La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2005 | BELGIQUE | N°C.03.0264.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 28 février 2005, C.03.0264.F


COMMUNAUTE FRANçAISE DE Belgique, représentée par le ministre de l'Enseignement supérieur, de l'Aide à la jeunesse, de la Recherche scientifique et des Relations internationales, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue des Arts, 19 A-D,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 523, où il est fait élection domicile,
contre
1. FACULTE POLYTECHNIQUE DE MONS, représentée par son conseil d'administration, dont les bureaux sont établis à Mons, rue de Hou

dain, 9,
défenderesse en cassation,
2. ETAT BELGE, représenté par le ministre...

COMMUNAUTE FRANçAISE DE Belgique, représentée par le ministre de l'Enseignement supérieur, de l'Aide à la jeunesse, de la Recherche scientifique et des Relations internationales, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue des Arts, 19 A-D,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 523, où il est fait élection domicile,
contre
1. FACULTE POLYTECHNIQUE DE MONS, représentée par son conseil d'administration, dont les bureaux sont établis à Mons, rue de Houdain, 9,
défenderesse en cassation,
2. ETAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires sociales et des Pensions, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 62,
représenté par Maître Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile,
3. ETAT BELGE, représenté par le ministre de l'Economie et de la Recherche scientifique, dont le cabinet est établi à Bruxelles, square de Meeûs, 23,
représenté par Maître John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, où il est fait élection de domicile,
4. ETAT BELGE, représenté par le ministre du Budget, de l'Intégration sociale et de l'Economie sociale, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue Royale, 180,
défendeurs en cassation ou, à tout le moins, parties appelées en déclaration d'arrêt commun.
La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 13 novembre 2002 par la cour d'appel de Bruxelles.
La procédure devant la Cour
Par ordonnance du 8 février 2005, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le conseiller Christian Storck a fait rapport.
Le premier avocat général Jean-François Leclercq a conclu.
Le moyen de cassation
La demanderesse présente un moyen libellé dans les termes suivants:
Dispositions légales violées
- articles 35, spécialement alinéas 1er et 2, 38, 127, § 1er, 2°, c) , 179 et, pour autant que de besoin, 24, § 5, de la Constitution coordonnée le 17 février 1994;
- articles 38 et, pour autant que de besoin, 37 de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires;
- article 1er, § 2, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, modifié par les lois des 8 août 1988 et 16 juillet 1993, cette disposition telle qu'elle existait tant avant qu'après sa modification par cette dernière loi, et, pour autant que de besoin, articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, et 87, § 3, de la même loi;
- article 61, §§ 1er à 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions.
Décisions et motifs critiqués
L'arrêt dit fondée dans son principe la demande formée par la défenderesse contre la demanderesse ayant pour objet le paiement des montants correspondant aux pensions de retraite que la défenderesse a été tenue de payer aux membres de son personnel enseignant admis à la retraite avant le 1er juillet 1971, tant pour les années 1986 et 1987 que pour les années 1989 et suivantes, et ce par tous ses motifs et notamment
« Que le débat actuel porte essentiellement sur la qualification qui peut être donnée aux subventions dues, sur pied de l'article 38 précité, à la [défenderesse] pour ses enseignants mis à la retraite avant le 1er juillet 1971: s'agit-il de 'pensions' justifiant la mise en oeuvre de l'exception visée par l'article 127 de la Constitution, hypothèse dans laquelle leur débition doit rester assumée par l'Etat (thèse de la [demanderesse]) ou de simples 'subventions' non assimilables à des pensions et dont la charge pèse sur la [demanderesse] en vertu du transfert de compétence précité (thèse [du deuxième défendeur]);
Que c'est à bon droit que le premier juge a considéré que les subventions visées à l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971 ne pouvaient être assimilées à des pensions au sens de l'article 127 de la Constitution, même si elles étaient destinées au paiement des pensions de retraite des membres du personnel académique des universités libres admis à la retraite avant le
1er juillet 1971 ;
Qu'une pension du secteur public répond aux caractéristiques suivantes:
- elle doit être instaurée par une loi (article 179 de la Constitution) et non par un règlement interne ;
- elle doit être payée par l'Etat (ou un organisme qu'il se substitue) et non par l'institution d'enseignement ;
- elle confère au créancier un droit subjectif contre l'Etat lui-même et non à l'égard des institutions d'enseignement ;
