Cour constitutionnelle
Arrêt n° 76/2024
du 4 juillet 2024
Numéros du rôle : 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049
En cause : les recours en annulation totale ou partielle du décret de la Région flamande du 23 décembre 2022 « modifiant la loi du 28 décembre 1964 relative à la lutte contre la pollution atmosphérique, le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, le décret du 13 juillet 2012 contenant les dispositions accompagnant le deuxième ajustement du budget 2012 et le décret du 17 décembre 2021 modifiant le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, en ce qui concerne les allocations au Fonds de l’Energie, les modifications relatives à la flexibilité et au partage d’énergie, le développement de la plateforme de données énergétiques et la révision des amendes administratives en matière d’exigences d’installation », introduits par la SA « A&U Energie », par la SA « E-Wood Energiecentrale » et l’ASBL « Organisatie voor Duurzame Energie Vlaanderen », par l’ASBL « Denuo », par l’ASBL « Boerenbond » et autres et par la SPRL « Wervic ».
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents Luc Lavrysen et Pierre Nihoul, et des juges Thierry Giet, Joséphine Moerman, Michel Pâques, Yasmine Kherbache et Danny Pieters, assistée du greffier Nicolas Dupont, présidée par le président Luc Lavrysen,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet des recours et procédure
a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 22 juin 2023 et parvenue au greffe le 23 juin 2023, la SA « A&U Energie », assistée et représentée par Me Wouter Vandorpe et Me David Haverbeke, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un recours en annulation des articles 26 et 61 du décret de la Région flamande du 23 décembre 2022 « modifiant la loi du 28 décembre 1964 relative à la lutte contre la pollution atmosphérique, le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, le décret du 13 juillet 2012 contenant les dispositions accompagnant le deuxième ajustement du budget 2012 et le décret du 17 décembre 2021 modifiant le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, en ce qui concerne les allocations au Fonds de l’Energie, les modifications relatives à la flexibilité et au partage d’énergie, le développement de la plateforme de données énergétiques et la révision des amendes administratives en matière d’exigences d’installation » (publié au Moniteur belge du 29 décembre 2022).
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b. Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 27 et 28 juin 2023 et parvenues au greffe les 30 juin et 3 juillet 2023, des recours en annulation totale ou partielle de l’article 26 du même décret ont été introduits par la SA « E-Wood Energiecentrale »
et l’ASBL « Organisatie voor Duurzame Energie Vlaanderen », assistées et représentées par Me Tim Vermeir et Me Pieter De Bock, avocats au barreau de Bruxelles, par l’ASBL « Denuo », assistée et représentée par Me Kathleen De hornois et Me Dominique Vanherck, avocates au barreau de Bruxelles, par l’ASBL « Boerenbond », la SRL « Baanheidehof », la SRL « Agrokom », la SRL « Bostoen Tuinbouwbedrijf », la SRL « Bergseheyde » et la S. Agr. « Vanderstraeten », assistées et représentées par Me Tim Vermeir, et par la SPRL « Wervic », assistée et représentée par Me Dominique Blommaert, Me Guy Block, Me Michel Vandersmissen et Me Kris Wauters, avocats au barreau de Bruxelles.
Ces affaires, inscrites sous les numéros 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049 du rôle de la Cour, ont été jointes.
Le Gouvernement flamand, assisté et représenté par Me Jeroen Dewispelaere, Me Janek Nowak et Me Charlotte Reyns, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un mémoire, les parties requérantes ont introduit des mémoires en réponse et le Gouvernement flamand a également introduit un mémoire en réplique.
Par ordonnance du 10 avril 2024, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs Yasmine Kherbache et Michel Pâques, a décidé que les affaires étaient en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos à l’expiration de ce délai et les affaires seraient mises en délibéré.
À la suite de la demande de la partie requérante dans l’affaire n° 8049 à être entendue, la Cour, par ordonnance du 24 avril 2024, a fixé l’audience au 29 mai 2024.
À l’audience publique du 29 mai 2024 :
- ont comparu :
. Me Wouter Vandorpe, également loco Me David Haverbeke, pour la partie requérante dans l’affaire n° 8039;
. Me Liselotte Dupont, avocate au barreau de Bruxelles, loco Me Tim Vermeir et Me Pieter De Bock, pour les parties requérantes dans les affaires nos 8046 et 8048;
. Me Pieter-Jan Tots, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me Kathleen De hornois et Me Dominique Vanherck, pour la partie requérante dans l’affaire n° 8047;
. Me Guy Block et Me Michel Vandersmissen, pour la partie requérante dans l’affaire n° 8049;
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. Me Jeroen Dewispelaere, pour le Gouvernement flamand;
- les juges-rapporteurs Yasmine Kherbache et Michel Pâques ont fait rapport;
- les avocats précités ont été entendus;
- les affaires ont été mises en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. En droit
-A-
Quant à la recevabilité
A.1.1. Le Gouvernement flamand allègue que les parties requérantes dans les affaires nos 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049 ne justifient pas de l’intérêt requis à l’annulation de l’article 26, attaqué, du décret de la Région flamande du 23 décembre 2022 « modifiant la loi du 28 décembre 1964 relative à la lutte contre la pollution atmosphérique, le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, le décret du 13 juillet 2012 contenant les dispositions accompagnant le deuxième ajustement du budget 2012 et le décret du 17 décembre 2021 modifiant le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, en ce qui concerne les allocations au Fonds de l’Energie, les modifications relatives à la flexibilité et au partage d’énergie, le développement de la plateforme de données énergétiques et la révision des amendes administratives en matière d’exigences d’installation » (ci-après : le décret du 23 décembre 2022).
Plus particulièrement, elles ne justifieraient pas d’un intérêt actuel à leur recours, parce que leur intérêt est purement hypothétique. L’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 ne fait que créer un cadre général au sein duquel il sera dorénavant possible pour la « Vlaams Energie- en Klimaatagentschap » (l’Agence flamande de l’énergie et du climat, ci-après : la VEKA) d’actualiser, selon des paramètres à déterminer par le Gouvernement flamand, la partie non rentable des projets en cours et nouveaux de production écologique d’énergie. Dès lors que le Gouvernement flamand n’a pas encore établi ces paramètres, les parties requérantes ne peuvent pas encore estimer l’incidence que cette actualisation aura sur leurs projets. Ce n’est que sur la base de l’arrêté que le Gouvernement flamand prendra en vertu de la disposition attaquée qu’il sera possible, le cas échéant, de déterminer si les parties requérantes sont susceptibles d’être défavorablement affectées.
Dès lors que l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 ne fait que prévoir le principe de l’actualisation de la partie non rentable, il est impossible qu’il porte préjudice aux parties requérantes. Cette actualisation fera en effet seulement en sorte que l’aide apportée pendant la durée de vie d’un projet reste en adéquation avec les besoins de ce projet.
Par ailleurs, les parties requérantes ne justifieraient pas d’un intérêt licite, en ce que leurs recours visent à pouvoir prétendre à une surcompensation.
A.1.2. En ce qui concerne en particulier la partie requérante dans l’affaire n° 8039, le Gouvernement flamand soutient que celle-ci ne justifie en tout état de cause pas d’un intérêt à l’annulation des alinéas 1er, 2 et 4 de l’article 61 du décret du 23 décembre 2022, puisque ces dispositions ne portent pas sur l’actualisation de la partie non rentable.
A.2.1. La partie requérante dans l’affaire n° 8039 allègue qu’en sa qualité de propriétaire d’une installation de production de biomasse ayant droit à des certificats verts, elle justifie d’un intérêt à l’annulation de l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022. Il est en effet fort probable qu’elle reçoive moins de certificats en raison
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de la disposition attaquée, vu l’augmentation continue à long terme des prix de l’électricité. Il est suffisamment certain que cela aura une incidence directe sur sa capacité à rembourser les financements externes qu’elle a contractés et, partant, sur la viabilité de l’ensemble du projet. Le fait que les certificats de la partie requérante soient rendus sujets à une actualisation a par ailleurs déjà aujourd’hui une incidence directe sur sa position contractuelle vis-à-vis des parties contractantes.
Le fait que la mesure attaquée ne soit pas encore en vigueur, en raison de l’absence d’arrêtés d’exécution, ne prive pas la partie requérante de son intérêt à agir en justice. En juger autrement aurait pour effet que le législateur décrétal puisse échapper à des recours en annulation en ne faisant entrer les décrets en vigueur qu’après l’expiration du délai de recours.
A.2.2. Ensuite, la partie requérante dans l’affaire n° 8039 soutient qu’une partie requérante qui justifie d’un intérêt à l’annulation d’une disposition matérielle justifie également d’un intérêt à l’annulation de la disposition qui en règle l’entrée en vigueur. Par conséquent, elle justifie aussi d’un intérêt à l’annulation de l’article 61 du décret du 23 décembre 2022.
A.3. La première partie requérante dans l’affaire n° 8046 est propriétaire et exploitante d’une installation de cogénération qui a été mise en service en décembre 2022. Toutes les étapes ont été entreprises afin que cette installation puisse obtenir des certificats de cogénération. Au moment où la société a été créée et où les décisions d’investissement utiles ont été prises, il n’était pas question d’une actualisation annuelle du facteur de banding à partir de laquelle serait déterminée la quantité de certificats à octroyer. Une actualisation annuelle conformément à l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, et donc une modification potentielle du facteur de banding préétabli, entraînent une insécurité et influenceront automatiquement de manière défavorable la situation de la partie requérante.
La seconde partie requérante dans l’affaire n° 8046 est l’organisation qui représente les entreprises actives dans le secteur de l’énergie durable en Flandre. Elle ambitionne elle-même la réalisation d’une transition vers une énergie 100 % renouvelable. Elle justifie de l’intérêt requis à l’annulation de l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, qui est source de vives préoccupations et d’une grande incertitude parmi ses membres et qui nuit de ce fait au climat d’investissement, compliquant ainsi sérieusement la transition ambitionnée.
A.4. La partie requérante dans l’affaire n° 8047 compte quelque 200 membres actifs dans le secteur du traitement et du recyclage des déchets et a pour objet social « de veiller aux et de défendre les intérêts communs de ses membres à l’égard de tiers ». Elle compte parmi ses membres un grand nombre d’entreprises qui collectent des matières organiques non recyclables pour les convertir en biogaz. En tant que producteurs d’énergie verte, ces entreprises reçoivent à cette fin des certificats verts. Les membres de la partie requérante sont susceptibles d’être directement et défavorablement affectés par l’actualisation du facteur de banding prévue à l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, puisqu’un facteur plus faible se traduira par une aide plus faible, avec de lourdes répercussions sur la rentabilité des catégories de projets concernées.
La partie requérante conteste le point de vue du Gouvernement flamand selon lequel l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 ne fait que créer le cadre général pour procéder à l’actualisation du facteur de banding.
Le législateur décrétal a lui-même prévu des paramètres concrets aux fins de cette actualisation, tout en en rejetant explicitement d’autres. Ces paramètres, ainsi que le maintien de l’application de facteurs de banding maximaux pour l’actualisation de la partie non rentable, ont pour effet une prise en compte imparfaite de la structure de coûts des installations ayant des frais de carburant, ce qui menace la viabilité économique de telles installations. C’est dès lors bien l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 qui risque d’affecter directement et défavorablement la situation de la partie requérante. À tout le moins, l’examen de l’intérêt de la partie requérante se confond avec l’examen du fond de l’affaire.
A.5. La première partie requérante dans l’affaire n° 8048 est une organisation de défense des agriculteurs et horticulteurs belges. Elle serait personnellement affectée par l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, qui crée un cadre ayant pour effet de réduire à néant tout investissement en matière d’usage efficace de l’énergie et qui a donc une incidence négative sur les initiatives en matière de comptabilités de gestion agricoles et d’optimisation de la production que la partie requérante est susceptible de développer pour ses membres. La partie requérante œuvre en outre à la création d’une situation socio-économique optimale pour tous ses membres. Cela englobe le droit de propriété, qui est violé par la disposition attaquée.
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Les deuxième à cinquième parties requérantes dans l’affaire n° 8048 exploitent des installations de cogénération et reçoivent des certificats de cogénération à cette fin. La sixième partie requérante exploite un digesteur « de poche » et reçoit elle aussi des certificats à cet effet. La possibilité d’une modification des certificats octroyés en raison de l’actualisation du facteur de banding, qui tend à une diminution de l’aide, influera automatiquement de manière défavorable sur la situation des parties requérantes.
A.6. La partie requérante dans l’affaire n° 8049 exploite une installation de cogénération et a droit pendant dix ans (du 19 avril 2018 au 19 avril 2028) à des certificats de cogénération avec application d’un facteur de banding fixe. L’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 vise à actualiser ce facteur. Dans la mesure où
cette actualisation du facteur de banding influera négativement sur la rentabilité de son projet ou lui procurera à tout le moins une base plus incertaine, la partie requérante justifie d’un intérêt à l’annulation de la disposition attaquée. Cette dernière, qui donne la possibilité au Gouvernement flamand de réduire l’intervention financière de la Région flamande dans les installations de cogénération, est par conséquent susceptible d’affecter directement et défavorablement la situation de la partie requérante.
Quant au fond
Affaire n° 8039
En ce qui concerne le premier moyen
A.7.1. Dans le premier moyen, la partie requérante allègue la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec le principe de la sécurité juridique, avec le principe de la motivation et avec le principe de la confiance légitime, ainsi que de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 « relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (refonte) » (ci-après : la directive (UE) 2018/2001), en ce que la disposition attaquée instaure l’actualisation de la partie non rentable tant pour les projets en cours que les projets nouveaux.
A.7.2. En ce qui concerne la violation du principe d’égalité et de non-discrimination garanti par les articles 10 et 11 de la Constitution, la partie requérante allègue que les projets en cours et les projets nouveaux se trouvent dans des situations fondamentalement différentes, en ce que les projets nouveaux peuvent anticiper sur une telle possibilité d’actualisation, ce qui n’est pas le cas des projets en cours.
La disposition attaquée n’est pas pertinente au regard de l’objectif de la sécurité d’investissement, que poursuivait au départ le décret du 13 juillet 2012 « contenant diverses mesures d’accompagnement du second ajustement du budget 2012 », qui prévoyait la non-application de l’actualisation pour les projets devant tenir compte de frais de carburant. La disposition attaquée ne peut pas non plus être justifiée par l’objectif de cette disposition consistant à tenir compte de l’augmentation rapide des prix de l’énergie. En effet, le législateur décrétal s’est servi d’un phénomène momentané pour justifier et imposer une modification profonde sur le long terme. Par ailleurs, le système de facteur de banding maximal permet déjà de lutter contre les compensations élevées. Les travaux préparatoires ne mentionnent en outre aucune étude qui démontrerait que les projets devant tenir compte de frais de carburant jouissent d’une surcompensation. C’est même tout le contraire qui ressort d’une étude du 7 décembre 2022 réalisée par le bureau d’études Oxera et commandée par la VEKA. La mesure ne trouve pas non plus de justification dans l’obligation qu’imposerait la Commission européenne de prendre une telle mesure par souci de compatibilité avec le marché interne.
Enfin, la disposition attaquée est disproportionnée, en ce qu’elle se traduit, pour quelques projets au moins, par une rentabilité devenue impossible ainsi que par de possibles pertes financières d’ampleur. La partie requérante renvoie à cet égard au fait que le régime décrétal permettait, avant la disposition attaquée, de définir la rentabilité selon les spécificités du projet, alors que l’actualisation instaurée par la disposition attaquée tient compte de paramètres simplifiés et généralisés ainsi que d’une rentabilité présumée par catégorie de projets. Dans le cas de la partie requérante, la disposition attaquée risque d’avoir une incidence directe sur sa capacité à rembourser les engagements qu’elle a contractés vis-à-vis de prêteurs externes. Les éventuels avantages financiers que l’État et le citoyen pourraient retirer de la limitation minime des surcompensations ne l’emportent pas sur ces préjudices.
A.7.3. En imposant des adaptations pour les projets déjà en cours, la disposition attaquée viole également l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001. Il ressort clairement de cette disposition que les montants déjà versés
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dans le cadre de l’aide financière ne peuvent pas être simplement récupérés, mais aussi que cela vaut plus largement pour les droits conférés dans ce cadre relativement à un projet. Toute modification apportée à un régime d’aide ne peut avoir une incidence négative sur les droits conférés dans ce cadre et ne peut compromettre la viabilité économique des projets déjà soutenus. Dans le cas présentement examiné, il est difficile de nier que la modification attaquée produit de tels effets pour les droits conférés. S’il devait y avoir le moindre doute au sujet de l’interprétation de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001, il y aurait lieu de poser à la Cour de justice de l’Union européenne une question préjudicielle à cet égard.
