Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG C.05.0443.N
COMMISSION BANCAIRE, FINANCIERE ET DES ASSURANCES, ci-apres denommee CBFA,
Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,
contre
SOCREAL, societe privee à responsabilite limitee,
Me Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour de cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er juillet2005 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.
L'avocat general Dirk Thijs a conclu.
II. Les moyens de cassation
La demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants :
Premier moyen
Dispositions legales violees
- article 149 de la Constitution ;
- articles 1315, alinea 1er, et 1349 à 1353 du Code civil ;
- articles 870 et 1138, 2DEG, du Code judiciaire ;
- article 438 du Code des societes ;
- articles 195, 196, 198 et 203 de l'arrete royal du 30 janvier 2001portant execution du Code des societes ;
- article 1er, S:2, 2DEG, de l'arrete royal du 8 novembre 1989 relatif auxoffres publiques d'acquisition et aux modifications du controle dessocietes ;
- principe dispositif et droit de la defense (principes generaux dudroit).
Decisions et motifs critiques
L'arret attaque annule la decision susmentionnee de la C.B.F.A. (lademanderesse) sur la base de la consideration que « la societe viseeVooruitzicht ne peut pas etre consideree comme une societe correspondantà la notion de societe telle que visee à l'article 1er, S: 1er, 1DEG ou2DEG, de l'arrete royal du 8 novembre 1989 ».
Plus precisement relativement à l'hypothese contenue à l'article 1er, S:2, 2DEG, de cet arrete royal du 8 novembre 1989, l'arret considere ce quisuit :
« Quant à la question de savoir si les 14.000 actions constituant lecapital social etaient ou non repandues parmi plus de cinquante personnes,les parties n'offrent pas d'indications coherentes » ;
(...)
- « L'ensemble de ces elements ne peut justifier raisonnablement uneconclusion univoque quant à la dispersion des actions dans le public » ;
- « Il n'est des lors pas demontre que la troisieme hypothese visee àl'article 1er, S: 2, de l'arrete royal du 8 novembre 1989 est rencontreedans le chef de Vooruitzicht » ;
- « Le seul fait que Vooruitzicht est inscrit depuis 1989 sur la liste dela C.B.F.A. comprenant les societes visees à l'article 1er, S: 2, del'arrete royal du 8 novembre 1989, n'est pas determinant en soi et nechange donc rien à la conclusion formulee ».
Griefs
L'hypothese consideree non prouvee par l'arret est celle contenue àl'article 1er, S: 2, 2DEG, de l'arrete royal du 8 novembre 1989, en vertuduquel « par societe ayant fait ou faisant publiquement appel àl'epargne, il y a lieu d'entendre pour l'application des chapitres Ier etIII du present arrete : toute societe autre que celle visee au 1DEG dontdes titres vises au paragraphe 3 sont repandus parmi plus de 50personnes ».
(...)
Troisieme branche
Violation des articles 1315, 1349 à 1353 du Code civil, 870 du Codejudiciaire, 438 du Code des societes, 195, 196, 198 et 203 de l'arreteroyal du 30 janvier 2001 portant execution du Code des societes et 1er, S:2, 2DEG, de l'arrete royal du 8 novembre 1989.
Il resulte de l'article 438 du Code des societes, invoque par lademanderesse dans ses conclusions, que tant qu'une societe anonyme,conformement aux articles 438, alineas 2 et 4, du Code des societes, 195et 196 de l'arrete royal portant execution du Code des societes, estinscrite sur la liste redigee par la C.B.F.A., elle est consideree commefaisant publiquement appel à l'epargne ; en effet, conformement au memearticle 438, alineas 2 et 3, du Code des societes et des articles 198 et203 de l'arrete royal du 30 janvier 2001 portant execution de ce code,elle ne peut obtenir la radiation de la liste precitee que si elle etablitque l'ensemble des titres vises n'est plus repandu parmi plus de cinquantepersonnes.
L'arret attaque meconnait la foi due à l'article 438 du Code des societeset aux dispositions executoires precitees, ainsi que la charge de lapreuve qui y est associee, en imputant à tort, en des circonstances noncontestees, à savoir l'inscription toujours valable sur la liste de laC.B.F.A., en violation de la charge de la preuve telle qu'elle estdeterminee aux articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire et enviolation de la force probante des presomptions (articles 1349 à 1353 duCode civil), la charge de la preuve, soit le risque de la preuve, à lademanderesse et, en ce qui concerne le fait invoque par la demanderesseque Vooruitzicht est inscrit sur la liste des societes de la C.B.F.A.visee à l'article 1er, S: 2, de l'arrete royal du 8 novembre 1989, selimite à la consideration que ce fait n'est « pas determinant » et« ne change donc rien à la conclusion formulee ».
En decidant ainsi, l'arret attaque viole tant les articles 438 du Code dessocietes, 1er, S: 2, 2DEG, de l'arrete royal du 8 novembre 1989, 195, 196,198 et 203 de l'arrete royal portant execution du Code des societes, queles regles generales en matiere de la charge de la preuve, contenues auxarticles 1315 et 1349 à 1353 (relativement à la « presomption » commemoyen de preuve) et 870 du Code judiciaire.
(...)
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
(...)
Quant à la troisieme branche :
5. L'article 438, alinea 1er, du Code des societes dispose qu'une societeanonyme est consideree comme faisant ou ayant fait publiquement appel àl'epargne lorsqu'elle a fait un appel public à l'epargne en Belgique ouà l'etranger par une offre publique en souscription, une offre publiqueen vente, une offre publique d'echange ou une admission à la cote au sensde l'article 4 du code des titres determines à cet article 438.
L'article 438, alinea 2, in fine, du Code des societes dispose qu'unesociete se proposant de faire pour la premiere fois un appel public àl'epargne, doit se faire inscrire aupres de la Commission bancaire etfinanciere.
En vertu de l'article 438, alinea 3, une societe anonyme cesse d'etreconsideree comme faisant ou ayant fait publiquement appel à l'epargne,notamment lorsqu'elle etablit que l'ensemble des obligations ou titres quiont fait l'objet d'une des operations visees à l'alinea 2 ne sont plusrepandus dans le public.
Il resulte de ces dispositions que la presomption de l'existance du statutde societe anonyme ayant fait publiquement appel à l'epargne qui est lieeà l'inscription sur la liste, ne vaut que pour les societes ayant faitappel à l'epargne conformement à la procedure decrite à l'article 438,aliena 1er, du Code des societes.
6. Il ne ressort pas de l'arret que la societe impliquee a effectue lesoperations visees à l'article 438, alinea 1er.
Le moyen, en cette branche, necessite un examen des faits, pour lequel laCour est sans competence.
Il est irrecevable.
(...)
Par ces motifs,
La Cour,
Rejette le pourvoi.
Condamne la demanderesse aux depens.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Ivan Verougstraete, le president de section EdwardForrier, les conseillers Luc Huybrechts, Eric Dirix et Paul Maffei, etprononce en audience publique du dix-sept novembre deux mille six par lepresident Ivan Verougstraete, en presence de l'avocat general Dirk Thijs,avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Daniel Plas ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le conseiller,
17 NOVEMBRE 2006 C.05.0443.N/6