Qu'aucune de ces conditions cumulatives n'est présente en l'espèce, dès lors que les enseignants de la [défenderesse] admis à la retraite avant le
1er juillet 1971 (et qui sont actuellement tous décédés) bénéficiaient d'une pension due en vertu, non d'une loi, mais de la réglementation interne de la [défenderesse] qui en était l'unique débitrice (même si le paiement était effectué pour son compte par une caisse provinciale) et contre laquelle le professeur pensionné disposait personnellement d'un droit de créance ;
Que ces caractéristiques sont celles d'un régime privé de pensions et non d'un système de pensions du secteur public et, comme tel, organisé et pris en charge par l'Etat ;
Que la loi du 27 juillet 1971 a maintenu ce régime spécifique dans son article 38 qui, de manière temporaire - puisque appelé à disparaître progressivement au fil du temps et des décès des bénéficiaires -, consacre le droit des universités libres à obtenir le financement intégral du régime par les pouvoirs publics, les mettant ainsi sur pied d'égalité avec les universités d'Etat;
Que cette disposition n'a toutefois ni pour but ni pour effet de transformer ce régime privé de pensions en régime du secteur public dès lors qu'elle en préserve les caractéristiques précitées;
Qu'à titre surabondant, il y a lieu de constater que cette interprétation est confirmée tant par les travaux préparatoires et l'exposé des motifs de la loi que par la mise en place de deux régimes distincts par les articles 37 et 38 et par l'emploi du terme 'subvention' dans l'article 38;
Que, dans l'exposé des motifs, il est énoncé que: '2°) Le gouvernement propose, à l'avenir, que le service des pensions et éméritats du personnel académique en fonction dans les institutions universitaires libres soit assuré par l'Etat. A cette fin, il y a lieu d'étendre le champ d'application de la loi du 30 juillet 1879 (article 37). En même temps, il est proposé que les membres du personnel enseignant nommés à titre définitif à partir du 1er juillet 1971 soient dorénavant soumis à la loi générale du 21 juillet 1844 sur les pensions civiles et ecclésiastiques. 3 °) L'extension aux institutions universitaires libres [...] ne se fera, comme il a été dit, que pour le personnel académique non encore pensionné de ces institutions. Des subventions destinées à s'éteindre avec le temps doivent donc être maintenues pour le personnel académique retraité';
Que, si la loi du 27 juillet 1971 avait voulu uniformiser les deux systèmes de pensions tant pour les enseignants de 'l'ancien régime' admis à la retraite avant le 1er juillet 1971 que pour ceux qui le seraient après cette date, il n'existait pas de motifs de maintenir, dans les articles 37 et 38, deux régimes différents applicables aux deux situations qui eussent été uniformisées; que pareille distinction a néanmoins clairement été faite par la loi puisque l'article 37 soumet les situations futures au régime du secteur public commun à tous les enseignants pensionnés après le 1er juillet 1971, alors que l'article 38 prolonge le régime privé antérieur qui régit les pensions des enseignants admis à la retraite avant cette date;
Que l'emploi du terme 'subvention' vient, si besoin en était encore, confirmer le caractère distinct des deux régimes organisés par les dispositions susdites ;
Que ce terme revêt, en droit public, un sens spécifique; qu'une subvention est 'une intervention pécuniaire accordée par l'Etat ou par une personne juridique subventionnée par l'Etat à une personne juridique ou physique pour le financement d'activités jugées utiles à l'intérêt général' (J.Salmon, Les subventions, Bruylant, 1976, 24); que les sommes visées à l'article 38 et désignées à juste titre par le nom technique qui leur convient répondent aux caractéristiques des subventions telles que définies ci-avant puisque:
1 ° elles sont versées par les pouvoirs publics à des institutions privées pour leur permettre d'assumer, sous le contrôle de l'Etat, un service d'intérêt général;
2 ° elles sont affectées au paiement des pensions aux membres du corps enseignant créanciers de ces institutions et non de l'autorité subsidiante;
Que si l'Etat était tenu au paiement des subventions visées à l'article 38 avant les réformes institutionnelles qui ont consacré le transfert de certaines compétences aux communautés et régions, il n'en est plus ainsi depuis la révision constitutionnelle de 1988 qui attribue à partir du 1er janvier 1989 à la Communauté française la compétence en matière d'enseignement ainsi que les droits et obligations qui s'y rattachent;
Que, dès lors que les sommes dues à la [défenderesse] ne peuvent être considérées comme des pensions mais comme des subventions pures et simples, elles n'entrent pas dans le champ d'application des exceptions visées par l'article 127 de la Constitution;
Que c'est donc à juste titre que le premier juge a condamné la [demanderesse] à leur paiement».