A.7.4. Enfin, la disposition attaquée viole le principe de la sécurité juridique et le principe de la confiance légitime, en ce qu’il est porté atteinte à l’attente légitime de la partie requérante selon laquelle aucune actualisation ne serait instaurée pour les projets devant tenir compte de frais de carburant, de même qu’elle viole le principe de la motivation, en ce que les travaux préparatoires du décret du 23 décembre 2022 ne précisent pas la raison pour laquelle la disposition attaquée a été adoptée ni en quoi celle-ci serait juste et efficace. L’étude de Trinomics citée par le Gouvernement flamand ne saurait faire en sorte qu’il soit satisfait à l’obligation de motivation, dès lors que cette étude n’est pas mentionnée dans les travaux préparatoires et qu’elle porte essentiellement sur l’éolien et le biogaz. En outre, le passage cité traite de situations dans lesquelles il est question d’une période d’aide prolongée, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
A.7.5. Selon la partie requérante, le raisonnement développé dans l’arrêt de la Cour n° 8/2014 du 23 janvier 2014 (ECLI:BE:GHCC:2014:ARR.008) ne saurait être appliqué par analogie à l’affaire présentement examinée, dès lors que le principal argument avancé dans cet arrêt pour ne pas prononcer l’annulation est la présence d’un régime transitoire, qui n’existe pas en l’espèce.
A.8.1. Le Gouvernement flamand fait valoir qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour et de celle de la Cour de justice que le principe de la confiance légitime n’implique pas un droit au maintien inchangé d’un régime d’aide décrétal en faveur de l’énergie renouvelable. Le Gouvernement flamand renvoie en particulier à l’arrêt n° 8/2014, précité. La partie requérante ne pouvait pas ignorer cette jurisprudence au moment où elle a pris sa décision d’investissement.
Le législateur décrétal a dûment motivé la disposition attaquée. L’exposé des motifs renvoie ainsi aux « Lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie pour 2022 » (2022/C 80/01) de la Commission européenne (ci-après : les lignes directrices), dont découle l’obligation pour la Région flamande de modifier, pour le 31 décembre 2023 au plus tard, les régimes d’aide existants en faveur de la protection de l’environnement et de l’énergie afin de les mettre en conformité avec les lignes directrices. Il est en outre renvoyé à l’objectif général du système de certificats prévu par le décret de la Région flamande du 8 mai 2009 « portant les dispositions générales en matière de la politique de l’énergie » (ci-après : le décret sur l’Énergie), consistant à offrir de la sécurité aux investisseurs tout en limitant le plus possible les coûts pour la société, de même qu’il est renvoyé à la récente crise énergétique. Ces motifs du législateur décrétal sont validés par deux études de 2022 réalisées à la demande de la VEKA. Ces deux études indiquent que la non-actualisation de la partie non rentable en fonction des prix de l’électricité peut donner lieu à un sous-subventionnement et à un sursubventionnement des installations existantes et suggèrent d’instaurer pour toutes les installations une actualisation annuelle du facteur de banding, aussi bien pendant la période d’aide initiale que pendant la période d’aide prolongée. Des secteurs de l’électricité verte aussi ont émergé des signaux selon lesquels certaines installations engrangent effectivement d’importants bénéfices. À l’aune de ces études et de ces signaux, il n’est pas déraisonnable que le législateur décrétal ait prévu l’instauration, au moyen de la disposition attaquée, d’un cadre en vue de l’actualisation générale des parties non rentables en fonction de la production d’électricité et des autres coûts et/ou recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet.
Le Gouvernement flamand souligne ensuite que la disposition attaquée n’aura une incidence que sur les certificats verts et les certificats de cogénération qui seront octroyés à l’avenir, si bien qu’elle ne vise pas les certificats définitivement acquis.
Par ailleurs, la disposition attaquée garantit la rentabilité des investissements qui ont déjà été réalisés dans le passé. Cela résulte du fonctionnement même du système de subventionnement sur la base de la partie non rentable, puisque celui-ci tend précisément à ce que l’ampleur de l’aide dépende de la rentabilité des installations. Il en va de même de l’actualisation de la partie non rentable instaurée par la disposition attaquée, dès lors que cette actualisation permet une évolution du montant de l’aide en fonction des besoins du projet au fil du temps et que la disposition attaquée élargit les paramètres relatifs à l’actualisation de la partie non rentable. La préservation de la rentabilité des projets bénéficiaires de certificats étant ainsi inhérente à la méthode d’actualisation de la partie non rentable, il n’était pas nécessaire d’instaurer un régime transitoire pour les projets existants. Cela étant, une garantie
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de rentabilité n’implique pas la garantie de réaliser les bénéfices les plus élevés possibles ni de bénéficier d’un flux constant de recettes tout au long du projet. Le principe de la confiance légitime ne contient pas un droit à l’obtention de recettes constantes et/ou d’une surcompensation pendant toute la durée du projet. En tout état de cause, la partie requérante ne démontre pas que la rentabilité ou la viabilité économique de son projet sont compromises par la disposition attaquée.
À la lumière de ce qui précède, il n’est pas non plus question d’une violation de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001. La disposition attaquée vise en effet à aligner le régime d’aide existant sur les règles en matière d’aides d’État, ce qui est permis, et elle ne porte en tout état de cause pas atteinte aux droits déjà conférés ni ne met en péril la viabilité économique des projets déjà soutenus. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’accéder à la demande de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne.
A.8.2. En ce qui concerne en particulier la violation du principe d’égalité garanti par les articles 10 et 11 de la Constitution, le Gouvernement flamand allègue qu’il n’y a aucune raison, à la lumière de l’objectif de la disposition attaquée consistant à éviter tout sous-subventionnement ou tout sursubventionnement, de traiter différemment les projets nouveaux et les projets en cours. Les deux catégories ont tout autant intérêt à ce que l’aide fournie pendant la durée du projet puisse être adaptée en fonction des besoins de ce projet. Aussi ne se trouvent-
elles pas dans des situations essentiellement différentes pour ce qui concerne les effets de la disposition attaquée.
En tout état de cause, la disposition attaquée ne compromet pas la rentabilité des projets existants et la sécurité d’investissement des installations existantes est garantie. La mesure est donc à tout le moins proportionnée à l’objectif poursuivi.
En ce qui concerne le deuxième moyen
A.9.1. Dans le deuxième moyen, la partie requérante invoque la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec le principe de la sécurité juridique, avec le principe de la motivation et avec le principe de la confiance légitime, en ce que l’actualisation de la partie non rentable est instaurée pour les installations avec une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013 qui doivent tenir compte de frais de carburant, alors que les installations avec une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013 qui doivent tenir compte de frais de carburant demeurent exemptées.
A.9.2. En ce qui concerne la violation du principe d’égalité et de non-discrimination garanti par les articles 10 et 11 de la Constitution, la partie requérante allègue que ces deux catégories d’installations se trouvent dans des situations identiques, en ce que ces deux catégories concernent des installations qui sont situées en Région flamande, qui peuvent développer et appliquer les mêmes technologies, qui doivent prendre en compte des frais de carburant au niveau de la partie input et qui peuvent fournir une électricité et une chaleur d’un même degré de durabilité. La distinction ne se fait qu’au niveau de la date de mise en service. Ce critère n’est pas pertinent au regard de l’objectif allégué de la mesure attaquée, à savoir éviter tout risque de surcompensation. Il apparaît en revanche que le risque de surcompensation est plus grand pour les installations ayant une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013. Pour le même motif que celui qui est exposé dans le premier moyen (A.7.2), la disposition attaquée n’est pas proportionnée.
A.9.3. En ce qui concerne la violation alléguée du principe de la sécurité juridique et du principe de la confiance légitime, la partie requérante renvoie à son exposé relatif au premier moyen (A.7.3).
A.10.1. Le Gouvernement flamand souligne que les installations de production ayant une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013 ne peuvent plus prétendre à l’obtention de certificats verts ni de certificats de cogénération, puisqu’elles ne devaient en principe recevoir des certificats verts que pendant une période de dix ans. L’aide pour ces installations s’est donc en principe arrêtée au plus tard au 31 décembre 2022. Il n’existe une exception à cette règle que pour les installations de fermentation LFJ avec postcompostage ayant une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013, qui pouvaient prétendre à une aide minimale pendant une période de vingt ans. Il apparaît toutefois en pratique que plus aucune installation de ce type avec une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013 ne reçoit encore des aides aujourd’hui en Région flamande. Par conséquent, le législateur décrétal n’a pas jugé utile de modifier également l’article 7.1.4/1, § 4, du décret sur l’Énergie pour ce qui concerne les installations de production ayant une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013.
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Puisque le législateur décrétal n’a pas souhaité s’approprier le contenu de cette disposition et n’a pas non plus exprimé la volonté de confirmer cette disposition ou de légiférer à nouveau, le recours est, sur ce point, irrecevable ratione temporis.
A.10.2. À titre subsidiaire, le Gouvernement flamand souligne que les deux catégories d’installations ne sont pas comparables, parce qu’elles sont soumises, en fonction de leur date de mise en service, à deux régimes décrétaux différents à la suite de l’entrée en vigueur en 2012 des modifications du régime décrétal d’aide en matière d’énergie renouvelable. La Cour a jugé, par son arrêt n° 8/2014, précité, que cette distinction était conforme aux articles 10 et 11 de la Constitution.
En ce qui concerne le troisième moyen
A.11. Dans le troisième moyen, la partie requérante invoque la violation, par les articles 26 et 61 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 108 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après : le TFUE).
Puisque les dispositions attaquées contiennent une modification de l’aide d’État existante, ces dispositions devaient, en vertu de l’article 108, paragraphe 3, du TFUE, être notifiées comme nouvelle aide d’État, ce qui n’a pas eu lieu.
A.12. Selon le Gouvernement flamand, le troisième moyen dans l’affaire n° 8039 est irrecevable, puisque la Cour n’est pas compétente pour examiner une norme législative directement au regard de dispositions conventionnelles.
Affaire n° 8046
En ce qui concerne le premier moyen
A.13.1. Dans le premier moyen, les parties requérantes invoquent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec le principe de la sécurité juridique et avec le principe de la confiance légitime.
A.13.2. Dans la première branche du premier moyen, les parties requérantes visent l’identité de traitement entre les producteurs d’électricité verte qui utilisent des installations de production ayant des frais de carburant, comme les installations de biomasse, et les producteurs d’électricité verte qui utilisent des installations de production n’ayant pas de frais de carburant, comme les panneaux solaires et les éoliennes. Or, ces catégories se trouvent dans des situations essentiellement différentes, en ce que les exploitants d’installations ayant des frais de carburant sont confrontés à des coûts opérationnels importants, contrairement aux exploitants d’installations n’ayant pas de frais de carburant. Compte tenu de cette différence essentielle, l’actualisation de la partie non rentable et du facteur de banding a, jusqu’à l’intervention de la disposition attaquée, toujours fait l’objet pour ces deux catégories d’installations de régimes distincts. L’identité de traitement instaurée par la disposition attaquée aura pour effet, en ce qui concerne les installations ayant des frais de carburant, que tous les coûts qui auront augmenté ne seront pas pris en compte, alors que toutes les recettes qui auront prétendument augmenté, elles, le seront.
L’identité de traitement ne saurait être justifiée par l’objectif d’éviter les sous-subventionnements ou les sursubventionnements. Il ressort en effet de l’étude du 7 décembre 2022, précitée, réalisée par Oxera à la demande de la VEKA qu’aucun risque important ne se pose sur ce point en ce qui concerne les installations de biomasse.
L’on ne saurait non plus prétendre que la disposition attaquée contribue à l’« efficacité économique » ou à la « sécurité d’investissement ». En effet, des flux importants de coûts auxquels sont confrontées les installations ayant des frais de carburant ne sont pas pris en compte pour l’actualisation, ce qui aura une incidence considérable sur la rentabilité de ces installations de production. En tout état de cause, la contribution éventuelle à ces motifs d’intérêt général n’est pas proportionnée à l’incidence que la disposition attaquée aura sur les producteurs d’électricité verte qui utilisent des installations ayant des frais de carburant.
A.13.3. Dans la deuxième branche du premier moyen, les parties requérantes visent l’identité de traitement entre deux catégories différentes de producteurs d’électricité verte et de chaleur qui utilisent des installations de production ayant des frais de carburant, à savoir les producteurs qui ont pris leur décision d’investissement avant l’entrée en vigueur de la disposition attaquée et les producteurs qui ont pris leur décision d’investissement après cette entrée en vigueur.
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Tandis que les producteurs relevant de la première catégorie ont pris leur décision d’investissement en tenant compte d’un facteur de banding qui est fixe en vertu de la réglementation applicable et qui garantit un flux de recettes important et stable, les producteurs relevant de la seconde catégorie peuvent prendre leur décision d’investissement en tenant compte de l’insécurité qui découle de l’actualisation annuelle du facteur de banding et prévoir la flexibilité nécessaire pour prendre en compte des circonstances changeantes. Partant, ces deux catégories se trouvent dans des situations essentiellement différentes au regard de la disposition attaquée.
Il n’y a aucun motif légitime d’intérêt général qui justifie que les deux catégories soient traitées de la même manière. Il n’est à tout le moins nullement question de proportionnalité au regard de l’objectif poursuivi. Les parties requérantes renvoient à cet égard à leur exposé relatif à la première branche du premier moyen (A.13.2).
A.13.4. Dans la troisième branche du premier moyen, les parties requérantes critiquent la différence de traitement entre les producteurs d’électricité verte qui recourent à leur propre personnel pour l’exploitation de leur installation et les producteurs d’électricité verte qui recourent entièrement ou partiellement à des prestataires externes pour cette exploitation, en ce que les frais de personnel relatifs aux effectifs internes ne seront pas pris en compte pour l’actualisation de la partie non rentable, à la différence des frais relatifs aux prestations réalisées par des prestataires externes.
Au regard de la disposition attaquée, ces deux catégories de producteurs se trouvent dans des situations comparables. Elles font en effet chacune réaliser des travaux et des actes et exposent ainsi des frais pour faire tourner leur installation de production. Il n’est pas pertinent, à cet égard, de savoir si ces travaux et actes sont réalisés par du personnel interne ou par des prestataires externes. Le critère de distinction n’est pas pertinent au regard de l’objectif poursuivi par le législateur décrétal. La disposition attaquée est en tout état de cause disproportionnée.
A.13.5. Dans la quatrième branche du premier moyen, les parties requérantes allèguent que la disposition attaquée porte atteinte à l’attente légitime des producteurs d’électricité verte qui utilisent des installations de production ayant des frais de carburant selon laquelle le facteur de banding pour leur installation de biomasse ou de cogénération demeurerait inchangé tout au long de la période d’aide.
Aucun motif impérieux d’intérêt général ne saurait justifier la violation du principe de la confiance légitime et l’absence d’un régime transitoire. Il n’apparaît en effet nulle part qu’il existe des motifs fondés pour adapter le régime existant, sans la moindre disposition transitoire. Ainsi que l’indique l’exposé relatif à la première branche du premier moyen (A.13.2), l’on ne saurait trouver aucune justification dans la volonté d’éviter les sous-
subventionnements ou les sursubventionnements, d’améliorer l’efficacité économique ou de réduire le risque d’investissement. Et à supposer qu’il faille tout de même procéder à une actualisation du facteur de banding, il n’y a pas non plus la moindre justification à cet égard pour ne pas utiliser tous les paramètres initialement appliqués.
A.14.1. En ce qui concerne la première branche du premier moyen, le Gouvernement flamand allègue que les projets devant tenir compte de frais de carburant et les projets ne devant pas tenir compte de frais de carburant ne se trouvent pas dans des situations différentes au regard de l’objectif et des effets de la disposition attaquée, à savoir éviter le sous-subventionnement et le sursubventionnement de projets en matière d’énergie renouvelable.
Le fait qu’avant la disposition attaquée, le législateur décrétal prévoyait une différence de traitement entre les projets devant tenir compte de frais de carburant et les projets ne devant pas tenir compte de tels frais n’y change rien. Cette décision avait été dictée par une simple analyse administrative du rapport coûts-bénéfices. Il est toutefois apparu entre-temps que l’hypothèse sur laquelle l’exclusion était fondée auparavant, à savoir le fait que les prix élevés de l’électricité et les frais élevés de carburant se compenseraient de façon qu’un exercice d’actualisation donnerait lieu à des frais administratifs élevés proportionnellement aux gains d’efficacité, ne tient plus. Il n’est dès lors pas déraisonnable que le législateur décrétal entende dorénavant appliquer l’actualisation de la partie non rentable de la même manière pour les deux catégories de projets.
Quoi qu’il en soit, l’identité de traitement est raisonnablement justifiée. Il n’est pas disproportionné à l’objectif légitime précité que l’aide puisse ou doive être réduite en cas de sursubventionnement. L’on ne saurait en outre sérieusement prétendre que le législateur décrétal ne puisse intervenir que lorsqu’il existe un risque important de sursubventionnement. À la lumière, notamment, des lignes directrices, lesquelles contraignent les États membres à ajuster leurs régimes d’aide aux fins d’éviter tout sursubventionnement, le législateur décrétal pouvait décider qu’il était légitime et nécessaire d’instaurer le principe de l’actualisation de la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant. Par ailleurs, la disposition attaquée permet de prendre en considération les paramètres spécifiques liés aux différents projets et/ou catégories de projets, en ce qu’il sera
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dorénavant également tenu compte des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet et que le Gouvernement flamand est habilité à déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée. Il est par conséquent possible, pour l’actualisation, de tenir compte de coûts opérationnels autres que les frais de carburant.
