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27/06/2024 | BELGIQUE | N°71/2024

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 27 juin 2024, 71/2024


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 71/2024
du 27 juin 2024
Numéro du rôle : 8045
En cause : le recours en annulation de l’article 35, 4°, du décret-programme flamand du 16 décembre 2022 « accompagnant le budget 2023 », introduit par l’ASBL « Denuo » et autres.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents Luc Lavrysen et Pierre Nihoul, et des juges Yasmine Kherbache, Sabine de Bethune, Emmanuelle Bribosia, Willem Verrijdt et Magali Plovie, assistée du greffier Frank Meersschaut, présidée par le président Luc Lavrysen,
après en avoir délibér

é, rend l’arrêt suivant :
I. Objet du recours et procédure
Par requête adressée à la Cour ...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 71/2024
du 27 juin 2024
Numéro du rôle : 8045
En cause : le recours en annulation de l’article 35, 4°, du décret-programme flamand du 16 décembre 2022 « accompagnant le budget 2023 », introduit par l’ASBL « Denuo » et autres.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents Luc Lavrysen et Pierre Nihoul, et des juges Yasmine Kherbache, Sabine de Bethune, Emmanuelle Bribosia, Willem Verrijdt et Magali Plovie, assistée du greffier Frank Meersschaut, présidée par le président Luc Lavrysen,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet du recours et procédure
Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 26 juin 2023 et parvenue au greffe le 27 juin 2023, un recours en annulation de l’article 35, 4°, du décret-programme flamand du 16 décembre 2022 « accompagnant le budget 2023 » (publié au Moniteur belge du 29 décembre 2022) a été introduit par l’ASBL « Denuo », la SRL « Marketing and Commercial Assistance », la SA « Comet Traitements », la SA « Cogetrina Logistics », la SA « Remondis Industrial Services », la SA « Eurowaste », la SA « Galloo », la SA « Mac² Solutions » et la SRL « Edelchemie Benelux », assistées et représentées par Me Annick Visschers et Me Filip Smet, avocats au barreau de Bruxelles.
Le Gouvernement flamand, assisté et représenté par Me Astrid Gelijkens, avocate au barreau d’Anvers, a introduit un mémoire, les parties requérantes ont introduit un mémoire en réponse et le Gouvernement flamand a également introduit un mémoire en réplique.
Par ordonnance du 27 mars 2024, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs Willem Verrijdt et Magali Plovie, a décidé que l’affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception
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de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos à l’expiration de ce délai et l’affaire serait mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. En droit
–A–
Quant à l’intérêt
A.1. Les parties requérantes estiment disposer d’un intérêt à leur recours en annulation. La première partie requérante a pour but statutaire la promotion et la défense des intérêts communs des entreprises et groupes d’entreprises affiliés à elle qui assurent le lien entre les matériaux utilisés et leur réutilisation, leur recyclage et leur traitement final, de sorte qu’elle justifie d’un intérêt collectif. En effet, la disposition attaquée, en supprimant la possibilité de déduire de la « redevance » écologique flamande le montant d’une taxe écologique similaire prélevée à l’étranger ou dans une autre région, a une incidence néfaste sur la situation fiscale de ses membres, ce qui a des retombées négatives sur la gestion des matériaux en Belgique ainsi que sur le maintien et le développement futur du secteur des déchets et du recyclage. Les huit autres parties requérantes sont des entreprises qui traitent des déchets. Elles sont affectées directement et défavorablement par la disposition attaquée, étant donné qu’elles sont soumises à la « redevance » écologique que prévoit l’article 45 du décret de la Région flamande du 23 décembre 2011 « relatif à la gestion durable de cycles de matériaux et de déchets » (ci-après : le décret du 23 décembre 2011).
A.2. Le Gouvernement flamand fait valoir que les parties requérantes ne justifient pas de l’intérêt requis.
D’après lui, la première partie requérante ne démontre pas in concreto qu’elle agit dans l’intérêt collectif de tous ses membres et les autres parties requérantes ne démontrent pas qu’elles subissent un préjudice réel en raison de la disposition attaquée. Il souligne que la suppression de la mesure de compensation est avantageuse pour certains membres de la première partie requérante, étant donné que cette suppression promeut le traitement des déchets en Région flamande et qu’elle ne préjudicie pas toutes les entreprises de traitement de déchets. En effet, l’incidence fiscale de la disposition attaquée dépend du type de déchets qui est traité ainsi que du lieu de traitement.
Quant au premier moyen
A.3.1. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation, par l’article 35, 4°, du décret-
programme flamand du 16 décembre 2022 « accompagnant le budget 2023 », de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, lu en combinaison avec les articles 28, 29 et 30 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après : le TFUE).
