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20/06/2024 | BELGIQUE | N°62/2024

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 20 juin 2024, 62/2024


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 62/2024
du 20 juin 2024
Numéro du rôle : 7955
En cause : les questions préjudicielles relatives à l’article 2.3.14 du Code civil, posées par le tribunal de la famille du Tribunal de première instance de Liège, division de Verviers.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents Pierre Nihoul et Luc Lavrysen, et des juges Thierry Giet, Joséphine Moerman, Michel Pâques, Yasmine Kherbache, Danny Pieters, Sabine de Bethune, Emmanuelle Bribosia, Willem Verrijdt, Kattrin Jadin et Magali Plovie, assistée du greffier Frank Mee

rsschaut, présidée par le président Pierre Nihoul,
après en avoir délibéré, rend...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 62/2024
du 20 juin 2024
Numéro du rôle : 7955
En cause : les questions préjudicielles relatives à l’article 2.3.14 du Code civil, posées par le tribunal de la famille du Tribunal de première instance de Liège, division de Verviers.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents Pierre Nihoul et Luc Lavrysen, et des juges Thierry Giet, Joséphine Moerman, Michel Pâques, Yasmine Kherbache, Danny Pieters, Sabine de Bethune, Emmanuelle Bribosia, Willem Verrijdt, Kattrin Jadin et Magali Plovie, assistée du greffier Frank Meersschaut, présidée par le président Pierre Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet des questions préjudicielles et procédure
Par jugement du 16 février 2023, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 20 mars 2023, le Tribunal de première instance de Liège, division de Verviers, a posé les questions préjudicielles suivantes :
« N’existe-t-il pas une discrimination contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution entre la situation des conjoints ayant opté pour un régime de séparation de biens et celle des personnes ayant souscrit une déclaration de cohabitation légale en ce que les premiers peuvent, compte tenu du libellé de l’article 2.3.14 du Code civil solliciter l’attribution préférentielle du bien acquis en indivision et ayant servi au logement de la famille tandis que les seconds ne le peuvent alors que pendant la vie commune la protection du même logement est libellée en des termes identiques pour ce qui concerne ces deux catégories de personnes (l’article 1477 § 2 de l’Ancien Code civil renvoyant expressément à l’article 215 du même Code) et que ces deux catégories de personnes, victimes d’un fait visé à l’article 375, 398 à 400, 402, 403 ou 405 du Code pénal ou d’une tentative de commettre un fait visé à l’article 375, 393, 394 ou 397 du même Code, ou s’il existe des indications sérieuses de tels comportements, bénéficient lors de la rupture des mêmes prérogatives dans le cadre de l’attribution provisoire du même logement (article 1253ter/5 du Code judiciaire) ?
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S’il devait être répondu positivement à cette question, le tribunal souhaite que la Cour constitutionnelle examine la question suivante :
L’article 2.3.14 § 2 deuxième phrase du Code civil ne viole-t-il pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, si le ministère public opte pour une médiation pénale, la victime d’un fait visé aux articles 375, 398 à 400, 402, 405, 409 §§ 1er à 3 et 5 et 422bis du Code pénal ou d’une tentative de commission d’un fait visé aux articles 375, 393 à 3978 [lire : 397], 401, 404
et 409 § 4 du même Code ne bénéficie pas de la faculté de s’appuyer sur la seconde phrase de la disposition légale, à défaut pour elle de pouvoir se prévaloir d’une décision coulée en force de chose jugée ? ».
Des mémoires ont été introduits par :
- S.F., assistée et représentée par Me Dominique Legrand, avocat au barreau de Verviers;
- A.V., assisté et représenté par Me Patrick Raxhon et Me Thierry Delobel, avocats au barreau de Verviers;
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me Sébastien Depré, Me Evrard de Lophem et Me Nissim Picard, avocats au barreau de Bruxelles.
Par ordonnance du 27 mars 2024, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs Magali Plovie et Willem Verrijdt, a décidé que l’affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos à l’expiration de ce délai et l’affaire serait mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. Les faits et la procédure antérieure
Les parties devant la juridiction a quo, un homme et une femme, ont signé une déclaration de cohabitation légale en 2010. Elles ont acquis la même année un bien qui leur a servi de logement familial. Elles ont trois enfants.
En 2019 et en 2021, la cohabitante, partie demanderesse devant la juridiction a quo, a déposé deux plaintes à la police pour des faits de violence conjugale. À la suite de la première plainte, le ministère public a envoyé la partie défenderesse devant la juridiction a quo en médiation pénale.
Les parties ont chacune saisi le tribunal de la famille afin de voir fixées des mesures. Celui-ci a joint les procédures, il a statué quant aux mesures et il a désigné un notaire pour procéder aux opérations de liquidation et de partage du patrimoine indivis.
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Le notaire estime que, dans le contexte législatif actuel, aucune des parties ne peut obtenir l’attribution préférentielle du logement familial.
À la demande de la partie demanderesse, le tribunal de la famille pose la première question préjudicielle reproduite plus haut. Il pose de sa propre initiative la seconde question préjudicielle. Il estime que la première question préjudicielle est indispensable à la solution du litige, dès lors qu’il n’est pas démontré que la partie demanderesse devant la juridiction a quo ne pourrait pas se prévaloir du mécanisme de l’attribution préférentielle « indépendamment de la question des violences conjugales ».
III. En droit
–A–
A.1.1. La partie défenderesse devant la juridiction a quo soutient que les dispositions en cause sont constitutionnelles. En ce qui concerne la première question préjudicielle, la partie défenderesse devant la juridiction a quo estime que la partie demanderesse devant la juridiction a quo demande l’attribution du logement familial en prétextant l’existence de violences conjugales dans une intention dilatoire. La partie défenderesse devant la juridiction a quo rappelle (1) que les articles 1447 à 1469, puis l’article 1389/2, § 1er, de l’ancien Code civil excluaient les cohabitants légaux de l’attribution préférentielle, (2) que le législateur a voulu établir un régime juridique différent pour les cohabitants légaux et pour les époux et (3) que la cohabitation légale peut également couvrir d’autres situations de vie que la situation d’un couple. Par son arrêt n° 28/2013 du 7 mars 2013
(ECLI:BE:GHCC:2013:ARR.028), la Cour a jugé que la différence de traitement entre les époux mariés sous le régime de la communauté et les époux mariés sous le régime de la séparation de biens, résultant du fait que les articles 1447 et 1469 de l’ancien Code civil réservaient l’attribution préférentielle à la première catégorie d’époux, n’était pas discriminatoire. Si le législateur a entre-temps étendu l’attribution préférentielle à la seconde catégorie d’époux, cela ne signifie pas qu’il doit en aller de même pour les personnes qui ont choisi de vivre sous le régime de la cohabitation légale. Selon la partie défenderesse devant la juridiction a quo, la différence entre les personnes qui choisissent de se marier et celles qui optent pour la cohabitation légale est plus profonde que la différence qui existait entre les époux mariés sans contrat de mariage et ceux mariés avec contrat de mariage. La partie défenderesse devant la juridiction a quo expose que l’article 1253ter/5 du Code judiciaire concerne la jouissance de la résidence conjugale à titre de mesures provisoires et non l’attribution préférentielle de celle-ci avec cession du droit de propriété.