A.14.2. En ce qui concerne la deuxième branche du premier moyen, le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative au premier moyen dans l’affaire n° 8039 (A.8.2).
A.14.3. En ce qui concerne la troisième branche du premier moyen, le Gouvernement flamand rappelle que les paramètres relatifs à l’actualisation de la partie non rentable ont été définis de manière suffisamment large, de sorte qu’ils permettent de tenir compte des différents coûts pouvant être associés aux différentes catégories de projets. C’est au bout du compte au Gouvernement flamand qu’il revient de déterminer de quelle manière les frais de personnel relatifs aux effectifs internes et les frais relatifs aux prestataires externes seront pris en compte ou non. Si les parties requérantes estiment que le Gouvernement flamand ne prend pas correctement en compte ces frais, elles peuvent introduire un recours contre l’arrêté d’exécution.
A.14.4. En ce qui concerne la quatrième branche du premier moyen, le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative au premier moyen dans l’affaire n° 8039 (A.8.1).
Le Gouvernement flamand ajoute que le moyen manque en fait, en ce qu’il y est invoqué que l’actualisation de la partie non rentable reposerait sur des paramètres trop strictement définis. Le moyen ignore ainsi l’habilitation expresse faite au Gouvernement flamand pour déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires devant être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée. Par ailleurs, le moyen énonce ainsi erronément que la disposition attaquée contient une limitation par rapport au régime actuel, alors que c’est l’inverse qui est vrai. En effet, l’actualisation ne se fait aujourd’hui que sur la base du prix de l’électricité.
En ce qui concerne le deuxième moyen
A.15. Dans le deuxième moyen, les parties requérantes invoquent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 170, § 2, de la Constitution et de l’article 1er de la loi du 23 janvier 1989 « relative à la compétence fiscale visée à l’article 110 [lire : article 170], §§ 1er et 2, de la Constitution ».
Selon les parties requérantes, la disposition attaquée instaure un impôt indirect sur la production d’électricité.
En réduisant l’aide accordée via les certificats, la disposition attaquée vise en effet à dégager indirectement des moyens pour l’autorité flamande. La disposition attaquée taxe les recettes des producteurs en compensant les recettes supplémentaires présumées de l’année écoulée par une aide plus faible pour l’année suivante.
Cependant, la production d’électricité est déjà soumise à un impôt fédéral. Plus précisément, le législateur fédéral a, par l’introduction d’un nouvel article 22ter dans la loi du 29 avril 1999 « relative à l’organisation du marché de l’électricité », instauré un prélèvement dans le cadre du plafond sur les recettes issues du marché des producteurs d’électricité. Les régions ne peuvent lever des impôts dans des matières que l’État fédéral impose déjà.
Le fait que la disposition attaquée ne soit pas encore entrée en vigueur ne change rien à ce qui précède. Même si cette disposition n’entre en vigueur qu’en 2024, la VEKA devra tenir compte, pour l’actualisation, des prix de 2023, à savoir l’année à laquelle s’applique l’impôt fédéral.
A.16. Le Gouvernement flamand estime que l’article 170, § 2, de la Constitution n’est pas applicable au cas d’espèce, puisque la disposition attaquée n’instaure pas un impôt. En effet, la disposition attaquée ne fait aucunement naître une créance fiscale à l’égard de l’autorité flamande. Elle s’inscrit par contre tout entière dans un mécanisme qui fait justement tout l’inverse d’un impôt, à savoir subventionner les producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. Il est à cet égard également possible que l’actualisation de la partie non rentable donne lieu à un montant d’aide plus élevé.
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En tout état de cause, il n’y a pas de violation du principe non bis in idem contenu dans l’article 170, § 2, de la Constitution. L’impôt fédéral sur les bénéfices excédentaires auquel la partie requérante se réfère et le principe de l’actualisation de la partie non rentable prévu par la disposition attaquée ont en effet clairement des portées et des champs d’application temporels différents.
En ce qui concerne le troisième moyen
A.17.1. Dans le troisième moyen, les parties requérantes allèguent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 16 de la Constitution, lu en combinaison ou non avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme.
En imposant l’actualisation de la partie non rentable et du facteur de banding en fonction des prix du marché de l’énergie de l’année écoulée, la disposition attaquée affecte directement la propriété des producteurs. Une telle modification de la législation qui affecte la méthode de calcul des certificats octroyés prive en effet les producteurs d’actifs qu’ils percevraient si la législation n’était pas modifiée.
Cette réglementation de l’usage des biens ne ménage aucun juste équilibre entre les impératifs de l’intérêt général et les droits fondamentaux de l’individu. En effet, la disposition attaquée porte atteinte à l’objectif principal de la politique d’aide, à savoir garantir des investissements suffisants dans la production d’électricité verte pour que la Flandre atteigne, de manière rentable, sa part dans les objectifs européens pour 2020 en matière d’énergies renouvelables. Quand bien même l’objectif consistant à éviter les sursubventionnements serait un objectif admissible dont la nécessité est démontrée, le législateur décrétal n’a pas suffisamment examiné les effets de la disposition attaquée sur les recettes des producteurs concernés.
A.17.2. Selon les parties requérantes, il convient à tout le moins de constater que la disposition attaquée viole les normes de référence invoquées dans le moyen, à supposer que cette disposition reçoive l’interprétation selon laquelle il n’y a pas lieu, pour l’actualisation de la partie non rentable, de tenir compte de tous les coûts opérationnels pertinents, et selon laquelle il n’y a aucune obligation, pour cette actualisation, de garantir la rentabilité des projets.
A.18. Le Gouvernement flamand estime qu’il n’est pas question de propriété, puisque la disposition attaquée ne vise pas les aides déjà versées et/ou les certificats déjà obtenus. Par ailleurs, la partie requérante ne peut faire valoir une attente légitime et raisonnable en ce qui concerne le maintien des conditions relatives à l’octroi des certificats verts et de cogénération pour l’avenir. Au regard, notamment, de la jurisprudence de la Cour et de celle de la Cour de justice de l’Union européenne, la partie requérante ne saurait dès lors faire valoir le droit de propriété.
À titre subsidiaire, si la Cour devait considérer qu’il existe un droit à une aide inchangée qui est protégé par le droit de propriété, le Gouvernement flamand soutient qu’il n’y a pas de limitation du droit de propriété, puisque la disposition attaquée ne compromet pas la rentabilité des projets existants. Le principe de l’actualisation des parties non rentables a justement pour objectif de garantir la rentabilité de ces projets. En outre, l’incidence concrète sur la rentabilité dépend des paramètres qui seront pris en compte en cas d’éventuelle actualisation de la partie non rentable et qui seront déterminés par le Gouvernement flamand. Pour autant qu’il y aurait une incidence négative sur le droit de propriété des parties requérantes, celle-ci ne saurait être appréciée que sur la base du futur arrêté d’exécution et non au regard de la disposition attaquée.
En tout état de cause, il ne saurait être sérieusement contesté que le législateur décrétal avait de bonnes raisons pour instaurer le principe de l’actualisation pour les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant.
La disposition attaquée ménage dès lors un juste équilibre entre les impératifs de l’intérêt général et les droits fondamentaux de l’individu. Cela est d’autant plus vrai qu’il ne sera pas uniquement tenu compte, pour l’actualisation de la partie non rentable, du prix de l’électricité, mais aussi des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants. Par ailleurs, le Gouvernement flamand peut déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée. C’est donc erronément que la partie requérante affirme que l’actualisation ne se fait que sur la base des recettes et que le législateur décrétal n’a pas tenu compte de la situation spécifique des installations de production ayant des frais de carburant.
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Affaire n° 8047
En ce qui concerne le premier moyen
A.19.1. Dans le premier moyen, la partie requérante allègue la violation, par l’article 26, 1° et 2°, du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de la sécurité juridique et avec le principe de la confiance légitime ainsi qu’avec l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001, en ce que, pour les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant, la disposition attaquée instaure le principe de l’actualisation de la partie non rentable en fonction du niveau du prix de l’énergie.
A.19.2. En ce qui concerne la violation alléguée des articles 10 et 11 de la Constitution, la partie requérante affirme que les catégories de projets ne devant pas tenir compte de frais de carburant, comme les panneaux solaires et les éoliennes, et les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant, comme les installations de biogaz, sont essentiellement différentes. En effet, les projets relevant de la première catégorie ne doivent pas acheter leur matière première (soleil et vent), au contraire des projets relevant de la seconde catégorie, qui doivent acheter cette matière première (biomasse). C’est en raison de l’existence de cette catégorie particulière de coûts, qui présente aussi une forte corrélation avec le prix de l’électricité, que le législateur décrétal n’avait à l’origine pas prévu d’actualisation de la partie non rentable pour les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant.
La disposition attaquée fait naître une identité de traitement entre les catégories de projets ne devant pas tenir compte de frais de carburant et les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant, et ce, sur deux plans : d’une part, une actualisation annuelle de la partie non rentable est prévue pour ces deux catégories et, d’autre part, l’aide pour ces deux catégories est rendue dépendante, avant toute chose, du niveau du prix de l’électricité. En effet, le seul paramètre concret que la disposition attaquée fixe dès maintenant est celui des recettes issues de la vente d’électricité. Ni les termes de la disposition attaquée ni l’exposé présenté par le ministre flamand compétent en matière d’Énergie ne permettent de déduire, en ce qui concerne la notion de « coûts des flux énergétiques entrants et sortants » mentionnée dans la disposition attaquée, que tous les paramètres ayant une incidence sur la viabilité économique des projets seront effectivement pris en compte.
Les égalités de traitement précitées ne sont pas raisonnablement justifiées au regard de l’objectif poursuivi consistant à lutter contre le sursubventionnement des catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant. Il n’est en effet aucunement question d’un sursubventionnement de ces catégories de projets, puisque l’aide octroyée est aujourd’hui déjà calculée sur la base d’un facteur de banding plus faible, plafonné, que le facteur de banding réel et que ces catégories bénéficient donc d’une aide inférieure à ce qui est nécessaire à la rentabilité du projet. Il ne ressort en tout cas d’aucune étude que les installations ayant des frais de carburant sont sursubventionnées. Par ailleurs, toute hausse du prix de l’électricité pour les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant est neutralisée par les augmentations concomitantes des prix en ce qui concerne leurs frais de carburant, de sorte que cette hausse n’engendrera pas de bénéfices supplémentaires. Ensuite, les exploitants travaillent en règle avec des contrats à long terme, de sorte qu’en cas de hausse du prix de l’électricité, ils recevront un prix inférieur au prix du marché. Partant, le fait de procéder à une actualisation sur la base du prix de l’électricité ne permet pas, pour ce qui concerne les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant, d’atteindre l’objectif poursuivi, à savoir un meilleur alignement de l’aide financière sur l’aide nécessaire pour que le projet soit suffisamment rentable.
A.19.3. En ce qui concerne la violation alléguée des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de la sécurité juridique et avec le principe de la confiance légitime, la partie requérante soutient que l’actualisation de la partie non rentable sur la base du niveau du prix de l’électricité porte une atteinte significative à la sécurité d’investissement des exploitants de catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant. Il est en effet impossible pour ceux-ci de prévoir l’incidence qu’aura la modification du prix de l’électricité sur l’aide qu’ils recevront. Pour ce faire, il faut d’abord confronter les recettes annuelles provenant de la vente d’électricité aux frais de carburant qui y sont liés. En ce qui concerne les exploitants de catégories de projets ne devant pas tenir compte de frais de carburant, en revanche, l’actualisation de la partie non rentable ne rend pas imprévisible la quantité d’aides dont ils bénéficieront, puisque pour ces exploitants, le niveau du prix de l’électricité constitue un critère pertinent pour apprécier la rentabilité de la catégorie de projets.
Il ne saurait être allégué en guise de justification que la non-actualisation du facteur de banding pour les installations ayant des frais de carburant était contraire aux règles en matière d’aides d’État, compte tenu du fait, notamment, que le législateur décrétal n’a pas estimé utile de notifier l’adoption prévue de la décision attaquée à
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la Commission européenne conformément aux règles en matière d’aides d’État. En tout état de cause, aucune obligation de modifier tous les régimes existants d’aide en faveur de la production d’énergie renouvelable ne découle du considérant 468, a), des lignes directrices.
A.19.4. En ce qui concerne la violation alléguée de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001, la partie requérante soutient que cette disposition limite le pouvoir du législateur décrétal d’intervenir dans les régimes d’aide existants sans avoir de raisons qui inciteraient à le faire. La partie requérante demande à la Cour de poser à la Cour de justice de l’Union européenne trois questions préjudicielles au sujet de cette disposition.
Tout d’abord, la partie requérante invite la Cour à demander à la Cour de justice si la notion de « critères objectifs » mentionnée à l’article 6, paragraphe 2, de la directive (UE) 2018/2001, en vertu duquel le niveau d’un régime d’aide en faveur de projets en matière d’énergie renouvelable peut être modifié, doit être interprétée en ce sens que le législateur national ou le législateur décrétal régional sont autorisés à fonder une modification du niveau de l’aide sur des critères à ce point corrélés que leurs effets s’annulent mutuellement.
La partie requérante invite ensuite la Cour à demander à la Cour de justice si l’article 6, paragraphe 4, de la directive (UE) 2018/2001 doit être interprété en ce sens qu’il en résulte l’obligation pour le législateur national ou le législateur décrétal régional d’au moins constater un sursubventionnement avant de pouvoir décider de modifier un régime d’aide en faveur d’une électricité issue d’énergies renouvelables.
Enfin, la partie requérante invite la Cour à demander à la Cour de justice si l’article 6, paragraphe 1, de la directive (UE) 2018/2001 doit être interprété en ce sens qu’avant de pouvoir procéder à la modification d’un régime d’aide, le législateur national doit au moins répertorier les effets, sur la viabilité économique des projets déjà soutenus, de la proposition de révision de ce régime d’aide.
A.20. Le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative au premier moyen dans l’affaire n° 8039 (A.8.1) et à la première branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046 (A.14.1).
Le Gouvernement flamand ajoute que le moyen manque en fait, en ce qu’il y est allégué que l’aide dépendra avant toute chose du niveau du prix de l’électricité.
En ce qui concerne le deuxième moyen
A.21. Dans le deuxième moyen, la partie requérante invoque la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant, qui ont des coûts d’exploitation et d’entretien élevés, et les catégories de projets ne devant pas tenir compte de frais de carburant, qui n’ont pas des coûts d’exploitation et d’entretien élevés, sont traitées de la même manière, en ce que les coûts opérationnels autres que les frais de carburant ne sont pris en compte pour aucune des deux catégories dans le cadre de l’actualisation de la partie non rentable.
Selon la partie requérante, cela découle du fait qu’en vertu de la disposition attaquée, la partie non rentable n’est actualisée qu’en fonction de la production d’électricité et des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants, ainsi que du fait que le Gouvernement flamand est uniquement habilité à déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée. Or, les coûts opérationnels tels que les frais de personnel et d’entretien ne sont, en tant que tels, pas des coûts des flux énergétiques entrants et sortants du projet.
L’exposé des motifs ne justifie pas pourquoi les coûts opérationnels autres que les frais de carburant qui sont associés à l’exploitation des catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant ne sont pas pris en compte pour l’actualisation de la partie non rentable.
A.22. Le Gouvernement flamand allègue que le moyen, dans lequel il est soutenu que la disposition attaquée exclurait les coûts opérationnels autres que les frais de carburant, se fonde sur une prémisse erronée. Le législateur décrétal reconnaît en effet que l’exploitation de catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant s’accompagne de certains coûts que n’ont pas les catégories de projets ne devant pas tenir compte de frais de carburant et il s’efforce de prendre en compte divers paramètres pour l’actualisation de la partie non rentable. Il est ainsi prévu que « la partie non rentable est uniquement actualisée en fonction de la production d’électricité et
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des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet, et le cas échéant, du facteur de banding calculé pour les certificats verts ou les certificats de cogénération ». Par ailleurs, le Gouvernement flamand peut « déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée ». Dès lors que la notion de « flux entrants et sortants supplémentaires »
peut englober toutes sortes de coûts, il est parfaitement possible de prendre en compte des coûts opérationnels autres que les frais de carburant pour l’actualisation de la partie non rentable.