Griefs
A défaut d'entrée en vigueur de l'article 35, alinéas 1er et 2, de la Constitution coordonnée issu de la révision du 5 mai 1993, chaque communauté n'a, en vertu de l'article 38 de la Constitution, que les attributions qui lui sont reconnues par la Constitution ou par les lois prises en vertu de celle-ci.
L'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution dispose que les conseils de la Communauté française et de la Communauté flamande, chacun pour ce qui le concerne, règlent par décret l'enseignement, à l'exception du régime des pensions.
L'article 179 de la Constitution dispose qu'aucune pension, aucune gratification à la charge du Trésor public ne peut être accordée qu'en vertu d'une loi.
L'article 1er, § 2, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du
8 août 1980, modifié par les lois des 8 août 1988 et 16 juillet 1993, dispose que le conseil et le gouvernement de la Communauté française, ci-après dénommés le conseil de la Communauté française et le gouvernement de la Communauté française, sont compétents pour les matières visées à l'article 59bis de la Constitution, l'article 59bis, § 2, étant devenu l'article 127, § 1er, de la Constitution coordonnée le 17 février 1994.
L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 dispose que l'autorité fédérale est seule compétente pour le droit du travail et la sécurité sociale; l'article 87, § 3, de la même loi exclut la compétence des communautés et des régions en matière de pensions.
L'article 61, §§ 1er à 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions dispose notamment qu'à moins que ladite loi n'en dispose autrement, les communautés et les régions succèdent aux droits et obligations de l'Etat relatifs aux compétences qui leur sont attribuées par la loi du 8 août 1988 modifiant la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, y compris les droits et obligations résultant de procédures judiciaires en cours et à venir.
L'article 38 de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires dispose qu'à partir du 1er juillet 1971, il est accordé aux institutions universitaires qu'il désigne, y compris la [défenderesse], une subvention exclusivement affectée au service des pensions des membres du personnel enseignant de ces institutions admis à la retraite avant le 1er juillet 1971.
Le régime des pensions visé à l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution, qui est exclu de la compétence des communautés et demeure par voie de conséquence de la compétence de l'Etat, englobe le régime de l'ensemble des pensions de retraite, notamment attribuées au personnel enseignant, dont la charge financière incombait à l'Etat en vertu de la loi du 27 juillet 1971 avant l'entrée en vigueur de cette disposition constitutionnelle.
Ce régime inclut notamment, d'une part, la charge financière constituée, en vertu de l'article 37 de la loi du 27 juillet 1971, par le paiement effectif, par l'Etat aux bénéficiaires, des pensions de retraite attribuées à certains membres d'institutions universitaires admis à la retraite après le
1er juillet 1971 et, d'autre part, la charge financière constituée, en vertu de l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971, par le paiement effectif, à des institutions universitaires, d'une subvention exclusivement affectée au service des pensions de retraite de certains membres du personnel enseignant de ces institutions admis à la retraite avant le 1er juillet 1971, subvention égale à la charge financière effectivement assumée par chaque institution pour le service des pensions. Ce régime, s'il exige, par sa combinaison avec l'article 179 de la Constitution, que les pensions qu'il vise soient mises à la charge du Trésor public en vertu d'une loi, n'exige, en revanche, ni que les pensions qu'il vise soient payées directement par l'Etat ou un organisme qu'il se substitue et non par une institution d'enseignement, ni que les créanciers de telles pensions disposent d'un droit subjectif contre l'Etat lui-même (ou un organisme qu'il se substitue) et non à l'égard des institutions d'enseignement. Il inclut donc dans son champ d'application les subventions exclusivement affectées au service de pensions, quel que soit le mode initial de calcul de telles pensions.
Ce régime, en tant qu'il met à la charge de l'Etat et non des communautés le financement de l'ensemble des pensions de retraite visées par les articles 37 et 38 de la loi du 27 juillet 1971, repose en effet dans sa totalité sur le principe du caractère fédéral qui s'attache au régime des pensions de retraite, considéré comme une composante du régime, également fédéral, de la sécurité sociale belge. La compétence exclusive de l'autorité fédérale en matière de sécurité sociale est au demeurant confirmée par l'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, tandis que l'exclusion de la compétence des communautés et des régions en matière de pensions est confirmée par l'article 87, § 3, de la même loi.
