La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2009 | BELGIQUE | N°F.08.0026.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 12 novembre 2009, F.08.0026.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.08.0026.N

LAS VEGAS ARCADE, societe anonyme,

Me Johan Speecke, avocat au barreau de Courtrai,

contre

Etat belge, (Finances),

Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 mai 2007 parla cour d'appel de Gand.

Le conseiller Eric Stassijns a fait rapport.

L'avocat general Dirk Thijs a conclu.

II. Les moyens de cassation

La demanderesse presente deux moyens libel

les dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les rev...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.08.0026.N

LAS VEGAS ARCADE, societe anonyme,

Me Johan Speecke, avocat au barreau de Courtrai,

contre

Etat belge, (Finances),

Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 mai 2007 parla cour d'appel de Gand.

Le conseiller Eric Stassijns a fait rapport.

L'avocat general Dirk Thijs a conclu.

II. Les moyens de cassation

La demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus, telqu'il est applicable à l'exercice d'imposition 1991 ;

- articles 1289 et 1290 du Code civil ;

- articles 10, 11 et 172 de la Constitution coordonnee du 17 fevrier1994 ;

- article 6.1 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droitsde l'homme et des libertes fondamentales, approuvee par la loi du 13 mai1955 et article 1er du Protocole additionnel du 20 mars 1952, approuve parla loi du 13 mai 1955.

Decisions et motifs critiques

Par l'arret attaque du 8 mai 2007, la cour d'appel accueille l'appelinterjete par la demanderesse, mais le declare non fonde et confirme,ainsi, implicitement le jugement dont appel par lequel la reclamation dela demanderesse a ete declaree recevable et partiellement fondee, plusspecifiquement dans la mesure ou l'augmentation de la taxe a ete reduiteà dix pour cent ou 431.950 francs (10.707,76 euros) et que leremboursement de l'excedant a ete ordonne, majore des interets moratoiresconformement à l'article 418 du Code des impots sur les revenus 1992, encondamnant la demanderesse et le demandeur chacun à la moitie des depens,apres avoir considere que :

« Contrairement à ce que pretend la demanderesse, il n'y a pas decompensation possible avec ce qu'elle a dejà paye en tant qu'entreprisesaisonniere. L'article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur lesrevenus dispose que tout appareil place doit etre muni d'un signedistinctif fiscal et que ce signe doit etre fixe d'une maniere permanenteà un endroit visible et facilement accessible. Aux termes de l'article85, aliena 3, de ce code, toute infraction aux dispositions de cet articleest assimilee à un non-paiement de la taxe. Il a dejà ete considere dansl'arret interlocutoire qu'il y avait une infraction au statut saisonnierdes que le delai maximum autorise en ce qui concerne l'accessibilite desluna parks etait depasse. Cette infraction equivaut au non-paiement de lataxe. Il faut en deduire que les taxations litigieuses ont une causeindependante qui consiste dans le defaut d'apposer les signes distinctifsfiscaux appropries. Le paiement de la taxe en tant qu'entreprisesaisonniere a une autre cause et ne peut, des lors, pas etre compense avecla taxe due ».

Griefs

Premiere branche

L'article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenusdispose que tout appareil place doit etre muni du signe distinctif fiscalvise à l'article 84 ; que ce signe doit etre fixe d'une manierepermanente à un endroit visible et facilement accessible et qu'il ne peutetre appose sur un appareil range dans une categorie superieure à cellepour laquelle la taxe a ete payee et finalement que toute infraction auxdispositions de cet article est assimilee à un non-paiement de la taxe.

En d'autres termes, si tous les appareils places ne sont pas munis d'unsigne distinctif fiscal, et/ou si le signe distinctif n'est pas fixe à unendroit visible et facilement accessible, et/ou si le signe distinctif aete appose sur un appareil range dans une categorie superieure à cellepour laquelle la taxe a ete payee, il y a lieu d'appliquer la sanction del'assimilation au non-paiement de la taxe.

