façon motivée du fait qu’il se prévaut du secret professionnel et ne satisfera dès lors pas à l’obligation de déclaration serait nécessaire pour répondre aux exigences de la directive et pour assurer que le secret
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professionnel n’empêche pas les déclarations nécessaires (Doc. parl., Parlement flamand, 2019-2020, n° 322/1, pp. 20-21).
Comme l’observe le Gouvernement flamand, lorsque l’avocat peut être considéré comme un intermédiaire au sens de l’article 5, 20°, du décret du 21 juin 2013, son client sera en principe soit le contribuable, soit un autre intermédiaire.
Si le client de l’avocat est un autre intermédiaire, le secret professionnel n’empêche pas que l’avocat attire l’attention de son client sur son obligation de déclaration.
Si le client de l’avocat est le contribuable et que d’autres intermédiaires participent au dispositif devant faire l’objet d’une déclaration, il ressort de l’article 11/7 du décret du 21 juin 2013, tel qu’il a été inséré par l’article 15 du décret du 26 juin 2020, que l’obligation de déclaration incombe aussi en toute hypothèse aux autres intermédiaires concernés, à moins qu’ils puissent apporter la preuve écrite du fait qu’un autre intermédiaire a déjà satisfait à l’obligation de déclaration. Si le secret professionnel de l’avocat l’empêche d’informer un autre intermédiaire du fait qu’il ne satisfera pas à l’obligation de déclaration, il ne peut a fortiori pas prouver par écrit à cet autre intermédiaire qu’il a bien satisfait à l’obligation de déclaration.
Dans ce cas, tout autre intermédiaire concerné demeure automatiquement tenu à l’obligation de déclaration. La question se pose dès lors de savoir si l’obligation qui incombe à l’intermédiaire en vertu de l’article 11/6, § 1er, alinéa 1er, 1°, du décret du 21 juin 2013 est justifiée par un motif impérieux d’intérêt général.
B.11.4. D’après son article 2, le décret attaqué vise à transposer la directive (UE) 2018/822.
L’article 1er, point 2), de la directive (UE) 2018/822 insère dans la directive 2011/16/UE
un article 8bis ter, dont les paragraphes 5 et 6 sont rédigés ainsi :
‘ 5. Chaque État membre peut prendre les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires le droit d’être dispensés de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit national dudit État membre. En pareil cas, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de notifier sans retard à tout autre intermédiaire, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6.
Les intermédiaires ne peuvent avoir droit à une dispense en vertu du premier alinéa que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leurs professions.
6. Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour faire en sorte que, lorsqu’il n’existe pas d’intermédiaire ou que l’intermédiaire notifie l’application d’une dispense en vertu du paragraphe 5 au contribuable concerné ou à un autre intermédiaire, l’obligation de transmettre des informations sur un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration relève de la responsabilité de l’autre intermédiaire qui a été notifié, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, du contribuable concerné ’.
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Il s’ensuit que l’obligation, pour l’intermédiaire qui se prévaut du secret professionnel, d’informer les autres intermédiaires ou le contribuable de leurs obligations de déclaration est imposée au législateur décrétal par la directive précitée. La Cour doit avoir égard à cet élément avant de juger de la compatibilité du décret avec la Constitution.
B.11.5. Il ne relève pas de la compétence de la Cour de se prononcer sur la compatibilité de la directive précitée avec les articles 7 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Avant de statuer quant au fond sur la violation alléguée, la Cour a dès lors, par son arrêt n° 167/2020 précité, posé à la Cour de justice de l’Union européenne la question préjudicielle suivante :
‘ L’article 1er, point 2), de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018
“ modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration ” viole-t-il le droit à un procès équitable garanti par l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en ce que le nouvel article 8bis ter, paragraphe 5, qu’il a inséré dans la directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 “ relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE ”’, prévoit que, si un État membre prend les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires le droit d’être dispensés de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit national dudit État membre, cet État membre est tenu d’obliger lesdits intermédiaires à notifier sans retard à tout autre intermédiaire ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, ses obligations de déclaration, en ce que cette obligation a pour effet qu’un avocat qui agit en tant qu’intermédiaire est tenu de partager avec un autre intermédiaire qui n’est pas son client les informations qui lui sont connues à l’occasion de l’exercice des activités essentielles de sa profession, à savoir la défense ou la représentation en justice du client et le conseil juridique, même en dehors de toute procédure judiciaire ? ’.
B.12. Par son arrêt du 8 décembre 2022 en cause de Orde van Vlaamse balies e.a.
