Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG S.05.0102.N
DOMICURA, S.P.R.L.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,
* * contre
UNION NATIONALE DES MUTUALITES SOCIALISTES,
ALLIANCE NATIONALE DES MUTUALITES CHRETIENNES,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation.
I. La procedure devant la Cour
III. IV. Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le27 mai 2005 par la cour du travail de Gand, section de Bruges.
V. Le president de section Robert Boes a fait rapport.
VI. L'avocat general Anne De Raeve a conclu.
VII. II. Les moyens de cassation
* La demanderesse presente quatre moyens dans sa requete.
* 1. Premier moyen
* Dispositions legales violees
* articles 10, plus specialement alinea 2, et 11 de laConstitution coordonnee le 17 fevrier 1994 ;
* article 164, plus specialement alinea 3, de la loicoordonnee du 14 juillet 1994 relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites ;
* articles 704, alinea 1er, 792, plus specialementalineas 2 et 3, et 1051, alinea 1er, du Codejudiciaire ;
* article 26, S:S:1er, alinea unique, 3DEG, et 2,alineas 1er et 3, de la loi speciale du 6 janvier 1989sur la Cour d'arbitrage.
* * Decisions et motifs critiques
* Par l'arret du 27 mai 2005, la cour du travail declarel'appel des defenderesses regulier dans ses forme et delai et, enconsequence, recevable (...) et accueille les demandes introduites par lesdefenderesses à l'egard de la demanderesse, de sorte qu'elle condamne lademanderesse à payer à l'Union nationale des mutualites socialistes unesomme de 116.879,54 euros (majoree des interets) et à l'Alliancenationale des mutualites chretiennes une somme de 323.349,89 euros(majoree des interets). La cour du travail condamne egalement lademanderesse aux depens de premiere instance et d'appel, à l'exceptiondes depens de madame M.
La cour du travail fonde sa decision sur la recevabilite de l'appel desdefenderesses sur les motifs suivants :
"5.1.2. L'article 1051, alinea 1er, du Code judiciaire dispose que ledelai pour interjeter appel est d'un mois à partir de la signification dujugement ou de la notification de celui-ci faite conformement àl'article 792, alineas 2 et 3.
Le jugement dont appel a ete notifie par pli judiciaire adresse le18 septembre 2003 aux parties, conformement à l'article 792, alineas 2 et3, du Code judiciaire. Il n'y a pas eu de signification par exploitd'huissier.
Le delai d'appel ayant pris cours le 19 septembre 2003 et la requeten'ayant ete deposee au greffe que le 27 octobre 2003, la question del'eventuelle tardivete de l'appel se pose (meme dans l'hypothese ou ledelai d'appel aurait pris cours non à la suite de la notification mais àla suite de la delivrance du pli judiciaire par les services postaux, ledelai d'un mois est depasse).
Ceci suppose toutefois que la contestation en l'espece porte effectivementsur une matiere pour laquelle une notification faite conformement àl'article 792, alineas 2 et 3, du Code judiciaire est requise.C'est-à-dire, conformement à ses dernieres dispositions, une desmatieres 'enumerees à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire'.Ainsi, la question qui se pose est de savoir si, en l'espece, la matiereest enumeree à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire.L'enumeration precitee fait etat des matieres enumerees aux articles508/16, 508 (lire 580), 2DEG, 3DEG, 6DEG, 7DEG, 8DEG, 9DEG, 10DEG et11DEG, 581, 2DEG, 582, 1DEG et 2DEG, et 583 du Code judiciaire. Lacontestation en l'espece ne releve d'aucune de ces dispositions. En effet,elle n'est pas relative aux droits et obligations des travailleurssalaries resultant des lois et reglements en matiere d'assuranceobligatoire maladie-invalidite (article 580, 2DEG, du Code judiciaire).Ainsi, conformement aux dispositions du Code judiciaire, la notificationvisee à l'article 792, alineas 2 et 3, n'est pas requise en l'espece.Toute notification faite conformement à l'article 792, alinea 2, du Codejudiciaire, alors qu'elle n'est pas rendue obligatoire par la loi, restesans effet. Elle ne peut notamment donner cours au delai d'appel.