Il en résulte qu'en décidant que seule est maintenue à la charge de l'Etat l'obligation de payer des pensions de retraite du personnel enseignant des
institutions universitaires visé à l'article 37 de la loi du 27 juillet 1971, tandis que serait transférée à la charge des communautés l'obligation de payer des subventions exclusivement affectées au service des pensions du personnel enseignant des institutions universitaires visé à l'article 38 de la même loi, au motif que ces subventions ne constituent pas des pensions du secteur public, l'arrêt viole l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution et, pour autant que de besoin, les articles 24, § 5, 35, alinéas 2 et 3, 38 et 179 de la Constitution révisée le 17 février 1994 et, en outre, l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires et, pour autant que de besoin, l'article 37 de la même loi et, en outre, pour autant que de besoin, l'article 1er, § 2, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, modifié par les lois des 8 août 1988 et 16 juillet 1993, et, pour autant que de besoin, les articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, et 87, § 3, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, ainsi que l'article 61, §§1er à 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions.
Le moyen invite donc la Cour à décider elle-même que l'article 127, §1er, 2°, c), de la Constitution, éventuellement combiné avec les articles 24, §5, 35, spécialement alinéas 1er et 2, et 179 de la Constitution, avec les articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, et 87, § 3, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, ainsi qu'avec l'article 61, §§ 1er à 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, doit être interprété comme incluant, dans l'exception constituée par le «régime des pensions», les subventions exclusivement affectées au service des pensions visées à l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971.
Si la Cour fait sienne cette interprétation, elle cassera l'arrêt attaqué.
Subsidiairement, il se pourrait que la Cour estime ne pas devoir consacrer elle-même l'interprétation de l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution éventuellement combiné avec les dispositions précitées de la Constitution, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 et de la loi du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, comme incluant dans le régime des pensions qui, étant exclu de la compétence des communautés et n'incombant pas à leur charge, relève de la compétence de l' Etat fédéral et incombe à la charge de celui-ci, le régime des subventions exclusivement affectées au service des pensions des membres du personnel enseignant des institutions universitaires visé à l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971. La Cour devrait néanmoins constater que, selon l'interprétation qui est reconnue à cette disposition constitutionnelle, éventuellement combinée avec les dispositions précitées des lois spéciales du 8 août 1980 et du 16 janvier 1989, celle-ci inclut ou non les subventions litigieuses, visées à l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971, dans le champ d'application de l'exception constituée par le régime des pensions.
Il en résulterait que, dans l'interprétation selon laquelle l'exception contenue dans l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution inclut les subventions litigieuses, l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971, lui-même interprété, ainsi que le fait l'arrêt, comme ne conférant pas aux subventions qu'il vise la qualification de pension relevant du régime de pensions mis à charge de l'Etat, serait incompatible avec cette disposition constitutionnelle et, partant, la violerait.
L'article 127, § 1er, 2°, c), et les articles 24, § 5, et 35, spécialement alinéas 1er et 2, de la Constitution, de même que les articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, et 87, § 3, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 et l'article 61, §§ 1er à 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 sur le financement des communautés et des régions sont des règles répartitrices de compétence, visées aux articles 141 et 142, 1°, de la Constitution et à l'article 26, § 1er, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, s'agissant de règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des communautés et des régions.
La demanderesse soulève dès lors quant à ce devant la Cour une question préjudicielle. La Cour devra la poser à la Cour d'arbitrage, conformément à l'article 26, § 2, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, aucune exception visée par cette disposition, modifiée par la loi du 9 mars 2003, n'étant vérifiée en l'espèce.
Cette question préjudicielle est libellée comme il suit:
«L'article 38 de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires, interprété comme ne conférant pas aux subventions qu'il vise, exclusivement affectées au service des pensions des membres du personnel enseignant des institutions considérées admis à la retraite avant le 1er juillet 1971, et égales à la charge financière effectivement assumée par chaque institution pour le service de ces pensions, la qualification de pensions, relevant du régime des pensions mis à charge de l'Etat par l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution révisée le 11 février 1994, le cas échéant combiné avec les articles 24, § 5, 35, spécialement alinéas 1er et 2, de la Constitution, avec l'article 179 de celle-ci et avec les articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, et 87, § 3, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du
8 août 1980 et avec l'article 67, §§ 1er à 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 sur le financement des communautés et des régions, viole-t-il ces règles constitutionnelles et ces règles légales» ?