(C-694/20, ECLI:EU:C:2022:963), la grande chambre de la Cour de justice de l’Union européenne a répondu à la question préjudicielle précitée comme suit :
‘ 18. À titre liminaire, il convient de relever que, si la question posée fait référence à l’obligation de notification, prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16
modifiée, tant à l’égard des intermédiaires que, en l’absence d’intermédiaire, à l’égard du contribuable concerné, il résulte néanmoins de la lecture d’ensemble de la demande de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi s’interroge, en réalité, uniquement sur la validité de cette obligation pour autant que la notification doive être faite, par un avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive (ci-après l’“ avocat intermédiaire ”), à un autre intermédiaire qui n’est pas son client.
19. En effet, lorsque la notification prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée est effectuée par l’avocat intermédiaire à son client, que ce dernier soit un autre intermédiaire ou le contribuable concerné, cette notification n’est pas susceptible de mettre en cause le respect des droits et des libertés garantis par les articles 7 et 47 de la
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Charte en raison, d’une part, de l’absence de toute obligation de secret professionnel de l’avocat intermédiaire vis-à-vis de son client et, d’autre part, du fait que, au stade de l’exécution par ce client de ses obligations déclaratives au titre de cette directive, la confidentialité de la relation entre l’avocat intermédiaire et ledit client s’oppose à ce qu’il puisse être exigé de ce dernier qu’il révèle à des tiers et, notamment, à l’administration fiscale l’existence de sa consultation d’un avocat.
20. Il ressort ainsi de la décision de renvoi que, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour, d’examiner la validité, au regard des articles 7 et 47 de la Charte, de l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, en ce que son application par les États membres a pour effet d’imposer à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive, lorsque celui-ci est dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de l’article 8bis ter de ladite directive, en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8bis ter.
21. À cet égard, il importe de rappeler que, conformément à l’article 8bis ter, paragraphe 1, de la directive 2011/16 modifiée, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de transmettre aux autorités compétentes les informations dont ils ont connaissance, qu’ils possèdent ou qu’ils contrôlent concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dans un délai de trente jours.
L’obligation de déclaration prévue à cette disposition s’applique à tous les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration et, donc, tant aux dispositifs sur mesure, définis au point 25 de l’article 3 de la directive 2011/16 modifiée, qu’aux dispositifs commercialisables, définis au point 24 de cet article 3.
22. Il y a lieu de constater que les avocats peuvent, dans l’exercice de leurs activités, être des “ intermédiaires ”, au sens de l’article 3, point 21, de la directive 2011/16 modifiée, en raison du fait qu’ils peuvent pratiquer eux-mêmes des activités de conception, de commercialisation, d’organisation, de mise à disposition aux fins de mise en œuvre ou de gestion de mise en œuvre de dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration ou, à défaut, en raison du fait qu’ils peuvent prêter assistance, aide ou conseil à de telles activités. Les avocats exerçant de telles activités sont ainsi, en principe, soumis à l’obligation de déclaration prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 1, de cette directive.
23. Cependant, aux termes du premier alinéa du paragraphe 5 de l’article 8bis ter de la directive 2011/16 modifiée, chaque État membre peut prendre les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires, et notamment aux avocats intermédiaires, une dispense de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit dudit État membre. En pareil cas, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de notifier sans retard à tout autre intermédiaire, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6 de cet article. Ce paragraphe prévoit que, dans une telle hypothèse, l’obligation de déclaration relève de la responsabilité de l’autre intermédiaire qui a été notifié, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, du contribuable concerné.
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24. Il importe néanmoins de souligner que, en vertu du second alinéa du paragraphe 5 de l’article 8bis ter de la directive 2011/16 modifiée, les intermédiaires ne peuvent bénéficier d’une dispense en vertu du premier alinéa de ce paragraphe 5 que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leur profession, ce qu’il incombe, le cas échéant, aux juridictions nationales de vérifier dans le cadre de l’application de cette législation. Partant, ce n’est que par rapport aux avocats intermédiaires qui agissent effectivement dans de telles limites qu’il convient d’examiner la validité de l’article 8bis ter, paragraphe 5, de cette directive au regard des articles 7 et 47 de la Charte.
25. À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 7 de la Charte, qui reconnaît à toute personne le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications, correspond à l’article 8, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la “ CEDH ”), tandis que l’article 47, qui garantit le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, correspond à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.
26. Conformément à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, qui vise à assurer la cohérence nécessaire entre les droits contenus dans celle-ci et les droits correspondants garantis par la CEDH sans porter atteinte à l’autonomie du droit de l’Union, la Cour doit donc tenir compte, dans l’interprétation qu’elle effectue à propos des droits garantis par les articles 7 et 47
de la Charte, des droits correspondants garantis par l’article 8, paragraphe 1, et par l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH, tels qu’interprétés par la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la " Cour EDH ”), en tant que seuil de protection minimale (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2021, Consob, C-481/19, EU:C:2021:84, points 36 et 37).