5.1.3. L'article 164, alinea 3, de la loi coordonnee du 14 juillet 1994dispose que 'toutes les recuperations de paiements indus decoulant dupresent article peuvent etre introduites selon la procedure prevue àl'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire'. C'est la raison pourlaquelle les defenderesses ont introduit leur contestation de cettemaniere. Toutefois, le fait qu'une contestation 'peut etre introduiteselon la procedure prevue à l'article 704, alinea 1er, du Codejudiciaire' ne signifie pas qu'elle est une contestation portant sur une'matiere enumeree à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire' quirequiert une notification faite par pli judiciaire et subit toutes lesconsequences d'une telle notification, notamment quant au point de departdu delai d'appel. La contestation qui porte sur une recuperation reclameepar un prestataire de soins ne releve pas de l'article 704, alinea 1er, duCode judiciaire et ne requiert pas de notification par plijudiciaire (...).
Ainsi, la notification du jugement du tribunal du travail de Bruges faitepar pli judiciaire n'a sorti aucun effet à l'egard des (defenderesses).Elle n'a pas donne cours au delai d'appel.
5.1.4. L'article 26, S:2, alinea 2, de la loi speciale du 6 janvier 1989sur la Cour d'arbitrage prevoit que la juridiction devant laquelle unequestion concernant une violation par la loi des articles de laConstitution vises au S:1er, 3DEG, de la loi, n'est pas tenue de posercette question à la Cour d'arbitrage si, manifestement, la violation estinexistante.
Or, (la cour du travail) considere que l'apparence d'inconstitutionnaliteinvoquee par (la demanderesse et madame M.) est inexistante.
La notification obligatoire par pli judiciaire est exclusivement reserveeaux contestations visees à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire,c'est-à-dire aux contestations opposant des beneficiaires d'allocationsde securite sociale (souvent des personnes economiquement faibles) auxinstitutions ou aux pouvoirs publics prestataires de ces allocations,indifferemment de la qualite de la personne qui a introduit l'instance. Lelegislateur estimait que, dans ces cas, il y avait lieu non seulement desimplifier l'introduction de la contestation mais aussi de prevoir lanotification d'office de la decision aux parties. Une telle notificationtend à reduire les frais de justice des lors qu'elle donne egalementcours aux delais des voies de recours ordinaires et, en consequence, estsubstituable à la signification par exploit d'huissier. La disposition apour autre avantage d'accelerer la solution des contestations en obligeantles parties à exercer leurs voies de recours sans tarder apres laprononciation de la decision, sous peine de voir la contestationdefinitivement tranchee dans les brefs delais impartis et de voir ladecision devenir executoire à l'expiration de ces delais.
L'article 164, alinea 3, de la loi coordonnee du 14 juillet 1994 tendegalement à reduire les frais de justice dans la mesure ou il prevoit quetoutes les recuperations visees peuvent etre introduites par voie derequete et, plus specialement, par la requete visee à l'article 704,alinea 1er, du Code judiciaire (...). En outre, dans la mesure ou lacontestation releve d'une des dispositions de l'article 704, alinea 1er,du Code judiciaire (notamment l'article 580, 2DEG, du Code judiciaire), larecuperation beneficie des effets prevus aux articles 792, alineas 2 et 3,et 1051, alinea 1er, du Code judiciaire. Dans l'hypothese contraire, commec'est le cas en l'espece, les effets secondaires ne se produisent pas. Lacour du travail ne constate à cet egard aucune discrimination, plusspecialement aucune discrimination au prejudice des prestataires de soins.Le legislateur pouvait considerer que les motifs qui l'ont incite àprevoir un exercice peu onereux des voies de recours et à regler lasolution rapide des contestations, qui fondent par ailleurs l'enumerationdes contestations visees à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire,indifferemment du fait que la partie demanderesse soit un pouvoir publicou une institution, sont inexistants lorsque la recuperation oppose unealliance nationale de mutualites et un prestataire de soins. Cettedistinction est raisonnablement et objectivement justifiee.
5.1.5. L'appel est regulier dans ses formes et delais et, en consequence,est recevable".
* Griefs
* Premiere branche.