A.3.2. Les parties requérantes soutiennent, à titre principal, que la disposition attaquée viole le principe de l’union économique et monétaire, le principe de l’union douanière et l’article 30 du TFUE, en ce que la suppression de la possibilité de déduire de la « redevance » flamande le montant d’une taxe écologique similaire, acquittée à l’étranger ou dans une autre région, a pour conséquence que la « redevance » écologique prévue par le décret du 23 décembre 2011 doit être qualifiée de taxe interdite d’effet équivalent à un droit d’entrée ou de sortie. En effet, la suppression de la mesure de compensation crée une situation où les redevables qui transportent et traitent des déchets en dehors des frontières de la Région flamande sont plus lourdement taxés que ceux qui restent en Région flamande. Les premiers doivent s’acquitter d’une taxe écologique tant en Région flamande qu’à l’étranger ou dans une autre région, alors que les seconds sont redevables de la seule « redevance » flamande.
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Elles rappellent que la Cour a déjà annulé par le passé une taxe flamande relative aux déchets dans ses arrêts nos 55/96 du 15 octobre 1996 (ECLI:BE:GHCC:1996:ARR.055) et 34/97 du 12 juin 1997
(ECLI:BE:GHCC:1997:ARR.034), au motif que la taxe était plus élevée pour le traitement en dehors de la Région flamande et était par conséquent qualifiée de taxe d’effet équivalent à un droit d’entrée ou de sortie. Il a d’abord fallu que le législateur décrétal harmonise les tarifs et introduise la mesure de compensation pour que la Cour finisse par accepter la « redevance » écologique par son arrêt n° 51/98 du 20 mai 1998
(ECLI:BE:GHCC:1998:ARR.051).
A.3.3. À titre subsidiaire, les parties requérantes soutiennent que la disposition attaquée, en dissuadant les redevables de traiter les déchets en dehors de la Région flamande, constitue une entrave à la libre circulation des marchandises et des services, alors qu’aucun motif impérieux d’intérêt général qui soit proportionné à l’objectif poursuivi ne justifie cette entrave. Elles relèvent tout d’abord que des objectifs purement économiques, tels que le besoin de moyens accrus, ne sauraient justifier une entrave à la libre circulation. Ensuite, elles font valoir que la suppression de la mesure de compensation ne contribue ni à garantir la viabilité de la capacité de traitement en Flandre, ni à créer des conditions équitables. La suppression de la mesure de compensation a précisément pour conséquence de fausser l’équité, puisque les redevables qui traitent des déchets en dehors de la Région flamande sont préjudiciés. En outre, cette suppression n’est pas davantage justifiée au regard de considérations environnementales, puisqu’elle ne contribue pas à diminuer la quantité de déchets résiduaires, que l’incinération des déchets n’est pas considérée comme une mesure préjudiciable à l’environnement et que les installations étrangères de traitement des déchets sont souvent plus écologiques. D’autres mesures, moins radicales, sont à tout le moins possibles. Enfin, elles indiquent que l’entrave n’est en tout état de cause pas justifiée, étant donné qu’elle donne lieu à une différence de traitement entre redevables, suivant qu’ils franchissent ou non les frontières régionales.
À titre subsidiaire également, les parties requérantes relèvent que la disposition attaquée viole l’article 110
du TFUE, si la Cour devait estimer que la « redevance » écologique constitue une taxe qui s’inscrit dans le régime général d’impositions intérieures. En effet, la suppression de la mesure de compensation présente un caractère protectionniste et est la source d’une discrimination indirecte en ce qu’elle dissuade les entreprises de traitement des déchets de transporter ceux-ci en dehors de la Région flamande.
A.4. Le Gouvernement flamand est d’avis que le premier moyen n’est pas fondé. Il note tout d’abord que la « redevance » écologique constitue une imposition intérieure au sens de l’article 110 du TFUE. Il est question d’une telle imposition intérieure lorsque la taxe frappe les produits nationaux transformés ou commercialisés sur le marché national et les produits exportés en l’état au même stade de commercialisation, et si le fait générateur est le même pour les deux catégories de produits. Cette condition est remplie, vu que la taxe est appliquée à des déchets produits en Région flamande et que le fait générateur est systématiquement la transformation de ces déchets, indépendamment du lieu du traitement.
Ensuite, le Gouvernement flamand fait valoir que la « redevance » écologique résiste au contrôle au regard de l’article 110, premier alinéa, du TFUE, étant donné qu’elle n’est pas discriminatoire. Même sans mesure de compensation, la Région flamande ne taxe pas davantage le traitement des déchets en dehors de la Région flamande que celui qui a lieu en Région flamande. D’après lui, le second alinéa de l’article 110 du TFUE n’est quant à lui pas applicable, étant donné que la « redevance » écologique est une taxe portant sur des produits similaires.
Enfin, le Gouvernement flamand relève qu’en ce qui concerne les déchets, le principe de la libre circulation est limité par le principe d’autosuffisance et de proximité. Il convient d’enlever les déchets le plus près possible du lieu où ils sont produits. La suppression de la règle de déduction y contribue, puisqu’elle permet d’éviter que les installations de traitement les plus proches soient délaissées.