27. S’agissant de la validité de l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16
modifiée au regard de l’article 7 de la Charte, il ressort de la jurisprudence de la Cour EDH que l’article 8, paragraphe 1, de la CEDH protège la confidentialité de toute correspondance entre individus et accorde une protection renforcée aux échanges entre les avocats et leurs clients (voir, en ce sens, Cour EDH, arrêt du 6 décembre 2012, Michaud c. France, CE:ECHR:2012:1206JUD001232311, §§ 117 et 118). À l’instar de cette disposition, dont la protection recouvre non seulement l’activité de défense, mais également la consultation juridique, l’article 7 de la Charte garantit nécessairement le secret de cette consultation juridique, et ce tant à l’égard de son contenu que de son existence. En effet, ainsi que l’a relevé la Cour EDH, les personnes qui consultent un avocat peuvent raisonnablement s’attendre à ce que leurs communications demeurent privées et confidentielles [Cour EDH, arrêt du 9 avril 2019, Altay c. Turquie (N° 2), CE:ECHR:2019:0409JUD001123609, § 49]. Partant, hormis des situations exceptionnelles, ces personnes doivent pouvoir légitimement avoir confiance dans le fait que leur avocat ne divulguera à personne, sans leur accord, qu’elles le consultent.
28. La protection spécifique que l’article 7 de la Charte et l’article 8, paragraphe 1, de la CEDH accordent au secret professionnel des avocats, qui se traduit avant tout par des obligations à leur charge, se justifie par le fait que les avocats se voient confier une mission fondamentale dans une société démocratique, à savoir la défense des justiciables (Cour EDH, arrêt du 6 décembre 2012, Michaud c. France, CE:ECHR:2012:1206JUD001232311, §§ 118
et 119). Cette mission fondamentale comporte, d’une part, l’exigence, dont l’importance est reconnue dans tous les États membres, que tout justiciable doit avoir la possibilité de s’adresser en toute liberté à son avocat, dont la profession même englobe, par essence, la tâche de donner, de façon indépendante, des avis juridiques à tous ceux qui en ont besoin et, d’autre part, celle,
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corrélative, de loyauté de l’avocat envers son client (voir, en ce sens, arrêt du 18 mai 1982, AM & S Europe/Commission, 155/79, EU:C:1982:157, point 18).
29. Or, l’obligation que prévoit l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16
modifiée pour l’avocat intermédiaire lorsque celui-ci est, en raison du secret professionnel auquel il est tenu par le droit national, dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de cet article 8bis ter, de notifier sans retard aux autres intermédiaires qui ne sont pas ses clients les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8bis ter comporte nécessairement la conséquence que ces autres intermédiaires acquièrent connaissance de l’identité de l’avocat intermédiaire notifiant, de son appréciation selon laquelle le dispositif en cause doit faire l’objet d’une déclaration ainsi que du fait qu’il est consulté à son sujet.
30. Dans ces conditions et dans la mesure où ces autres intermédiaires n’ont pas forcément connaissance de l’identité de l’avocat intermédiaire et du fait qu’il a été consulté au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, l’obligation de notification, prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, entraîne une ingérence dans le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, garanti à l’article 7 de la Charte.
31. En outre, il convient d’observer que cette obligation de notification induit, indirectement, une autre ingérence dans ce même droit, résultant de la divulgation, par les tiers intermédiaires ainsi notifiés, à l’administration fiscale de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire.
32. En effet, il ressort de l’article 8bis ter, paragraphes 1, 9, 13 et 14, de la directive 2011/16 modifiée que l’identification des intermédiaires figure au nombre des informations à fournir en exécution de l’obligation de déclaration, cette identification faisant l’objet d’un échange d’informations entre les autorités compétentes des États membres. Par conséquent, en cas de notification au titre de l’article 8bis ter, paragraphe 5, de cette directive, les tiers intermédiaires notifiés, ainsi informés de l’identité de l’avocat intermédiaire et de sa consultation au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration et eux-
mêmes non tenus au secret professionnel, devront informer les autorités compétentes visées à l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive non seulement de l’existence de ce dispositif et de l’identité du ou des contribuables concernés, mais encore de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire.
33. Partant, il convient d’examiner si ces ingérences dans le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, garanti à l’article 7 de la Charte, sont susceptibles d’être justifiées.
34. Dans ce contexte, il importe de rappeler que les droits consacrés à l’article 7 de la Charte n’apparaissent pas comme étant des prérogatives absolues, mais doivent être pris en considération par rapport à leur fonction dans la société. En effet, ainsi qu’il ressort de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, celle-ci admet des limitations à l’exercice de ces droits, pour autant que ces limitations soient prévues par la loi, qu’elles respectent le contenu essentiel desdits droits et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elles soient nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union européenne ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2020, Privacy International, C-623/17, EU:C:2020:790, points 63 et 64).