Cet article releve du chapitre V, à savoir les mesures de controle enmatiere de taxe sur les appareils automatiques de divertissement (titre IVdu Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus). Il s'agit doncd'une mesure de controle et les situations sanctionnees enumerees à cetarticle sont, des lors, prevues afin de permettre le controle ou d'enprevenir son empechement. Le motif sous-jacent est clairement le souci dulegislateur de prevenir des pratiques frauduleuses. L'opportunite defraude nait, en effet, par le fait que le signe distinctif est delivre nonpour un appareil determine, mais pour un appareil d'une categoriedeterminee, sans identification de cet appareil, de sorte que le signedistinctif peut etre appose au gre du proprietaire sur chaque appareil decette categorie. Cela implique qu'un signe distinctif fiscal paye pour unappareil determine peut etre utilise pour un autre appareil de la memecategorie, qui n'a pas ete declare et pour lequel il n'a pas ete paye ; end'autres termes, qu'un usage abusif est fait de la preuve de paiement. Ils'ensuit qu'en pareil cas, dans lequel il ne peut etre controle si la taxea ete payee pour l'appareil en question ou dans lequel le controle estempeche, le legislateur considere que la taxe n'a pas ete payee.

Il s'ensuit aussi que le ratio implique que cette assimilation n'est pasapplicable lorsque, comme en l'espece, il est clair et il n'a jamais eteconteste, meme pas dans l'arret en question, que la taxe a ete payee pourchaque appareil, fut-ce de maniere insuffisante. En pareil cas il n'y apas d'assimilation au non-paiement de la taxe et seul le supplementlegalement du peut etre demande, ce qui est obtenu en compensant avec lataxe dejà payee.

Conclusion : en decidant qu'il n'y a pas de compensation possible avec lataxe payee en tant qu'entreprise saisonniere au motif qu'il y a eu uneinfraction qui est assimilee au non-paiement de la taxe et que la taxedejà payee a une autre cause qui ne peut etre compensee avec la taxe due,alors qu'il est etabli que la taxe a bien ete payee pour chaque appareilen tant qu'entreprise saisonniere et qu'il n'y a donc pas eu d'abus despossibilites de controles imparfaites, la cour d'appel viole l'article 85du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus en n'autorisantpas la compensation avec cette taxe payee.

Deuxieme branche

La confirmation des taxations contestees implique immediatement que lataxe payee en tant qu'entreprise saisonniere a ete payee de maniere indueet doit etre remboursee. Au moment ou la dette de la demanderesse enversle defendeur en paiement de la totalite de la taxe sur les appareils dedivertissement automatiques est definitivement etablie, une dette naitaussi dans le chef du defendeur de sorte que la taxe dejà payee en tantqu'entreprise saisonniere pour les memes appareils devient ipso factoindue.

Cette creance de la demanderesse portant restitution de la taxe indumentpayee en tant qu'entreprise saisonniere, doit suivre la procedure fiscaleappropriee, à savoir via une compensation dans le cadre du calcul de lataxe finalement due. En effet, aux termes de l'article 1290 du Code civil,le paiement ou remboursement de la dette de et par le defendeur s'opere deplein droit par la seule force de la loi sous la forme de la compensationavec sa propre creance ; en d'autres termes, la compensation n'est riend'autre qu'une modalite d'execution de la restitution de la taxe payee entant qu'entreprise saisonniere. Les deux dettes s'eteignentreciproquement, des l'instant ou elles existent ensemble, jusqu'àconcurrence de leurs quotites respectives.

Savoir quelles sont les causes des deux dettes/creances est sansimportance à cet egard, d'autant plus que les taxes à payer et àrestituer ont toujours trait aux memes appareils.

Conclusion : en decidant que la compensation n'est pas possible, la courd'appel viole les articles 1289 et 1290 du Code civil et l'article 85 duCode des taxes assimilees aux impots sur les revenus.

Troisieme branche

La regle de l'egalite de tous les Belges devant la loi et l'interdictionde la discrimination, contenues aux articles 10, 11 et 172 de laConstitution, n'excluent pas qu'une distinction de traitement soit faiteentre certaines categories de personnes, pour autant que le critere dedistinction se fonde sur une justification objective et raisonnable.L'existence d'une telle justification doit etre appreciee en tenant comptede l'objectif et des effets de la mesure contestee, ainsi que de la naturedes principes en question. Le principe d'egalite est viole lorsqu'il estetabli qu'il n'y a pas de proportionnalite raisonnable entre les moyensutilises et l'objectif vise.

Lorsqu'il n'y a pas de possibilite de fraude en raison du defaut decorrelation entre les signes distinctifs et les appareils individuels,chaque appareil etant muni d'un signe distinctif, aucune justificationobjective et raisonnable ne pourrait etre donnee d'une telle interdictionde compensation, d'autant plus que cela entraine un enrichissementdisproportionne de l'Etat belge.