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–B–
Quant à la disposition attaquée et à son contexte
B.1.1. Les parties requérantes demandent l’annulation de l’article 35, 4°, du décret-
programme flamand du 16 décembre 2022 « accompagnant le budget 2023 » (ci-après : le décret-programme du 16 décembre 2022), qui dispose :
« À l’article 46 du décret du 23 décembre 2011 relatif à la gestion durable de cycles de matériaux et de déchets, modifié en dernier lieu par le décret du 23 décembre 2011, sont apportées les modifications suivantes :
[...]
4° au paragraphe 1er, 19°, la deuxième phrase est abrogée;
[...] ».
B.1.2. L’article 46, § 1er, alinéa 1er, 19°, du décret de la Région flamande du 23 décembre 2011 « relatif à la gestion durable de cycles de matériaux et de déchets » (ci-après : le décret du 23 décembre 2011), modifié par la disposition attaquée, fait partie de la section 2 (« Redevances écologiques ») du chapitre 5 (« Contributions écologiques, redevances écologiques et rétributions ») de ce décret. Il détermine la façon dont est fixée la « redevance » écologique pour les déchets produits en Région flamande qui sont transportés en vue de leur traitement dans une installation autorisée à cet effet en dehors de la Région flamande.
Avant sa modification par la disposition attaquée, l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 19°, du décret du 23 décembre 2011 disposait :
« Le montant de la redevance écologique est fixé comme suit, dépendant de la nature des déchets et du mode de traitement :
[...]
19° pour les déchets produits en Région flamande qui sont transférés en vue de leur traitement dans un établissement autorisé [lire : une installation autorisée] à cet effet en dehors de la Région flamande : les montants visés au point 1° à 18° inclus, qui sont déterminés par le mode de traitement appliqué. Lorsqu’une redevance écologique similaire est d’application dans une région ou un pays où les déchets concernés sont traités, le montant de la redevance est
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diminuée du montant de la redevance écologique similaire précitée sans qu’elle puisse pour autant être réduite à zéro ».
En abrogeant la deuxième phrase de cette disposition, la disposition attaquée a supprimé la possibilité de déduire de la « redevance » écologique flamande une taxe écologique similaire applicable dans la région ou le pays où sont traités les déchets. Le montant de la taxe sur les déchets produits en Région flamande qui sont transportés en vue de leur traitement dans une installation autorisée à cet effet en dehors de la Région flamande est désormais exclusivement fixé conformément aux règles applicables lorsque le traitement a lieu en Région flamande.
Ces règles sont mentionnées à l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 1° à 18°, du décret du 23 décembre 2011, qui dispose, dans sa version actuelle :
« § 1er. Le montant de la redevance écologique est fixée comme suit, dépendant de la nature des déchets et du mode de traitement :
1° pour l’incinération de déchets si l’incinération n’est pas couverte par un permis d’environnement ou d’exploitation conformément à la législation en vigueur : 150 euros par tonne x K où :
K = 4 pour déchets dangereux;
K = 1 pour déchets non dangereux;
Un minimum de 250 euros s’applique dans ce cas;
2° pour l’abandon de déchets contraire aux prescriptions du présent décret ou de ses arrêtés d’exécution visés à l’article 12, paragraphe 1er, ou pour le stockage de déchets si le stockage n’est pas couvert par un permis d’environnement conformément à la législation en vigueur :
25 euros par tonne par trimestre x K x D1/D2 où :
K = 4 pour déchets dangereux;
K = 1 pour autres déchets non dangereux;
K = 0,5 pour déchets inertes;
D1 = le nombre de jours de stockage des déchets sans permis;
D2 = le nombre total de jours au cours du trimestre concerné;
3° pour le déversement de déchets combustibles dans une installation autorisée à cet effet;
75 euros par tonne. Un tarif de 100 euros par tonne s’applique à partir du 1er juillet 2016;
4° pour le déversement de déchets ménagers qui ne pouvaient pas être traités dans une installation autorisée pour le traitement de déchets ménagers parce que l’exploitant a temporairement mis l’installation hors service sur base volontaire et en dehors des périodes d’entretien normales parce il n’a pas pu répondre aux conditions d’autorisation imposées :
20 euros par tonne. Cette dérogation ne vaut cependant pour chaque installation que pendant
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une période de dix-huit mois à compter du premier jour du mois pendant lequel l’installation a été fermée sur base volontaire;
5° pour le déversement de déchets non-combustibles dans une installation autorisée à cet effet : 40 euros par tonne. Un tarif de 55 euros par tonne s’applique à partir du 1er juillet 2016;
6° a) pour le déversement sur une décharge autorisée à cet effet, de résidus de processus issus d’un procédé de nettoyage humide et provenant d’entreprises qui nettoient de la terre, des boues d’avaloirs, du sable tamisé, du nettoyage des rues et des déchets sableux comparables de manière physicochimique dans une installation autorisée à cet effet, en vue de la récupération de sable et de granulats comme nouvelle matière première : 2 euros par tonne. La quantité de résidus de processus doit être inférieure à 40 pour cent en poids sur la base sèche. Ce pourcentage doit être considéré comme un maximum de 40 % sur la base sèche par lot nettoyé, sauf si OVAM autorise une dérogation au pour cent en poids pour un certain lot, à la demande de l’exploitant. Un taux de 0 euros par tonne s’applique à partir du 1er [janvier] 2019.
