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13/12/2007 | BELGIQUE | N°F.06.0065.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 13 décembre 2007, F.06.0065.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.06.0065.N

1. MEERVER, societe anonyme,

2. VERBERCK, societe anonyme,

Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation,

contre

ETAT BELGE, ministre des Finances,

Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 6 septembre2005 par la cour d'appel d'Anvers.

Le president Ivan Verougstraete a fait rapport.

L'avocat general Dirk Thijs a conclu.

II. Le moyen de cassation



Les demanderesses presentent quatre moyens dans leur requete.

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 149 de ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.06.0065.N

1. MEERVER, societe anonyme,

2. VERBERCK, societe anonyme,

Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation,

contre

ETAT BELGE, ministre des Finances,

Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 6 septembre2005 par la cour d'appel d'Anvers.

Le president Ivan Verougstraete a fait rapport.

L'avocat general Dirk Thijs a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demanderesses presentent quatre moyens dans leur requete.

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- articles 1315, 1319, 1320, 1321 et 1322 du Code civil ;

- article 870 du Code judiciaire ;

- article 211 du Code des impots sur les revenus 1992, coordonne parl'arrete royal du 10 avril 1992 et confirme par la loi du 12 juin 1992 ;

- articles 1er, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 11 de la directive 90/434 CEE du 23juillet 1990 concernant le regime fiscal commun applicable aux fusions,scissions, apports d'actifs et echanges d'actions interessant des societesd'Etats membres differents, dans sa version anterieure à la modificationpar la directive 2005/19/CE du Conseil du 17 fevrier 2005.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque « declare l'appel recevable mais non fonde. Confirme lejugement attaque. Condamne les demanderesses aux depens de l'appel, taxesdans le chef du defendeur à 456,14 euros, suivant l'etat dans lesconclusions additionnelles ».

Sur la base des motifs figurant aux pages 5 à 10 :

« Besoins legitimes de caractere financier ou economique

En ce qui concerne la notion de `besoins de caractere financier oueconomique' en matiere de fusions et de scissions, figurant actuellementdans l'article 211, S: 1er, alinea 2, 3DEG, du Code des impots sur lesrevenus 1992, lors des travaux preparatoires de la loi du 6 aout 1993portant des dispositions fiscales en matiere de fusion et de scission desocietes, le ministre des Finances indique dans le rapport fait au nom dela commission chargee des problemes en matiere de droit commercial eteconomique que sont ainsi visees les operations qui sont anormales et dontun des objectifs ou l'objectif principal est l'evasion fiscale. Le but decette disposition anti-abus est de supprimer l'effet fiscal de la decisionde la societe et pas la decision elle-meme.

La condition que l'operation doit repondre `à des besoins legitimes decaractere financier ou economique' est fondee sur l'article 11.1,a de ladirective 90/434/CEE du 23 juillet 1990 du Conseil des Communauteseuropeennes concernant le regime fiscal commun applicable aux fusions,scissions, apports d'actifs et echanges d'actions interessant des societesd'Etats membres differents.

Il ressort de cet article qu'un defaut de motifs economiques peut fairesupposer que la transaction concernee a comme objectif principal ou commeun de ses objectifs principaux la fraude ou l'evasion fiscales. Donc si undes objectifs de la fusion ou de la scission est l'evasion fiscale l'Etatmembre peut refuser le caractere fiscal neutre de l'operation.

La notion de `motifs economiques' et de `besoins legitime de caracterefinancier ou economique' est plus etendue que les consequences entraineespar chaque operation (fusion ou scission) (effet economique,simplification de la structure,...).

Il ressort du texte de la directive 90/434/CEE et de l'article 211, S:1er, alinea 2, 3DEG, du Code des impots sur les revenus 1992 que la chargede la preuve relative àux besoins legitimes de caractere financier oueconomique' incombe au contribuable.