A.1.2. En ce qui concerne la seconde question préjudicielle, la partie défenderesse devant la juridiction a quo fait valoir que, premièrement, l’exigence d’une décision coulée en force de chose jugée résulte de la loi du 28 janvier 2003 « visant à l’attribution du logement familial au conjoint ou au cohabitant légal victime d’actes de violence physique de son partenaire, et complétant l’article 410 du Code pénal » (ci-après : la loi du 28 janvier 2003). Ce choix du législateur a été justifié dans les travaux préparatoires. Deuxièmement, la partie défenderesse devant la juridiction a quo observe que le fait qu’il y ait eu une médiation pénale n’empêche pas la partie demanderesse devant la juridiction a quo d’introduire une citation directe devant le tribunal correctionnel ou de se constituer partie civile devant le juge d’instruction. Troisièmement, aucune reconnaissance de la responsabilité pénale n’est exigée pour se lancer dans le processus de médiation pénale visé à l’article 216ter du Code d’instruction criminelle. Quatrièmement, la partie défenderesse devant la juridiction a quo rappelle qu’en matière pénale, la présomption d’innocence prévaut et que le doute bénéficie au prévenu. Elle conteste en l’espèce les faits de « viol technique » et l’existence de toute infraction de son fait. Elle soutient que « les deux parties en sont venues aux mains » et qu’elle a respecté la procédure de médiation pénale. Elle conclut que le critère de l’existence ou non d’une décision coulée en force jugée n’est pas discriminatoire, en particulier dans les circonstances de l’espèce.
A.2.1. Pour la partie demanderesse devant la juridiction a quo, les propos de la partie défenderesse devant la juridiction a quo sont choquants et attestent qu’elle n’a pas pris conscience de la gravité des faits. La partie
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demanderesse devant la juridiction a quo conteste que les violences aient été réciproques. Elle observe à cet égard que la partie défenderesse devant la juridiction a quo n’a pas déposé plainte contre elle.
En ce qui concerne la première question préjudicielle, la partie demanderesse devant la juridiction a quo soutient que l’article 2.3.14 du Code civil s’applique. Elle estime que les circonstances et le droit civil belge ont fortement évolué depuis l’arrêt de la Cour n° 28/2013, précité. Elle fait valoir que, depuis la réforme de 2018, les époux sont mieux protégés que les cohabitants légaux, en raison du choix du législateur d’avoir étendu l’attribution préférentielle et non en raison du choix par les époux de leur régime matrimonial. Selon la partie demanderesse devant la juridiction a quo, il n’est pas justifié que, durant la vie commune, le logement principal de la famille d’un couple de cohabitants légaux bénéficie de la même protection que celui d’un couple marié et que ce ne soit plus le cas au moment de la séparation. Partant, la différence de traitement en cause est dépourvue de justification raisonnable. Cette différence de traitement est d’autant moins justifiée que les couples mariés et les couples cohabitants légaux sont traités de la même manière pour l’attribution de la jouissance de l’immeuble commun en vertu de l’article 1253ter/5 du Code judiciaire.
La partie demanderesse devant la juridiction a quo fait valoir, en outre, que la lutte contre les violences conjugales est une priorité pour le législateur et pour les autorités judiciaires. Se référant à la doctrine et à la jurisprudence, elle soutient que la portée de la disposition en cause doit être définie par l’objectif qu’elle poursuit, à savoir la protection des personnes victimes de violences.
A.2.2. En ce qui concerne la seconde question préjudicielle, la partie demanderesse devant la juridiction a quo fait valoir qu’il ressort de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle qu’une médiation pénale ne peut avoir lieu que si le suspect est en aveu, « à savoir [s’il] s’[est] reconnu coupable des faits dont il est accusé ». Il s’ensuit que l’objectif de respecter le principe de la présomption d’innocence qui sous-tend l’article 2.3.14 du Code civil est tout autant atteint par la mise en œuvre d’une médiation pénale que par l’obtention d’une décision coulée en force de chose jugée. Dès lors que la médiation pénale est un mode alternatif de règlement des conflits qui a été introduit pour assurer une réaction répressive rapide et pour renforcer la confiance de la société et de la victime en la justice, il serait paradoxal que le choix d’une médiation pénale ait pour conséquence de priver la victime de violences de la protection prévue par la disposition en cause. La partie demanderesse devant la juridiction a quo conclut que l’article 2.3.14, § 2, seconde phrase, du Code civil, dans l’interprétation selon laquelle la victime de violences conjugales ne peut pas bénéficier de l’attribution préférentielle du logement familial si le ministère public opte pour une médiation pénale, viole les articles 10 et 11 de la Constitution. Elle estime que la même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution si elle est interprétée en ce sens que la victime de violences conjugales peut bénéficier de l’attribution préférentielle du logement familial lorsque le ministère public opte pour une médiation pénale « car cette médiation implique, de la part de l’auteur des violences, un aveu des faits qui lui sont reprochés, ce qui équivaut au prononcé d’une décision de condamnation coulée en force de chose jugée ».
A.3.1. En ce qui concerne la première question préjudicielle, le Conseil des ministres fait valoir que le mariage, la cohabitation légale et la cohabitation de fait sont des formes de vie commune qui ont des conséquences juridiques différentes. Il observe qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que des différences de traitement entre ces différents types d’union peuvent être raisonnablement justifiées.
Le Conseil des ministres expose, d’une part, que la loi du 28 janvier 2003 prévoit, à titre de mesure provisoire, l’attribution préférentielle de la jouissance du logement familial en cas de violences conjugales. Cette règle est applicable aux époux mariés sous le régime de la communauté de biens, aux époux mariés sous le régime de la séparation de biens et aux cohabitants légaux. D’autre part, en vertu de la même loi, l’attribution préférentielle de l’immeuble après le divorce s’appliquait, au départ, uniquement aux époux mariés sous le régime de la communauté de biens. Le législateur a maintenu ce choix, après avoir été interpellé sur ce point par la section de législation du Conseil d’État. Par son arrêt n° 28/2013, la Cour a jugé que la différence de traitement qui en résultait entre les époux mariés sous le régime de la communauté de biens et les époux mariés sous le régime de la séparation de biens était raisonnablement justifiée. Le fait que les époux mariés sous le régime de la communauté de biens et les époux mariés sous le régime de la séparation de biens bénéficient d’une protection de leur logement pendant la vie commune (article 215 de l’ancien Code civil) n’a pas empêché cette appréciation de la Cour. Selon le Conseil des ministres, le fait que les cohabitants légaux bénéficient de la même protection du logement durant la cohabitation légale (l’article 1477, § 2, de l’ancien Code civil, renvoyant à l’article 215 du même Code) n’est pas non plus de nature à rendre la différence de traitement visée par la première question préjudicielle, entre les
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cohabitants légaux et les époux mariés sous le régime de la séparation de biens, incompatible avec le principe d’égalité et de non-discrimination.
