Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG P.07.1552.N
I
PROCUREUR-GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE GAND.
II
INSPECTEUR REGIONAL DE L'URBANISME,
demandeur en retablissement,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
les deux pourvois contre
M. R. H.,
prevenue,
Me Bert Roelandts et Me Hans Van Landeghem, avocats au barreau de Gand.
I. la procedure devant la cour
* * Les pourvois sont diriges contre l'arret rendu le 14 septembre 2007par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
* Les demandeurs presentent chacun un moyen dans un memoire annexe aupresent arret.
* Le conseiller Etienne Goethals a fait rapport.
* L'avocat general Marc Timperman a conclu.
* II. la decision de la cour
* * Sur les moyens :
* * 1. Les juges d'appel ont acquitte la defenderesse des faits mis àsa charge, à savoir le maintien du 13 fevrier 1984 au 6 avril 2005 detravaux illegalement effectues dans une zone naturelle, pour le motifque cette zone n'avait pas encore cette affectation au moment ou cestravaux ont ete realises, soit en 1970.
* * 2. Les deux demandeurs contestent l'interpretation que les jugesd'appel ont donnee de l'article 146, alinea 3, du decret de la Regionflamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'amenagement duterritoire.
* * Le demandeur sub I fait valoir que le maintien impute à ladefenderesse a toujours ete punissable, conformement à la loi du 29mars 1962 organique de l'amenagement du territoire et de l'urbanismeet au decret relatif à l'amenagement du territoire, coordonne le 22octobre 1996, et au decret de la Region flamande du 18 mai 1999portant organisation de l'amenagement du territoire, la dernieredisposition en date etant l'article 146, alinea 3, precite du decretde la Region flamande du 18 mai 1999 tel que complete par l'article 7du decret du 4 juin 2003 modifiant le decret du 18 mai 1999 portantorganisation de l'amenagement du territoire en ce qui concerne lapolitique de maintien.
* * A l'appui de son action en reparation, le demandeur sub II faitvaloir que le maintien de constructions sans permis urbanistiqueprealable ou contraire à celui-ci, commence avant le 22 aout 2003, etpoursuivi depuis cette date, reste punissable en vertu de l'article146 du decret de 1999, independamment du fait qu'au moment del'erection illicite des constructions, le bien etait ou n'etait passitue dans une zone vulnerable du point de vue spatial et dans lamesure ou le bien est situe dans une zone vulnerable du point de vuespatial depuis l'entree en vigueur de l'article 146 du decret de 1999tel que modifie par le decret du 4 juin 2003, et jusqu'au jugement dujuge penal.
* * 3. L'article 146, alinea 3, du decret de 1999, dans la versionposterieure à l'arret d'annulation nDEG 14/2005 rendu le 19 janvier2005 par la Cour constitutionnelle dispose : « La sanction pour laperpetuation d'infractions visees à l'alinea premier, 1DEG, 2DEG,3DEG, 6DEG et 7DEG, ne s'applique pas pour autant que les operations,travaux, modifications ou l'utilisation contraire ne sont pas situesdans les zones vulnerables du point [de] vue spatial,[...] ».
* * 4. Les juges d'appel ont considere que l'article precite n'indiquaitpas pour autant à partir de quel moment il doit etre question d'unezone vulnerable. Ils ont considere que la destination du bien aumoment de l'infraction originaire devait etre prise en compte. Ilssoulignent l'objectif des autres innovations du decret du 4 juin 2003,notamment le fait que les constructions baties avant le tout premieretablissement definitif du plan de secteur concerne sont presumeesfaire l'objet d'un permis. (Decret de 1999 portant organisation del'amenagement du territoire, article 96, S: 4, alinea 2).
* * Des lors, les juges d'appel ont considere que l'article 146, alinea3, du decret de 1999 portant organisation de l'amenagement duterritoire est egalement applicable lorsque la zone n'etait pasconsideree comme etant vulnerable du point de vue spatial au moment del'execution des travaux, meme si ce statut lui a ete attribueulterieurement.
* Ils ont considere que, conformement à l'article 2, alinea 2, du Codepenal, cette disposition penale moins severe ote le caracterepunissable des agissements de la defenderesse.
* * 5. Il ressort des travaux parlementaires que l'intention dulegislateur etait d'abroger, dans certains cas, l'infraction demaintien de constructions illicites, notamment lorsque les operations,travaux, modifications ou l'utilisation contraire n'etaient pas situesdans les zones vulnerables du point de vue spatial.
* Toutefois, il n'apparait nulle part que, pour que le maintien dans unezone vulnerable du point de vue spatial soit punissable, le pouvoirdecretal requiert que les operations, travaux, modifications oul'utilisation contraire aient egalement ete effectues dans des zonesvulnerables du point de vue spatial.
* * Pour des constructions erigees anterieurement au decret du 4 juin2003, ceci n'apparait pas davantage de la presomption d'autorisationde permis, etablie par l'article 96, S: 4, alinea 2, du decret de1999, à l'egard des constructions baties apres l'entree en vigueur dela loi du 29 mars 1962 mais avant le tout premier etablissementdefinitif du plan de secteur dans lequel elles se situent, lesautorites pouvant renverser cette presomption, en vertu de la memedisposition, « par tout mode de preuve, sauf temoignages, par exempleau moyen d'un plan de construction approuve, un proces-verbal ou unrecours ».
* * 6. Il n'y a maintien punissable, au sens de l'article 146, alinea 3,du decret de la Region flamande du 18 mai 1999, que si, au moment dumaintien, les travaux illegaux sont situes dans des zones vulnerablesdu point de vue spatial. Cette disposition penale n'ote pas lecaractere punissable de l'infraction continue de maintien commiseavant ou apres la modification legislative du 4 juin 2003, pour autantque ce maintien concerne des biens situes dans une zone vulnerable dupoint de vue spatial.
* * Le moyen est fonde.
* Par ces motifs,
* * La Cour
* * Casse l'arret attaque ;
* Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;
* Laisse les frais des deux pourvois à charge de la defenderesse ;
* Renvoie la cause à la cour d'appel de Bruxelles.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Edward Forrier, les conseillers EtienneGoethals, Paul Maffei, Luc Van hoogenbemt et Koen Mestdagh, et prononce enaudience publique du vingt-six fevrier deux mille huit par le president desection Edward Forrier, en presence de l'avocat general Marc Timperman,avec l'assistance du greffier delegue Veronique Kosynsky.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Paul Mathieu ettranscrite avec l'assistance du greffier adjoint principal Patricia DeWadripont.
Le greffier adjoint principal, Le conseiller,
26 fevrier 2008 P.07.1552.N/5