Aux termes de l'article 1051, alinea 1er, du Code judiciaire, le delaipour interjeter appel est d'un mois à partir de la signification dujugement ou de la notification de celui-ci faite conformement àl'article 792, alineas 2 et 3, du meme code.
En vertu de l'article 792, alinea 1er, du meme code, le greffier adresse,sous «simple» lettre, à chacune des parties ou, le cas echeant, àleurs avocats, une copie non signee du jugement.
En vertu du deuxieme alinea de l'article 792 precite, dans les matieresenumerees à l'article 704, alinea 1er, le greffier notifie le jugementaux parties par pli judiciaire adresse dans les huit jours et,conformement au troisieme alinea du meme article, la notification par plijudiciaire doit contenir des mentions determinees.
La cour du travail a expressement constate que le jugement dont appel aete notifie par pli judiciaire adresse aux parties le 18 septembre 2003,conformement à l'article 792, alineas 2 et 3, du Code judiciaire.
L'article 704, alinea 1er, du meme code dispose :
"Dans les matieres enumerees aux articles 508/16, 580, 2DEG, 3DEG, 6DEG,7DEG, 8DEG, 9DEG, 10DEG et 11DEG, 581, 2DEG, 582, 1DEG et 2DEG, et 583,les demandes sont introduites par une requete ecrite, deposee ou adressee,sous pli recommande, au greffe du tribunal du travail ; les parties sontconvoquees par le greffe à comparaitre à l'audience fixee par le juge.La convocation precise l'objet de la demande".
Ainsi, le legislateur a prevu pour les contestations enumerees àl'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire, un mode d'introductiond'instance aise, rapide et peu onereux en autorisant l'introduction de cescontestations par le depot ou par l'envoi sous pli recommande d'unerequete au greffe. Les memes motifs de rapidite, d'economie et de facilitel'ont incite à prevoir pour les memes contestations, par la voie del'article 792, alinea 2, du Code judiciaire, la notification par plijudiciaire de la decision.
S'il desire etendre le benefice de ces dispositions procedurales àd'autres matieres, le legislateur peut soit elargir l'enumeration del'article 704, alinea 1er, soit faire reference à cet article 704,alinea 1er, dans la reglementation qu'il desire instaurer. Ainsi, dans lesdeux cas, l'introduction de l'instance pourra se faire conformement auxdispositions particulieres de l'article 704, alinea 1er, du Codejudiciaire, et la notification de la decision judiciaire pourra se faireconformement aux dispositions de l'article 792, alineas 2 (et 3), du memecode, qui se refere aux dispositions de l'article 704, alinea 1er, du memecode.
Aux termes du troisieme alinea de l'article 164 de la loi coordonnee du14 juillet 1994 relative à l'assurance obligatoire soins de sante etindemnites, toutes les recuperations de paiements indus decoulant du cetarticle peuvent etre introduites selon la procedure prevue àl'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire.
Ainsi, ces contestations peuvent etre introduites de la maniere aisee,rapide et peu onereuse decrite precedemment et, en consequence, beneficierde l'application du mode de notification de la decision judiciaire prevuà l'article 792, alineas 2 et 3, du Code judiciaire.
Comme les defenderesses l'ont releve (...), leur contestation porte sur larecuperation de paiements indus au sens de l'article 164 precite, de sorteque la cour du travail n'a pas decide legalement que la notification dujugement du premier juge, à savoir le jugement rendu le 12 septembre 2003par la deuxieme chambre du tribunal du travail de Ypres, faite par plijudiciaire adresse aux parties le 18 septembre 2003, n'a sorti aucun effetquant au delai d'appel.
Ainsi, c'est à tort que la cour du travail a deboute les defenderesses deleur appel.
En consequence, la cour du travail viole :
* l'article 164, plus specialement alinea 3, de la loicoordonnee du 14 juillet 1994 relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites ;
* les articles 704, alinea 1er, 792, plus specialementalineas 2 et 3, et 1051, alinea 1er, du Codejudiciaire.