La loi du 22 juillet 2018 « modifiant le Code civil et diverses autres dispositions en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant la loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités et modifiant diverses autres dispositions en cette matière » a étendu l’attribution préférentielle du logement en cas de divorce aux époux mariés sous le régime de la séparation de biens. Se référant à l’avis de la section de législation du Conseil d’État, le Conseil des ministres estime que le fait de ne pas étendre aux cohabitants légaux l’attribution préférentielle du logement familial relève d’un choix en opportunité du législateur. Par analogie avec ce que la Cour a jugé dans son arrêt n° 69/2018 du 7 juin 2018
(ECLI:BE:GHCC:2018:ARR.069), le Conseil des ministres conclut que la différence de traitement qui en résulte entre les cohabitants légaux et les époux mariés sous le régime de la séparation de biens est raisonnablement justifiée.
A.3.2. En ce qui concerne la seconde question préjudicielle, le Conseil des ministres soutient à titre principal qu’il n’y a pas lieu d’y répondre, eu égard à la réponse négative qu’il suggère d’apporter à la première question préjudicielle. À titre subsidiaire, il estime que la seconde question préjudicielle est irrecevable, à défaut de mentionner les catégories de personnes qu’elle compare. Il soutient que la différence de traitement est en tout état de cause justifiée, dès lors que, d’une part, la condition selon laquelle la médiation pénale est possible si l’infraction ne paraît pas de nature à entraîner une peine de plus de deux ans d’emprisonnement correctionnel principal ou une peine plus lourde permet de faire sortir un certain nombre de cas de violences conjugales du champ d’application de la médiation pénale et, par extension, de l’impossibilité d’appliquer la règle de l’attribution préférentielle du logement à l’époux victime de ces violences. D’autre part, il ressort des travaux préparatoires que l’exigence d’une décision coulée en force de chose jugée vise à attribuer définitivement le logement uniquement aux victimes de violences conjugales lorsque la culpabilité de leur auteur est établie avec certitude. La culpabilité du prévenu n’est pas établie avec certitude en cas de médiation pénale, dans le cadre de laquelle le prévenu se limite à reconnaître sa responsabilité civile. Le Conseil des ministres considère que la mesure en cause est la seule qui permet de réaliser l’objectif du législateur et qu’elle est proportionnée à cet objectif.
-B-
B.1.1. L’article 2.3.14 du Code civil, intitulé « Attribution préférentielle en cas de divorce », dispose :
« § 1er. Lorsque le régime matrimonial prend fin par le divorce sur la base de l’article 229
de l’ancien Code civil, par la séparation de corps ou par la séparation de biens judiciaire, chacun des époux peut au cours des opérations de liquidation, demander au tribunal de la famille de faire application à son profit des dispositions visées à l’article 2.3.13.
§ 2. Le tribunal statue en considération des intérêts que chacun des époux peut faire valoir et en tenant compte des capacités financières de celui qui, le cas échéant, devra payer la soulte.
Il est fait droit, sauf circonstances exceptionnelles, à la demande formulée par l’époux qui a été victime d’un fait visé aux articles 375, 398 à 400, 402, 403, 405, 409, §§ 1er à 3 et 5, et 422bis du Code pénal ou d’une tentative de commission d’un fait visé aux articles 375, 393 à 397, 401, 404 et 409, § 4, du même Code, si l’autre époux a été reconnu coupable de ce chef comme auteur, coauteur ou complice par décision coulée en force de chose jugée ».
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L’article 2.3.13 du Code civil, auquel l’article 2.3.14 renvoie, est intitulé « Attribution préférentielle en cas de décès ». Il dispose :
« Lorsque le régime matrimonial prend fin par le décès d’un des époux, le conjoint survivant peut, moyennant soulte s’il y a lieu, se faire attribuer par préférence, pour autant qu’ils appartiennent au patrimoine commun ou au patrimoine qui est en indivision exclusivement entre les époux :
1° un des immeubles servant au logement de la famille;
2° les meubles meublants qui le garnissent;
3° les biens qu’il utilise pour l’exercice de sa profession ou l’exploitation de son entreprise ».
B.1.2. L’article 2.3.14, § 1er, du Code civil prévoit la possibilité pour chacun des époux de demander, au cours des opérations de liquidation, l’attribution préférentielle de l’« un des immeubles servant au logement de la famille », lorsque le régime matrimonial prend fin par le divorce pour cause de désunion irrémédiable, par la séparation de corps ou par la séparation de biens.
Lorsqu’un des deux époux ou les deux époux formulent une telle demande, le juge statue en considération des intérêts de chacun des époux et en tenant compte des capacités financières de celui qui, le cas échéant, devra payer la soulte (article 2.3.14, § 2, alinéa 1er).
Cette marge d’appréciation étendue connaît une exception dans l’hypothèse de violence conjugale : sauf circonstances exceptionnelles, il est fait droit à la demande d’attribution préférentielle lorsqu’elle émane de l’époux qui a été victime d’un des faits de violence énumérés dans l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, ou d’une tentative de commission de ceux-ci, si l’autre époux a été reconnu coupable de ce chef, comme auteur, coauteur ou complice, par une décision passée en force de chose jugée.
B.2. Par la première question préjudicielle, la juridiction a quo demande à la Cour si l’article 2.3.14 du Code civil est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’il prévoit que les époux mariés sous un régime de séparation de biens peuvent solliciter
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l’attribution préférentielle du bien acquis en indivision et ayant servi au logement familial, alors que les cohabitants légaux ne disposent pas de cette possibilité. À cet égard, la juridiction a quo relève que ces deux catégories de personnes bénéficient pourtant d’une même protection du logement familial pendant la vie commune (articles 215 et 1477, § 2, de l’ancien Code civil) et sont également traitées de la même manière dans le cadre de l’attribution provisoire du logement familial en cas de violence conjugale (article 1253ter/5 du Code judiciaire).
En cas d’inconstitutionnalité constatée en réponse à la première question préjudicielle, la juridiction a quo demande à la Cour si l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, lorsque le ministère public opte pour une médiation pénale, la victime d’un fait de violence énuméré dans cette disposition ne peut pas bénéficier du droit de se faire en principe attribuer le logement familial, à défaut de pouvoir se prévaloir d’une décision coulée en force de chose jugée.