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35. En premier lieu, en ce qui concerne l’exigence selon laquelle toute limitation de l’exercice des droits fondamentaux doit être prévue par la loi, celle-ci implique que l’acte qui permet l’ingérence dans ces droits doit définir lui-même la portée de la limitation de l’exercice du droit concerné, étant précisé, d’une part, que cette exigence n’exclut pas que la limitation en cause soit formulée dans des termes suffisamment ouverts pour pouvoir s’adapter à des cas de figure différents ainsi qu’aux changements de situations. D’autre part, la Cour peut, le cas échéant, préciser, par voie d’interprétation, la portée concrète de la limitation au regard tant des termes mêmes de la réglementation de l’Union en cause que de son économie générale et des objectifs qu’elle poursuit, tels qu’interprétés à la lumière des droits fondamentaux garantis par la Charte (arrêt du 21 juin 2022, Ligue des droits humains, C-817/19, EU:C:2022:491, point 114 et jurisprudence citée).
36. À cet égard, il y a lieu de relever que, d’une part, le paragraphe 5 de l’article 8bis ter de la directive 2011/16 modifiée prévoit expressément l’obligation, pour l’avocat intermédiaire dispensé de l’obligation de déclaration en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier aux autres intermédiaires les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6 de cet article. D’autre part, ainsi qu’il a été constaté aux points 29 et 30 du présent arrêt, l’ingérence dans le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, consacré à l’article 7 de la Charte, est la conséquence directe d’une telle notification par l’avocat à un autre intermédiaire qui n’est pas son client, notamment lorsque celui-ci n’avait, jusqu’au moment de cette notification, pas connaissance de l’identité de cet avocat et de sa consultation au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration.
37. En outre, s’agissant de l’ingérence résultant indirectement de ladite obligation de notification en raison de la divulgation, par les tiers intermédiaires notifiés, de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire à l’administration fiscale, celle-ci est due, ainsi qu’il a été constaté aux points 31 et 32 du présent arrêt, à l’étendue des obligations d’information découlant de l’article 8bis ter, paragraphes 1, 9, 13 et 14, de la directive 2011/16 modifiée.
38. Dans ces conditions, il convient de considérer qu’il est satisfait au principe de légalité.
39. En deuxième lieu, en ce qui concerne le respect du contenu essentiel du droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, garanti à l’article 7 de la Charte, il convient de relever que l’obligation de notification, instaurée par l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, n’induit que de manière limitée la levée, à l’égard d’un tiers intermédiaire et de l’administration fiscale, de la confidentialité des communications entre l’avocat intermédiaire et son client. En particulier, cette disposition ne prévoit pas l’obligation, ni même l’autorisation, pour l’avocat intermédiaire de partager, sans le consentement de son client, des informations relatives à la teneur de ces communications avec d’autres intermédiaires et ces derniers ne seront donc pas en mesure de transmettre de telles informations à l’administration fiscale.
40. Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que l’obligation de notification, prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, porte atteinte au contenu essentiel du droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, consacré à l’article 7 de la Charte.
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41. En troisième lieu, s’agissant du respect du principe de proportionnalité, celui-ci exige que les limitations qui peuvent notamment être apportées par des actes du droit de l’Union à des droits et libertés consacrés dans la Charte ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la satisfaction des objectifs légitimes poursuivis ou du besoin de protection des droits et libertés d’autrui, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante. En outre, un objectif d’intérêt général ne saurait être poursuivi sans tenir compte du fait qu’il doit être concilié avec les droits fondamentaux concernés par la mesure, ce en effectuant une pondération équilibrée entre, d’une part, l’objectif d’intérêt général et, d’autre part, les droits en cause, afin d’assurer que les inconvénients causés par cette mesure ne soient pas démesurés par rapport aux buts visés. Ainsi, la possibilité de justifier une limitation aux droits garantis à l’article 7 de la Charte doit être appréciée en mesurant la gravité de l’ingérence que comporte une telle limitation et en vérifiant que l’importance de l’objectif d’intérêt général poursuivi par cette limitation est en relation avec cette gravité (arrêts du 26 avril 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C-401/19, EU:C:2022:297, point 65, ainsi que du 22 novembre 2022, Luxembourg Business Registers et Sovim, C-37/20 et C-601/20, EU:C:2022:912, point 64).
42. Partant, il y a lieu de vérifier, tout d’abord, que l’obligation de notification, prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, répond à un objectif d’intérêt général reconnu par l’Union. Dans l’affirmative, il convient ensuite de s’assurer, premièrement, qu’elle est apte à réaliser cet objectif, deuxièmement, que l’ingérence dans le droit fondamental au respect des communications entre les avocats et leurs clients qui est susceptible de résulter de cette obligation de notification est limitée au strict nécessaire, en ce sens que l’objectif poursuivi ne pourrait raisonnablement être atteint de manière aussi efficace par d’autres moyens moins attentatoires à ce droit, et, troisièmement, pour autant que tel soit effectivement le cas, que cette ingérence n’est pas disproportionnée par rapport audit objectif, ce qui implique notamment une pondération de l’importance de celui-ci et de la gravité de ladite ingérence (voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2022, Luxembourg Business Registers et Sovim, C-37/20 et C-601/20, EU:C:2022:912, point 66).
43. Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 88 de ses conclusions, la modification apportée à la directive 2011/16 par la directive 2018/822 s’inscrit dans le cadre d’une coopération fiscale internationale de lutte contre la planification fiscale agressive qui se concrétise par un échange d’informations entre États membres. À cet égard, il ressort notamment des considérants 2, 4, 8 et 9 de la directive 2018/822 que les obligations de déclaration et de notification, mises en place par l’article 8bis ter de la directive 2011/16
modifiée, ont pour objectif de contribuer à la prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales.
44. Or, la lutte contre la planification fiscale agressive et la prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales constituent des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, susceptibles de permettre qu’une limitation soit apportée à l’exercice des droits garantis par l’article 7 de celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2020, État luxembourgeois (Droit de recours contre une demande d’information en matière fiscale), C-245/19 et C-246/19, EU:C:2020:795, point 87].
45. En ce qui concerne le point de savoir si l’obligation de notification, prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, est apte et nécessaire à la
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réalisation desdits objectifs, les gouvernements français et letton soutiennent, en substance, qu’une telle notification permettrait notamment de sensibiliser les autres intermédiaires à leur devoir de se conformer à l’obligation de déclaration et ainsi d’éviter que ces autres intermédiaires ne soient pas informés du fait que l’obligation de déclaration du dispositif transfrontière leur est transférée en application de l’article 8bis ter, paragraphe 6, de la directive 2011/16 modifiée. Ainsi, selon ces gouvernements, à défaut d’une obligation de notification dans le chef de l’avocat intermédiaire, le dispositif transfrontière risquerait de n’être aucunement déclaré, et cela en méconnaissance des objectifs poursuivis par cette directive.
46. Or, à supposer même que l’obligation de notification, instaurée par l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, soit effectivement apte à contribuer à la lutte contre la planification fiscale agressive et à la prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales, force est de constater qu’elle ne saurait, toutefois, être considérée comme étant strictement nécessaire pour réaliser ces objectifs et, notamment, pour assurer que les informations concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration soient transmises aux autorités compétentes.
47. En effet, premièrement, les obligations de déclaration incombant aux intermédiaires sont clairement énoncées dans la directive 2011/16 modifiée, en particulier à son article 8bis ter, paragraphe 1. En vertu de cette disposition, tous les intermédiaires sont, en principe, tenus de transmettre aux autorités compétentes les informations dont ils ont connaissance, qu’ils possèdent ou qu’ils contrôlent, concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration. En outre, conformément à l’article 8bis ter, paragraphe 9, premier alinéa, de cette directive, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour exiger que, lorsqu’il existe plus d’un intermédiaire, l’obligation de transmettre des informations incombe à l’ensemble des intermédiaires participant à un même dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration. Aucun intermédiaire ne saurait donc utilement faire valoir qu’il ignorait les obligations de déclaration auxquelles il est directement et individuellement soumis, du seul fait de sa qualité d’intermédiaire.
48. Deuxièmement, quant à l’argument du gouvernement letton selon lequel l’obligation de notification réduirait le risque que les autres intermédiaires se fient au fait que l’avocat intermédiaire déclarera les informations requises aux autorités compétentes et qu’ils s’abstiennent pour ce motif d’effectuer eux-mêmes une déclaration, il convient de constater, d’une part, que, dans la mesure où la consultation d’un avocat est soumise au secret professionnel, les autres intermédiaires n’auront, ainsi qu’il a été relevé au point 30 du présent arrêt, pas forcément connaissance de l’identité de l’avocat intermédiaire et de sa consultation au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, ce qui, en pareil cas, exclut d’emblée un tel risque.
49. D’autre part, même dans l’hypothèse contraire où les autres intermédiaires ont une telle connaissance, il n’y a pas lieu de craindre que ceux-ci se fient, sans vérification, à ce que l’avocat intermédiaire effectue la déclaration requise, dès lors que l’article 8bis ter, paragraphe 9, deuxième alinéa, de la directive 2011/16 modifiée précise qu’un intermédiaire n’est dispensé de l’obligation de transmettre des informations qu’à la condition qu’il puisse prouver que ces mêmes informations ont déjà été transmises par un autre intermédiaire. Par ailleurs, en prévoyant expressément, à son article 8bis ter, paragraphe 5, que le secret professionnel peut conduire à une dispense de l’obligation de déclaration, la directive 2011/16
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modifiée fait de l’avocat intermédiaire une personne dont les autres intermédiaires ne peuvent, a priori, attendre aucune initiative de nature à les décharger de leurs propres obligations de déclaration.