Deuxieme branche
Ce grief est invoque au cas ou la Cour considererait - quod non - quel'article 792, alinea 2, du Code judiciaire doit etre applique de maniereà ne reserver la notification du jugement par pli judiciaire adresse parle greffier aux parties qu'aux contestations expressement enumerees àl'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire, à l'exclusion descontestations auxquelles l'article 704, alinea 1er, est declare applicablepar une disposition legale distincte.
Conformement à l'article 10, alinea 2, de la Constitution coordonnee le17 fevrier 1994, les Belges sont egaux devant la loi. Aux termes del'article 11 de la meme Constitution, la jouissance des droits et libertesreconnus aux Belges doit etre assuree sans discrimination.
La demanderesse considere que, dans la mesure ou l'article 792, alinea 2,du Code judiciaire devrait etre applique comme il est indique ci-avant, ily a violation des principes constitutionnels de l'egalite et de lanon-discrimination.
En effet, les justiciables interesses dans des contestations susceptiblesd'etre introduites de la maniere peu onereuse, rapide et aisee visee àl'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire beneficieraient egalement,pour les memes motifs de rapidite, d'economie et de facilite, de lapossibilite de notifier ensuite la decision judiciaire de la meme manierepeu onereuse, rapide et aisee qui en resulte, alors que les justiciablesconcernes dans d'autres contestations ne pourraient se prevaloir de cetavantage.
Aux termes de l'article 26, S:1er, alinea unique, 3DEG, de la loi specialedu 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, celle-ci statue, à titreprejudiciel, par voie d'arret, sur les questions relatives à la violationpar une loi (...) des articles du titre II "Des Belges et de leurs droits"(...) de la Constitution, dont les articles 10 et 11 relevent.
Conformement à l'article 26, S:2, alinea 1er, de la meme loi, lajuridiction devant laquelle une telle question est soulevee est tenue,sauf dans les cas d'exception non applicables en l'espece, de demander àla Cour d'arbitrage de statuer sur cette question.
En consequence, plaise à la Cour, dans la mesure ou elle n'accueilleraitpas le grief invoque par la demanderesse au moyen, en sa premiere branche,poser à la Cour d'arbitrage, par voie d'arret interlocutoire, la questionprejudicielle enoncee au dispositif du present pourvoi en vue d'entendreconstater la violation des articles 10 et 11 de la Constitution coordonneedans l'hypothese ou l'article 792, alinea 2, du Code judiciaire devraitetre applique comme il est releve ci-avant.
Troisieme branche
Conformement à l'article 10, alinea 2, de la Constitution coordonnee le17 fevrier 1994, les Belges sont egaux devant la loi. Aux termes del'article 11 de la meme Constitution, la jouissance des droits et libertesreconnus aux Belges doit etre assuree sans discrimination.
Les principes constitutionnels de l'egalite des Belges devant la loi et dela non-discrimination des citoyens n'excluent toutefois pas toutedifference de traitement entre diverses categories de personnes pourautant que le critere de distinction soit objectivement et raisonnablementjustifie. Cette justification doit etre appreciee à la lumiere du but etdes effets de la regle concernee. Le principe de l'egalite est violelorsqu'il est etabli que les moyens utilises et le but vise ne sont pasraisonnablement proportionnes.
La demanderesse a fait valoir dans ses conclusions (...) que, dans lamesure ou l'article 792, alinea 2, du Code judiciaire devrait etreapplique de maniere à ne reserver la notification du jugement par plijudiciaire adresse par le greffier aux parties qu'aux contestationsexpressement enumerees à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire,à l'exclusion des contestations auxquelles l'article 704, alinea 1er, estdeclare applicable par une disposition legale distincte, il y a violationdes principes de l'egalite et de la non-discrimination.
Aux termes de l'article 26, S:1er, alinea unique, 3DEG, de la loi specialedu 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, celle-ci statue, à titreprejudiciel, par voie d'arret, sur les questions relatives à la violationpar une loi (...) des articles du titre II "Des Belges et de leurs droits"(...) de la Constitution, dont les articles 10 et 11 relevent.
Conformement à l'article 26, S:2, alinea 1er, de la meme loi, lajuridiction devant laquelle une telle question est soulevee est tenue,sauf dans les cas d'exception non applicables en l'espece, de demander àla Cour d'arbitrage de statuer sur cette question.