Contrairement à ce que soutiennent les demanderesses, l'existence de`motifs economiques ` est necessaire. Le fait que le contribuable affirmequ'il n'y a pas de motifs fiscaux, ne demontre pas en soi que la condition`des besoins legitimes de caractere financier et economique est remplie.

En l'espece, aucun `besoin legitime de caractere financier et economique'n'est demontre dans le chef de IMV. Outre les effets qui sont propres àchaque scission (et qui ne suffisent pas) la societe ne retient que lesmotifs personnels des actionnaires.

Les demanderesses enoncent que l'administration a publie pendant desannees des reglements dans lesquels elle admettait que les motifsd'economie et de simplification de la structure constituaient en soi `desbesoins legitimes de caractere financier ou economique'.

Il faut toutefois preciser à ce propos que la decision de la commissionde ruling depend finalement d'une question de fait et que chaque operationdoit etre appreciee distinctement en fonction des circonstances de fait etde droit.

La commission de ruling a toujours decide de ne pas donner son accord àpropos de l'application de l'article 211, S: 1er, du Code des impots surles revenus 1992 lorsque les arguments invoques dans la demande selimitent principalement à des motifs de nature strictement personnelledes actionnaires et qu'il n'est nullement demontre que la survie de lasociete serait mise en peril.

Le fait qu'il existe effectivement un conflit entre les actionnaires etque ce conflit est de nature telle que l'administration de la societe estrendue impossible et que la survie de la societe est mise en peril doitetre demontre de maniere suffisante et claire par la societe concernee. Lefait qu'il existe une volonte de dissoudre la societe (par la scission) nesuffit pas.

En l'espece, le rapport ecrit qui doit etre etabli par l'organe de gestiondes societes participant à la scission, conformement à l'article 730 duCode des societes, ne fait pas etat de `besoins legitimes de caracterefinancier ou economique' justifiant la scission. Ce rapport n'expose eneffet pas l'etat du patrimoine des societes qui participent à la scissionet la necessite de la scission n'est pas davantage commentee et justifieed'un point de vue juridique et economique.

Les demanderesses soutiennent que la scission de IMV en S.A. Holdiver etS.A. Houdstermaatschappij der Vlaanderen entre dans le cadre d'operationsqui ont pour objectif la rationalisation et la restructuration d'unensemble de societes liees entre elles, entrainant aussi unerationalisation des frais et une simplification de la structure.

Elles se referent à ce propos aux rapports d'evaluation sur lefonctionnement de la Commission des accords fiscaux prealables et àdiverses decisions de cette Commission.

Selon les demanderesses il est question d'une violation du principe deconfiance et/ou du principe d'egalite, des lors que d'autres contribuablesse trouvant dans la meme situation ont pu à l'origine invoquer certainsmotifs afin de realiser une fusion neutre d'un point de vue fiscal. Lesdemanderesses sont tenues de prouver la violation du principe de confianceet /ou le principe d'egalite qu'elles ont invoque ; elles doiventdemontrer que la discrimination appliquee par l'administration estarbitraire et, des lors, que la difference de traitement n'est pasjustifiee par l'objectif poursuivi, la nature et l'objet de la mesure, enl'espece l'accord prealable.

Un tel accord ecrit prealable constitue toutefois un acte juridiqueadministratif unilateral à tendance individuelle et ne peut etre utiliseou cite en tant que precedent par un contribuable qui n'a pas demande cetaccord. En l'espece, IMV n'a pas demande d'accord ecrit prealable.

En outre, les faits et les considerations qui determinent le contenu duruling ne sont pas reproduits in extenso de sorte qu'une ligne de conduiteconstante de l'administration ne peut s'en deduire. Les demanderessesn'apportent donc pas la preuve de la violation invoquee du principed'egalite et/ou du principe de confiance.