Affaire n° 8048
En ce qui concerne le premier moyen
A.23. Dans le premier moyen, les parties requérantes invoquent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec le principe de la sécurité juridique et avec le principe de la confiance légitime, en ce que la disposition attaquée porte atteinte aux attentes légitimes des producteurs d’électricité verte qui utilisent des installations de production ayant des frais de carburant selon lesquelles le facteur de banding resterait inchangé pour leur installation de production pendant toute la période d’aide.
Les parties requérantes avancent les mêmes arguments que ceux que les parties requérantes dans l’affaire n° 8046 ont avancés concernant la quatrième branche de leur premier moyen (A.13.5).
A.24. Le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative à la quatrième branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046 (A.14.4).
En ce qui concerne le deuxième moyen
A.25.1. Dans le deuxième moyen, les parties requérantes invoquent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution.
A.25.2. Dans la première branche du deuxième moyen, les parties requérantes visent l’identité de traitement entre les producteurs d’énergie renouvelable qui utilisent des installations de production ayant des frais de carburant, comme les installations de cogénération, et les producteurs d’énergie renouvelable qui utilisent des installations de production n’ayant pas de frais de carburant, comme les panneaux solaires et les éoliennes.
Les parties requérantes avancent les mêmes arguments que ceux que les parties requérantes dans l’affaire n° 8046 avancent concernant la première branche de leur premier moyen (A.13.2).
A.25.3. Dans la deuxième branche du deuxième moyen, les parties requérantes visent l’identité de traitement entre deux différentes catégories de producteurs d’énergie renouvelable qui utilisent des installations de production ayant des frais de carburant, à savoir les producteurs qui ont pris leur décision d’investissement avant l’entrée en vigueur de la disposition attaquée et les producteurs qui ont pris leur décision d’investissement après cette entrée en vigueur.
Alors que les producteurs relevant de la première catégorie ont pris une décision d’investissement en tenant compte d’un facteur de banding plafonné qui resterait fixe pendant dix ans, les producteurs relevant de la seconde catégorie peuvent prendre une décision d’investissement en tenant compte de la possibilité d’une actualisation du facteur de banding. Rien ne justifie raisonnablement l’identité de traitement entre ces deux catégories essentiellement différentes. Les prix fluctuants de l’énergie en 2022, qui auraient donné lieu à des sous-
subventionnements ou à des sursubventionnements, ne constituent pas une justification légitime, puisque les prix de l’énergie se sont entre-temps stabilisés et ont même diminué. Enfin, la disposition attaquée produit des effets disproportionnés, en ce que les investissements en cours sont privés de leur promesse de rendement, de sorte que ces investissements dégageront moins de rendement et qu’il y sera mis un terme. Cela aura de surcroît pour effet de dissuader les investissements, en raison de l’insécurité juridique créée par ce précédent.
A.26. Le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative aux première et deuxième branches du premier moyen dans l’affaire n° 8046 (A.14.1 et A.14.2).
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En ce qui concerne le troisième moyen
A.27. Dans le troisième moyen, les parties requérantes invoquent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 16 de la Constitution, lu en combinaison ou non avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme.
Les parties requérantes avancent les mêmes arguments que ceux que les parties requérantes dans l’affaire n° 8046 avancent concernant leur troisième moyen (A.17.1).
A.28. Le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative au troisième moyen dans l’affaire n° 8046 (A.18).
Affaire n° 8049
En ce qui concerne le premier moyen
A.29.1. Dans le premier moyen, la partie requérante invoque la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10, 11 et 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, lus en combinaison ou non avec le principe de la confiance légitime, avec le principe de la solidarité contenu dans l’article 194 du TFUE et avec les articles 1er, 6 et 7 du règlement (UE) 2022/1854 du Conseil du 6 octobre 2022 « sur une intervention d’urgence pour faire face aux prix élevés de l’énergie » (ci-après : le règlement (UE) 2022/1854).
A.29.2. Dans la première branche du premier moyen, la partie requérante vise l’identité de traitement entre les installations de cogénération ayant des frais de carburant et les projets de production d’énergie ne devant pas tenir compte de frais de carburant, en ce que la disposition attaquée instaure le système de l’actualisation de la partie non rentable pour les installations de cogénération ayant des frais de carburant.
Tant le décret du 13 juillet 2012 « modifiant le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, en ce qui concerne la production écologique d’énergie » que le règlement (UE) 2022/1854 et la loi du 16 décembre 2022 « modifiant la loi du 29 avril 1999 relative à l’organisation du marché de l’électricité et introduisant un plafond sur les recettes issues du marché des producteurs d’électricité » reconnaissent que les installations de cogénération ayant des frais de carburant et les projets de production d’énergie ne devant pas tenir compte de frais de carburant constituent deux catégories distinctes. Cette distinction résulte également du fait que les installations de cogénération assurent une production d’énergie en continu, offrant ainsi des garanties importantes en matière de sécurité d’approvisionnement, alors que la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables présente un caractère intermittent, dès lors qu’elle est généralement soumise aux aléas météorologiques.
L’identité de traitement entre ces catégories distinctes ne peut pas être justifiée par l’augmentation rapide des prix de l’électricité ni par l’évolution des prix des carburants. En effet, le législateur décrétal s’efforce de la sorte de remédier à un problème qui n’est en substance pas fondé, dès lors que rien n’indique qu’il y a une surcompensation pour ce qui concerne les technologies qui fonctionnent sur la base de la cogénération. Il ressort par contre du rapport de Trinomics cité par le Gouvernement flamand que le facteur de banding fixe n’a pas donné lieu à une surcompensation pour les installations de cogénération ayant des frais de carburant et qu’en tout état de cause, l’aide octroyée ne compense que partiellement les investissements. Par ailleurs, les prix de l’électricité ont fortement diminué depuis le moment où la disposition attaquée a été débattue au Parlement flamand, sans compter que les prix des carburants sont une donnée volatile. La disposition attaquée est d’autant moins pertinente et légitime lorsque l’on tient compte du droit fondamental de tout citoyen à la sécurité d’approvisionnement, contenu dans le droit à un logement décent au sens de l’article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, et des obligations de solidarité qui incombent à la Région flamande en matière de sécurité d’approvisionnement en vertu de l’article 194, paragraphe 1, du TFUE. En effet, le législateur décrétal, en soumettant les investissements en cours à l’actualisation du facteur de banding, crée des risques supplémentaires qui nuisent à la rentabilité des installations de cogénération, mettant ainsi potentiellement en péril l’approvisionnement énergétique. Compte tenu de l’importance de la Belgique en tant qu’exportatrice d’énergie pour les pays de l’Union, le principe de solidarité est également violé.
Même une exécution diligente de la disposition attaquée ne saurait supprimer les effets négatifs sur la rentabilité des installations de cogénération. Il apparaît ainsi que la méthode de calcul prévue dans le projet d’arrêté du Gouvernement flamand ramènerait à 0 les facteurs de banding, à partir de 2016, pour toutes les installations de
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cogénération ayant des frais de carburant, avec de sérieux risques de rentabilité comme conséquence. Ces effets ne se produisent pas pour les installations n’ayant pas de frais de carburant.
A.29.3. Dans la deuxième branche du premier moyen, la partie requérante vise l’identité de traitement entre, d’une part, les projets de cogénération en cours devant tenir compte de frais de carburant et dont la date de début est située entre le 1er janvier 2013 et l’entrée en vigueur de la disposition attaquée et, d’autre part, les nouveaux projets de cogénération devant tenir compte de frais de carburant et dont la date de début est située après l’entrée en vigueur de la disposition attaquée.
En ce qui concerne les projets en cours, l’exclusion, pour toute la durée de la période d’amortissement, de l’actualisation du facteur de banding pour les installations de cogénération ayant des frais de carburant constituait une protection importante contre les risques et les coûts. En instaurant soudainement l’actualisation des facteurs de banding pour ces projets, le législateur décrétal modifie une constante importante du climat d’investissement, ce qui déstabilise les projets en cours. Cela est d’autant plus vrai que les projets de cogénération sont des contrats de coopération entre un producteur d’électricité et un ou plusieurs utilisateurs de chaleur, accords qui sont conclus à long terme et conformément aux conditions du climat d’investissement. Les contrats de coopération qui ont été conclus selon les anciennes conditions représentent subitement des risques imprévisibles que les investisseurs doivent assumer. En revanche, pour les nouveaux projets, la décision d’investissement dans des installations de cogénération est prise dans un climat au sein duquel les risques sont différemment répartis, de sorte qu’il est possible d’anticiper sur ceux-ci.
En dépit de cette différence essentielle entre les investissements en cours et les investissements nouveaux, le législateur décrétal n’a pas prévu de disposition transitoire pour répondre à l’attente légitime des justiciables selon laquelle la non-actualisation vaudrait pour l’intégralité de la période d’amortissement. Cette attente légitime des investisseurs dans les projets en cours les distingue des investisseurs dans les nouveaux projets, qui ne peuvent légitimement faire valoir une telle attente.
Pour le même motif que celui qui est exposé dans la première branche du premier moyen, l’objectif d’éviter tout sursubventionnement ne peut être invoqué avec pertinence pour justifier l’identité de traitement entre les projets de cogénération en cours et nouveaux. Par ailleurs, l’objectif consistant à « réduire les risques relatifs aux projets qui sont liés à des écarts entre les frais de carburant et les recettes issues de la vente d’électricité » n’est pas pertinent en ce qui concerne les projets de cogénération en cours. En raison du plafonnement originel des facteurs de banding pour ces derniers projets, l’actualisation des facteurs de banding fait en effet preuve d’une logique asymétrique et a précisément pour effet d’accroître les risques pour les projets en cours. Aussi le législateur décrétal aurait-il dû tenir compte, pour le calcul de l’actualisation, de la partie non rentable calculée à l’époque, c’est-à-dire du facteur de banding non plafonné au moment de la décision d’investissement.
En ne prévoyant pas une disposition transitoire pour les projets de cogénération en cours devant tenir compte de frais de carburant et en n’inscrivant aucune garantie de rentabilité dans la loi en tant que ligne directrice contraignante pour le Gouvernement flamand, la disposition attaquée traite de la même manière deux catégories essentiellement différentes, sans qu’existe à cet égard une justification raisonnable.
A.30. Le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative au premier moyen dans l’affaire n° 8039 (A.8.1 et A.8.2) et à la première branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046 (A.14.1).
Le Gouvernement flamand ajoute qu’il n’y a pas de violation du principe de la solidarité énergétique consacré à l’article 194 du TFUE. En effet, la disposition attaquée ne compromet pas la rentabilité des installations existantes de cogénération et n’a, en tout état de cause, aucune incidence négative sur la sécurité d’approvisionnement. Il ressort par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne que le principe de la solidarité énergétique n’implique pas que la politique énergétique de l’Union et des États membres ne puisse jamais avoir d’effets négatifs sur les intérêts particuliers d’un État membre. Par conséquent, il est évident que le principe précité ne s’oppose pas à ce qu’un État membre intervienne dans un régime d’aide existant aux fins de rendre cette mesure conforme aux règles en matière d’aides d’État.
En ce qui concerne la violation alléguée de l’article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, le Gouvernement flamand soutient qu’il ne peut être déduit de l’arrêt de la Cour n° 63/2023 du 13 avril 2023
(ECLI:BE:GHCC:2023:ARR.063) que cette disposition constitutionnelle contient un droit constitutionnel à une sécurité d’approvisionnement générale et systématique. En effet, cet arrêt concernait des mesures destinées à
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protéger les personnes vulnérables contre des frais énergétiques élevés, qui sont d’un tout autre ordre de grandeur que les mesures qui garantissent la sécurité d’approvisionnement générale du pays.
En ce qui concerne le deuxième moyen
A.31. Dans le deuxième moyen, la partie requérante invoque la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 143 et 170, § 1er, de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 6, § 1er, VII, alinéas 1er et 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (ci-après : la loi spéciale du 8 août 1980), ainsi qu’avec le principe constitutionnel de proportionnalité.
La partie requérante allègue que la disposition attaquée, en privant les projets de cogénération en cours d’une source fiable de financement, met en péril la rentabilité de ces projets. Compte tenu du rôle important que les installations de cogénération jouent pour répondre à la demande d’électricité, en particulier pendant les heures de pointe et les périodes de faible production d’électricité issue de sources d’énergie renouvelables, la disposition attaquée présente de grands risques pour l’approvisionnement énergétique de la Belgique. La disposition attaquée porte ainsi atteinte à la compétence exclusive de l’autorité fédérale en matière d’approvisionnement énergétique, qui lui a été attribuée par l’article 6, § 1er, VII, alinéa 2, a) et c), de la loi spéciale du 8 août 1980. En tout état de cause, la disposition attaquée a pour effet qu’il est impossible et à tout le moins excessivement difficile pour l’autorité fédérale d’exécuter correctement sa politique. Cette disposition va même à l’encontre des tendances européennes visant à préserver les centrales énergétiques fonctionnant au gaz. Par conséquent, la disposition attaquée viole le principe de proportionnalité qui est inhérent à tout exercice de compétence.
Le fait que le législateur fédéral ait prévu un mécanisme de rémunération de capacité, qui doit garantir la sécurité d’approvisionnement, ne change rien à ce qui précède. En effet, la première période de livraison de ce mécanisme ne débutera que le 1er novembre 2025, de sorte que les participants à ce mécanisme n’auront droit à toute forme d’aide qu’à partir de ce moment. Par conséquent, ce soutien arrivera trop tard pour les installations dont la rentabilité aura déjà été tellement affectée avant le 1er novembre 2025 par l’actualisation du facteur de banding que le projet en sera devenu non viable. L’aide n’est en outre accordée qu’après une enchère, de sorte que seules les installations les plus économiquement intéressantes en bénéficieront.
En tout état de cause, la disposition attaquée ne saurait reposer sur la compétence régionale en matière de sources d’énergie renouvelables, dès lors que les installations de cogénération ayant des frais de carburant ne sont pas une source d’énergie renouvelable, puisque ces installations fonctionnent au gaz.
A.32.1. Le Gouvernement flamand estime qu’à défaut d’exposé, le moyen est irrecevable en ce qu’il invoque la violation de l’article 170, § 1er, de la Constitution.
A.32.2. Quant au fond, le Gouvernement flamand allègue que la disposition attaquée fait partie du système de certificats élaboré par le Gouvernement flamand qui vise à promouvoir les nouvelles sources d’énergie et qui, partant, relève de la compétence exclusive de la Région flamande en matière de nouvelles sources d’énergie, qui lui a été attribuée par l’article 6, § 1er, VII, alinéa 1er, f), de la loi spéciale du 8 août 1980. À titre subsidiaire, le Gouvernement flamand soutient que la disposition attaquée relève de la compétence régionale en matière d’utilisation rationnelle de l’énergie ou de la compétence régionale en matière de récupération d’énergie par les industries et autres utilisateurs. La disposition attaquée n’a aucune incidence négative sur la compétence de l’autorité fédérale en matière de sécurité de l’approvisionnement et ne rend en tout état de cause pas impossible ou exagérément difficile la mise en œuvre de la politique du législateur fédéral.
En effet, le moyen repose sur la prémisse erronée selon laquelle la disposition attaquée mettrait en péril la rentabilité des projets de cogénération. Or, la disposition attaquée ne fait que créer un cadre général au sein duquel il sera dorénavant possible pour la VEKA d’actualiser la partie non rentable selon des paramètres devant être déterminés par le Gouvernement flamand. Puisque le Gouvernement flamand n’a pas encore donné exécution à cette disposition, il ne peut pas encore être établi à l’heure actuelle que les projets en cours ne rentreront pas dans leurs frais ou devront être arrêtés. Par ailleurs, le subventionnement sur la base de la partie non rentable vise justement à calibrer le niveau de l’aide en fonction de la rentabilité des installations, de sorte que l’actualisation de la partie non rentable contient en réalité une garantie renforcée de rentabilité. En cas d’actualisation, il faudra également garantir que la rentabilité des projets existants soit assurée, puisque, sans cela, l’actualisation viderait de sa substance même la notion de partie non rentable.
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À titre subsidiaire, le Gouvernement flamand souligne que la disposition attaquée ne saurait avoir une incidence négative sur la compétence de l’autorité fédérale en matière de sécurité d’approvisionnement. Le législateur fédéral a en effet prévu un régime spécifique qui doit garantir la sécurité d’approvisionnement, à savoir le mécanisme de rémunération de capacité. La disposition attaquée n’interfère pas avec ce mécanisme. Comme le souligne une étude d’Elia réalisée pour la Belgique pour la période 2024-2025, la sécurité d’approvisionnement de la Belgique est garantie par l’établissement du mécanisme de rémunération de capacité.