En vertu de l'article 26, S:2, alinea 3, de la meme loi, la juridiction,dont la decision est susceptible, notamment, de pourvoi en cassation n'esttoutefois pas tenue de poser la question prejudicielle à la Courd'arbitrage si la loi (...) "ne viole manifestement pas une regle ou unarticle de la Constitution vises au S: 1er, (de l'article 26)".
Apres avoir rappele cette disposition, la cour du travail a considere enl'espece "que l'apparence d'inconstitutionnalite invoquee par (lademanderesse et madame M.) est inexistante" (...) en fondant cettedecision sur un examen de la ratio legis de l'article 704, alinea 1er, duCode judiciaire et de l'article 164, alinea 3, de la loi coordonnee du14 juillet 1994 relative à l'assurance obligatoire soins de sante etindemnites et en relevant "que le legislateur pouvait considerer que lesmotifs qui l'ont incite à prevoir un exercice peu onereux des voies derecours et à regler la solution rapide des contestations, qui fondent parailleurs l'enumeration des contestations visees à l'article 704,alinea 1er, du Code judiciaire, meme lorsque la partie demanderesse soitun pouvoir public ou une institution, sont inexistants lorsque larecuperation oppose une alliance nationale de mutualites et un prestatairede soins. La cour du travail est arrivee à la conclusion "que cettedistinction est raisonnablement et objectivement justifiee" (...).
En procedant ainsi à l'examen de la question de savoir si la differencede traitement entre diverses categories de personnes est justifiee par uncritere objectif et raisonnable et en appreciant le but et les effets dela regle concernee, la cour du travail s'approprie la competence de laCour d'arbitrage. En consequence, la cour du travail viole l'article 26,S:2, alineas 1er et 3, de la loi speciale du 6 janvier 1989 sur la Courd'arbitrage ainsi que, pour autant que de besoin, l'article 26, S:1er,alinea unique, 3DEG, de la meme loi.
Ainsi, la cour du travail n'a pas declare legalement que l'appel desdefenderesses est fonde (violation de l'article 164, plus specialementalinea 3, de la loi coordonnee du 14 juillet 1994 relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites.
(...)
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
1. En vertu de l'article 1051 du Code judiciaire, le delai pourinterjeter appel est d'un mois à partir de la signification dujugement ou de la notification de celui-ci faite conformement àl'article 792, alineas 2 et 3.
Conformement à l'article 792, alinea 2, du Code judiciaire, le greffiernotifie le jugement aux parties par pli judiciaire, dans les matieresenumerees à l'article 704, alinea 1er.
Les matieres visees à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire sontles matieres enumerees aux articles 580, 2DEG, 3DEG, 6DEG, 7DEG, 8DEG,9DEG, 10DEG et 11DEG, 581, 2DEG, 582, 1DEG et 2DEG, et 583 du meme code.
2. L'arret considere, sans etre critique à cet egard, que larecuperation exercee en application de l'article 164 de la loicoordonnee du 14 juillet 1994 qui porte sur des prestations del'assurance obligatoire soins de sante indues pour cause d'erreurou de dol ne constitue pas une contestation au sens des articlesindiques à l'article 704, alinea 1er, precite.
3. La notification du jugement faite par pli judiciaire adresse parle greffier aux parties dans une contestation ou une tellenotification n'est pas prevue par la loi, ne peut constituer lepoint de depart du delai d'appel. Dans un tel cas, le delaid'appel ne peut prendre cours qu'à partir de la signification dela decision judiciaire.
4. Le moyen, en cette branche, qui fait valoir que les juges d'appelviolent les dispositions legales citees en decidant que lanotification du jugement du 12 septembre 2003 faite par plijudiciaire adresse aux parties le 18 septembre 2003 n'a sortiaucun effet quant au delai d'appel, manque en droit.
Quant à la deuxieme branche :
Quant à la fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche :
5. Les defenderesses font valoir dans un premier temps que le moyen,en cette branche, est irrecevable par le motif qu'il ometd'indiquer les dispositions legales violees.