Si l'article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenusdevait etre interprete en ce sens qu'aucune compensation n'est possible,meme dans la circonstance ou le paiement indu de la taxe en tantqu'entreprise saisonniere est etabli pour chaque appareil qui fait l'objetde la taxe en tant qu'entreprise ordinaire (annuelle), une distinctiondiscriminatoire existe entre :

1) d'une part, les entreprises qui sont ouvertes toute l'annee et quipayent leur taxe (annuelle) à 100 pour cent et, d'autre part, lesentreprises qui en raison de la perte de leur statut d'entreprisesaisonniere sont aussi autorisees à etre ouvertes toute l'annee, mais quipayent pour cela une taxe equivalant à 150 pour cent, soit la taxeannuelle et la taxe saisonniere non compensee ; et

2) d'une part, les contribuables soumis à l'impot sur les revenus qui, encas de taxes dues, peuvent compenser les taxes dejà payees de sorte qu'ilne faut plus payer que le supplement et, d'autre part, les contribuablessoumis à la taxe assimilee aux impots sur les revenus, plus precisementla taxe sur les appareils de divertissement automatiques, qui, en casd'une taxe due en raison de la qualification d'entreprise ordinaire, nepeuvent pas compenser la taxe qu'ils ont dejà payee en tant qu'entreprisesaisonniere et qui ne peuvent donc pas se limiter à payer le supplement.

Conclusion : l'interpretation retenue par les juges d'appel viole lesarticles 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus, 10,11 et 172 de la Constitution coordonnee.

L'article 26, S: 2, de la loi du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage,dispose que lorsqu'une telle question (relative à la violation par uneloi des articles 10, 11 ou 172 de la Constitution) est soulevee devant unejuridiction, celle-ci doit demander à la Cour d'arbitrage de statuer surcette question.

Quatrieme branche

Le refus de compenser la taxe en vertu d'une mesure de controle prevue parl'article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus quiresulte, en l'espece, d'un montant à payer de 8.639.000 francs + 431.950francs = 9.070.950 francs (224.862,98 euros), ne peut etre qualifieeautrement que de sanction de nature penale, des lors qu'elle concerne toutcontribuable sans distinction et non un seul groupe determine ayant unstatut particulier, qu'elle prescrit un montant determine et assortit sonrespect d'une sanction, qu'elle ne concerne pas seulement uneindemnisation pecuniaire d'un dommage, mais tend essentiellement à punirafin d'eviter une repetition d'actes similaires, qu'elle se fonde sur unenorme generale, dont l'objectif est à la fois preventif et repressif etqu'elle est tres severe eu egard à son montant.

Il suit de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales que s'il s'agit d'une sanction àcaractere penal, le juge exerce un controle de pleine juridiction de cettesanction. Il peut en examiner la legalite et, specialement, verifier sicette sanction est compatible avec les conditions imperatives desconventions internationales et du droit interne, y compris des principesgeneraux du droit. Ce droit de controle doit particulierement permettre aujuge de verifier si la sanction n'est pas disproportionnee àl'infraction, de sorte qu'il peut examiner si l'administration pouvaitraisonnablement imposer une sanction administrative d'une telle etendue. Acet egard, il peut particulierement tenir compte de la gravite del'infraction, du taux des sanctions dejà infligees et de ce qui a dejàete decide dans des causes similaires, sans pouvoir reduire cette sanctionpour des motifs resultant de circonstances attenuantes propres à lapersonne du contribuable ou pour des simples raisons d'opportunite.L'obligation de l'administration de sanctionner n'empeche pas quel'administration deroge aux tarifs des amendes fixes par ou en vertu de laloi. Le juge doit precisement verifier s'il existe des fondements pourderoger à ces tarifs et les mentionner.

Concretement, cela implique que s'il y a lieu d'interpreter l'article 85du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus en ce sens que lescontribuables n'ont pas droit à la compensation, meme dans lacirconstance ou le paiement indu de la taxe en tant qu'entreprisesaisonniere est etabli pour chaque appareil qui fait l'objet de la taxe entant qu'entreprise ordinaire (annuelle), il existe une distinctiondiscriminatoire avec les contribuables qui font l'objet d'une sanctionpenale ou d'une sanction administrative à caractere penal, des lors queles premiers ne peuvent pas beneficier d'un controle de pleinejuridiction, alors que les derniers en beneficient.