Quant à la première question préjudicielle
B.3. Il ressort de la formulation de la première question préjudicielle que la juridiction a quo interroge la Cour à propos de la différence de traitement entre les époux mariés sous un régime de séparation de biens et les cohabitants légaux, en ce que les premiers peuvent solliciter l’attribution préférentielle du logement familial après le divorce tandis que les seconds sont exclus de cette possibilité après la cessation de la cohabitation légale.
B.4.1. L’article 2.3.14 du Code civil trouve son origine dans l’article 1389/2 de l’ancien Code civil, qui trouve lui-même son origine dans l’article 1447 de l’ancien Code civil.
B.4.2. L’article 1447 de l’ancien Code civil, tel qu’il a été inséré par l’article 2 de la loi du 14 juillet 1976 « relative aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux » et tel qu’il a été modifié par l’article 4 de la loi du 28 janvier 2003 « visant à l’attribution du logement familial au conjoint ou au cohabitant légal victime d’actes de violence
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physique de son partenaire, et complétant l’article 410 du Code pénal » (ci-après : la loi du 28 janvier 2003) et par l’article 17 de la loi du 27 avril 2007 « réformant le divorce » (ci-après :
la loi du 27 avril 2007), réservait l’attribution préférentielle du logement familial en cas de divorce aux époux mariés sous un régime prévoyant un patrimoine commun.
B.4.3. Par son arrêt n° 28/2013 du 7 mars 2013 (ECLI:BE:GHCC:2013:ARR.028), la Cour a jugé que la différence de traitement entre les époux mariés sous un régime prévoyant un patrimoine commun et les époux mariés sous un régime de séparation de biens, qui résultait du fait que l’article 1447, précité, de l’ancien Code civil réservait l’attribution préférentielle à la première catégorie d’époux, était raisonnablement justifiée (B.8, alinéa 1er). Elle a toutefois également jugé que « l’on ne pourrait pas non plus reprocher au législateur d’étendre le champ d’application de la disposition en cause à un logement familial qui est la propriété indivise des époux, quel que soit le régime matrimonial » (B.8, alinéa 2).
B.4.4. Par les articles 9 et 26 de la loi du 22 juillet 2018 « modifiant le Code civil et diverses autres dispositions en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant la loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités et modifiant diverses autres dispositions en cette matière » (ci-après : la loi du 22 juillet 2018), le législateur a déplacé les règles relatives à l’attribution préférentielle du logement familial en cas de divorce, en les modifiant légèrement, vers l’article 1389/2 de l’ancien Code civil, qui fait partie des dispositions générales du titre V (« Des régimes matrimoniaux »), chapitre Ier (« Dispositions générales »), de l’ancien Code civil, applicables à tous les régimes matrimoniaux, de sorte que ces règles s’appliquent désormais à tous les époux, quel que soit leur régime matrimonial.
Lors des travaux préparatoires de la loi du 22 juillet 2018, l’extension à tous les époux de la possibilité de solliciter l’attribution préférentielle du logement familial a été justifiée notamment par référence à l’arrêt n° 28/2013, précité :
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« Les règles en matière d’attribution préférentielle du logement familial, des meubles meublants et des biens professionnels sont transférées vers la partie générale du droit des régimes matrimoniaux (titre V, chapitre Ier) de sorte qu’elles s’appliquent désormais à tous les époux quel que soit le régime matrimonial choisi. L’article 1389/1 du Code civil proposé règle l’attribution après le décès (l’article 1446 actuel du Code civil) et l’article 1389/2 du Code civil proposé règle l’attribution après le divorce, la séparation de corps ou la séparation de biens (l’actuel article 1447 du Code civil; infra). Cette application étendue avait déjà été plaidée par une partie de la doctrine, mais vivement contestée par d’autres auteurs, qui invoquaient le manque de fondement juridique. La Cour constitutionnelle a en outre estimé, dans un arrêt du 7 mars 2013, que le fait que l’attribution préférentielle ne s’appliquait pas à un logement familial appartenant en indivision à des époux mariés sous le régime de la séparation de biens ne violait pas le principe d’égalité (arrêt n° 28/2013). ‘ L’on ne pourrait pas non plus reprocher au législateur d’étendre le champ d’application de la disposition en cause à un logement familial qui est la propriété indivise des époux, quel que soit le régime matrimonial ’, selon la Cour.
Cette mesure est à présent prise.
Par conséquent, à la fin du régime matrimonial, les époux peuvent désormais demander l’attribution préférentielle du logement familial et des meubles meublants sur lesquels ils peuvent tous les deux faire valoir des prétentions à la propriété, que ce soit dans une communauté dissoute ou dans une indivision » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2848/001, pp. 39-40. Voy. aussi pp. 66-67).
Et :
« À maints égards, le droit actuel établit une distinction entre la règlementation applicable aux conjoints mariés sous un régime de communauté, d’une part, et celui applicable aux conjoints mariés sous un régime de séparation de biens, d’autre part. Pour un certain nombre de règles, une partie de la doctrine plaide déjà, de lege lata, pour une application par analogie aux conjoints mariés sous un régime de séparation ou du moins pose la question de la pertinence de la distinction.
Dans la présente initiative législative, il est dès lors proposé d’appliquer également dans des régimes de séparation certaines règles qui, selon une interprétation légaliste, s’appliquent exclusivement aux régimes de communauté. L’objectif est uniquement de prévoir une base juridique pour l’application de règles bien déterminées dans des régimes de séparation et non d’adopter une position sur l’application par analogie d’autres règles encore, sujet qui fait débat dans la doctrine.
Dans un premier temps, quelques règles qui figurent actuellement dans les articles relatifs au partage dans le régime légal sont déplacées dans les dispositions générales qui s’appliquent à tous les régimes matrimoniaux. Il s’agit des articles sur l’attribution par préférence du logement familial et des biens professionnels à l’un des conjoints (les articles 1446 et 1447
actuels du Code civil) [...]. En effet, on peut difficilement justifier pourquoi l’application de dispositions qui protègent le milieu de vie et l’exercice de la profession des conjoints [...] ne devrait être possible que lorsque ces biens sont en communauté entre les deux conjoints et non lorsque les deux conjoints peuvent faire valoir des droits sur ces biens d’une autre manière, notamment parce qu’ils possèdent ces biens en indivision » (ibid., pp. 21-22).
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Se référant aux arrêts de la Cour nos 28/2013 et 130/2015
(ECLI:BE:GHCC:2015:ARR.130), la section de législation du Conseil d’État a observé que l’application de certaines règles du régime de la communauté de biens, comme celle de l’attribution préférentielle, au régime de la séparation de biens « ne viole pas de principes supérieurs de droit constitutionnel ou international et répond à un choix en opportunité du législateur » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2848/002, p. 11).