50. Troisièmement, il convient de rappeler que tout intermédiaire qui, en raison du secret professionnel auquel il est tenu par le droit national, est dispensé de l’obligation de déclaration prévue au paragraphe 1 de l’article 8bis ter de la directive 2011/16 modifiée, reste néanmoins tenu de notifier sans retard à son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 de cet article.
51. Quatrièmement, s’agissant de la divulgation, par les tiers intermédiaires notifiés, de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire à l’administration fiscale, cette divulgation n’apparaît pas non plus strictement nécessaire à la poursuite des objectifs de la directive 2011/16 modifiée de lutte contre la planification fiscale agressive et de prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales.
52. En effet, d’une part, l’obligation de déclaration incombant aux autres intermédiaires non soumis au secret professionnel et, à défaut de tels intermédiaires, celle incombant au contribuable concerné garantissent, en principe, que l’administration fiscale soit informée des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration. En outre, l’administration fiscale peut, après avoir reçu une telle information, demander au besoin des informations supplémentaires relatives au dispositif en question directement au contribuable concerné, lequel pourra alors s’adresser à son avocat pour qu’il l’assiste, ou effectuer un contrôle de la situation fiscale dudit contribuable.
53. D’autre part, compte tenu de la dispense de déclaration prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, la divulgation à l’administration fiscale de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire ne permettra, en tout état de cause, pas à cette administration d’exiger de celui-ci des informations sans le consentement de son client.
54. Lors de l’audience devant la Cour, la Commission a toutefois soutenu, en substance, que cette divulgation de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire serait nécessaire pour permettre à l’administration fiscale de vérifier que celui-ci invoque de manière justifiée le secret professionnel.
55. Cet argument ne saurait être retenu.
56. Certes, ainsi qu’il a été relevé au point 24 du présent arrêt, le second alinéa du paragraphe 5 de l’article 8bis ter de la directive 2011/16 modifiée précise que les avocats intermédiaires ne peuvent avoir droit à une dispense en vertu du premier alinéa de ce paragraphe que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leur profession. Toutefois, l’objectif des obligations de déclaration et de notification, prévues à l’article 8bis ter de cette directive, est non pas de contrôler que les avocats intermédiaires agissent dans ces limites, mais de lutter contre les pratiques fiscales potentiellement agressives et de prévenir le risque d’évasion et de fraude fiscales, en assurant que les informations concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration soient transmises aux autorités compétentes.
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57. Or, ainsi qu’il résulte des points 47 à 53 du présent arrêt, ladite directive assure une telle information de l’administration fiscale, sans que la divulgation à celle-ci de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire soit nécessaire à cet effet.
58. Dans ces conditions, l’éventualité que des avocats intermédiaires puissent invoquer à tort le secret professionnel pour se soustraire à leur obligation de déclaration ne saurait permettre de considérer comme étant strictement nécessaire l’obligation de notification, prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 5, de cette directive, et la divulgation à l’administration fiscale de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire notifiant qui en est la conséquence.
59. Il résulte des considérations qui précèdent que l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée viole le droit au respect des communications entre l’avocat et son client, garanti à l’article 7 de la Charte, en ce qu’il prévoit, en substance, que l’avocat intermédiaire, soumis au secret professionnel, est tenu de notifier à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent.
60. En ce qui concerne la validité de l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée au regard de l’article 47 de la Charte, il y a lieu de rappeler que le droit à un procès équitable, garanti à cette dernière disposition, est constitué de divers éléments.
Il comprend, notamment, les droits de la défense, le principe de l’égalité des armes, le droit d’accès aux tribunaux et le droit d’accès à un avocat, tant en matière civile qu’en matière pénale.
L’avocat ne serait pas en mesure d’assurer sa mission de conseil, de défense et de représentation de son client de manière adéquate, et celui-ci serait par conséquent privé des droits qui lui sont conférés par l’article 47 de la Charte, si l’avocat, dans le cadre d’une procédure judiciaire ou de sa préparation, était obligé de coopérer avec les pouvoirs publics en leur transmettant des informations obtenues lors des consultations juridiques ayant eu lieu dans le cadre d’une telle procédure (voir, en ce sens, arrêt du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a., C-305/05, EU:C:2007:383, points 31 et 32).
61. Il ressort de ces considérations que les exigences découlant du droit à un procès équitable impliquent, par définition, un lien avec une procédure judiciaire (voir, en ce sens, arrêt du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a., C-305/05, EU:C:2007:383, point 35).
62. Or, force est de constater qu’un tel lien n’est pas établi en l’occurrence.
63. En effet, il résulte des dispositions de l’article 8bis ter, paragraphes 1 et 5, de la directive 2011/16 modifiée et, notamment, des délais prévus à ces dispositions que l’obligation de notification naît à un stade précoce, au plus tard lorsque le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration vient d’être finalisé et est prêt à être mis en œuvre, donc en dehors du cadre d’une procédure judiciaire ou de sa préparation.
64. Ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 41 de ses conclusions, à ce stade précoce, l’avocat intermédiaire n’agit pas en tant que défenseur de son client dans un litige et la seule circonstance que les conseils de l’avocat ou le dispositif transfrontière objet de sa consultation puissent donner lieu à un contentieux à un stade ultérieur ne signifie pas que l’intervention de l’avocat s’est opérée dans le cadre ou aux fins du droit de la défense de son client.
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65. Dans ces conditions, il convient de considérer que l’obligation de notification se substituant, pour l’avocat intermédiaire tenu au secret professionnel, à l’obligation de déclaration prévue à l’article 8bis ter, paragraphe 1, de la directive 2011/16 modifiée ne comporte pas d’ingérence dans le droit à un procès équitable, garanti à l’article 47 de la Charte.
66. Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre à la question posée que l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée est invalide au regard de l’article 7 de la Charte, en ce que son application par les États membres a pour effet d’imposer à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive, lorsque celui-ci est dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de l’article 8bis ter de ladite directive, en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8bis ter ’.
B.13.1. Il ressort de cet arrêt que l’article 8bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16/UE, inséré par la directive (UE) 2018/822, viole l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en ce que son application par les États membres a pour effet d’imposer à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de la directive 2011/16/UE, lorsque celui-ci est dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de l’article 8bis ter de cette directive, en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 de l’article 8bis ter.
Il s’ensuit que le deuxième moyen, en sa deuxième branche, dans l’affaire n° 7429 est fondé en ce qu’il est dirigé contre l’obligation qui incombe, en vertu de l’article 11/6, § 1er, alinéa 1er, 1°, du décret du 21 juin 2013, à l’avocat-intermédiaire de notifier sans retard aux autres intermédiaires qui ne sont pas ses clients leurs obligations de déclaration ».
B.15.2. Pour des motifs identiques à ceux qui sont contenus dans l’arrêt n° 111/2023, précité, le septième moyen dans l’affaire n° 7535 est fondé en ce qu’il est dirigé contre l’obligation qui incombe à l’avocat-intermédiaire, en vertu de l’article 5/2, § 5, alinéa 1er, du décret du 12 janvier 2017, de notifier sans retard aux autres intermédiaires qui ne sont pas ses clients leurs obligations de déclaration.
B.15.3. Il y a lieu d’annuler l’article 5/2, § 5, alinéa 1er, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, en ce qu’il impose à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire une obligation d’information envers un autre intermédiaire qui n’est pas son client.
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En ce qui concerne le second moyen dans l’affaire n° 7581
B.16. Le second moyen dans l’affaire n° 7581 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11 et 22 de la Constitution, des articles 7, 8, 20 et 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 1er et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, lus en combinaison avec les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec les articles 47, 48, 49, 51 et 52 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec les principes généraux du droit en matière de droits de la défense et avec l’article 6, paragraphe 2, du TUE.
La première branche du second moyen dans l’affaire n° 7581 soulève, d’une part, le même grief que celui qui est examiné en B.15.1 à B.15.3 et, d’autre part, le grief qui est examiné en B.7.1 à B.7.3.
La deuxième branche du second moyen dans l’affaire n° 7581 soulève le même grief que celui qui est examiné en B.12.1 à B.14.3.
La troisième branche du second moyen dans l’affaire n° 7581 critique l’absence de règles distinctes pour les avocats. L’examen de cette branche ne saurait aboutir à un constat de violation plus étendu que ceux qui sont mentionnés en B.14.3 et en B.15.2.
En ce qui concerne le deuxième moyen dans l’affaire n° 7585
B.17. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 prend un deuxième moyen de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 5 du TUE et avec l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle reproche au décret du 12 novembre 2020 d’être basé sur une directive qui viole les principes fondamentaux du droit de l’Union européenne. Le moyen rejoint les deuxième et troisième moyens dans l’affaire n° 7535. Comme il a été jugé en B.6.4 et en B.7.3 à l’égard de ces moyens, il y a également lieu de surseoir à statuer sur le deuxième moyen dans l’affaire n° 7585 dans l’attente
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de la réponse de la Cour de justice aux première et cinquième questions préjudicielles qui lui ont été posées par l’arrêt n° 103/2022.
En ce qui concerne le troisième moyen dans l’affaire n° 7585
B.18.1. Le troisième moyen dans l’affaire n° 7585 est pris de la violation, par le décret du 12 novembre 2020, des articles 10, 11 et 22 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. La partie requérante dans l’affaire n° 7585 fait valoir que, sans qu’existe une justification raisonnable, les dispositions attaquées font naître une différence de traitement entre les intermédiaires, selon qu’ils collaborent avec d’autres intermédiaires ou non.