Conclusion : selon l'interpretation retenue par les juges d'appel,l'article 85 du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus violeles articles 10, 11 et 172 de la Constitution coordonnee, lus separementou en combinaison avec les articles 6.1 de la Convention de sauvegarde desdroits de l'homme et des libertes fondamentales et 1er du (premier)Protocole additionnel.

L'article 26, S: 2, de la loi du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage,dispose que lorsqu'une telle question (relative à la violation par uneloi des articles 10, 11 ou 172 de la Constitution) est soulevee devant unejuridiction, celle-ci doit demander à la Cour d'arbitrage de statuer surcette question.

Second moyen

Dispositions legales violees

- article 100 de l'arrete royal du 17 juillet 1991 portant coordinationdes lois sur la comptabilite de l'Etat (ancienne loi du 6 fevrier 1970) ;

- article 131, 2DEG, de la loi du 22 mai 2003 portant organisation dubudget et de la comptabilite de l'Etat federal ;

- article 2262bis, S: 1er, 1DEG, du Code civil ;

- article 10 de la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositions enmatiere de prescription ;

- article 1376 du Code civil ;

- principe general du droit interdisant l'enrichissement sans cause.

Decisions et motifs critiques

La demanderesse a invoque que si l'article 85 du Code des taxes assimileesaux impots sur les revenus n'autorise pas de compensation, il y a en toutcas un paiement indu et/ou un enrichissement sans cause. Cette demande aete formulee pour la premiere fois dans la requete d'appel du 21 juin2001. A cet egard, les juges d'appel ont decide comme suit :

« Abstraction faite de la question de savoir si les conditionsd'application des regles juridiques en matiere de paiement indu sontremplies en l'espece, il y a lieu d'examiner la prescription. (...)

La demande en paiement indu concerne une demande contre l'Etat federal àlaquelle s'applique le regime de prescription special des articles 100 et101 des lois sur la comptabilite de l'Etat. Ce regime contient unederogation importante au droit commun, de sorte que c'est en vain quel'appelante (la demanderesse) invoque les dispositions transitoires de laloi du 10 juin 1998.

Lors de l'appreciation de la demande en paiement indu, il faut aussi tenircompte des dispositions de l'article 100, 1DEG et 2DEG, des lois sur lacomptabilite de l'Etat, qui dispose que : `sont prescrites etdefinitivement eteintes au profit de l'Etat, sans prejudice des decheancesprononcees par d'autres dispositions legales, reglementaires ouconventionnelles sur la matiere :

1DEG les creances qui, devant etre produites selon les modalites fixeespar la loi ou le reglement, ne l'ont pas ete dans le delai de cinq ans àpartir du premier janvier de l'annee budgetaire au cours de laquelle ellessont nees ;

2DEG les creances qui, ayant ete produites dans le delai vise au 1DEG,n'ont pas ete ordonnancees par les ministres dans le delai de cinq ans àpartir du premier janvier de l'annee pendant laquelle elles ont eteproduites'.

L'article 100, 1DEG et 2DEG, des lois sur la comptabilite de l'Etat estdonc relatif à la prescription des creances au profit de l'Etat. Ceregime de prescription releve de l'ordre public et peut, des lors, etreinvoque à tout moment de la procedure.

L'article 100 des lois sur la comptabilite de l'Etat opere une distinctionentre les creances devant etre produites en vertu d'une disposition legaleou reglementaire (alinea 1er, 1DEG et 2DEG), les creances pour lesquellesune telle production n'est pas exigee (alinea 1er, 3DEG) et les creancesresultant de jugements.

En ce qui concerne les creances devant etre produites, la Cour decassation suppose que, sauf dispositions legales contraires, toutes lescreances qui ne constituent pas une `depense fixe' de l'Etat, doivent etreproduites (comp. Cass., 10 octobre 1996, Pas., 1996, 372 ; Cass., 14 avril2003, R.A.B.G., 2003, ep. 15, 837, note I. Claeys). Cela est deduit desarticles 68 et 100 du reglement general sur la comptabilite de l'Etat(voir Cass., 13 juin 2003, R.W., 2004-05, 384, note S. Van Der Jeght ;Cass., 25 mars 2004, T.F.R., 2004, 851, note D. Jacques ; voir pour uneexplication detaillee : Joke Baeck, `Verjaring enoverheidsaansprakelijkheid', in Verjaring in het Privaatrecht. Weet deavond wat de morgen brengt ?, Ignace Claeys, (ed.), Malines, WoltersKluwer Belgique, 2005, p. 129-180).