En ce qui concerne le troisième moyen
A.33. Dans le troisième moyen, la partie requérante invoque la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 16 de la Constitution, lu en combinaison avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, avec le principe de la sécurité juridique et avec l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
En supprimant une partie non rentable fixe qui garantissait la rentabilité de l’investissement au cours de la période d’amortissement, la disposition attaquée affecte la rentabilité du projet. Cela implique une diminution de valeur de l’investissement qui fait partie du patrimoine des investisseurs et cette diminution doit dès lors être considérée comme une privation de valeur patrimoniale. En ce que le législateur décrétal n’a pas prévu de disposition transitoire ni n’a justifié l’absence d’une telle disposition et en ce qu’il n’a pas prévu non plus de compensation d’une autre manière, il prive les investisseurs, de manière arbitraire et irrégulière, d’une partie de leur patrimoine.
A.34. Le Gouvernement flamand avance dans sa réponse les mêmes arguments que ceux qu’il a exposés dans sa réponse relative au troisième moyen dans l’affaire n° 8046 (A.18).
-B-
Quant aux dispositions attaquées et à leur contexte
B.1. Les parties requérantes dans les affaires nos 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049
demandent l’annulation de l’article 26 du décret de la Région flamande du 23 décembre 2022
« modifiant la loi du 28 décembre 1964 relative à la lutte contre la pollution atmosphérique, le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, le décret du 13 juillet 2012 contenant les dispositions accompagnant le deuxième ajustement du budget 2012 et le décret du 17 décembre 2021
modifiant le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, en ce qui concerne les allocations au Fonds de l’Energie, les modifications relatives à la flexibilité et au partage d’énergie, le développement de la plateforme de données énergétiques et la révision des amendes administratives en matière d’exigences d’installation » (ci-après : le décret du 23 décembre 2022). Cette disposition apporte plusieurs modifications à l’article 7.1.4/1, § 4, du décret de la Région flamande du 8 mai 2009 « portant les dispositions générales en matière de la politique de l’énergie » (ci-
après : le décret sur l’Énergie), qui concerne la méthode de calcul de la partie non rentable dans le cadre de l’octroi des certificats verts et des certificats de cogénération.
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La partie requérante dans l’affaire n° 8039 demande également l’annulation de l’article 61
du décret du 23 décembre 2022, qui règle l’entrée en vigueur de ce décret.
B.2.1. Les dispositions attaquées sont liées aux règles, contenues dans le décret sur l’Énergie, relatives aux certificats verts et aux certificats de cogénération.
B.2.2. Le décret sur l’Énergie s’inscrit dans le prolongement du décret de la Région flamande du 17 juillet 2000 « relatif à l’organisation du marché de l’électricité » et remplace notamment ce décret, dans lequel il avait été opté, en Région flamande, pour un système de certificats verts et de cogénération destiné à promouvoir la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables et l’économie d’énergie par cogénération.
Un « certificat d’électricité écologique », ou certificat vert, est un bien immatériel unique, négociable, électronique et transférable démontrant qu’une certaine installation de production a généré une quantité d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables dans une certaine période (article 1.1.3, 60°, du décret sur l’Énergie).
Un « certificat d’énergie thermique », ou certificat de cogénération, est un bien immatériel unique, négociable, électronique et transférable démontrant qu’une certaine installation de production a généré une quantité d’économie d’énergie primaire en faisant usage de cogénération qualitative par rapport à une centrale de référence moderne et une chaudière de référence moderne (article 1.1.3, 135°, du décret sur l’Énergie).
B.2.3. Le système des certificats verts et de cogénération consiste, dans les grandes lignes, en ce qui suit :
- Les producteurs d’« électricité verte », c’est-à-dire d’électricité issue de sources d’énergie renouvelables, peuvent recevoir un certificat vert lorsqu’ils ont produit une certaine quantité d’« électricité verte » (article 7.1.1 du décret sur l’Énergie). Les producteurs d’énergie produite dans des installations de cogénération qualitative peuvent recevoir un certificat de cogénération lorsqu’ils ont réalisé une économie d’énergie primaire déterminée (article 7.1.2
du décret sur l’Énergie). Les certificats sont octroyés par le régulateur flamand du marché de l’électricité et du gaz (ci-après : le VREG) (article 7.1.3 du décret sur l’Énergie).
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- Les producteurs peuvent vendre leurs certificats soit sur le marché au prix du marché, soit à un gestionnaire de réseau, lequel est alors tenu d’acheter le certificat à une valeur minimale déterminée. En ce qui concerne les certificats verts, la valeur minimale varie selon la source d’énergie et la technologie de production utilisées. L’obligation pour les gestionnaires de réseau d’acheter les certificats à une valeur minimale déterminée est dictée par le souci de garantir un certain revenu aux producteurs en question. Les gestionnaires de réseau mettent au moins une fois par an sur le marché les certificats acquis, pour en récupérer les coûts (articles 7.1.6 et 7.1.7 du décret sur l’Énergie).
- Les fournisseurs d’électricité (dits les « titulaires d’accès ») doivent chaque année fournir au VREG un nombre de certificats verts et de cogénération correspondant à un pourcentage d’« électricité verte » ou d’électricité produite dans une installation de cogénération proportionnel au total de l’électricité qu’ils ont fournie aux clients finaux au cours de l’année civile précédente. Ils peuvent satisfaire à cette obligation en achetant des certificats auprès des producteurs ou des gestionnaires de réseau (articles 7.1.10 et 7.1.11 du décret sur l’Énergie).
B.3.1. Sauf en ce qui concerne la production d’énergie solaire, l’octroi de certificats verts et de cogénération aux producteurs d’électricité générée par des sources d’énergie renouvelables ou par des installations de cogénération qualitative n’était, jusqu’à l’entrée en vigueur du décret de la Région flamande du 13 juillet 2012 « modifiant le décret sur l’Energie du 8 mai 2009, en ce qui concerne la production écologique d’énergie » (ci-après : le décret du 13 juillet 2012), pas limité dans le temps.
Partant du constat que le système avait un certain nombre d’effets secondaires indésirables, notamment parce qu’il a conduit à un excédent de certificats sur le marché, avec pour conséquence que le climat d’investissement était devenu incertain, que les coûts étaient répercutés sur les tarifs du réseau, que les coûts pour les consommateurs finaux augmentaient et que le consensus social en faveur de l’énergie verte diminuait (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1639/1, pp. 2-3), le législateur décrétal a jugé nécessaire d’adapter le système.
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Il a choisi de limiter dans le temps l’aide octroyée aux producteurs d’électricité verte et de faire correspondre cette aide à ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables (ibid., p. 2).
Plus généralement, le législateur décrétal s’est fixé comme objectif, d’une part, d’augmenter l’efficacité économique du système et, d’autre part, de continuer à garantir la sécurité des investissements des producteurs d’électricité générée par des sources d’énergie renouvelables, en vue d’« atteindre de manière rentable les objectifs européens de 2020 en matière d’énergie renouvelable, sans compromettre l’économie flamande » (ibid.).
B.3.2. Les articles 7.1.1 et 7.1.2 du décret sur l’Énergie, tels qu’ils ont été remplacés par les articles 4 et 5 du décret du 13 juillet 2012, instaurent une distinction, concernant l’octroi de certificats verts et de cogénération aux producteurs d’énergie verte et aux producteurs d’énergie à partir d’installations de cogénération, entre les installations dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013 et les installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013.
B.3.3. Les installations dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013
ne reçoivent en principe des certificats verts que pendant une période de dix ans après la première mise en service et ne reçoivent en principe des certificats de cogénération que durant une période déterminée par le Gouvernement flamand, le nombre de certificats de cogénération qui sont octroyés au cours de cette période diminuant de manière dégressive selon une formule fixée par le Gouvernement flamand (articles 7.1.1, § 1er, alinéa 2, et 7.1.2, § 1er, alinéa 2).
Il est octroyé à ces installations un certificat vert pour chaque 1 000 kWh d’électricité produite dans l’installation à partir de sources d’énergie renouvelables (article 7.1.1, § 1er, alinéa 1er) et un certificat de cogénération pour chaque 1 000 kWh d’économie d’énergie primaire réalisée dans l’installation au moyen d’une installation de cogénération qualitative par rapport aux installations de référence (article 7.1.2, § 1er, alinéa 1er).
B.3.4. Pour les installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013, les certificats verts et de cogénération ne sont accordés que pendant la période d’amortissement utilisée dans la méthode de calcul de la partie non rentable pour cette technologie d’énergie renouvelable ou pour la technologie de cogénération (articles 7.1.1, § 2, alinéa 3, et 7.1.2, § 2,
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alinéa 2). Le Gouvernement flamand peut toutefois prévoir des règles concernant une éventuelle prorogation de la période d’aide (articles 7.1.1, § 3, et 7.1.2, § 3).
La partie non rentable concerne « la partie des revenus se référant à la production, qui est nécessaire pour obtenir une valeur [actualisée] nette d’un investissement égale à zéro et qui est calculée à l’aide d’un calcul du cash flow » (article 1.1.3, 95°). L’octroi de subventions sur la base des parties non rentables implique, en gros, que « le montant de l’aide soit désormais lié à la rentabilité des installations » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1639/1, p. 3).
Le nombre de certificats verts et de cogénération qui est accordé, pour les installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013, par 1 000 kWh d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables ou par 1 000 kWh d’économie d’énergie primaire réalisée au moyen d’une installation de cogénération qualitative par rapport aux installations de référence est égal à 1, multiplié par le facteur de banding applicable (article 7.1.1, § 2, alinéa 4). Le facteur de banding est défini à l’article 1.1.3, 13°/2, du décret sur l’Énergie comme étant la « partie non rentable divisée par le diviseur de banding ». Le diviseur de banding est égal à « 97 euros par certificat d’électricité écologique [lire : certificat vert] pour le calcul du facteur de banding en vue de l’attribution de certificats d’électricité écologique [lire : certificats verts] » et à « 35 euros par certificat de cogénération pour le calcul du facteur de banding en vue de l’attribution de certificats de cogénération » (article 1.1.3, 13°/1). La notion de facteur de banding a été précisée dans les travaux préparatoires de la manière suivante :
« La notion de facteur de banding est introduite dans le nouveau régime d’aide en vue de mieux faire correspondre l’aide financière au soutien nécessaire pour rendre le projet suffisamment rentable.
L’introduction du facteur de banding aboutit à ce qu’il ne sera plus accordé un certificat vert pour chaque 1 000 kWh d’électricité verte produits. Si la valeur du certificat vert sur le marché (diviseur de banding) est estimée à 97 euros, un projet type dont la partie non rentable s’élève à 48,5 euros ne recevra un certificat vert que pour la production de chaque 2 000 kWh »
(Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1639/1, p. 4).
« Une nouveauté importante concerne l’introduction du principe de banding qui permet d’opérer une différenciation de l’aide en fonction de la technologie (et, lorsque c’est pertinent, selon la taille ou le type de projet), en accordant plus ou moins de certificats par MWh d’électricité verte produit et permet ainsi de mieux faire correspondre l’aide au calcul de la partie non rentable.
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Les certificats verts sont attribués par le VREG sur la base d’un facteur de banding qui a été calculé pour une technologie représentative et une taille déterminées » (ibid., pp. 7-8).
« Dans le cas de certaines technologies, l’obligation d’achat incombant aux gestionnaires de réseau entraîne actuellement des frais très importants. Le coût des certificats verts qui ne sont pas vendus sur le marché mais sont vendus contre un montant minimal aux gestionnaires du réseau de distribution est en effet facturé dans les tarifs de réseau des gestionnaires de réseau concernés, au prix obligatoire diminué du prix du marché, étant donné que le gestionnaire de réseau les revend sur le marché. [...]
L’introduction du banding fera disparaître à l’avenir, pour les nouvelles installations, la pression de l’aide minimale sur les tarifs. Un système de banding performant veillera en effet à ce qu’il ne soit plus nécessaire de recourir à l’aide minimale » (ibid., p. 11).
B.4.1. En vertu de l’article 7.1.4/1, § 1er, alinéas 1er et 2, du décret sur l’Énergie, la « Vlaams Energie- en Klimaatagentschap » (l’Agence flamande de l’énergie et du climat, ci-
après : la VEKA) calcule et actualise annuellement les parties non rentables pour les catégories représentatives de projets selon une procédure et une méthode fixées par le Gouvernement flamand. Sur la base des parties non rentables, la VEKA calcule chaque fois aussi les facteurs de banding correspondants (article 7.1.4/1, § 1er, alinéa 5). Ce facteur de banding ne peut jamais dépasser 1,25 (article 7.1.4/1, § 4, alinéa 6). Les facteurs de banding qui sont applicables sont adaptés, tant pour les nouveaux projets que pour les projets en cours, lorsque le facteur de banding actualisé s’écarte de plus de 2 % du facteur de banding qui est applicable (article 7.1.4/1, § 1er, alinéa 6).
L’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie dispose que la partie non rentable n’est pas actualisée pour certaines installations au cours de la période d’amortissement, de sorte que l’aide ne change pas pour ces projets. Tel est le cas pour les projets en cours et les nouveaux projets dont la date de début se situe entre le 1er août et le 31 décembre de l’année civile en cours pour la production d’électricité verte ou la cogénération et qui doivent tenir compte de frais de carburant, comme les installations de biomasse et les installations de cogénération, de même que pour la production d’électricité verte dans une installation dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013. Pour tous les autres projets en cours et nouveaux projets, la partie non rentable est uniquement actualisée en fonction du prix de l’électricité.
Ainsi, l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie dispose :
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« Pour les projets en cours et pour les nouveaux projets dont la date de début se situe entre le 1 août et le 31 décembre de l’année calendaire en cours en vue de la production d’électricité écologique ou de la cogénération, la partie non rentable n’est pas actualisée pendant la période d’amortissement visé[e] à l’article 7.1.1, § 2 ou § 3, ou à l’article 7.1.2, § 2 ou § 3, lorsque les frais de carburant, visés au premier alinéa, 3°, peuvent être d’application dans la méthode pour une catégorie de projets. La partie non rentable pour la production d’électricité écologique dans une installation dont la date de début se situe avant le 1er janvier 2013, telle que visée à l’article 7.1.1, § 1er, n’est pas actualisée. Pour tous les autres projets en cours et pour les nouveaux projets dont la date de début se situe entre le 1 août et le 31 décembre de l’année calendaire en cours en vue de la production d’électricité écologique ou de la cogénération, la partie non rentable est actualisée uniquement en fonction du prix de l’électricité ».
Cette disposition a été justifiée comme suit lors de son insertion par le décret du 13 juillet 2012 :
« De même, pour les projets en cours, pour lesquels il est nécessaire de calculer un facteur de banding, l’aide sera adaptée annuellement selon un prix de l’électricité modifié, en cas de modification du facteur de banding dépassant de 2 % le facteur de banding en vigueur. En effet, le prix de l’électricité constitue un facteur important dans le calcul de la partie non rentable, pour lequel il existe de bons indicateurs. Pour d’autres facteurs susceptibles de fluctuer pendant la période d’exploitation, il est souvent plus difficile d’établir une évolution des prix. Pour les prix de la biomasse, par exemple, on connaît beaucoup moins d’indicateurs de portée générale, certainement si l’on tient compte de la large gamme des différents approvisionnements de biomasse et des caractéristiques de la biomasse qui sont sur le marché. Dans ce cas, il est tenu compte du fait que la biomasse constitue aussi un substitut aux combustibles fossiles et suit donc, de manière globale, la même tendance, qui est elle aussi liée au prix de l’électricité. À cet égard, on estime qu’une augmentation du prix des combustibles fossiles entraîne une hausse des prix de l’électricité (davantage de recettes pour les producteurs d’électricité verte) et s’accompagne d’une hausse des prix de la biomasse (davantage de dépenses pour les producteurs d’électricité verte), ce qui fait que l’impact total sur les parties non rentables et les facteurs de banding reste limité et qu’un exercice d’actualisation conduirait à une augmentation des frais administratifs par rapport aux gains en matière d’efficacité. Pour les installations de cogénération aussi, l’augmentation des prix des carburants (coûts plus élevés pour l’exploitant d’une installation de cogénération) est compensée dans une large mesure par une augmentation des prix de l’électricité qui en sont la conséquence (revenus plus élevés). Pour les projets de biomasse et les projets de cogénération en cours, la partie non rentable n’est dès lors pas actualisée » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1639/1, pp. 8-9).
En vertu de l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 4, du décret sur l’Énergie, tel qu’il a été inséré par le décret du 16 novembre 2018 « portant diverses dispositions en matière d’énergie », la partie non rentable est en outre actualisée au cours de la période d’amortissement sur la base des tarifs de l’impôt des sociétés, et ce pour tous les projets en cours et les nouveaux projets dont la date de début se situe entre le 1er août et le 31 décembre de l’année civile en cours pour la production d’électricité verte ou pour la cogénération.
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B.4.2. L’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 modifie les règles relatives à l’actualisation de la partie non rentable, telles qu’elles sont contenues dans l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, précité, du décret sur l’Énergie.
Plus particulièrement, la première phrase de cette disposition, qui prévoit la non-
actualisation de la partie non rentable pour les installations ayant des frais de carburant, est abrogée. Par suite de cette modification, la VEKA peut actualiser la partie non rentable pour tous les projets en cours ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013 et pour tous les nouveaux projets ayant une date de début entre le 1er août et le 31 décembre de l’année civile en cours pour la production d’électricité verte ou pour la cogénération, que ces installations puissent exposer ou non des frais de carburant.