b) pour le déversement sur une décharge autorisée à cet effet de déchets provenant d’opérations d’assainissement du sol, de terre qui ne peut pas être nettoyée et de résidus autres que ceux visés à l’article 46, § 1er, 6°, a), du nettoyage de terre, de boues d’avaloirs, de sable tamisé, de nettoyage des rues et de déchets sableux comparables, où, conformément à l’avis d’OVAM, les procédés d’assainissement autres que l’enlèvement et le déversement entraînent des dépenses démesurées ou sont impraticables : 2 euros par tonne. Un taux de 0 euros par tonne s’applique à partir du 1er [janvier] 2019. Par dérogation à ce qui précède, le taux de redevance de 0 euros par tonne s’applique au déversement sur une décharge autorisée à cet effet de déchets provenant d’opérations d’assainissement du sol approuvés par OVAM, dans le cadre d’une convention convenue ou non, pour lesquels une déclaration a été délivrée par OVAM, au plus tard le 31 décembre 2012, déclarant que le tarif zéro s’applique;
Par dérogation à ce qui précède, le taux de redevance de 0 euro par tonne s’applique au déversement dans une décharge autorisée à cet effet de déchets provenant de projets de type Enhanced Landfill Mining approuvés par l’OVAM répondant aux conditions suivantes :
- le projet ELFM concerne une décharge;
- le déblaiement et le redéveloppement sont repris dans un projet d’assainissement du sol ou génère un gain de matières premières, d’énergie ou d’espace.
c) à partir du 1er juillet 2016 : 15 euros par tonne pour le déversement sur une décharge autorisée à cet effet de résidus sableux non recyclables provenant d’installations PST, pour lesquels, selon l’avis de l’OVAM, un mode de traitement autre que le déversement entraînerait des coûts déraisonnablement élevés ou serait impossible;
7° pour le déversement sur une décharge autorisée à cet effet, de résidus provenant du traitement de boues d’avaloirs dans des installations autorisées à cet effet : 3 euros par tonne.
Ce taux vaut jusqu’au quatrième trimestre de 2017;
8° pour le déversement sur une décharge autorisée à cet effet, de résidus de boues provenant de l’assainissement de sables tamisés dans des entreprises autorisées à cet effet :
3 euros par tonne. Ce taux vaut jusqu’au quatrième trimestre de 2017;
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9° pour le déversement sur une décharge autorisée à cet effet de déchets immobilisés incombustibles provenant d’entreprises autorisées à cet effet, à condition que l’immobilisation soit nécessaire afin de répondre aux conditions d’autorisation de la décharge : 23 euros par tonne. Un tarif de 30 euros par tonne s’applique à partir du 1er juillet 2016. Même dans le cas d’une exportation vers une autre région ou un autre Etat-membre, le tarif ne s’applique qu’aux déchets incombustibles pour lesquels il est démontré que l’immobilisation est nécessaire afin de répondre aux conditions de déversement des déchets concernés en vigueur en Région flamande;
10° pour le déversement de déchets d’oxydes de fer provenant de la production du zinc, notamment le jarosite et le goethite, sur une décharge autorisée à cet effet : 5 euros par tonne;
11° pour le déversement de déchets de plâtre et de déchets contenant du chlorure de calcium en provenance de la production d’acides phosphoriques et de processus métallurgiques sur une décharge autorisée à cet effet : 1 euro par tonne. Pour les années d’imposition 2013 et 2015, ce taux s’applique également au déversement sur une décharge autorisée à cet effet de déchets de plâtre collectés sélectivement, provenant d’entreprises qui transforment des déchets de plâtre collectés sélectivement en matières premières pour la production de nouveaux produits de plâtre qui, conformément à l’avis d’OVAM, ne peuvent pas être recyclées. A partir du 1er janvier 2019, ce tarif vaut également pour le déversement sur une décharge autorisée de boues à base de gypse de la production de chlorure de calcium et de scories de plomb de procédés métallurgiques. A partir du 1er juillet 2016 jusqu’à l’année 2027 incluse, ce tarif s’applique également aux résidus non recyclables de déchets de plâtre collectés sélectivement, provenant d’entreprises qui transforment des déchets de plâtre collectés sélectivement en matières premières pour la production de nouveaux produits de plâtre. Ce tarif s’applique à une quantité qui s’élève à 15 % pour 2016 et pour à partir de 2017 jusqu’à l’année 2027 incluse à 10 % de la quantité de déchets de plâtre collectés sélectivement apportés aux entreprises concernées;