Dans le `rapport d'evaluation sur le fonctionnement de la Commission pourles accords fiscaux prealables jusqu'au 31 decembre 1996', la commissionde ruling evoque certains motifs qui - en cas de scission - peuventcorrespondre à des besoins legitime de caractere financier ou economique.La realisation d'economies ne constitue toutefois pas en soi un argumentsuffisant pour repondre à la condition posee par l'article 211, S: 1er,alinea 2, 3DEG, du Code des impots sur les revenus 1992, des lors que lareduction de frais est dejà inherente à cette sorte d'operation.

Il ressort du `rapport fait à l'assemblee generale des actionnaires de lasociete anonyme Investeringsmaatschappij der Vlaanderen' à propos de laproposition de scission que la neutralite se fonde sur les considerationssuivantes :

- la scission autorise une jonction de patrimoines sans precomptemobilier ;

- il n'y a pas de plus-values exonerees :

- il n'y a pas des plus-values latentes ou demontrables par fusion.

Ces considerations concernent plutot le point de vue que la scissionn'entraine pas de resultat imposable, plutot que le fait que la scissionrepondrait à des besoins legitimes de caractere financier ou economique.Ce sont plutot des motifs fiscaux.

Dans `le rapport special du conseil d'administration' à propos de lascission prevue, l'objectif de la scission est defini de la manieresuivante : «mieux faire concorder les actifs et les activites de notresociete avec les interets reels de chaque groupe d'actionnaires' ».

Avant la scission IMV etait entre les mains de Amex Engineering Ltd, MainStreet, Road Town, British Virgin Islands, à concurrence de 99 %, avec untotal de 375.520 actions sur un total de 375.540, les autres parts etantentre les mains de Messieurs P. V. et E. V.

L'ensemble de l'actif et du passif est partage à concurrence de 50/50entre les deux nouvelles societes à creer, la societe anonyme Holdiver etla societe anonyme Houdstermaatschappij. Les actions de ces societes sontentre les mains de Amex Engineering Ltd à concurrence de 99 % chaque foispour 999 actions sur 1000. La part restante est entre les mainsrespectivement de P. V. et de E. V.

Tant avant qu'apres la scission l'actionnaire principal possede donc uneparticipation de 99 % dans le groupe.

Il est peu probable qu'une scission en fonction des activites des deuxautres actionnaires corresponde à un partage realise des actifs et despassifs sur une base de 50/50.

Il n'est pas tout à fait exact de pretendre, comme le font lesdemanderesses, qu'une analyse des besoins legitimes doit tout d'abord sefaire aupres de la societe qui est scindee et pas aupres des autressocietes et relativement à d'autres operations simultanees.

L'analyse des besoins legitimes en cas de fusion ou de scission doit sefaire tant aupres des societes concernees qu'aupres des actionnairesprincipaux, specialement lorsque l'operation se situe dans le cadre d'unerestructuration d'activites dans un groupe de societes.

Il n'est pas davantage exact que l'operation est motivee necessairementpar des besoins legitimes economique et financiers s'il n'y a pas demotifs fiscaux comme le soutiennent les demanderesses.

L'ensemble des motifs doit etre examine.

En l'espece, les demanderesses n'apportent aucun element concret prouvantque la scission repond à des besoins legitimes de caractere financier eteconomique. Les motifs enonces dans le rapport fait à l'assembleegenerale extraordinaire et dans le rapport special du conseild'administration à propos de la scission envisagee ne sont pas suffisantspour apporter la preuve de besoins legitimes de caractere financier oueconomique.

Le defaut eventuel de besoins fiscaux ne constitue pas en soi un motifsuffisant. Le fait que la reserve exoneree apres la scission figure encoredans les bilans respectifs des societes nees de la scission ne constituequ'un aspect, qui ne suffit pas pour conforter la these des demanderessesque l'ensemble des operations n'est inspire par aucun motif fiscal etrepond à des besoins legitimes de caractere financier ou economique.

Conclusion :

Par les decisions du 23 novembre 2001, le directeur regional a rejete àjuste titre les reclamations des demanderesses par les decisions du 23novembre 2001. Le premier juge a declare à juste titre les demandes desdemanderesses non fondees et il y a lieu de confirmer le jugemententrepris.