En outre, il est prévu que la partie non rentable n’est plus « uniquement actualisée en fonction du prix de l’électricité », mais bien « uniquement actualisée en fonction de la production d’électricité et des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet, et le cas échéant, du facteur de banding calculé pour les certificats verts ou les certificats de cogénération ». De plus, le Gouvernement flamand est habilité à « déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée ».
Après l’entrée en vigueur de l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie disposera :
« La partie non rentable pour la production d’électricité écologique dans une installation dont la date de début se situe avant le 1er janvier 2013, telle que visée à l’article 7.1.1, § 1er, n’est pas actualisée. Pour tous les autres projets en cours et nouveaux projets ayant une date de début du 1er août au 31 décembre de l’année civile en cours pour la production d’électricité verte ou pour la cogénération, la partie non rentable est uniquement actualisée en fonction de la production d’électricité et des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet, et le cas échéant, du facteur de banding calculé pour les certificats verts ou les certificats de cogénération. Le Gouvernement flamand peut déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée ».
Dans les travaux préparatoires, ces modifications sont justifiées comme suit :
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« En ce qui concerne les projets ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013, la partie non rentable est, conformément à l’article 7.1.4/1, § 4, du décret sur l’Énergie, actualisée en fonction du prix de l’électricité pour les projets en cours et les nouveaux projets dont la date de début se situe entre le 1er août et le 31 décembre de l’année civile en cours, en vue de la production d’électricité verte ou de la cogénération.
En ce qui concerne les projets en cours et les nouveaux projets dont la date de début se situe entre le 1er août et le 31 décembre de l’année civile en cours, en vue de la production d’électricité verte ou de la cogénération, la partie non rentable n’est cependant pas actualisée au cours de la période d’amortissement visée à l’article 7.1.1, § 2 ou § 3, ou à l’article 7.1.2, § 2 ou § 3, du décret sur l’Énergie, lorsque, dans la méthode fixée par le Gouvernement flamand, une catégorie de projets peut être confrontée à des frais de carburant.
Vu l’augmentation rapide des prix de l’électricité (supplément de recettes pour le projet) et l’évolution des prix des carburants (coût supplémentaire potentiel pour le projet), il est justifié d’abroger l’exception précitée pour les projets devant tenir compte de frais de carburant. Il est ainsi évité qu’il y ait sursubventionnement ou sous-subventionnement en raison de l’évolution des prix de l’électricité ou des frais de carburant. De ce fait, l’efficacité économique est augmentée et les risques pour les investisseurs diminuent. Il est proposé d’actualiser non seulement en fonction du prix de l’électricité, mais aussi sur la base des recettes d’électricité et d’autres frais et/ou recettes de flux énergétiques entrants et sortants du projet. Le Gouvernement flamand peut également fixer des flux entrants et sortants supplémentaires, qui doivent être pris en compte dans le calcul de l’actualisation de la partie non rentable » (Doc. parl., Parlement flamand, 2022-2023, n° 1467/1, p. 33).
Dans les travaux préparatoires, il est en outre mentionné que la disposition attaquée « concerne des mesures utiles pour les nouvelles lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie pour 2022 (Climate, Energy and Environmental Aid Guidelines, CEEAG). Conformément au point 468, a), des nouvelles lignes directrices, les régimes d’aide existants doivent être modifiés au plus tard le 31 décembre 2023, de manière à les mettre en conformité avec ces lignes directrices. Les dispositions en projet permettent de s’aligner sur les CEEAG » (ibid., p. 22).
B.4.3. L’article 61, alinéa 3, attaqué, du décret du 23 décembre 2022 dispose que l’article 26, attaqué, du même décret entre en vigueur à une date à fixer par le Gouvernement flamand.
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Quant à la recevabilité
B.5.1. Le Gouvernement flamand fait valoir que les parties requérantes dans les affaires nos 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049 ne justifient pas de l’intérêt requis à l’annulation de l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022. Leur intérêt serait purement hypothétique, en ce que la disposition attaquée ne fait que créer un cadre général dans lequel il est dorénavant possible, pour la VEKA, d’actualiser la partie non rentable des nouveaux projets de production d’énergie verte comme des projets en cours selon des paramètres que le Gouvernement flamand doit fixer. Seul l’arrêté que le Gouvernement flamand prendra sur la base de la disposition attaquée pourrait, le cas échéant, faire apparaître que les parties requérantes sont susceptibles d’être affectées défavorablement. Par ailleurs, l’intérêt des parties requérantes serait illégitime, en ce que leurs actions tendraient à prétendre à une surcompensation.
B.5.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d’un intérêt. Ne justifient de l’intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée.
B.5.3. À l’exception de l’ASBL « Organisatie voor Duurzame Energie Vlaanderen » et de l’ASBL « Boerenbond », les parties requérantes dans les affaires jointes nos 8039, 8046, 8048
et 8049 sont toutes des propriétaires ou exploitants d’une installation de production d’électricité verte ou de cogénération ayant des frais de carburant, qui reçoivent des certificats verts ou de cogénération ou qui introduiront une demande à cet effet.
Ces parties requérantes peuvent être affectées directement et défavorablement par l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, qui abroge l’exception à l’actualisation de la partie non rentable pour les installations ayant des frais de carburant, ce qui implique que l’aide octroyée au cours de la période d’aide peut être modifiée, et qui prévoit quels paramètres pourront être pris en compte dans le cadre de cette actualisation. Le fait que la disposition attaquée doit encore être mise en œuvre et que seul l’arrêté du Gouvernement flamand pourrait faire apparaître dans quelle mesure les parties requérantes sont lésées par la disposition attaquée ne prive pas celles-ci de l’intérêt à demander l’annulation de l’article 26 du décret du 23 décembre 2022. Leur intérêt n’est pas davantage illégitime au motif que, par leurs recours,
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elles visent à maintenir le régime d’aide actuel, quand bien même ce régime pourrait donner lieu à une surcompensation.
B.5.4. Étant donné que toutes les requêtes dans les affaires nos 8039, 8046, 8048 et 8049
sont introduites entre autres par un propriétaire ou exploitant d’une installation de production d’électricité verte ou de cogénération ayant des frais de carburant, dans chacune de ces affaires, au moins une partie requérante justifie d’un intérêt suffisant à l’annulation de la disposition attaquée et l’intérêt de l’ASBL « Organisatie voor Duurzame Energie Vlaanderen » et de l’ASBL « Boerenbond » ne doit pas être examiné. Il n’est pas davantage nécessaire d’examiner l’intérêt de la partie requérante dans l’affaire n° 8047, l’ASBL « Denuo », dès lors que le recours dans cette affaire porte sur la même disposition et repose sur des moyens analogues aux moyens invoqués dans les autres affaires.
B.5.5. L’exception est rejetée.
B.6.1. Le Gouvernement flamand conteste ensuite l’intérêt de la partie requérante dans l’affaire n° 8039 à l’annulation des alinéas 1er, 2 et 4 de l’article 61 du décret du 23 décembre 2022, étant donné que ces dispositions ne portent pas sur l’actualisation de la partie non rentable.
B.6.2. La partie requérante dans l’affaire n° 8039 demande l’annulation de l’article 61 du décret du 23 décembre 2022, en ce que cette disposition règle l’entrée en vigueur de l’article 26
du même décret.
Le recours porte donc exclusivement sur l’article 61, alinéa 3, du décret du 23 décembre 2022, en ce que cette disposition règle l’entrée en vigueur de l’article 26 du même décret.
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Quant au fond
En ce qui concerne les règles répartitrices de compétences
B.7. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 8049 est pris de la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 143 et 170, § 1er, de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 6, § 1er, VII, alinéas 1er et 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (ci-après : la loi spéciale du 8 août 1980) et avec le principe constitutionnel de proportionnalité.
La disposition attaquée priverait les projets de cogénération en cours d’une source de financement fiable et compromettrait la rentabilité de ces projets, ce qui impliquerait des risques majeurs pour la sécurité d’approvisionnement en énergie. La disposition attaquée porterait ainsi atteinte à la compétence exclusive de l’autorité fédérale en matière d’approvisionnement en énergie et rendrait en tout état de cause impossible et à tout le moins exagérément difficile la mise en œuvre correcte de sa politique, ce qui violerait le principe de proportionnalité, qui est inhérent à chaque exercice de compétence.
B.8.1. Selon le Gouvernement flamand, le deuxième moyen dans l’affaire n° 8049 est irrecevable, en ce qu’il est pris de la violation de l’article 170, § 1er, de la Constitution, étant donné que la partie requérante n’invoque aucun argument à cet égard.
B.8.2. En vertu de l’article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la requête doit contenir un exposé des faits et des moyens.
Pour satisfaire aux exigences de l’article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.
B.8.3. Faute d’exposé, le deuxième moyen dans l’affaire n° 8049 est irrecevable pour ce qui concerne la violation alléguée de l’article 170, § 1er, de la Constitution.
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B.9.1. En vertu de l’article 6, § 1er, VII, de la loi spéciale du 8 août 1980, les régions sont compétentes pour les aspects régionaux de l’énergie, et en tout cas :
« f) Les sources nouvelles d’énergie à l’exception de celles liées à l’énergie nucléaire;
[...]
h) L’utilisation rationnelle de l’énergie ».
Cette disposition réserve toutefois à l’autorité fédérale les compétences concernant :
« les matières dont l’indivisibilité technique et économique requiert une mise en œuvre homogène sur le plan national, à savoir :
a) les études sur les perspectives d’approvisionnement en énergie;
[...]
c) Les grandes infrastructures de stockage; le transport et la production de l’énergie;
[...] ».
B.9.2. Il faut considérer que le Constituant et le législateur spécial, dans la mesure où ils n’en disposent pas autrement, ont attribué aux régions toute la compétence d’édicter les règles propres aux matières qui leur ont été transférées, et ce, sans préjudice de la possibilité de recourir, le cas échéant, à l’article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980. Tel est le cas pour la compétence des régions relative aux aspects régionaux de l’énergie.
B.9.3. Concernant l’articulation entre les compétences attribuées aux régions et celles qui sont réservées à l’autorité fédérale, les travaux préparatoires de la loi spéciale du 8 août 1988
modifiant la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles exposent :
« Concernant la politique de l’énergie, les Régions sont compétentes pour les aspects régionaux de la politique de l’énergie et, en tout cas, pour les matières énumérées au premier alinéa de l’article 6, § 1er, VII, à la seule exception des matières dont l’indivisibilité technique et économique requi[ert] une mise en œuvre homogène sur le plan national, matières
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limitativement et exhaustivement énumérées après les mots ‘ à savoir :’. L’autorité nationale est compétente pour les exceptions précitées, ainsi que pour les aspects non régionaux de la politique de l’énergie » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1988, n° 405/2, p. 111).
B.9.4. Le législateur spécial a donc conçu la politique énergétique comme une compétence exclusive partagée, les régions étant notamment compétentes pour adopter l’ensemble des règles qui sont propres aux nouvelles sources d’énergie, sauf en matière d’énergie nucléaire, de même que l’ensemble des règles en matière de consommation rationnelle d’énergie. L’autorité fédérale est quant à elle demeurée compétente pour les grandes infrastructures de stockage, le transport et la production d’énergie, ce qui coïncide avec sa compétence résiduelle en matière de sécurité d’approvisionnement en énergie.
B.10. L’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, qui règle l’aide octroyée aux producteurs d’énergie verte et d’énergie provenant d’installations de cogénération en vue de promouvoir la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables et l’économie d’énergie par cogénération, relève des compétences régionales en matière de nouvelles sources d’énergie et de consommation rationnelle d’énergie.
B.11.1. Dans l’exercice de leurs compétences, les régions doivent toutefois respecter le principe de proportionnalité, qui est inhérent à tout exercice de compétence. Elles doivent dès lors veiller à ne pas rendre impossible ou exagérément difficile l’exercice des compétences fédérales.
B.11.2. Contrairement à ce que soutient la partie requérante dans l’affaire n° 8049, la disposition attaquée ne rend pas impossible ou exagérément difficile l’exercice de la compétence fédérale en matière de sécurité d’approvisionnement. En effet, il n’apparaît pas que la disposition attaquée, en prévoyant la possibilité d’actualiser la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013, risque de compromettre la rentabilité de ces projets et, par conséquent, la sécurité d’approvisionnement en énergie.
Les règles relatives au calcul des certificats verts et des certificats de cogénération en fonction de la partie non rentable, telles qu’elles sont contenues dans le décret sur l’Énergie, visent au contraire à mettre l’aide qui est octroyée aux producteurs d’énergie verte et d’énergie provenant d’installations de cogénération en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre
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les installations de production rentables (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1639/1, p. 3). En prévoyant, par l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, une possibilité d’actualiser la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013, le législateur décrétal vise à éviter « qu’il y ait sursubventionnement ou sous-subventionnement en raison de l’évolution des prix de l’électricité ou des frais de carburant » (Doc. parl., Parlement flamand, 2022-2023, n° 1467/1, p. 33). La disposition attaquée contribue ainsi à l’objectif initial du législateur décrétal consistant à mettre l’aide en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables et ne porte dès lors pas atteinte à la rentabilité des projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013, et cette disposition ne risque a fortiori pas de compromettre la sécurité d’approvisionnement.
B.12. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 8049 n’est pas fondé.
B.13. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 8046 est pris de la violation, par l’article 26
du décret du 23 décembre 2022, de l’article 170, § 2, de la Constitution et de l’article 1er de la loi du 23 janvier 1989 « relative à la compétence fiscale visée à l’article 110 [lire : article 170], §§ 1er et 2, de la Constitution » (ci-après : la loi du 23 janvier 1989). Selon la partie requérante, la disposition attaquée établit un impôt indirect sur la production d’électricité, alors que la production d’électricité serait déjà soumise à un impôt fédéral.
B.14.1. L’article 170, § 2, de la Constitution dispose :
« Aucun impôt au profit de la communauté ou de la région ne peut être établi que par un décret ou une règle visée à l’article 134.
La loi détermine, relativement aux impositions visées à l’alinéa 1er, les exceptions dont la nécessité est démontrée ».
B.14.2. L’article 1er de la loi du 23 janvier 1989 dispose :
« Dans les cas non prévus par l’article 11 de loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des Communautés et des Régions, les Parlements de communauté et de région ne sont pas autorisés à lever des impôts dans les matières qui font l’objet d’une imposition par l’État, ni à percevoir des centimes additionnels aux impôts et perceptions au profit de l’État, ni à accorder des remises sur ceux-ci sauf sur les huiles minérales, conformément à l’accord de
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coopération du 25 juillet 2018 relatif à l’exécution et au financement de l’assainissement du sol des stations-services et des citernes de gasoil à des fins de chauffage ».
B.14.3. En vertu de l’article 170, § 2, alinéa 2, de la Constitution et de l’article 1er de la loi du 23 janvier 1989, les communautés et les régions disposent d’une compétence fiscale propre, sous la réserve que la loi n’ait pas déterminé ou ne détermine pas ultérieurement les exceptions dont la nécessité est démontrée, et les communautés et les régions ne sont en principe pas autorisées à percevoir des impôts à l’égard de matières qui font l’objet d’un impôt fédéral.
Elles « peuvent lever des impôts dans des matières vierges » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 562/2, p. 160).
B.15. L’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, qui porte sur l’aide qui est octroyée sous forme de certificats verts et de certificats de cogénération aux producteurs d’énergie verte et d’énergie provenant d’installations de cogénération, ne concerne pas un impôt au sens de l’article 170 de la Constitution. En effet, il ne s’agit pas d’un prélèvement ayant une portée générale, qui est pratiqué d’autorité par les pouvoirs publics afin de couvrir une dépense d’utilité publique, mais d’une aide apportée aux producteurs d’énergie.
Le simple fait que le montant de l’aide ainsi octroyée soit susceptible de diminuer n’a pas pour effet de rendre la différence entre le montant initial de l’aide et le nouveau montant qualifiable d’impôt.
Étant donné que l’article 26 du décret du 23 décembre 2022 ne concerne pas un impôt, l’article 170, § 2, alinéa 2, de la Constitution et l’article 1er de la loi du 23 janvier 1989 ne sauraient être violés.
B.16. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 8046 n’est pas fondé.
En ce qui concerne le principe de la sécurité juridique et le principe de la confiance légitime
B.17. Dans les premier et deuxième moyens dans l’affaire n° 8039, dans la quatrième branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046 et dans le premier moyen dans les affaires
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nos 8047, 8048 et 8049, les parties requérantes invoquent la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de la sécurité juridique, avec le principe de la motivation et avec le principe de la confiance légitime, ainsi que de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 « relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (refonte) » (ci-après : la directive (UE) 2018/2001), en ce que la disposition attaquée instaure l’actualisation de la partie non rentable pour les projets en cours devant tenir compte de frais de carburant et porte ainsi atteinte à l’attente légitime des producteurs d’électricité verte et d’énergie provenant d’installations de cogénération qui font usage d’installations de production ayant des frais de carburant, attente selon laquelle le facteur de banding pour leur installation de production ne serait pas modifié durant toute la période d’aide.