Une demande en repetition du chef de paiement indu ne constitue pas unedepense fixe de l'Etat, de sorte qu'elle est soumise au delai deprescription special de l'article 100, alinea 1er, des lois sur lacomptabilite de l'Etat. Pour obtenir le paiement de sa creance,l'appelante (la demanderesse) est, des lors, tenue de produire unedeclaration, un etat ou un compte dans le delai de cinq ans à partir dupremier janvier de l'annee budgetaire au cours de laquelle la creance estnee, l'annee budgetaire correspondant, en Belgique, à l'annee civile.

La question est de savoir quand la creance issue du paiement indu est nee.L'appelante (la demanderesse) propose la date de l'arret interlocutoire,le novembre 2006, soit la date à laquelle les taxations contestees ontete maintenues. Selon l'appelante (la demanderesse), le pouvoir dejuridiction de la cour d'appel est alors epuise et le caractere indu dupaiement est definitivement etabli. D'autres dates auxquelles la creancepourrait avoir vu le jour pourraient etre soit la date du paiement de8.639.000 francs (214.155,22 euros), à savoir fin 1990, ou le moment del'enrolement de la decision attaquee, à savoir le 21 decembre 1993.

Il ressort, par contre, des travaux preparatoires qu'il y a lieu de tenircompte, lors de la determination de la naissance de la creance contrel'Etat, du moment auquel nait le droit pour le creancier d'introduire uneaction (voir Joke Baeck, `Verjaring en overheidsaansprakelijkheid', inVerjaring in het Privaatrecht. Weet de avond wat de morgen brengt ?,Ignace Claeys, (ed.), Malines, Wolters Kluwer Belgique, 2005, p. 148).

Le droit d'introduire une action est ne à la date d'enrolement. En effet,à ce moment il est etabli que le paiement anterieur de 50 pour centn'etait pas correct, de sorte qu'à partir de ce moment l'appelante (lademanderesse) pouvait introduire sa demande en paiement indu, en tout casdans l'hypothese de l'appelante ou il etait question d'un paiement indu.La circonstance que ces taxations ont ete contestees suivant la procedurefiscale appropriee n'y porte pas atteinte. Cela n'empeche pas que lacreance est nee lors de l'etablissement des taxations contestees. Le pointde vue de l'appelante (la demanderesse) ne peut donc pas etre accueilli.

Comme point de depart de la prescription, il y a, des lors, lieu deprendre en consideration le 1er janvier 1993, de telle sorte qu'eu egardau delai de prescription de cinq ans, la demande fondee sur le paiementindu formulee seulement le 21 juin 2001, a ete tardivement introduite.

La demande en restitution du paiement indu de 8.639.000 francs (214.155,22euros) est prescrite en vertu de l'article 100, 1DEG, des lois sur lacomptabilite de l'Etat.

Le meme raisonnement s'applique dans la mesure ou la demande se fonde surun `enrichissement sans cause'. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieud'examiner les autres griefs ».

Griefs

Les juges d'appel ont refuse d'examiner sur le fond la demande enrestitution fondee sur le paiement indu, prevue par l'article 1376 du Codecivil et/ou fondee sur l'enrichissement sans cause, au motif qu'une telledemande est prescrite en vertu des lois sur la comptabilite de l'Etat.

Fin 1990, la demanderesse a paye des taxes et elle demande, des lors, larestitution de (cette) taxe en se fondant sur le paiement indu et/ou del'enrichissement sans cause.

Il ressort des travaux preparatoires de la loi du 6 fevrier 1970 quel'article 100 de l'arrete royal du 17 juillet 1991 n'est pas applicable auremboursement des taxes. Les delais de prescription qui y sont contenus nes'appliquent, des lors, pas. Seul l'article 2262bis, S: 1er, 1DEG, du Codecivil est, des lors, applicable, lequel prescrit un delai de prescriptionde dix ans pour les actions personnelles, en combinaison avec lesdispositions transitoires de la loi du 10 juin 1998, plus precisementl'article 10, en vertu duquel l'action, exercee une premiere fois par larequete du 21 juin 2001, a ete exercee en temps utile, quelle que soit ladate retenue comme point de depart (paiement, enrolement).