L'appel des demanderesses est des lors non fonde et il y a lieu decondamner les demanderesses aux depens de l'appel taxes ci-dessous ».

Griefs

Pour qu'une scission par absorption, par constitution de nouvellessocietes ou une scission mixte, telle que visees à l'article 210, S: 1er,1DEG, du Code des impots sur les revenus 1992 soit traitee d'une maniereneutre sur le plan fiscal conformement aux articles 211 à 214 inclus duCode des impots sur les revenus 1992, il est notamment requis que« l'operation reponde à des besoins legitimes de caractere financier oueconomique » comme le prevoit l'article 211, S: 1er, alinea 2, 3DEG, duCode des impots sur les revenus 1992.

Cette condition repose sur l'article 11, alinea 1er, a) de la directive90/434/CEE du 23 juillet 1990 du conseil des communautes europeennesconcernant le regime fiscal commun applicable aux fusions, scissions,apports d'actifs et echanges d'actions interessant des societes d'Etatsmembres differents.

Il ressort des travaux parlementaires que le legislateur a insere ladisposition supranationale precitee dans l'article 211, S: 1er, alinea 2,3DEG, du code des impots sur les revenus 1992 en soutenant que cettedisposition `est une disposition specifique anti-abus' analogue à cellede l'article 46, S: 1er, alinea 2, 2DEG du Code des impots sur les revenus1992 (Doc. Parl. Senat, 1992-93, Doc. nDEG 765-2, p. 36) à propos delaquelle le legislateur enonce : `Les articles 8, 32 et 43, S:S: 2 et 8 duprojet tendent à realiser le transfert dans la loi fiscale belge de ladirective europeenne adoptee le 23 juillet 1990 concernant le regimefiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs etechanges d'actions interessant des societes d'Etats membres differents ence qui concerne le volet concernant l'apport d'actifs. (...) Lesconditions d'octroi du regime de neutralite fiscale dont certaines sontdejà reprises dans les articles 10 à 12 de l'arrete royal d'execution duCode des impots sur les revenus sont adaptes mutatis mutandis conformementà la directive et sont dorenavant toutes reprises à l'article 46 du Codedes impots sur les revenus 1992 (...) comme l'autorise l'article 11 de ladirective, l'octroi du regime de neutralite fiscale est subordonne àtitre de mesure preventive contre l'abus ou la fraude, à la condition que`l'operation reponde à des besoins legitimes de caractere financier oueconomique'. C'est en effet, en vue de la recherche d'une uniformite etd'une connexite, l'expression utilisee dans la disposition anti-evasionqui a ete inseree il y a peu dans le Code des impots sur les revenus etqui a ete puisee dans l'article 344 du Code des impots sur les revenus1992 (anciennement article 250 du Code des impots sur les revenus).(...)Ladite condition a ete inseree afin de donner au fisc les moyensd'enerver ces constructions abusives. Elle est fondee sur l'article 11, S:1er, a, de la directive 90/434/CEE qui est libelle comme suit : `Un Etatmembre peut refuser d'appliquer tout ou partie des dispositions des titresII, III et IV ou en retirer le benefice lorsque l'operation de fusion, descission, d'apport d'actifs ou d'echange d'actions: a) a comme objectifprincipal ou comme un de ses objectifs principaux la fraude ou l'evasionfiscales; le fait qu'une des operations visees à l'article 1er n'est paseffectuee pour des motifs economiques valables, tels que larestructuration ou la rationalisation des activites des societesparticipant à l'operation, peut constituer une presomption que cetteoperation a comme objectif principal ou comme un de ses objectifsprincipaux la fraude ou l'evasion fiscales; (...)'. L'expression utiliseepar l'article 344 du Code des impots sur les revenus 1992 (ancien article250 du Code des impots sur les revenus) a ete preferee à l'expressionproposee par le Conseil d'Etat `pour des motifs economiques' afin de nepas inserer une nouvelle terminologie dans ce code. (...) La portee del'expression figurant à l'article 250 du Code des impots sur les revenusne differe pas de celle utilisee par l'article 11, S: 1er, a, de ladirective ; elle pose les memes difficultes d'appreciation : à ce proposil faut preciser que l'application de cette condition est subordonnee auxregles generales en matiere de procedure qui imposent la charge de lapreuve à l'administration : pour ne pas tenir compte de la declaration ducontribuable, l'administration doit faire connaitre les motifs qui selonelle justifient la rectification et, le cas echeant, etablissent lecaractere anormal de l'operation. Cette disposition ne sera doncapplicable, sous le controle des cours, que lorsque les constructionsrealisees ont pour objectif exclusif ou principal d'eviter une chargefiscale ou l'obtention d'un avantage fiscal ». (Doc. Parl. Chambre,1991-1992, Doc. nDEG 444/1, p. 11 à 14).

