V. H. M.,
Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,
contre
Région flamande,
Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation.
I. La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 25 février 2003 par la cour d'appel d'Anvers.
II. La procédure devant la Cour
Le conseiller Greta Bourgeois a fait rapport.
L'avocat général Guy Dubrulle a conclu.
III. Le moyen de cassation
La demanderesse présente un moyen dans sa requête.
La requête est annexée au présent arrêt et en fait partie intégrante.
IV. La décision de la Cour
1. Quant à la première branche:
Attendu qu'il ne ressort pas des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que la demanderesse a invoqué devant les juges du fond le dépassement du délai raisonnable au sens de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales;
Que le moyen, en cette branche, est nouveau et, dès lors, irrecevable;
(.)
2. Quant à la troisième branche:
Attendu que l'indemnité provisionnelle, déterminée à l'article 16 de la Constitution, est étrangère à la condamnation au remboursement du surplus des sommes perçues par la personne expropriée, dès lors que, durant la procédure de révision fondée sur la loi du 26 juillet 1962 relative à la procédure d'extrême urgence en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, l'indemnité d'expropriation est diminuée par décision judiciaire;
Attendu qu'il ne ressort pas des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que la demanderesse a allégué devant les juges du fond que l'article 1er du Premier Protocole additionnel du 20 mai 1952 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été violé, dès lors que le défendeur n'avait pas déterminé l'indemnité d'expropriation dans un délai raisonnable;
Que le moyen, en cette branche, est nouveau;
Attendu que, pour le surplus, la violation alléguée de l'article 1er du Premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que l'arrêt, plus de vingt ans après la fixation de l'indemnité provisionnelle, condamne la demanderesse au remboursement d'un montant de 97.127,06 euros, majoré des intérêts, à savoir un montant supérieur à l'indemnité d'expropriation provisionnelle, est entièrement déduite d'une transgression vainement invoquée du délai raisonnable;
Que le moyen, en cette branche, est irrecevable;
3. Quant à la quatrième branche:
Attendu que conformément à l'article 1er, du Premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international;
Que l'article 21 de la loi du 26 juillet 1962 dispose que si au cours de la procédure, l'indemnité d'expropriation est diminuée par décision judiciaire et que l'exproprié est dès lors condamné au remboursement du trop-perçu, celui-ci est redevable des fruits civils qu'il a perçus ou aurait pu percevoir sur ce montant jusqu'au jour de la condamnation au remboursement; que ces fruits sont toujours égaux au taux de l'intérêt de la Caisse des dépôts et consignations pour la période où les sommes y sont restées consignées, et au taux de refinancement de la Banque centrale européenne à partir du retrait de celles-ci; qu'à partir du retrait des sommes de la Caisse des dépôts et consignations, les fruits s'élèvent à 3 p.c.;
Attendu que le règlement contenu à l'article précité tend à déterminer un taux d'intérêt très bas pour les sommes perçues indûment par la personne expropriée et ne lui impose, ainsi, pas la charge de la preuve d'avoir obtenu moins d'intérêts sur les sommes ainsi perçues que le taux d'intérêt légal ou le taux d'intérêt du marché;
Que cette disposition, quelle que soit la durée de la procédure en révision, ne porte pas atteinte au juste équilibre entre l'intérêt général et le droit de propriété individuelle tel qu'il est garanti par le Protocole additionnel;
Que le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Ivan Verougstraete, le président de section Robert Boes, les conseillers Greta Bourgeois, Ghislain Londers et Eric Dirix, et prononcé en audience publique du onze février deux mille cinq par le président Ivan Verougstraete, en présence de l'avocat général Guy Dubrulle, avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Didier Batselé et transcrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le conseiller,