B.4.5. L’article 1389/2 de l’ancien Code civil a été abrogé par l’article 58, 7°, de la loi du 19 janvier 2022 « portant le livre 2, titre 3, ‘ Les relations patrimoniales des couples ’ et le livre 4 ‘ Les successions, donations et testaments ’ du Code civil » (ci-après : la loi du 19 janvier 2022). Son contenu a été repris à l’article 2.3.14 du Code civil « sans autre modification que celle portant sur le renvoi à une autre disposition du présent titre, adapté à sa nouvelle numérotation » (Doc. parl., Chambre, 2019-2020, DOC 55-1272/001, p. 34).
B.4.6. L’article 2.3.14 du Code civil fait partie du chapitre 2 (« Dispositions générales »)
du sous-titre 1er (« Régimes matrimoniaux ») du titre 3 (« Les relations patrimoniales des couples ») du livre 2 (« Les personnes, la famille et les relations patrimoniales des couples »)
du Code civil, introduits par l’article 2 de la loi du 19 janvier 2022. Comme l’article 1389/2 de l’ancien Code civil qu’il remplace, l’article 2.3.14 du Code civil s’applique à tous les époux, quel que soit leur régime matrimonial. Il ne s’applique en revanche pas aux cohabitants légaux.
B.5.1. Les articles 10 et 11 de la Constitution garantissent le principe d’égalité et de non-
discrimination.
B.5.2. Le principe d’égalité et de non-discrimination n’exclut pas qu’une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu’elle repose sur un critère objectif et qu’elle soit raisonnablement justifiée.
L’existence d’une telle justification doit s’apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d’égalité et de
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non-discrimination est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.6. La différence de traitement visée en B.3 repose sur le statut choisi par le couple. Ce critère est objectif.
B.7. Les travaux préparatoires de la loi du 22 juillet 2018, qui est à l’origine de l’extension de la possibilité de solliciter l’attribution préférentielle du logement familial en cas de divorce à toutes les catégories d’époux, ne précisent pas les raisons pour lesquelles cette possibilité n’a pas également été reconnue aux cohabitants légaux. Les travaux préparatoires de la loi du 19 janvier 2022 ne le précisent pas davantage. Selon le Conseil des ministres, le choix du législateur de ne pas étendre aux cohabitants légaux l’attribution préférentielle du logement familial relève d’un choix en opportunité qui est raisonnablement justifié.
B.8.1. Le mariage et la cohabitation légale se distinguent d’autres formes de vie commune par l’engagement public qu’ils supposent (CEDH, grande chambre, 29 avril 2008, Burden c. Royaume-Uni, ECLI:CE:ECHR:2008:0429JUD001337805, § 65; 10 février 2011, Korosidou c. Grèce, ECLI:CE:ECHR:2011:0210JUD000995708, § 70; grande chambre, 3 avril 2012, Van der Heijden c. Pays-Bas, ECLI:CE:ECHR:2012:0403JUD004285705, § 69).
Ces deux formes institutionnalisées de vie commune diffèrent l’une de l’autre aussi bien en ce qui concerne les droits et devoirs réciproques des époux ou cohabitants légaux qu’en ce qui concerne leurs situations patrimoniales respectives.
La cohabitation légale offre aux deux personnes qu’elle lie une protection patrimoniale limitée, qui s’inspire partiellement de dispositions applicables aux époux.
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B.8.2. La différence entre le statut de l’époux et celui du cohabitant légal peut, dans certains cas, justifier une différence de traitement entre ces deux catégories de personnes, lorsque cette différence est liée à l’objectif de la mesure en cause.
B.9.1. L’article 2.3.14, § 1er, du Code civil prévoit un droit en faveur de l’ex-époux de demander la reprise sur estimation, moyennant compensation le cas échéant, de l’un des immeubles ayant servi au logement familial qui fait partie du patrimoine indivis à partager.
Cette opération de partage déroge au principe du partage en nature. Elle ne déroge en revanche pas à celui de l’équivalence des lots : la valeur de l’immeuble concerné est imputée sur la part de l’ex-époux dans la masse indivise, à charge pour celui-ci de payer une soulte si cette valeur est supérieure à celle de sa part. L’attribution préférentielle permet à l’ex-époux qui en bénéficie d’éviter la vente publique de l’immeuble ou l’attribution de celui-ci par tirage au sort. Elle n’a pas de caractère indemnitaire.
Le juge statue sur la demande de l’ex-époux en considération « des intérêts que chacun des époux peut faire valoir » et « en tenant compte des capacités financières de celui qui, le cas échéant, devra payer la soulte » (article 2.3.14, § 2, alinéa 1er, du Code civil). Ces critères remplacent depuis la réforme de 2018 les anciens critères des « intérêts sociaux et familiaux »
des époux et des « droits de récompense ou de créance au profit de l’autre ». Ils visent à permettre au juge de « procéder à une pondération inclusive, sans qu’il ait à se limiter à des intérêts définis à l’avance » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2848/001, p. 42).
B.9.2. La possibilité de demander l’attribution préférentielle du logement familial vise ainsi à régler le sort du logement familial après le divorce en fonction des intérêts – au sens le plus large – des ex-époux, appréciés en fait par le juge. Elle permet à l’ex-époux qui le souhaite d’acheter la part de l’autre dans l’un des immeubles servant au logement familial et de préserver ainsi le lieu de l’ancienne communauté de vie.
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La possibilité de demander l’attribution préférentielle du logement familial vise également à assurer une solidarité minimale et la bonne foi entre les ex-époux, dont la nécessité se fait surtout ressentir lors de la dissolution du mariage. Cette possibilité est en effet de nature à lutter contre l’abus qu’un des deux ex-conjoints peut faire du droit d’exiger la vente publique du logement familial dont ils sont propriétaires indivis.
B.9.3. Les objectifs précités qui fondent l’attribution préférentielle du logement familial valent pour toute forme institutionnalisée de vie commune.
Comme les époux mariés sous le régime de la séparation de biens, les cohabitants légaux qui acquièrent ensemble un immeuble sont indivisaires de ce bien. Lorsque cet immeuble sert au « logement principal de la famille » – c’est-à-dire lorsqu’il sert à l’habitation effective de la famille ou d’une partie de celle-ci (Cass., 29 avril 2011, C.10.0132.N, ECLI:BE:CASS:2011:ARR.20110429.1) –, il est soumis, durant la vie commune, à une protection analogue en cas de mariage et en cas de cohabitation légale (article 215, § 1er, de l’ancien Code civil, qui est rendu applicable par analogie aux cohabitants légaux en vertu de l’article 1477, § 2, de l’ancien Code civil).
Après le divorce ou après la cessation de la cohabitation légale, les ex-époux ou les ex-
cohabitants légaux peuvent saisir à tout moment le tribunal de la famille d’une demande de liquidation et de partage de cette indivision (article 572bis, 10°, du Code judiciaire).