En vue de la suppression de la neutralite fiscale pour des situationspurement internes le legislateur a ainsi opte dans l'article 211, S: 1er,alinea 2, 3DEG, du Code des impots sur les revenus 1992 dans lalegislation nationale belge pour l'insertion dans le droit communautairedes solutions puisees dans le droit interne.

Il s'ensuit que pour l'application de la loi interne belge le droitcommunautaire qui y est transpose doit etre applique et que la Cour dejustice est competente conformement à l'article 234 du Traite CEE (ancienarticle 177), le cas echeant, pour interpreter les dispositions du droitcommunautaire, des lors qu'il existe un interet communautaire certain àce que, pour eviter des divergences d'interpretation, les dispositions ounotions reprises du droit communautaire rec,oivent une interpretationuniforme.

Premiere branche

Il ressort du regime general institue par la directive 90/434, pour lequelle legislateur a opte, que le systeme elabore de suspension d'imposition,est applicable sans distinction à chaque fusion, scission, apportd'actifs ou echange d'actions, quelle que soit la raison pour laquelleelle a ete realisee et independamment du fait qu'elle soit de naturefinanciere, economique ou purement fiscale.

La suspension d'imposition doit des lors etre accordee, sauf si l'objectifprincipal ou un des objectifs principaux de l'operation est la fraude oul'evasion fiscale. A cet egard, il peut etre decide sur la base del'article 11, alinea 1er, a, de la directive 90/434 que le fait qu'uneoperation n'est pas realisee pour des motifs economiques, comme larestructuration ou la rationalisation des activites, constitue unepresomption de fraude ou d'evasion fiscale.

Ce n'est que lorsque l'operation litigieuse a pour objectif principal lafraude ou l'evasion fiscale que l'avantage de la suspension del'imposition peut etre refuse.

Cela implique que l'administration fiscale supporte la charge de la preuvede cet objectif des lors que c'est elle qui doit demontrer la derogationà la regle generale.

Il s'ensuit que l'arret attaque decide illegalement à la page 6 « qu'ilressort du texte de la directive 90/434/CEE et de l'article 211, S: 1er,alinea 2, 3DEG du Code des impots sur les revenus 1992 que la charge de lapreuve `en matiere de besoins legitimes de caractere financier eteconomique' incombe au contribuable », alors que la charge de la preuveque l'objectif principal ou un des objectifs principaux de la scissionlitigieuse est la fraude ou l'evasion fiscale incombe à l'administration(violation de l'article 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire) etque, des lors, les juges d'appel on rejete à tort les pretentions desdemanderesses qui n'ont pas apporte cette preuve, en considerant à lapage 10 « qu'en l'espece, les demanderesses n'apportent aucun elementconcret suivant lequel la scission repond à des besoins legitimes decaractere financier ou economique » (violation de l'article 211, S: 1er,alinea 2, 3DEG, du Code des impots sur les revenus 1992 et des articles1er, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 et I I, alinea 1er, a de la directive90/434/CEE).

(...)