B.18. Si le législateur estime qu’un changement de politique s’impose, il peut décider de lui donner un effet immédiat et il n’est pas tenu, en principe, de prévoir un régime transitoire.
Le principe d’égalité et de non-discrimination n’est violé que si l’absence d’une mesure transitoire entraîne une différence de traitement qui n’est pas susceptible de justification raisonnable ou s’il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime. Ce principe est étroitement lié au principe de la sécurité juridique, qui interdit au législateur de porter atteinte sans justification objective et raisonnable à l’intérêt que possèdent les sujets de droit d’être en mesure de prévoir les conséquences juridiques de leurs actes.
Le législateur doit toutefois, lorsqu’il instaure un nouveau régime légal, examiner au cas par cas si des mesures transitoires sont nécessaires, compte tenu de l’incidence des nouvelles règles et des attentes légitimes des justiciables concernés.
B.19.1. Le principe de la confiance légitime ne peut, en soi, être invoqué pour exiger le maintien des conditions d’un système de subsides. Le législateur décrétal peut modifier ces conditions pour l’avenir, à condition de tenir compte de l’incidence des modifications sur les investissements déjà réalisés.
B.19.2. En outre, l’article 7.1.14 du décret sur l’Énergie dispose :
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« Tous les trois ans, et pour la première fois avant le 1er octobre de l’année suivant l’entrée en vigueur du présent décret, le Gouvernement flamand soumet un rapport d’évaluation au Parlement flamand sur les obligations de certificats énergie renouvelable et cogénération qualitative. Ce rapport évalue les effets et le rapport coût-efficacité des obligations de certificats ».
Il résulte de cette disposition, qui trouve ses origines, selon les travaux préparatoires, dans les articles 23, § 4, et 25bis, dernier alinéa, du décret de la Région flamande du 17 juillet 2000
« relatif à l’organisation du marché de l’électricité », abrogé dans l’intervalle (Doc. parl., Parlement flamand, 2008-2009, n° 2165/1, p. 66), que le système des certificats verts et de cogénération doit être évalué régulièrement en ce qui concerne ses effets et son « rapport coût-
efficacité ». Par conséquent, cette disposition fait apparaître que le législateur décrétal a toujours considéré que certaines circonstances pouvaient le contraindre à modifier le système des certificats verts et de cogénération et qu’il était pour cette raison recommandé de prévoir une évaluation du système.
Ainsi, les personnes intéressées ne pouvaient pas déduire de la législation décrétale relative à l’énergie verte et à la cogénération que les conditions du système continueraient à s’appliquer sans modification et indéfiniment. Ceci vaut d’autant plus pour les entreprises du secteur de l’énergie, puisqu’elles agissent à titre professionnel et qu’en cette qualité, elles doivent être conscientes que l’autorité compétente peut modifier pour l’avenir les conditions du système lorsque les données socio-économiques sur lesquelles repose ce système ont changé.
B.19.3. La disposition attaquée ne modifie les règles relatives au calcul des certificats verts et des certificats de cogénération que pour l’avenir. Ainsi, elle ne porte pas atteinte à des droits déjà irrévocablement fixés, puisqu’elle n’affecte en aucune manière les certificats verts et de cogénération qui ont été octroyés avant l’entrée en vigueur du décret du 23 décembre 2022.
B.19.4. Ainsi qu’il a déjà été observé en B.11.2, les règles relatives au calcul des certificats verts et des certificats de cogénération en fonction de la partie non rentable, telles qu’elles sont contenues dans le décret sur l’Énergie, visent à mettre l’aide accordée aux producteurs d’énergie verte et d’énergie provenant d’installations de cogénération en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables. En prévoyant, à l’article 26,
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attaqué, du décret du 23 décembre 2022, une possibilité d’actualiser la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013 en fonction des recettes issues de l’électricité et d’autres frais et/ou recettes de flux énergétiques entrants et sortants du projet, le législateur décrétal tend à éviter « qu’il y ait sursubventionnement ou sous-subventionnement en raison de l’évolution des prix de l’électricité ou des frais de carburant » (Doc. parl., Parlement flamand, 2022-2023, n° 1467/1, p. 33). La disposition attaquée contribue dès lors à l’objectif initial du législateur décrétal de mettre l’aide en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables, fût-ce sans possibilité pour les producteurs concernés de réaliser des bénéfices très élevés.
En ce que certaines catégories de producteurs, en raison de la possibilité d’actualiser la partie non rentable, risquent à l’avenir de recevoir moins d’aides, il convient d’observer que les bénéficiaires ne sauraient légitimement espérer pouvoir continuer à bénéficier d’une forme de surcompensation, à charge des gestionnaires des réseaux de distribution et, in fine, du consommateur d’énergie. Tel est d’autant plus le cas que le cadre juridique de l’Union européenne relatif aux aides d’État interdit qu’une mesure d’aide, comme les règles relatives aux certificats verts et aux certificats de cogénération, puisse donner lieu à une surcompensation (voy. Commission européenne, décision du 16 février 2018 concernant les certificats verts et les certificats de cogénération en Flandre, SA.46013, paragraphe 94). Étant donné que le calcul des certificats verts et des certificats de cogénération reste lié à la partie non rentable, qui sera certes actualisée à l’avenir en fonction des recettes provenant de l’électricité et d’autres coûts et/ou recettes de flux énergétiques entrants et sortants du projet, il reste en principe garanti que tous les investissements – en ce compris les investissements du passé – seront récupérés dans un délai raisonnable, fût-ce sans possibilité de réaliser des bénéfices très élevés à charge du consommateur d’énergie.
B.19.5. L’article 6 de la directive (UE) 2018/2001 ne s’oppose pas davantage à la modification, attaquée, du régime d’aide pour les projets en cours d’installations d’énergie verte et d’installations de cogénération ayant des frais de carburant. Cette disposition énonce :
« 1. Sans préjudice des adaptations nécessaires au respect des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les États membres veillent à ce que la révision du niveau et des conditions de l’aide accordée aux projets en matière d’énergie renouvelable
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n’ait pas d’incidence négative sur les droits conférés ni ne compromette la viabilité économique des projets bénéficiant déjà d’une aide.
2. Les États membres peuvent adapter le niveau de l’aide conformément à des critères objectifs, pour autant que ces critères aient été prévus au niveau de la conception originale du régime d’aide.
3. Les États membres publient un calendrier à long terme préfigurant l’allocation escomptée des aides, couvrant, comme référence, au moins les cinq années suivantes ou, en cas de contraintes de planification budgétaire, les trois années suivantes, incluant un calendrier indicatif, la fréquence des procédures de mise en concurrence s’il y a lieu, la capacité prévue, le budget ou l’aide maximale par unité qui devrait être allouée ainsi que les technologies admissibles envisagées, le cas échéant. Ce calendrier est mis à jour tous les ans ou, lorsque cela est nécessaire, afin de tenir compte de l’évolution récente des marchés ou de l’allocation escomptée d’aides.
4. Les États membres évaluent, au moins tous les cinq ans, l’efficacité de leurs régimes d’aide en faveur de l’électricité produite à partir de sources renouvelables ainsi que leurs effets distributifs majeurs sur les différentes catégories de consommateurs et sur les investissements.
Cette évaluation tient compte des effets d’éventuelles modifications des régimes d’aide. La planification indicative à long terme des décisions relatives aux aides et la conception de nouveaux types d’aide prennent en compte les résultats de cette évaluation. Les États membres incluent cette évaluation dans les mises à jour pertinentes de leurs plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat conformément au règlement (UE) 2018/1999 ».
Sans qu’il faille examiner si la disposition attaquée est nécessaire pour satisfaire aux articles 107 et 108 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après : le TFUE), il suffit de constater que – comme il est dit en B.19.3 – la disposition attaquée ne porte pas atteinte à des droits déjà irrévocablement fixés et ne compromet pas la rentabilité des projets en cours. L’article 6, paragraphe 1, de la directive (UE) 2018/2001 n’est dès lors pas violé.
La partie requérante dans l’affaire n° 8047 invoque en outre la violation de l’article 6, paragraphe 2, de la directive (UE) 2018/2001, en ce que la disposition attaquée subordonne l’aide à « un critère (le prix de l’électricité) pour lequel le législateur décrétal sait actuellement que ses effets sont neutralisés par le prix de la biomasse qui est en corrélation avec celui-ci », de sorte que la modification du régime d’aide ne reposerait pas sur un critère objectif. Il suffit de constater en la matière que le prix de l’électricité constitue bien un critère objectif, indépendamment de la question de savoir si les effets du prix de l’électricité sont neutralisés ou non par le prix du carburant. Par ailleurs, dans le cadre de l’actualisation de la partie non rentable, il convient de tenir compte également d’autres critères, en ce que l’actualisation dépend, en vertu de la disposition attaquée, « de la production d’électricité et des autres coûts
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et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet, et le cas échéant, du facteur de banding calculé pour les certificats verts ou les certificats de cogénération » et que la disposition attaquée habilite le Gouvernement flamand à « déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée ». L’article 6, paragraphe 2, de la directive (UE) 2018/2001 n’est dès lors pas violé.
Enfin, en ce que la partie requérante dans l’affaire n° 8047 invoque la violation de l’article 6, paragraphe 4, de la directive (UE) 2018/2001, au motif « qu’il n’existe aucune analyse faisant apparaître que les installations ayant des frais de carburant reçoivent plus d’aides que nécessaire pour garantir la rentabilité », il suffit de constater que cette disposition concerne simplement une obligation faite aux États membres d’évaluer « l’efficacité de leurs régimes d’aide en faveur de l’électricité produite à partir de sources renouvelables ainsi que leurs effets distributifs majeurs sur les différentes catégories de consommateurs et sur les investissements ».
Cette disposition n’empêche pas les États membres de modifier un régime d’aide existant.
L’article 6, paragraphe 4, de la directive (UE) 2018/2001 n’est dès lors pas violé.
B.19.6. Les parties requérantes dans les affaires nos 8039 et 8047 demandent à la Cour de poser des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne concernant l’interprétation de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001.
Lorsqu’une question d’interprétation du droit de l’Union européenne est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours en vertu du droit national, cette juridiction est tenue de poser la question à la Cour de justice, conformément à l’article 267, troisième alinéa, du TFUE.
Ce renvoi n’est toutefois pas nécessaire lorsque cette juridiction a constaté que la question soulevée n’est pas pertinente, que la disposition du droit de l’Union en cause a déjà fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou que l’interprétation correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable (CJCE, 6 octobre 1982, C-283/81, CILFIT, ECLI:EU:C:1982:335, point 21; CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management et Catania Multiservizi SpA, ECLI:EU:C:2021:799, point 33). À la lumière de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ces motifs doivent ressortir à suffisance de la motivation
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de l’arrêt par lequel la juridiction refuse de poser la question préjudicielle (CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, précité, point 51).
L’exception du défaut de pertinence a pour effet que la juridiction nationale n’est pas tenue de poser une question lorsque « la question n’est pas pertinente, c’est-à-dire dans les cas où la réponse à cette question, quelle qu’elle soit, ne pourrait avoir aucune influence sur la solution du litige » (CJUE, 15 mars 2017, C-3/16, Aquino, ECLI:EU:C:2017:209, point 43; grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, précité, point 34).
L’exception selon laquelle l’interprétation correcte du droit de l’Union s’impose avec évidence implique que la juridiction nationale doit être convaincue que la même évidence s’imposerait également aux autres juridictions de dernier ressort des autres États membres et à la Cour de justice. Elle doit à cet égard tenir compte des caractéristiques propres au droit de l’Union, des difficultés particulières que présente l’interprétation de ce dernier et du risque de divergences de jurisprudence au sein de l’Union. Elle doit également tenir compte des différences entre les versions linguistiques de la disposition concernée dont elle a connaissance, notamment lorsque ces divergences sont exposées par les parties et sont avérées. Enfin, elle doit également avoir égard à la terminologie propre à l’Union et aux notions autonomes dans le droit de l’Union, ainsi qu’au contexte de la disposition applicable à la lumière de l’ensemble des dispositions du droit de l’Union, de ses finalités et de l’état de son évolution à la date à laquelle l’application de la disposition en cause doit être faite (CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, précité, points 40-46).
Pour le surplus, une juridiction nationale statuant en dernier ressort peut s’abstenir de soumettre une question préjudicielle à la Cour « pour des motifs d’irrecevabilité propres à la procédure devant cette juridiction, sous réserve du respect des principes d’équivalence et d’effectivité » (CJCE, 14 décembre 1995, C-430/93 et C-431/93, Van Schijndel et Van Veen, ECLI:EU:C:1995:441, point 17; CJUE, 15 mars 2017, C-3/16, précité, point 56; grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, précité, point 61).
Eu égard à ce qui est dit en B.19.5, l’interprétation de l’article 6 de la directive (UE) 2018/2001 n’est pas suffisamment mise en doute, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’accueillir la demande de poser des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne.
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B.20. Il résulte de ce qui précède que le premier moyen dans les affaires nos 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049 et le deuxième moyen dans l’affaire n° 8049 ne sont pas fondés, en ce qu’ils sont pris de la violation des normes mentionnées en B.17.
En ce qui concerne le droit de propriété
B.21. Le troisième moyen dans les affaires nos 8046, 8048 et 8049 est pris de la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 16 de la Constitution, lu en combinaison ou non avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme (ci-après : le Premier Protocole additionnel), avec l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec le principe de la sécurité juridique.
Les parties requérantes font valoir en substance que le droit de propriété des producteurs d’électricité verte et des producteurs d’énergie produite à partir d’installations de cogénération qualitative est affecté par l’instauration d’une possibilité d’actualisation de la partie non rentable pour les installations ayant des frais de carburant. En effet, la disposition attaquée priverait les producteurs d’actifs qu’ils percevraient si la législation n’était pas modifiée et elle affecterait ainsi la rentabilité du projet.
B.22.1. L’article 16 de la Constitution dispose :
« Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».
L’article 1er du Premier Protocole additionnel dispose :
« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens
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conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes ».
L’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dispose :
« 1. Toute personne a le droit de jouir de la propriété des biens qu’elle a acquis légalement, de les utiliser, d’en disposer et de les léguer. Nul ne peut être privé de sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, dans des cas et conditions prévus par une loi et moyennant en temps utile une juste indemnité pour sa perte. L’usage des biens peut être réglementé par la loi dans la mesure nécessaire à l’intérêt général.
2. La propriété intellectuelle est protégée ».
B.22.2. L’article 1er du Premier Protocole additionnel et l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ayant une portée analogue à celle de l’article 16 de la Constitution, les garanties qu’ils contiennent forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour en tient compte lors de son contrôle des dispositions attaquées.
B.22.3. Sont des « biens », au sens de l’article 1er du Premier Protocole additionnel, les valeurs patrimoniales, telles que des créances en vertu desquelles leurs titulaires peuvent prétendre avoir au moins une espérance légitime et raisonnable d’obtenir la jouissance effective d’un droit de propriété (CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c. Belgique, ECLI:CE:ECHR:2007:1127JUD002186103, § 75; grande chambre, 29 mars 2010, Depalle c. France, ECLI:CE:ECHR:2010:0329JUD003404402, § 63; 18 mai 2010, Plalam S.P.A.
c. Italie, ECLI:CE:ECHR:2010:0518JUD001602102, § 36), étant entendu que cette espérance doit reposer sur une « base suffisante en droit interne » (CEDH, grande chambre, 28 septembre 2004, Kopecký c. Slovaquie, ECLI:CE:ECHR:2004:0928JUD004491298, § 52; grande chambre, 29 mars 2010, Depalle c. France, précité, § 63).
B.23. Comme il est dit en B.19, dans le cadre de l’examen des moyens relatifs à la violation alléguée du principe de la sécurité juridique, la réglementation qui existait avant l’entrée en vigueur du décret du 23 décembre 2022 ne pouvait être interprétée en ce sens qu’elle créait, pour les producteurs d’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables et d’énergie produite dans des installations de cogénération qualitative, une attente légitime en ce qui concerne le maintien des conditions relatives à l’octroi de certificats verts et de certificats de cogénération. Par conséquent, la circonstance que les conditions du régime sont modifiées pour
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l’avenir ne saurait permettre de déduire une violation du droit de propriété des producteurs d’énergie verte et d’énergie produite dans des installations de cogénération qualitative. Pour le surplus, les dispositions attaquées n’affectent nullement les certificats octroyés par le passé et l’aide reste en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables du fait que le calcul des certificats verts et des certificats de cogénération demeure lié à la partie non rentable.