La cessation de la cohabitation légale comme celle du mariage entraînent la nécessité d’assurer une solidarité minimale et la bonne foi entre les ex-partenaires en permettant à ceux-
ci, ou à l’un d’eux, de préserver le lieu de l’ancienne communauté de vie par une demande d’attribution préférentielle du logement familial à apprécier en tenant compte des intérêts de chacun des ex-partenaires. De même, la cessation de la cohabitation légale comme celle du mariage font naître l’obligation de veiller de la même manière aux intérêts des enfants mineurs, protégés par l’article 22bis, alinéa 4, de la Constitution.
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La circonstance que la cohabitation légale est une forme de vie commune plus souple et plus précaire que le mariage ne justifie pas que l’attribution préférentielle du logement familial ne puisse être demandée en cas de cessation de la cohabitation légale si les deux ex-partenaires en étaient propriétaires indivis. Le type de forme institutionnalisée de vie commune choisie par le couple n’est pas pertinent par rapport à l’objet de la disposition en cause.
B.9.4. En outre, l’absence de mesure analogue à celle prévue à l’article 2.3.14 du Code civil, applicable aux cohabitants légaux, peut entraîner des effets disproportionnés pour les ex-
cohabitants légaux en obligeant ceux-ci, ou l’un d’eux, à se porter acquéreur du logement familial au terme d’enchères avec des tiers et, le cas échéant, avec l’autre ex-cohabitant légal, dans le cadre d’une vente publique.
Cette lacune produit en outre des effets disproportionnés pour le cohabitant légal victime de violences conjugales pour lesquelles son ex-partenaire a été reconnu coupable par décision coulée en force de chose jugée. Il ne peut en effet pas bénéficier du droit de se faire en principe attribuer le logement familial sur la base de l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil.
B.10. La différence de traitement visée en B.3 n’est pas raisonnablement justifiée.
Cette inconstitutionnalité ne découle pas de la disposition en cause mais de l’absence d’une disposition prévoyant que les cohabitants légaux qui ont acquis en indivision un bien servant au logement familial peuvent solliciter, après la cessation de la cohabitation légale, l’attribution préférentielle de ce bien.
Dans l’attente d’une intervention du législateur, il appartient à la juridiction a quo de mettre fin à l’inconstitutionnalité constatée en appliquant par analogie aux cohabitants légaux le régime prévu à l’article 2.3.14 du Code civil.
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Quant à la seconde question préjudicielle
B.11. Selon le Conseil des ministres, la seconde question préjudicielle est irrecevable, à défaut pour la juridiction a quo d’indiquer quelles sont les catégories de personnes à comparer.
B.12.1. Il ressort de la formulation de la seconde question préjudicielle et des motifs de la décision de renvoi que la juridiction a quo demande à la Cour si l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil, et plus précisément l’exigence d’une décision coulée en force de chose jugée qu’elle prévoit, est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, lorsque le ministère public opte pour une médiation pénale, la victime d’un fait de violence conjugale mentionné dans cette disposition ne peut pas bénéficier du droit prévu par cette disposition de se faire en principe attribuer par préférence le logement familial, à défaut de pouvoir se prévaloir d’une décision coulée en force de chose jugée.
B.12.2. L’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil prévoit que le tribunal de la famille fait droit – sauf circonstances exceptionnelles – à la demande d’attribution préférentielle du logement familial formulée par l’ex-époux qui a été victime d’un fait de violence conjugale « si l’autre époux a été reconnu coupable de ce chef comme auteur, coauteur ou complice par décision coulée en force de chose jugée ».
B.12.3. La médiation pénale à laquelle se réfère la seconde question préjudicielle est la procédure d’« extinction de l’action publique moyennant l’exécution de mesures et le respect des conditions » visée à l’article 216ter du Code d’instruction criminelle, tel qu’il a été remplacé par l’article 11 de la loi du 18 mars 2018 « modifiant diverses dispositions du droit pénal, de la procédure pénale et du droit judiciaire » (ci-après : la loi du 18 mars 2018).
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Cette procédure, également appelée « procédure de médiation et mesures », comporte deux volets distincts : d’une part, un volet relatif aux « mesures » axées sur le suspect et, d’autre part, un volet relatif à la « médiation » entre le suspect et la victime.
L’article 216ter, § 1er, alinéa 1er, du Code d’instruction criminelle prévoit que, dans l’hypothèse où le fait constitutif d’une infraction ne paraît pas être de nature à devoir être puni d’un emprisonnement correctionnel principal de plus de deux ans ou d’une peine plus lourde et à condition que le suspect « reconnaisse, le cas échéant, sa responsabilité civile dans le fait », le procureur du Roi peut inviter le suspect à indemniser ou réparer le dommage causé par l’infraction et à consentir à une ou plusieurs mesures.
Si l’infraction a causé un dommage à une victime connue, le procureur du Roi peut inviter la victime et le suspect à consentir à une médiation sur l’indemnisation ou la réparation ainsi que sur ses modalités (article 216ter, § 1er, alinéa 2). En cas de refus de la victime de participer à la médiation ou si celle-ci n’aboutit pas, la procédure de l’article 216ter peut se poursuivre en son absence (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2753/001, p. 43). Dans le second cas, la victime est informée de la continuation du dossier en ce qui concerne les mesures axées sur l’auteur (article 216ter, § 2, alinéa 5).
Quelle que soit la situation en cause (infraction avec ou sans victime, victime acceptant ou non la médiation; Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2753/001, p. 43), le procureur du Roi peut proposer au suspect d’exécuter, sur une période d’un an maximum, une ou plusieurs mesures visées au paragraphe 1er, alinéa 5, à savoir : le suivi d’un traitement médical ou de toute autre thérapie adéquate, l’exécution d’un travail d’intérêt général ou le suivi d’une formation.
L’acceptation par le suspect des « mesures » relatives à sa personne et des « conditions »
relatives à la victime (ibid., pp. 43, 45 et 48) donne lieu à la conclusion d’une convention (article 216ter, § 2).
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Lorsque le suspect de l’infraction a satisfait à toutes les mesures et conditions formulées dans cette convention, qui étaient le cas échéant homologuées par le juge compétent, l’action publique est éteinte. Lorsque l’infraction a causé un dommage à un tiers, l’extinction de l’action publique est subordonnée à la reconnaissance écrite par le suspect de sa responsabilité civile pour le fait générateur du dommage et à la production de la preuve de l’indemnisation ou de la réparation de la fraction non contestée du dommage et des modalités de règlement de celui-ci.
L’extinction de l’action publique ne peut pas porter préjudice au droit de la victime de faire valoir ses droits devant le tribunal civil compétent ni aux droits des personnes subrogées dans les droits de la victime. À l’égard de ces personnes, l’acceptation par le suspect de la proposition du procureur du Roi constitue une présomption irréfragable de sa faute (article 216ter, § 5; Doc.
parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2753/001, p. 39).