12° pour le déversement de schlamm de minerai provenant de la production de pigments de dioxyde de titane selon le procédé au chlore sur une décharge autorisée à cet effet : 5 euros par tonne;
13° pour le déversement de boues de dragage sur une décharge autorisée à cet effet :
0,1 euro par tonne;
14° pour le déversement de boues de curage sur une décharge autorisée à cet effet :
0,1 euro par tonne;
15° pour le déversement de déchets inertes et de boues en provenance de la production d’eau potable sur une décharge autorisée à cet effet : 11 euros par tonne;
16° pour l’incinération de déchets ménagers, déchets ménagers prétraités, déchets médicaux, boues d’épuration d’eaux d’égouts et autres boues industrielles dans une installation autorisée à cet effet : 7 euros par tonne;
16°/1 pour l’incinération de déchets industriels autres que ceux visés au point 16° dans une installation autorisée à cet effet : 25 euros par tonne. Ce tarif est d’application à partir du 1er janvier 2022;
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17° pour la co-incinération de déchets ménagers, déchets ménagers prétraités, déchets médicaux, boues d’épuration d’eaux d’égouts et autres boues industrielles dans une installation autorisée à cet effet : 7 euros par tonne;
17°/1 pour la co-incinération de déchets industriels autres que ceux visés au point 17° dans une installation autorisée à cet effet : 25 euros par tonne. Ce tarif est d’application à partir du 1er janvier 2022;
18° pour le triage ou le prétraitement de déchets dans un établissement autorisé [lire : une installation autorisée] à cet effet : les montants conformément aux points 1° au 17° inclus, qui sont déterminés par le mode de traitement appliqué sur les déchets non recyclés ou réutilisés.
Lorsque le traitement de déchets non recyclés ou non réutilisés se fait en dehors de la Région flamande, les dispositions du point 19°, mentionné ci-dessous, sont d’application ».
B.1.3. L’exposé des motifs apporte les explications suivantes à la suppression de la règle de déduction :
« Lorsqu’elle a été introduite, cette disposition, par son mécanisme de déduction de la taxe applicable dans le pays ou la région où sont traités les déchets, visait en premier lieu le transfert interrégional de déchets de la Flandre vers Bruxelles et la Wallonie. La même règle existe également pour le transport depuis la Wallonie vers la Flandre (article 21 du décret fiscal du 22 mars 2007 favorisant la prévention et la valorisation des déchets en Région wallonne).
En pratique, la règle est également appliquée à l’exportation vers la France (déduction de la TGAP : taxe générale sur les activités polluantes) et les Pays-Bas (déduction de la taxe néerlandaise sur les déchets). La France et les Pays-Bas sont à l’heure actuelle les seuls États membres avoisinants à prélever une taxe similaire.
Les Pays-Bas appliquent eux aussi une taxe à l’exportation pour certains déchets, sans toutefois prévoir la possibilité de déduire de la taxe sur les déchets due aux Pays-Bas la taxe similaire qui est applicable en Flandre, par exemple. Pareille exportation nécessite l’acquittement intégral de la taxe tant aux Pays-Bas qu’en Flandre.
La règle de déduction mobilise des ressources financières flamandes afin de promouvoir des conditions équitables pour le traitement des déchets en dehors de la Flandre par rapport au traitement de ces mêmes déchets en Flandre. Ce mécanisme permet d’aboutir à des conditions équitables en exonérant sur le lieu de destination le traitement des déchets importés.
[...]
En ce qui concerne la capacité d’incinération des déchets, la Flandre, soucieuse de ne pas trop faciliter l’incinération des déchets, a respecté ces dernières années un planning de capacité strict.
La Flandre connaît une offre légèrement excédentaire de déchets, dont une partie doit donc forcément être exportée, plus précisément environ 10 à 15 % de l’offre totale de déchets combustibles (en 2021, 237 966 tonnes pour une offre totale de 2 168 213 tonnes).
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Contrairement à la Flandre, les Pays-Bas présentent une surcapacité d’incinération des déchets. Étant donné que les incinérateurs entraînent de toute manière des coûts fixes, liés par ailleurs à des contrats de fourniture d’énergie, les Pays-Bas entendent de toute façon les faire tourner à pleine capacité, quitte à proposer l’incinération à des tarifs qui ne couvrent pas les frais réels.
Cette situation crée des conditions inéquitables et il est de plus en plus difficile pour les entreprises de traitement flamandes de continuer à assurer les apports de déchets.