6. Contrairement à ce que les defenderesses soutiennent, le moyen,en cette branche, invoque la violation des principesconstitutionnels de l'egalite et de la non-discrimination garantispar les articles 10 et 11 de la Constitution.
La fin de non-recevoir ne peut etre accueillie.
7. Les defenderesses font valoir ensuite que le moyen, en cettebranche, est irrecevable par le motif qu'il omet d'indiquerl'article 57, alinea 1er, du Code judiciaire comme dispositionlegale violee.
8. Le moyen, en cette branche, pose la question de savoir quel actede procedure, en l'espece, donne cours au delai d'appel.
Les parties sont unanimes quant aux effets respectifs de la notificationet de la signification.
Ainsi, la disposition legale relevee par les defenderesses est denuee depertinence en l'espece.
La fin de non-recevoir ne peut etre accueillie.
Quant à la branche :
9. Le moyen, en cette branche, pose la question de savoir s'il existeune discrimination, contraire aux articles 10 et 11 de laConstitution, en ce qui concerne le point de depart du delaid'appel entre :
- les justiciables auxquels la notification doit etre faite par plijudiciaire conformement à l'article 792, alinea 2, du Code judiciaire,dans les matieres enumerees à l'article 704, alinea 1er, du meme code, et
- les justiciables auxquels la notification ne doit pas etre faite par unpli judiciaire conformement à l'article 792, alinea 2, du Codejudiciaire, alors que le mode d'introduction d'instance simplifie prevu àl'article 704, alinea 1er, du Code judiciaire a ete declare applicable àces matieres par l'article 164, alinea 3, de la loi coordonnee du14 juillet 1994 relative à l'assurance obligatoire soins de sante etindemnites.
10. Conformement à l'article 26, S:1er, 3DEG, de la loi speciale du6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, la Cour d'arbitragestatue, à titre prejudiciel, par voie d'arret, sur les questionsrelatives à la violation par une loi des articles 10 et 11 de laConstitution.
En vertu de l'article 26, S:2, de la meme loi, la Cour est tenue de poserà la Cour d'arbitrage la question enoncee au dispositif du present arret.
11. En cet etat de la cause, il n'y a pas lieu d'examiner lesdeuxieme, troisieme et quatrieme moyens.
* Par ces motifs,
* * La Cour
* * Surseoit à statuer jusqu'à ce que la Cour d'arbitrage ait reponduà la question prejudicielle suivante :
* "L'article 792, alinea 2, du Code judiciaire, lu conjointement avecl'article 704, alinea 1er, du meme code et l'article 164, alinea 3,de la loi coordonnee du 14 juillet 1994 relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites, viole-t-il les articles 10,alinea 2, et 11 de la Constitution coordonnee en ce qu'il y a lieud'interpreter l'article 792, alinea 2, precite en ce sens que lanotification du jugement faite par pli judiciaire adresse par legreffier n'est reservee qu'aux contestations visees à l'article 704,alinea 1er, du Code judiciaire, qui prevoit l'introduction d'instancepar requete, à l'exclusion des contestations susceptibles d'etreintroduites conformement à l'article 704, alinea 1er, en applicationd'une disposition legale distincte, telle que la disposition del'article 164, alinea 3, de la loi coordonnee du 14 juillet 1994, desorte que, dans le premier cas, les justiciables auxquels lelegislateur a offert le benefice de l'introduction d'instancesimplifiee visee à l'article 704, alinea 1er, du Code judiciairepeuvent se prevaloir de l'article 792, alineas 2 et 3, du Codejudiciaire et, dans le second cas, ne peuvent se prevaloir de cetarticle ?".
* Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles,ou siegeaient le president de section Robert Boes, les conseillersGhislain Londers, Eric Dirix, Eric Stassijns et Koen Mestdagh, et prononceen audience publique du cinq mars deux mille sept par le president desection Robert Boes, en presence de l'avocat general Anne De Raeve, avecl'assistance du greffier-adjoint Johan Pafenols.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Philippe Gosseries ettranscrite avec l'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.
Le greffier, Le conseiller,
5 MARS 2007 S.05.0102.N/1