B.12.4. Il s’ensuit que la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle emporte l’extinction de l’action publique lorsque le suspect a satisfait à toutes les mesures et conditions qu’il avait acceptées. Lorsqu’en revanche, cette procédure s’interrompt ou échoue, « par exemple si le suspect n’a pas respecté les conditions qu’il avait pourtant acceptées », le procureur du Roi retrouve toutes ses prérogatives quant à l’exercice de l’action publique (Doc.
parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2753/001, p. 41).
La disposition en cause ne fait dès lors pas naître de différence de traitement, quant au bénéfice du droit de se faire en principe attribuer le logement familial, selon que le ministère public a opté pour la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle et que celle-
ci s’interrompt ou échoue, d’une part, ou selon qu’il n’a pas opté pour une telle procédure, d’autre part. Dans les deux cas, le ministère public dispose en effet de toutes ses prérogatives quant à la conduite de l’action publique.
B.12.5. La seconde question préjudicielle doit être interprétée en ce sens que la Cour est interrogée à propos de la différence de traitement introduite par l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil entre les victimes de faits de violence conjugale (à savoir : les ex-époux qui sont victimes de faits de violence conjugale et – compte tenu de la réponse donnée à la première question préjudicielle – les ex-cohabitants légaux qui sont victimes de tels faits), selon que le ministère public a opté pour la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle et
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que celle-ci a abouti ou selon que le ministère public n’a pas opté pour une telle procédure ou que celle-ci échoue. Lorsque le ministère public a opté pour une telle procédure et que le suspect respecte toutes les mesures et conditions prévues, l’action publique s’éteint, de sorte que la victime de faits de violence conjugale ne peut pas bénéficier du droit de se faire en principe attribuer le logement familial, à défaut de pouvoir se prévaloir d’une décision pénale coulée en force de chose jugée. Lorsque le ministère public n’a pas recours à la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle ou que celle-ci échoue, le suspect est susceptible d’être poursuivi devant les juridictions pénales et d’être reconnu coupable par une décision coulée en force de chose jugée. Dans ce cas, la victime de faits de violence conjugale bénéficie du droit de se faire en principe attribuer le logement familial.
B.13. L’exception est rejetée.
B.14. La juridiction a quo demande à la Cour si l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que la victime de faits de violence conjugale ne peut pas bénéficier de la mesure civile de protection prévue par cette disposition si le ministère public choisit de recourir, sur le plan pénal, à la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle et si cette procédure aboutit.
B.15.1. L’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil prévoit le droit de la victime de violences conjugales de se faire en principe attribuer par préférence le logement familial.
B.15.2. Insérée initialement à l’article 1447, alinéa 2, de l’ancien Code civil par la loi du 28 janvier 2003 avec d’autres mesures visant à améliorer la protection sur le plan civil et pénal de la victime de violence au sein du couple, cette mesure tente d’« atténuer les conséquences matérielles de la séparation » en prévoyant « l’attribution de la résidence familiale par préférence à la victime de viol, de tentative de meurtre, de tentative d’assassinat, de tentative d’empoisonnement ou de coups et blessures volontaires qui a été commis par l’époux » (Doc.
parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1693/001, pp. 3-4 et 6; DOC 50-1693/006, p. 5).
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L’article 1447, alinéa 2, de l’ancien Code civil, tel qu’il avait été inséré par l’article 4 de la loi du 28 janvier 2003, disposait :
« II est fait droit, sauf circonstances exceptionnelles, à la demande formulée par l’époux qui a été victime d’un fait visé aux articles 375, 398 à 400, 402, 403 ou 405 du Code pénal ou d’une tentative d’un fait visé aux articles 375, 393, 394 ou 397 du même Code, soit lorsque l’autre époux a été condamné de ce chef par une décision coulée en force de chose jugée et que le divorce a été prononcé contre lui, soit lorsque la décision prononçant le divorce est fondée en tout ou en partie sur ce fait ».
En vertu de cette disposition, le juge devait en principe faire droit à la demande d’attribution préférentielle du logement familial formulée par l’ex-époux marié sous le régime légal qui était victime de violences conjugales dans deux hypothèses : soit lorsque « l’époux auteur des violences conjugales [avait] fait l’objet d’une condamnation coulée en force de chose jugée du chef de celles-ci », soit lorsque « le jugement qui [prononçait] le divorce se [fondait]
au moins pour partie sur ces faits de violence conjugale » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1693/005, p. 2; DOC 50-1693/006, p. 29).
B.15.3. Lors des travaux préparatoires à l’origine de la loi du 28 janvier 2003, il avait initialement été envisagé que des « indices sérieux de comportements de violence conjugale »
puissent suffire à faire droit à une demande d’attribution préférentielle du logement familial en cas de violence, formulée après le divorce (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-
1693/001, p. 7; DOC 50-1693/006, pp. 24-25). Cette possibilité a finalement été écartée par l’adoption d’un amendement du Gouvernement justifié comme suit :
« L’amendement a pour objectif de rencontrer l’une des observations ressortant de la discussion devant la Commission de la Justice : compte tenu du fait que l’attribution préférentielle du logement familial après le prononcé du divorce présente, à la différence des autres hypothèses, un caractère définitif, il paraît préférable de réserver cette attribution préférentielle aux cas dans lesquels l’époux auteur des violences conjugales a fait l’objet d’une condamnation coulée en force de chose jugée du chef de celles-ci, ou aux cas dans lesquels le jugement qui prononce le divorce se fonde au moins pour partie sur ces faits de violence conjugale » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1693/005, p. 2; DOC 50-1693/006, p. 29).
Il fut précisé que ce n’est que dans la seconde hypothèse (décision prononçant le divorce fondée en tout ou en partie sur des faits de violence) qu’aucune condamnation pénale antérieure n’était nécessaire. Dans ce cas, la preuve des faits pouvait être faite « par des documents ou par
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des témoins qui ont été pris en considération par le juge qui a prononcé le divorce » (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, DOC 50-1693/006, pp. 29-30).
B.15.4. Cette seconde hypothèse a ensuite été supprimée par l’article 17 de la loi du 27 avril 2007 dans le cadre de la réforme visant à supprimer toute référence à la faute au stade du prononcé du divorce (Doc. parl., Sénat, 2006-2007, nos 3-2068/6 et 3-2068/7).
À la suite de cette modification, l’article 1447, alinéa 2, de l’ancien Code civil disposait :
« Il est fait droit, sauf circonstances exceptionnelles, à la demande formulée par l’époux qui a été victime d’un fait visé aux articles 375, 398 à 400, 402, 403 ou 405 de Code pénal ou d’une tentative d’un fait visé aux articles 375, 393, 394 ou 397 du même Code lorsque l’autre époux a été condamné de ce chef par une décision coulée en force de chose jugée ».