À cela s’ajoute qu’il est de moins en moins fréquent que les redevances écologiques soient payées en Flandre, vu qu’il existe aux Pays-Bas une ‘ redevance écologique similaire ’ (33,58 euros/tonne, en 2022), qui est déduite de la taxe prélevée en Flandre sur l’exportation de déchets flamands.
Ainsi, à compter de 2020 et surtout en 2021, l’exportation des déchets concernés a augmenté de plus de 50 % (de 90 872 tonnes en 2019 à 114 253 tonnes en 2020 et 148 739 tonnes en 2021) »
(Doc. parl., Parlement flamand, 2022-2023, n° 1466/1, pp. 31-32).
Le même exposé des motifs poursuit :
« La suppression de la règle de déduction vise presque exclusivement l’exportation de déchets en vue de leur (co-)incinération. Cette modification a en premier lieu pour objectif de garantir la viabilité économique de la capacité de traitement en Flandre, dès lors qu’elle est en concurrence avec une capacité de traitement extérieure à la Flandre et qu’elle est pour l’heure désavantagée en raison de cette règle de déduction. Ces derniers mois, cette situation a d’ailleurs conduit à une sous-utilisation des capacités de traitement en Flandre.
Pour le déversement, la suppression de la règle de déduction n’a aucune incidence, puisque l’exportation à des fins de déversement (en dehors de la Belgique) n’est pas autorisée (principe d’autosuffisance). Il n’est pas non plus permis de procéder directement au déversement de déchets flamands en Wallonie sans dérogation préalable des autorités wallonnes (qui n’est généralement pas accordée dans la pratique).
L’exportation de déchets en vue de leur co-incinération concerne des déchets dont il est préférable qu’ils soient traités dans l’installation la plus proche, non seulement pour limiter l’incidence environnementale (distance de transport aussi courte que possible), mais aussi pour des raisons politiques (préservation de l’autosuffisance et de la rentabilité des capacités de traitement en Flandre). La règle de déduction actuelle facilite donc l’exportation que notre politique cherche à limiter autant que possible. La suppression de la règle de déduction constitue aussi à cet égard une simplification administrative » (ibid., p. 33).
B.1.4. En ce qui concerne les montants visés à l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 19°, du décret du 23 décembre 2011, la « redevance » écologique est due « au moment [où] les déchets produits en Région flamand[e] sont transférés en vue de leur traitement en dehors de la Région flamande ».
Pour les traitements qui ont lieu sur le territoire de la Région flamande, elle est due « au moment
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[où] les déchets sont traités dans les [installations visées] à l’article 46, § 1er, alinéa premier, 1° à 18° compris, et § 2, alinéa premier » (article 47, alinéa 1er, du décret du 23 décembre 2011).
En vertu de l’article 45, alinéa 1er, du décret du 23 décembre 2011, les redevables sont « les exploitants des installations soumis[es] à autorisation, visées à l’article 46, § 1er, alinéa premier, 1° à 18° inclus, et § 2, alinéa premier, ainsi que les entreprises et installations [...] qui collectent ou transportent des déchets sur une base professionnelle et des commerçants ou agents de déchets, en vue de leur traitement en dehors de la Région flamande, visés à l’article 46, § 1er, alinéa premier, 19° ».
Quant à l’intérêt
B.2.1. Le Gouvernement flamand conteste l’intérêt des parties requérantes.
B.2.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d’un intérêt. Ne justifient de l’intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée; il s’ensuit que l’action populaire n’est pas admissible.
B.2.3. Les deuxième à neuvième parties requérantes sont des entreprises actives dans le secteur du traitement des déchets. Elles ont intérêt à attaquer une disposition qui supprime la possibilité de déduire de la « redevance » écologique flamande à laquelle elles sont soumises une taxe écologique similaire qui est applicable dans la région ou le pays où sont traités les déchets.
Dès lors que les deuxième à neuvième parties requérantes justifient d’un intérêt à agir et que leur recours est recevable, la Cour ne doit pas examiner s’il l’est aussi pour la première partie requérante.
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Quant aux moyens
En ce qui concerne le premier moyen
B.3. Le premier moyen est pris de la violation, par l’article 35, 4°, du décret-programme du 16 décembre 2022, de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (ci-après : la loi spéciale du 8 août 1980), lu en combinaison avec les articles 28, 29 et 30 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après : le TFUE). Selon les parties requérantes, la disposition attaquée a pour conséquence que la « redevance » écologique prévue par le décret du 23 décembre 2011 doit être qualifiée de taxe interdite d’effet équivalent à un droit d’entrée ou de sortie. Elle donnerait lieu à tout le moins à une entrave injustifiée à la libre circulation ou à une imposition intérieure à caractère protectionniste et discriminatoire.
B.4. L’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose :
« En matière économique, les Régions exercent leurs compétences dans le respect des principes de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux et de la liberté de commerce et d’industrie, ainsi que dans le respect du cadre normatif général de l’union économique et de l’unité monétaire, tel qu’il est établi par ou en vertu de la loi, et par ou en vertu des traités internationaux ».