B.24. Le troisième moyen dans les affaires nos 8046, 8048 et 8049 n’est pas fondé.
En ce qui concerne le principe d’égalité et de non-discrimination
B.25. Les parties requérantes dans les affaires nos 8039, 8046, 8047, 8048 et 8049 prennent plusieurs moyens de la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10
et 11 de la Constitution.
B.26.1. Le principe d’égalité et de non-discrimination garanti par les articles 10 et 11 de la Constitution n’exclut pas qu’une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu’elle repose sur un critère objectif et qu’elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s’oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu’apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.
L’existence d’une telle justification doit s’apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d’égalité et de non-discrimination est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
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B.26.2. Compte tenu de la haute technicité de la matière en cause, il y a lieu de reconnaître au législateur compétent une marge d’appréciation étendue et il ne peut lui être reproché d’avoir appréhendé la diversité des situations de manière simplifiée et approximative.
B.27. Dans le premier moyen dans l’affaire n° 8039, dans la deuxième branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046, dans la deuxième branche du deuxième moyen dans l’affaire n° 8048 et dans la deuxième branche du premier moyen dans l’affaire n° 8049, les parties requérantes critiquent l’identité de traitement de projets dont la date de début est antérieure ou postérieure à l’entrée en vigueur de la disposition attaquée, en ce que celle-ci instaure pour les deux catégories de projets l’actualisation de la partie non rentable. Or, ces deux catégories se trouveraient dans des situations fondamentalement différentes, en ce que les nouveaux projets dont la date de début est postérieure à l’entrée en vigueur de la disposition attaquée peuvent anticiper sur une telle possibilité d’actualisation, ce qui n’est pas le cas des projets en cours dont la date de début est antérieure à l’entrée en vigueur de la disposition attaquée.
B.28.1. Si le législateur décrétal estime qu’un changement de politique s’impose, il peut décider de lui donner un effet immédiat et, en principe, il n’est pas tenu de prévoir un régime transitoire. Les articles 10 et 11 de la Constitution ne sont violés que si l’absence d’une mesure transitoire entraîne une différence de traitement qui n’est pas susceptible de justification raisonnable ou s’il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime.
B.28.2. Il découle des travaux préparatoires cités en B.4.2 que le législateur décrétal entendait, par la disposition attaquée, éviter « qu’il y ait sursubventionnement ou sous-
subventionnement en raison de l’évolution des prix de l’électricité ou des frais de carburant. De ce fait, l’efficacité économique est augmentée et les risques pour les investisseurs diminuent »
(Doc. parl., Parlement flamand, 2022-2023, n° 1467/1, p. 33).
B.28.3. Il appartient au législateur décrétal d’apprécier dans quelle mesure il est nécessaire et, le cas échéant, également urgent de prendre des mesures en vue d’augmenter l’efficacité économique du système des certificats verts et de cogénération.
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Eu égard à cet objectif, et compte tenu de ce que la disposition attaquée n’affecte nullement les certificats octroyés par le passé et de ce que l’aide reste en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables du fait que le calcul des certificats verts et des certificats de cogénération reste lié à la partie non rentable, l’identité de traitement des projets en cours et des nouveaux projets n’est pas dénuée de justification raisonnable.
B.29. Le premier moyen dans l’affaire n° 8039, le premier moyen, en sa deuxième branche, dans l’affaire n° 8046, le deuxième moyen, en sa deuxième branche, dans l’affaire n° 8049 et le premier moyen, en sa deuxième branche, dans l’affaire n° 8049, en ce qui concerne la violation alléguée des articles 10 et 11 de la Constitution, ne sont pas fondés.
B.30 Dans la première branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046, les premier et deuxième moyens dans l’affaire n° 8047, la première branche du deuxième moyen dans l’affaire n° 8048 et la première branche du premier moyen dans l’affaire n° 8049, les parties requérantes critiquent l’identité de traitement entre les catégories de projets devant tenir compte de frais de carburant et celles qui ne le doivent pas. Elles se trouveraient dans des situations fondamentalement différentes au regard de l’objectif et des effets de la disposition attaquée, en ce que les projets devant tenir compte de frais de carburant sont confrontés à d’importants coûts opérationnels, ce qui n’est pas le cas des projets sans frais de carburant.
B.31.1. En abrogeant, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, l’exception à l’actualisation de la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant et en prévoyant une actualisation de la partie non rentable pour les projets de production d’électricité verte ou de cogénération, qu’il s’agisse de projets devant tenir compte de frais de carburant ou de projets sans frais de carburant, le législateur décrétal traite ces catégories de projets de la même manière.
B.31.2. La circonstance qu’une règle antérieure ne prévoyait pas l’actualisation de la partie non rentable dans le cadre du calcul des certificats verts et des certificats de cogénération pour les projets devant tenir compte de frais de carburant n’empêche pas le législateur décrétal de prévoir dans de nouvelles règles l’actualisation de la partie non rentable pour ces projets.
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En ce qui concerne l’objectif, mentionné en B.28.2, de l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, il est pertinent de prévoir l’actualisation de la partie non rentable pour les projets de production d’électricité verte ou de cogénération, qu’il s’agisse de projets devant tenir compte de frais de carburant ou de projets sans frais de carburant.
Cette identité de traitement ne produit pas des effets disproportionnés, en ce que l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie, tel qu’il a été modifié par l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, dispose que, dans le cadre de l’actualisation, il est tenu compte non seulement de la production d’électricité, mais également des « autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet » et que le Gouvernement flamand « peut déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée ». L’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, précité, du décret sur l’Énergie n’exclut donc pas que, dans le cadre de l’actualisation de la partie non rentable, il soit tenu compte des coûts opérationnels des projets de production d’électricité verte et de cogénération. Le législateur décrétal a toutefois laissé au Gouvernement flamand le soin de fixer, outre les paramètres prévus par la disposition précitée, des paramètres supplémentaires qui sont pris en compte pour l’actualisation de la partie non rentable.
Lorsqu’un législateur décrétal délègue, il faut supposer, sauf indication contraire, qu’il entend exclusivement habiliter le délégué à faire de son pouvoir un usage conforme à la Constitution. C’est au juge compétent qu’il appartient de vérifier si le choix effectué par le Gouvernement flamand, en ce qui concerne les paramètres à prendre en compte en vue de l’actualisation de la partie non rentable, porte atteinte ou non au principe d’égalité et de non-
discrimination.
B.31.3. Indépendamment de la question de savoir si les projets de production d’électricité verte ou de cogénération se trouvent dans des situations fondamentalement différentes selon qu’ils doivent ou non tenir compte de frais de carburant, l’identité de traitement critiquée est raisonnablement justifiée.
B.32. Le premier moyen, en sa première branche, dans l’affaire n° 8046, les premier et deuxième moyens dans l’affaire n° 8047, le deuxième moyen, en sa première branche, dans l’affaire n° 8048 et le premier moyen, en sa première branche, dans l’affaire n° 8049, en ce qui concerne la violation alléguée des articles 10 et 11 de la Constitution, ne sont pas fondés.
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B.33. Dans la troisième branche du premier moyen dans l’affaire n° 8046, les parties requérantes critiquent la différence de traitement entre les producteurs d’électricité verte qui ont recours à leur propre personnel pour exploiter leur installation et les producteurs d’électricité verte qui, pour cette exploitation, ont entièrement ou partiellement recours à des prestataires externes, en ce que, dans le cadre de l’actualisation de la partie non rentable, il ne serait pas tenu compte des coûts salariaux mais bien des frais liés aux prestations de prestataires externes.
B.34. Contrairement à ce que font valoir les parties requérantes, l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie, tel qu’il a été modifié par l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, n’exclut pas que, dans le cadre de l’actualisation de la partie non rentable, il soit tenu compte des coûts salariaux. Comme il est dit en B.31.2, la partie non rentable est en effet actualisée, en vertu de cette disposition, « en fonction de la production d’électricité et des autres coûts et/ou des recettes des flux énergétiques entrants et sortants du projet » et le Gouvernement flamand peut « déterminer des flux entrants et sortants supplémentaires qui doivent être pris en compte dans le calcul de la partie non rentable actualisée ». Le législateur décrétal a ainsi habilité le Gouvernement flamand à déterminer dans quelle mesure les frais de personnel sont pris en compte en vue de l’actualisation de la partie non rentable.
Il appartient au juge compétent d’examiner si le choix opéré par le Gouvernement flamand, en ce qui concerne les paramètres à prendre en compte en vue de l’actualisation de la partie non rentable, porte atteinte ou non au principe d’égalité et de non-discrimination.
B.35. En sa troisième branche, le premier moyen dans l’affaire n° 8046 n’est pas fondé.
B.36. Dans le deuxième moyen dans l’affaire n° 8039, la partie requérante critique la différence de traitement entre, d’une part, les installations ayant des frais de carburant et une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013, pour lesquelles l’article 26 du décret du 23 décembre 2022 prévoit une actualisation de la partie non rentable, et, d’autre part, les installations ayant des frais de carburant dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013, qui restent exceptées de l’actualisation.
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B.37. En vertu de l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie, tel qu’il a été modifié par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, « la partie non rentable pour la production d’électricité écologique dans une installation dont la date de début se situe avant le 1er janvier 2013, telle que visée à l’article 7.1.1, § 1er, n’est pas actualisée », alors que, « pour tous les autres projets en cours et nouveaux projets ayant une date de début du 1er août au 31 décembre de l’année civile en cours pour la production d’électricité verte ou pour la cogénération, la partie non rentable est [...] actualisée ».
B.38.1. Selon le Gouvernement flamand, le deuxième moyen dans l’affaire n° 8039 est irrecevable ratione temporis, au motif que le législateur décrétal n’aurait pas voulu s’approprier le contenu du régime relatif aux installations de production dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013, tel qu’il est contenu dans l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, du décret sur l’Énergie.
B.38.2. Un recours dirigé contre une différence de traitement ne résultant pas de la loi attaquée mais déjà contenue dans une loi antérieure est irrecevable.
Toutefois, lorsque, dans une législation nouvelle, le législateur reprend une disposition ancienne et s’approprie de cette manière son contenu, un recours peut être introduit contre la disposition reprise, dans les six mois de sa publication.
B.38.3. Certes, par l’article 26, attaqué, du décret du 23 décembre 2022, le législateur décrétal n’a pas légiféré à l’égard des installations de production dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013, en ce qu’il n’a pas modifié l’article 7.1.4/1, § 4, alinéa 3, première phrase, du décret sur l’Énergie, qui dispose que, pour ces installations, la partie non rentable n’est pas actualisée.
Étant donné que, par la disposition attaquée, le législateur décrétal a toutefois prévu une actualisation pour tous les autres projets de production d’électricité verte ou de cogénération, en ce compris les projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013, la différence de traitement invoquée découle effectivement de la disposition attaquée.
L’exception est rejetée.
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B.39.1. Comme il est dit en B.3, le législateur décrétal a prévu, par le décret du 13 juillet 2012, qui a remplacé les articles 7.1.1 et 7.1.2 du décret sur l’Énergie, des régimes distincts pour les installations dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013 et les installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013. Le législateur décrétal visait ainsi en substance à « augmenter l’efficacité de l’aide financière, en limitant la période d’aide accordée via les certificats sans porter atteinte aux engagements contractés par voie de décret, afin de sauvegarder la sécurité juridique » (Doc. parl., Parlement flamand, 2011-
2012, n° 1639/1, p. 6). Ainsi que la Cour l’a déjà jugé par son arrêt n° 8/2014 du 23 janvier 2014 (ECLI:BE:GHCC:2014:ARR.008), « le régime s’appliquant aux installations dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013 repose sur des principes qui diffèrent fondamentalement des principes qui fondent un régime applicable aux installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013, avec pour effet que des aspects isolés de ces régimes ne peuvent pas être utilement comparés » (B.58).
Le régime afférent aux installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013 tend à faire en sorte que « le montant de l’aide soit [...] lié à la rentabilité des installations »
(Doc. parl., Parlement flamand, 2011-2012, n° 1639/1, p.3). Cet objectif est confirmé par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, qui tend à éviter « qu’il y ait sursubventionnement ou sous-subventionnement en raison de l’évolution des prix de l’électricité ou des frais de carburant. De ce fait, l’efficacité économique est augmentée et les risques pour les investisseurs diminuent » (Doc. parl., Parlement flamand, 2022-2023, n° 1467/1, p. 33). Ainsi qu’il a été constaté à plusieurs reprises, il est pertinent, à la lumière de cet objectif, de prévoir une actualisation de la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013.
Pour les installations dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013, le législateur décrétal a, par le décret du 13 juillet 2012, voulu respecter autant que possible les « engagements contractés ». Il n’apparaît pas que, par le décret du 23 décembre 2022, le législateur décrétal ait voulu revenir sur cet objectif. À la lumière de cet objectif, il est également pertinent de prévoir que la partie non rentable pour la production d’électricité verte dans une installation dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013 n’est pas actualisée. Par ailleurs, le facteur de banding et la partie non rentable, pour les installations dont la date de mise en service est antérieure au 1er janvier 2013, jouent uniquement un rôle dans le
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cadre du calcul du nombre de certificats verts octroyés en cas de prolongation de la période d’aide initiale, le facteur de banding étant calculé différemment en comparaison des installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013 et des plafonds différents étant applicables pour les facteurs de banding.
B.39.2. La différence de traitement ne produit pas des effets disproportionnés, étant donné que la disposition attaquée n’affecte aucunement les certificats octroyés par le passé et que l’aide octroyée pour les installations ayant une date de mise en service à partir du 1er janvier 2013 reste en adéquation avec ce qui est nécessaire pour rendre les installations de production rentables du fait que le calcul des certificats verts et des certificats de cogénération demeure lié à la partie non rentable.
B.39.3. Par conséquent, la différence de traitement entre les installations ayant une date de mise en service antérieure au 1er janvier 2013 ou à partir de cette date n’est pas dénuée de justification raisonnable.
B.40. En ce qui concerne la violation alléguée des articles 10 et 11 de la Constitution, le deuxième moyen dans l’affaire n° 8039 n’est pas fondé.
Quant aux autres griefs
B.41. Dans le troisième moyen dans l’affaire n° 8039, la partie requérante invoque la violation, par les articles 26 et 61 du décret du 23 décembre 2022, de l’article 108 du TFUE, au motif que les dispositions attaquées modifieraient les aides d’État existantes et auraient dès lors dû être notifiées à la Commission européenne, ce qui n’a pas été fait.
B.42. En vertu de l’article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour est compétente pour statuer sur les recours en annulation d’une loi, d’un décret ou d’une règle visée à l’article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l’autorité fédérale, des communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.
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B.43. En ce que la Cour est invitée, dans le troisième moyen dans l’affaire n° 8039, à exercer un contrôle direct des dispositions attaquées au regard de l’article 108 du TFUE, le moyen est irrecevable.
B.44. Le troisième moyen dans l’affaire n° 8039 est irrecevable.
B.45. Dans le premier moyen dans l’affaire n° 8049, la partie requérante invoque la violation, par l’article 26 du décret du 23 décembre 2022, des articles 10, 11 et 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de la solidarité, qui est contenu dans l’article 194 du TFUE, et avec les articles 1er, 6 et 7 du règlement (UE) 2022/1854 du Conseil du 6 octobre 2022 « sur une intervention d’urgence pour faire face aux prix élevés de l’énergie »
(ci-après : le règlement (UE) 2022/1854).
B.46. La partie requérante n’expose pas en quoi la disposition attaquée porterait atteinte au règlement (UE) 2022/1854.
À défaut d’exposé, le premier moyen dans l’affaire n° 8049, en ce qui concerne la violation alléguée des articles 1er, 6 et 7 du règlement (UE) 2022/1854, est irrecevable.
B.47. En ce qui concerne la violation alléguée du droit à un logement décent, garanti par l’article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, lu en combinaison avec le principe de la solidarité contenu dans l’article 194 du TFUE, la partie requérante fait valoir qu’en soumettant les investissements en cours à l’actualisation du facteur de banding, le législateur décrétal porte atteinte à la rentabilité des installations de cogénération, de sorte que l’approvisionnement en énergie risque d’être compromis.
B.48. Comme il est dit en B.11.2, il n’apparaît pas que la disposition attaquée, en prévoyant une possibilité d’actualiser la partie non rentable pour les projets devant tenir compte de frais de carburant et ayant une date de début à partir du 1er janvier 2013, risque de compromettre la rentabilité de ces projets et par conséquent la sécurité d’approvisionnement en énergie.
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B.49. Le premier moyen dans l’affaire n° 8049, en ce qui concerne la violation alléguée de l’article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, lu en combinaison avec le principe de la solidarité contenu dans l’article 194 du TFUE, repose par conséquent sur une prémisse erronée et est dès lors non fondé.
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Par ces motifs,
la Cour
rejette les recours.
Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 4 juillet 2024.
Le greffier, Le président,
Nicolas Dupont Luc Lavrysen