Conclusion : en decidant que l'article 100, 1DEG, de l'arrete royal du 17juillet 1991 portant coordination des lois sur la comptabilite de l'Etatest applicable à l'action presente et que celle-ci est ainsi prescrite,les juges d'appel ont viole les articles 100, de l'arrete royal du 17juillet 1991 portant coordination des lois sur la comptabilite de l'Etat(ancienne loi du 6 fevrier 1970) et 131, 2DEG, de la loi du 22 mai 2003portant organisation du budget et de la comptabilite de l'Etat federal,2262bis, S: 1er, 1DEG, du Code civil, 10 de la loi du 10 juin 1998modifiant certaines dispositions en matiere de prescription, 1376 du Codecivil et le principe general interdisant l'enrichissement sans cause).

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

1. L'article 85, alinea 1er, du Code des taxes assimilees aux impots surles revenus, tel qu'il est applicable à l'exercice d'imposition 1991,dispose que tout appareil place doit etre muni du signe distinctif fiscalvise à l'article 84. Ce signe doit etre fixe d'une maniere permanente àun endroit visible et facilement accessible; il ne peut etre appose sur unappareil range dans une categorie superieure à celle pour laquelle lataxe a ete payee. L'article 85, aliena 3, de ce code dispose que touteinfraction aux dispositions du present article est assimilee à unnon-paiement de la taxe.

2. Le moyen, en cette branche, suppose que nonobstant le signe distinctiffiscal appose sur les appareils, l'administration doit tenir compte despaiements qui ont ete faits relativement à ces appareils par lecontribuable.

3. L'arret interlocutoire non attaque du 28 novembre 2006 decide quel'exploitation des appareils pour lesquels une cotisation saisonniereavait ete payee a eu lieu en dehors de la periode autorisee et considerequ'ainsi, les appareils etaient munis d'un signe distinctif fiscalirregulier.

L'arret attaque ne tire que les conclusions de la decision rendue parl'arret du 28 novembre 2006 en ce qui concerne la cause des taxationscontestees et decide que des lors qu'un signe distinctif irregulier avaitete appose, il y a lieu d'appliquer la sanction de l'article 85, alinea 3,du Code des taxes assimilees aux impots sur les revenus.

4. En etant essentiellement dirige contre une decision qui etait dejàcontenue dans l'arret interlocutoire, à savoir que le signe distinctifetait irregulier, le moyen, en cette branche, est irrecevable.

Quant aux deuxieme à quatrieme branches :

5. Le moyen, en ces branches, repose sur l'hypothese juridique erronee queles taxations d'office dans le cadre de la taxe sur les appareilsautomatiques de divertissement, apres la constatation que les appareilsont ete exploites en dehors des jours d'ouverture communiques aux servicesdes contributions, a pour effet que la taxe payee spontanement par lademanderesse d'apres sa declaration du chef de l'exploitation desappareils automatiques de divertissement dans le cadre d'une entreprisesaisonniere, constitue un paiement de l'indu.

Le moyen, en ces branches, manque en droit.

6. Il n'y a pas lieu de poser les questions prejudicielles proposees parla demanderesse.

Sur le second moyen :

7. En vertu de l'article 2 du Code des taxes assimilees aux impots sur lesrevenus, tel qu'il est applicable à l'exercice d'imposition 1991, lesdispositions du Code des impots sur les revenus 1964 qui y sont enumereessont applicables aux taxes assimilees à ces impots.

Ainsi, les articles 272, 274 et 277 du Code des impots sur les revenus1964 sont notamment applicables aux taxes assimilees aux impots sur lesrevenus.

Le remboursement des taxes assimilees aux impots sur les revenus qui nesont pas dues doit etre demande dans les brefs delais mentionnes dans cesdispositions.

8. En supposant que le remboursement de la taxe sur les appareilsautomatiques de divertissement payee spontanement par la demanderesse peutetre demande durant dix ans en vertu de l'article 2262bis, S: 1er, 1DEG,du Code civil, au motif que la taxe serait indue, le moyen manque endroit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Ivan Verougstraete, le president de section LucHuybrechts, les conseillers Eric Stassijns, Alain Smetryns et GeertJocque, et prononce en audience publique du douze novembre deux mille neufpar le president Ivan Verougstraete, en presence de l'avocat general DirkThijs, avec l'assistance du greffier Johan Pafenols.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Didier Batsele ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le conseiller,

12 NOVEMBRE 2009 F.08.0026.N/15


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.08.0026.N
Date de la décision : 12/11/2009

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2009-11-12;f.08.0026.n ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award