B.5.1. La « redevance » en cause n’apparaît pas comme la rétribution d’un service fourni par l’autorité au profit du redevable, considéré individuellement. Il ne s’agit donc pas d’une redevance, mais d’une taxe.
B.5.2. L’exercice par une région de la compétence fiscale propre qui lui a été attribuée ne peut porter atteinte à la conception globale de l’État telle qu’elle se dégage des réformes de l’État successives ainsi que des lois spéciales et ordinaires déterminant les compétences respectives de l’autorité fédérale, des communautés et des régions.
Il ressort de l’ensemble de ces dispositions, et notamment de celles de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 – inséré par l’article 4, § 8, de la loi spéciale du 8 août 1988 modifiant la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles –, et de l’article 49,
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§ 6, alinéa 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions que la structure de l’État belge repose sur une union économique et monétaire caractérisée par un marché intégré et l’unité de la monnaie.
Bien que l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 s’inscrive dans l’attribution de compétences aux régions en ce qui concerne l’économie, cette disposition traduit la volonté du législateur spécial de maintenir une réglementation de base uniforme de l’organisation de l’économie dans un marché intégré.
L’existence d’une union économique implique au premier chef la libre circulation des marchandises et des facteurs de production entre les composantes de l’État. Sont incompatibles avec une union économique, pour ce qui est des échanges de biens, les mesures établies de façon autonome par les composantes de l’union – en l’espèce, les régions – qui entravent la libre circulation. Il en va nécessairement de même pour tout droit de douane intérieur et toute taxe d’effet équivalent.
B.5.3. Pour une définition du concept de taxe d’effet équivalent à un droit de douane, il peut être renvoyé mutatis mutandis à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.
Selon la Cour de justice, « constitue une taxe d’effet équivalent à un droit de douane toute charge pécuniaire, même minime, unilatéralement imposée, quelles que soient son appellation et sa technique, et frappant les marchandises en raison du fait qu’elles franchissent une frontière, lorsqu’elle n’est pas un droit de douane proprement dit. En revanche, une charge pécuniaire résultant d’un régime général d’impositions intérieures appréhendant systématiquement selon les mêmes critères objectifs des catégories de produits indépendamment de leur origine ou de leur destination relève de l’article 110 TFUE, qui interdit les impositions intérieures discriminatoires » (CJUE, 6 décembre 2018, C-305/17, FENS, ECLI:EU:C:2018:986, point 29).
La Cour de justice s’est également penchée sur la distinction entre taxe d’effet équivalent et imposition intérieure de nature générale et a jugé que « la caractéristique essentielle d’une taxe d’effet équivalent, qui la distingue d’une imposition intérieure de nature générale, réside dans la circonstance que la première frappe exclusivement le produit qui franchit la frontière en tant que tel, tandis que la seconde frappe à la fois des produits importés, exportés et nationaux »
et que, « pour relever d’un système général d’‘ impositions intérieures ’, au sens de l’article 110
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TFUE, la charge fiscale considérée doit frapper le produit intérieur et le produit exporté identique d’un même impôt au même stade de la commercialisation et le fait générateur de l’impôt doit, lui aussi, être identique » (ibid., points 37 et 40; voy. aussi CJUE, 2 octobre 2014, C-254/13, Orgacom, ECLI:EU:C:2014:2251, points 28 et 29; 21 septembre 2000, C-441/98 et C-442/98, Michaïlidis, ECLI:EU:C:2000:479, points 22 et 23).
B.6.1. La disposition attaquée n’introduit pas une nouvelle taxe, mais modifie l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 19°, du décret du 23 décembre 2011, qui fixe le montant de la taxe sur les déchets produits en Région flamande qui sont transportés en vue de leur traitement dans une installation autorisée à cet effet en dehors de la Région flamande.
B.6.2. À l’égard d’une version antérieure de cette taxe, qui était prélevée sur la collecte de déchets et non sur leur transport vers une région ou un pays différents, la Cour a estimé, par son arrêt n° 51/98 du 20 mai 1998 (ECLI:BE:GHCC:1998:ARR.051), qu’elle ne constituait pas une taxe d’effet équivalent à un droit de douane :
« B.3.4. En l’espèce, il échet d’observer que le montant de la taxe est fixé, selon la disposition présentement attaquée, conformément aux ‘ montants indiqués sous les points 1° à 37° inclus, suivant le procédé de traitement appliqué ’ et que le montant de la taxe due en vertu du décret flamand est réduit lorsqu’une taxe d’environnement analogue est levée dans la région ou le pays où les déchets sont traités. Contrairement aux dispositions précédentes qui ont été annulées par la Cour, la collecte de déchets en vue de leur traitement en dehors de la Région flamande n’est pas taxée plus lourdement que le traitement des déchets dans cette Région.