B.18.2. En ce qui concerne la déclaration individuelle initiale relative à un dispositif commercialisable, il y a lieu de constater que, comme il est dit en B.13.2, les informations à transmettre lors de cette déclaration ne sont pas couvertes par le secret professionnel.
B.18.3. En ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative à un dispositif commercialisable, il y a lieu de constater que, comme il est dit en B.14.1, il n’est pas exclu que cette obligation de déclaration porte sur des activités qui relèvent du secret professionnel.
Pour les motifs mentionnés en B.14.2 et B.14.3, la Cour a jugé qu’il n’est pas raisonnablement justifié que les avocats ne puissent pas se prévaloir du secret professionnel en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs commercialisables.
S’il est vrai que le secret professionnel de l’avocat, en ce qu’il est un élément fondamental du droit à un procès équitable, se distingue de celui d’autres dépositaires du secret professionnel et s’il est vrai que les avocats sont soumis à un statut particulier et accomplissent une mission spécifique dans le cadre de l’administration de la justice, il y a lieu de constater qu’en l’espèce, les motifs mentionnés en B.14.2 et B.14.3 valent également à l’égard des autres intermédiaires qui sont tenus au secret professionnel.
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Par conséquent, l’inconstitutionnalité constatée en B.14.3 concerne tous les intermédiaires qui sont tenus au secret professionnel.
Il y a lieu d’annuler l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du décret du 12 novembre 2020, en ce qu’il prévoit que l’intermédiaire qui est tenu au secret professionnel pénalement sanctionné ne peut pas se prévaloir du secret professionnel en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs commercialisables au sens de l’article 5/2, § 2, du décret du 12 janvier 2017.
B.19.1. En ce qui concerne l’obligation, pour chaque intermédiaire qui invoque le secret professionnel, d’informer les autres intermédiaires qui ne sont pas ses clients de leurs obligations de déclaration, la Cour a jugé, par son arrêt n° 103/2022, qu’il ne pouvait pas être statué sur ce moyen avant de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l’Union européenne :
« L’article 1er, point 2), de la directive (UE) 2018/822 précitée viole-t-il le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que le nouvel article 8bis ter, paragraphe 5, qu’il a inséré dans la directive 2011/16/UE précitée, prévoit que, si un État membre prend les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires le droit d’être dispensés de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit national dudit État membre, cet État membre est tenu d’obliger lesdits intermédiaires à notifier sans retard à tout autre intermédiaire ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, ses obligations de déclaration, en ce que cette obligation a pour effet qu’un intermédiaire qui est soumis au secret professionnel pénalement sanctionné en vertu du droit dudit État membre est tenu de partager avec un autre intermédiaire qui n’est pas son client les informations qui lui sont connues à l’occasion de l’exercice de sa profession ? ».
B.19.2. La question précitée se pose également dans le cadre du moyen présentement examiné. Dans l’attente de la réponse de la Cour de justice à la quatrième question préjudicielle qui lui a été posée par l’arrêt n° 103/2022, il y a lieu de surseoir à statuer sur le moyen mentionné en B.18.1 en ce qu’il porte sur l’obligation, pour l’intermédiaire qui se prévaut d’un secret professionnel pénalement sanctionné, autre que celui de l’avocat, d’informer les autres intermédiaires qui ne sont pas ses clients de leurs obligations de déclaration.
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Par ces motifs,
la Cour
- annule l’article 9, alinéa 2, du décret de la Communauté française du 12 novembre 2020
« modifiant le décret du 12 janvier 2017 concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal, en vue de la transposition de la Directive européenne 2018/822/UE sur la coopération administrative »;
- annule l’article 5/2, § 12, du décret de la Communauté française du 12 janvier 2017
« concernant la coopération administrative dans le domaine fiscal », tel qu’il a été inséré par l’article 5 du même décret du 12 novembre 2020;
- annule l’article 5/2, § 5, alinéa 1er, du même décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du même décret du 12 novembre 2020, en ce qu’il impose à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire une obligation d’information envers un autre intermédiaire qui n’est pas son client;
- annule l’article 5/2, § 5, alinéa 3, du même décret du 12 janvier 2017, tel qu’il a été inséré par l’article 5 du même décret du 12 novembre 2020, en ce qu’il prévoit que l’intermédiaire qui est tenu au secret professionnel pénalement sanctionné ne peut pas se prévaloir du secret professionnel en ce qui concerne l’obligation de déclaration périodique relative aux dispositifs commercialisables au sens de l’article 5/2, § 2, du même décret du 12 janvier 2017;
- sursoit à statuer sur les griefs mentionnés en B.6.1, B.7.1, B.8.1, B.9.1, B.17 et B.18.1, dans l’attente de la réponse de la Cour de justice de l’Union européenne aux questions préjudicielles qui lui ont été posées par l’arrêt n° 103/2022 du 15 septembre 2022
(ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.103).
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Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 11 janvier 2024.
Le greffier, Le président,
N. Dupont P. Nihoul