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

1. En vertu de l'article 211, S: 1er, debut et alinea 1er, du Code desimpots sur les revenus 1992, en cas de scission les plus-values constateesà l'occasion de cette operation n'interviennent pas pour l'impositionprevue à l'article 208, alinea 2 ou à l'article 209.

L'article 211, S: 1er, alinea 2, du Code des impots sur les revenus 1992dispose que l'alinea 1er est uniquement applicable à la condition que lasociete absorbante ou beneficiaire soit une societe residente et quel'operation reponde à des besoins legitimes de caractere financier oueconomique.

2. Il ressort des travaux parlementaires de ces dispositions legales quelors de l'insertion de cette regle qui interesse les operations internes,le legislateur s'est fonde sur l'article 11 de la directive 90/434/CEE duConseil du 23 juillet 1990 concernant le regime fiscal commun applicableaux fusions, scissions, apports d'actifs et echanges d'actions interessantdes societes d'Etats membres differents.

Il ressort du regime general de la directive, tel qu'il est interprete parla Cour de Justice des Communautes europeennes dans son arret du 17juillet 1997 en cause de Leur-Bloem, que le regime fiscal communautaireintroduit par la directive, qui comprend divers avantages fiscaux , estapplicable sans distinction à chaque fusion, scission, echange d'actions,quelle que soit la raison pour laquelle elle est realisee et qu'elle soitde nature financiere, economique ou purement fiscale.

Il ressort aussi de cette directive telle qu'elle est interpretee par laCour de justice, que les Etats membres peuvent ne pas appliquer lesavantages fiscaux ou en supprimer l'avantage, s'il apparait que l'objectifprincipal ou un des objectifs principaux de la fusion, de la scission, del'apport d'actifs ou de l'echange d'actions, est la fraude ou l'evasionfiscale. La directive precise dans son article 11, alinea 1er, sub a, dansle cadre de cette competence reservee, que l'Etat membre peut deciderqu'il est question d'une presomption de fraude ou d'evasion fiscalelorsqu'une des operations juridiques visees n'est pas effectuee pour desmotifs economiques, comme la restructuration ou la rationalisation desactivites des societes concernees par la transaction.

Il ressort des dispositions de la directive, suivant l'arret precite de laCour de justice, que les Etats membres doivent accorder les avantagesfiscaux prevus par la directive pour ladite operation, à moins quel'objectif principal ou un des objectifs principaux de l'operation soit lafraude ou l'evasion fiscale. A cet egard les Etats membres peuventdeterminer que le fait que ces operations juridiques n'ont pas eteeffectuees pour des motifs economiques, constitue une presomption defraude ou d'evasion fiscale.

3. Il ressort de ce qui precede qu'il appartient à l'autorite competentequi invoque que le contribuable a agi dans le but d'eviter l'impot et quiestime devoir baser cette preuve sur le defaut de motifs economiques, estaussi tenu d'apporter la preuve de ce defaut, sans prejudice del'obligation du contribuable de collaborer à cette preuve. Il ressort eneffet du regime de la directive qui est transpose dans le droit national,que l'operation est censee avoir ete effectuee pour des motifs economiqueset qu'il appartient à l'autorite de prouver le contraire.

4. L'arret considere que la charge de la preuve en matiere de besoinslegitimes de caractere economique ou financier incombe au contribuable etviole ainsi les dispositions legales citees par le moyen, en cettebranche.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Gand.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Ivan Verougstraete, le president de section EdwardForrier, les conseillers Luc Huybrechts, Paul Maffei et Pierre Cornelis,et prononce en audience publique du treize decembre deux mille sept par lepresident Ivan Verougstraete, en presence de l'avocat general Dirk Thijs,avec l'assistance du greffier adjoint Johan Pafenols.

Traduction etablie sous le controle du president Ivan Verougstraete ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le president,

13 DECEMBRE 2007 F.06.0065.N/14


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.06.0065.N
Date de la décision : 13/12/2007

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2007-12-13;f.06.0065.n ?
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