La disposition attaquée ne se présente donc pas comme une taxe d’effet équivalent à un droit de douane; elle n’est dès lors pas contraire à l’union douanière inhérente à l’union économique et monétaire belge.
B.3.5. Certes la taxe litigieuse est-elle due au moment de la collecte des déchets, alors que la collecte des déchets traités dans la Région flamande n’est pas taxée.
Les dispositions attaquées doivent toutefois être lues en corrélation avec les autres dispositions du décret relatif aux déchets et en particulier avec l’article 47, § 2, 1° à 37°, qui soumet les déchets traités dans la Région flamande à une taxe d’environnement, en fonction du mode de traitement, à concurrence des montants auxquels la disposition attaquée fait référence.
Le fait que le redevable de la taxe et le moment où la taxe est due ne sont pas les mêmes ne permet pas de conclure que la mesure doive être considérée comme une entrave illicite à la libre circulation des déchets.
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En l’espèce, le traitement neutre, d’un point de vue fiscal, n’entrave pas la libre circulation des déchets puisqu’un même tarif de taxation est applicable, que les déchets soient traités dans ou hors de la Région flamande ».
B.6.3. En l’espèce, il apparaît toutefois que la taxe présentement examinée, telle qu’elle a été introduite par l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 19°, du décret du 23 décembre 2011 et modifiée par la disposition attaquée, présente bien les caractéristiques d’une taxe d’effet équivalent à un droit de douane.
Tout d’abord, cette taxe est liée au franchissement de la frontière territoriale de la Région flamande. En effet, il s’agit d’une taxe sur les déchets produits en Région flamande qui sont transportés en vue de leur traitement dans une installation autorisée à cet effet en dehors de la Région flamande, qui est due par « les entreprises et installations [...] qui collectent ou transportent des déchets sur une base professionnelle et des commerçants ou agents de déchets, en vue de leur traitement en dehors de la Région flamande, visés à l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 19° » (article 45, alinéa 1er, du décret du 23 décembre 2011), au moment où les déchets produits en Région flamande sont transférés en vue de leur traitement en dehors de la Région flamande (article 47, alinéa 1er, 2°, du décret du 23 décembre 2011).
Par ailleurs, la taxe présentement examinée décourage le transport de déchets en dehors de la Région flamande, nonobstant l’alignement du taux de la taxe sur celui qui s’applique lorsque le traitement a lieu en Région flamande. La suppression de la règle de déduction par la disposition attaquée a pour conséquence qu’il sera souvent nettement plus onéreux de traiter en dehors de la Région flamande des déchets qui y sont produits. En effet, la taxe flamande reste due intégralement, même si une taxe similaire doit être payée après le transfert. Il ressort d’ailleurs des travaux préparatoires cités en B.1.3 que tel est l’objectif de la disposition attaquée.
Enfin, contrairement à ce que prétend le Gouvernement flamand, l’on ne peut, en tout état de cause, pas considérer la taxe concernée comme une imposition intérieure de nature générale en la lisant en combinaison avec les taxes qui, en vertu de l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 1° à 18°, et § 2, du décret du 23 décembre 2011, sont dues pour le traitement de déchets en Région flamande. En effet, les taxes n’interviennent pas au même stade de commercialisation. La taxe concernée est due lors du transfert des déchets, alors que les taxes visées à l’article 46, § 1er,
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alinéa 1er, 1° à 18°, et § 2, du décret du 23 décembre 2011 sont dues lors de leur traitement (article 47, alinéa 1er, 1°, du décret du 23 décembre 2011). En outre, il ne s’agit pas des mêmes redevables. Pour les taxes visées à l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 1° à 18°, et § 2, du décret du 23 décembre 2011, il s’agit des « exploitants des installations soumis[es] à autorisation [...]
visées à l’article 46, § 1er, alinéa premier, 1° à 18° inclus, et § 2, alinéa premier » et non des « entreprises et installations [...] qui collectent ou transportent des déchets sur une base professionnelle et des commerçants ou agents de déchets, en vue de leur traitement en dehors de la Région flamande, visés à l’article 46, § 1er, alinéa premier, 19° » (article 45, alinéa 1er, du décret du 23 décembre 2011).
B.7. Ainsi, la disposition attaquée constitue une entrave à la libre circulation, prohibée, qui porte atteinte à l’union économique et monétaire belge.
Le premier moyen est fondé.
B.8. Dès lors que les autres moyens ne peuvent donner lieu à une annulation plus étendue, ils ne doivent pas être examinés.
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Par ces motifs,
la Cour
annule l’article 35, 4°, du décret-programme flamand du 16 décembre 2022
« accompagnant le budget 2023 ».
Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 27 juin 2024.
Le greffier, Le président,
Frank Meersschaut Luc Lavrysen


Synthèse
Numéro d'arrêt : 71/2024
Date de la décision : 27/06/2024
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2024
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2024-06-27;71.2024 ?

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