La décision de la Cour
Sur la fin de non-recevoir opposée au pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre lui, par le premier défendeur et déduite de ce que la décision de l'arrêt le mettant hors de cause n'est pas critiquée,
Et sur la fin de non-recevoir opposée d'office au pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre le troisième défendeur, par le ministère public, conformément à l'article 1097 du Code judiciaire, et déduite de ce que la décision de l'arrêt mettant ce défendeur hors de cause n'est pas critiquée:
Attendu que l'arrêt, qui considère «que [le premier défendeur] n'est plus concerné par le litige, qui se meut entre la [défenderesse] [.], d'une part, [le deuxième défendeur] (qui se substitue [au troisième] [.]) et la [demanderesse], d'autre part», décide «de confirmer la mise hors de cause du [premier défendeur] et de donner acte au [deuxième défendeur] de sa substitution au [troisième] qui doit, lui-même, être mis hors de cause»;
Attendu que l'unique moyen présenté à l'appui du pourvoi par la demanderesse ne critique pas ces décisions, sur lesquelles la cassation qu'il pourrait entraîner resterait sans effet;
Que les fins de non-recevoir sont fondées;
Attendu qu'il se déduit des motifs qui justifient d'accueillir ces fins de non-recevoir que les demandes en déclaration d'arrêt commun formées par la demanderesse contre les premier et troisième défendeurs sont pareillement irrecevables;
Sur le moyen:
Attendu qu'aux termes de l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution, les conseils de la Communauté française et de la Communauté flamande, chacun pour ce qui le concerne, règlent par décret l'enseignement, à l'exception du régime des pensions;
Attendu qu'en vertu de l'article 38, alinéas 1er et 2, de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires, il est, à partir du 1er juillet 1971, accordé annuellement, à la défenderesse comme aux autres établissements libres d'enseignement universitaire désignés au texte, une subvention qui est exclusivement affectée au service des pensions des membres du personnel enseignant de ces institutions admis à la retraite avant le 1er juillet 1971 et qui est égale à la charge financière effectivement assumée par chacune d'elles pour le service de ces pensions en application de son règlement en vigueur à la date du 1er janvier 1971;
Qu'il suit des termes mêmes de cette disposition qu'en allouant aux institutions auxquelles elle s'applique, en vue de leur permettre d'honorer leurs engagements à l'égard des enseignants retraités, l'aide qui y est prévue, le législateur s'est borné à établir une règle de financement des universités libres sans s'immiscer dans le régime des pensions au service desquelles cette aide est affectée et qui, ayant déjà pris cours lors de l'entrée en vigueur de l'article 38, restaient soumises aux règlements particuliers dont celui-ci réserve expressément l'application;
Que le moyen, qui suppose que la subvention prévue à l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971 se rattache au régime des pensions que l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution exclut de la matière de l'enseignement qu'il attribue aux communautés, manque en droit;
Attendu que, pour le surplus, l'article 38 de la loi du 27 juillet 1971, qui ne détermine pas à qui, de l'Etat, des communautés ou des régions, compète la subvention qui en forme l'objet, ne saurait violer ni l'article 127, § 1er, 2°, c), de la Constitution ni aucune des autres dispositions visées au moyen en vertu desquelles cette compétence a été réglée;
Que, dès lors, dénuée d'objet, la question préjudicielle proposée à l'appui du moyen ne doit pas être posée à la Cour d'arbitrage;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi et les demandes en déclaration d'arrêt commun;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de six cent septante-deux euros trente-trois centimes envers la partie demanderesse, à la somme de cent soixante-deux euros neuf centimes envers la deuxième partie défenderesse et à la somme de deux cent quatre-vingt-quatre euros quatre-vingt-neuf centimes envers la troisième partie défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Philippe Echement, les conseillers Christian Storck, Daniel Plas, Christine Matray et Philippe Gosseries, et prononcé en audience publique du vingt-huit février deux mille cinq par le président de section Philippe Echement, en présence du premier avocat général Jean-François Leclercq, avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.03.0264.F
Date de la décision : 28/02/2005
1re chambre (civile et commerciale)
Sens de l'arrêt : Rejet

Parties
Demandeurs : COMMUNAUTE FRANÇAISE DE BELGIQUE
Défendeurs : FACULTE POLYTECHNIQUE DE MONS

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bruxelles, 13 novembre 2002


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2005-02-28;c.03.0264.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award