B.15.5. L’article 1447, alinéa 2, de l’ancien Code civil a ensuite été abrogé et remplacé par l’article 1389/2, § 2, alinéa 2, de l’ancien Code civil, tel qu’il a été introduit par l’article 9
de la loi du 22 juillet 2018. L’article 1389/2, § 2, alinéa 2, de l’ancien Code civil disposait :
« Il est fait droit, sauf circonstances exceptionnelles, à la demande formulée par l’époux qui a été victime d’un fait visé aux articles 375, 398 à 400, 402, 403, 405, 409, §§ 1er à 3 et 5, et 422bis du Code pénal ou d’une tentative de commission d’un fait visé aux articles 375, 393
à 397, 401, 404 et 409, § 4, du même Code, si l’autre époux a été reconnu coupable de ce chef comme auteur, coauteur ou complice par décision coulée en force de chose jugée ».
À cette occasion, le droit de l’ex-époux victime de violences conjugales à l’attribution préférentielle de principe du logement familial a été élargi à « l’énumération des faits punissables qui apparaissent également dans la loi du 10 décembre 2012 relative à l’indignité successorale et la substitution » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2848/001, p. 42).
L’exigence, visée à l’article 1447, alinéa 2, de l’ancien Code civil précité, que l’autre époux ait été « condamné [du chef de violences conjugales] par une décision coulée en force de chose
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jugée » a par ailleurs été remplacée par celle que l’autre époux ait été « reconnu coupable [du chef de violences conjugales] comme auteur, coauteur ou complice par décision coulée en force de chose jugée » (ibid., p. 106).
B.15.6. L’article 1389/2, § 2, alinéa 2, de l’ancien Code civil a ensuite été abrogé et repris, sans modification, à l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil.
B.16.1. Il ressort des travaux préparatoires précités en B.15.3 que l’exigence contenue dans l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil d’une décision coulée en force de chose jugée reconnaissant la culpabilité du partenaire sur le plan pénal répond à la nécessité d’établir avec certitude les faits de violence conjugale justifiant la mesure civile de protection prévue par cette disposition, eu égard au caractère définitif de celle-ci.
B.16.2. Il ressort par ailleurs des travaux préparatoires de la loi du 18 mars 2018, qui a réformé la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle, que le législateur a voulu accorder une « attention particulière au statut de la victime » lors du recours à cette procédure (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2753/001, p. 48; voy. aussi pp. 42-43).
Ainsi, comme il est dit en B.12.3, l’entame de la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle de même que l’extinction de l’action publique au terme de celle-ci sont subordonnées à la reconnaissance par le suspect de sa responsabilité civile dans le fait (article 216ter, § 1er, alinéa 1er, et § 5, du Code d’instruction criminelle). L’article 216ter, § 5, prévoit que l’extinction de l’action publique est subordonnée, en outre, à la production par le suspect de la preuve de l’indemnisation ou de la réparation de la fraction non contestée du dommage et des modalités de règlement de celui-ci. Pour le surplus, la victime peut faire valoir ses droits devant le tribunal civil compétent, auquel cas l’acceptation par le suspect de la proposition du procureur du Roi de recourir à la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle constitue une présomption irréfragable de sa faute sur le plan civil (Doc.
parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2753/001, p. 39).
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B.16.3. Il s’ensuit que l’exigence contenue dans l’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil d’une décision coulée en force de chose jugée reconnaissant la culpabilité du partenaire sur le plan pénal n’est pas nécessaire au regard de l’objectif mentionné en B.16.1 lorsque le ministère public recourt à la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle et que celle-ci aboutit.
Dans cette hypothèse, les faits de violence conjugale sont en effet établis avec certitude par la reconnaissance par le suspect de sa responsabilité civile dans ceux-ci préalablement à l’entame de la procédure (dans ce sens, voy. Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-
2753/001, p. 40) et par la présomption irréfragable de sa faute sur le plan civil qui découle de son acceptation de la proposition du ministère public de recourir au mode amiable de règlement de l’action publique de l’article 216ter.
B.17.1. La différence de traitement visée en B.12.5 n’est pas raisonnablement justifiée.
B.17.2. L’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que la victime d’un fait de violence conjugale ne peut pas bénéficier du droit de se faire en principe attribuer le logement familial lorsque le ministère public recourt à la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle et que celle-ci aboutit.
Dans l’attente d’une intervention du législateur, dès lors que le constat de la lacune est exprimé en des termes suffisamment précis et complets qui permettent l’application de la disposition en cause dans le respect des normes de référence sur la base desquelles la Cour exerce son contrôle, il appartient à la juridiction a quo de mettre fin à la violation de ces normes.
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Par ces motifs,
la Cour
dit pour droit :
1. - L’article 2.3.14 du Code civil, en ce qu’il ne s’applique pas aux cohabitants légaux, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution;
- L’absence d’une disposition législative prévoyant que les cohabitants légaux qui ont acquis en indivision un bien servant au logement familial peuvent solliciter, après la cessation de la cohabitation légale, l’attribution préférentielle de ce bien viole les articles 10 et 11 de la Constitution;
2. L’article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que la victime d’un fait de violence conjugale ne peut pas bénéficier du droit de se faire en principe attribuer le logement familial lorsque le ministère public recourt à la procédure de l’article 216ter du Code d’instruction criminelle et que celle-ci aboutit.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 20 juin 2024.
Le greffier, Le président,
Frank Meersschaut Pierre Nihoul


Synthèse
Numéro d'arrêt : 62/2024
Date de la décision : 20/06/2024
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Analyses

1. - Non-violation (article 2.3.14 du Code civil, en ce qu'il ne s'applique pas aux cohabitants légaux) - Violation (absence d'une disposition législative prévoyant que les cohabitants légaux qui ont acquis en indivision un bien servant au logement familial peuvent solliciter, après la cessation de la cohabitation légale, l'attribution préférentielle de ce bien) 2. Violation (article 2.3.14, § 2, alinéa 2, du Code civil, en ce que la victime d'un fait de violence conjugale ne peut pas bénéficier du droit de se faire en principe attribuer le logement familial lorsque le ministère public recourt à la procédure de l'article 216ter du Code d'instruction criminelle et que celle-ci aboutit)

COUR CONSTITUTIONNELLE - DROIT PUBLIC ET ADMINISTRATIF - COUR CONSTITUTIONNELLE - les questions préjudicielles relatives à l'article 2.3.14 du Code civil, posées par le tribunal de la famille du Tribunal de première instance de Liège, division de Verviers. Droit civil - Cohabitation légale - Cessation - Immeuble servant au logement familial - Attribution préférentielle - Victime d'un fait de violence conjugale - Médiation pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2024
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2024-06-20;62.2024 ?

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