Cour de cassation de Belgique
Arrêt
5413
N° C.09.0406.F
COMMUNAUTÉ FRANÇAISE, représentée par son gouvernement, en la personne duministre-président, dont le cabinet est établi à Bruxelles, place Surletde Chokier, 15-17, et en la personne du ministre de l'Enseignementsupérieur et de la Recherche scientifique, dont le cabinet est établi àBruxelles, rue Belliard, 9-11,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 36,où il est fait élection de domicile,
contre
V. A.,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11,où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 18 septembre2008 par la cour d'appel de Bruxelles statuant comme juridiction de renvoiensuite de l'arrêt de la Cour du 2 septembre 2005.
Le conseiller Didier Batselé a fait rapport.
L'avocat général André Henkes a conclu.
II. Le moyen de cassation
La demanderesse présente un moyen libellé dans les termes suivants :
Dispositions légales violées
- articles 1^er, in fine, 2 et 10, § 2, de l'arrêté royal n° 63 du 20juillet 1982 modifiant les dispositions des statuts pécuniairesapplicables au personnel enseignant et assimilé de l'enseignement de pleinexercice et de l'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit,les deux premiers articles, tels qu'ils ont été modifiés par les articles1^er et 2 de l'arrêté royal n° 161 du 30 décembre 1982 portantmodification de l'arrêté royal du 15 avril 1958 portant statut pécuniairedu personnel enseignant, scientifique et assimilé du ministère del'Instruction publique, modification de l'arrêté royal du 15 avril 1958accordant une allocation pour surcroît de travail à certains membres dumême personnel et modification de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982modifiant les dispositions des statuts pécuniaires applicables aupersonnel enseignant et assimilé de l'enseignement de plein exercice et del'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit ;
- article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976 relative auxpropositions budgétaires 1976-1977 ;
- article 2, chapitre III, de l'arrêté royal du 9 novembre 1978 fixant au1^er avril 1972 les échelles de traitement des membres du personneldirecteur et enseignant et du personnel auxiliaire d'éducation desétablissements d'enseignement artistique de plein exercice de l'État,relevant du ministre de la Culture néerlandaise et du ministre de laCulture française, ainsi que des membres du personnel du serviced'inspection chargé de la surveillance des établissements d'enseignementartistique.
Décisions et motifs critiqués
L'arrêt attaqué reçoit les demandes originaires de la défenderesse etcondamne la demanderesse à restituer la somme de 670,73 euros augmentéedes intérêts moratoires échus au taux légal depuis le 24 février 1995,jusqu'à parfait paiement, dit fondée la demande tendant au paiement desarriérés de traitement et de subventions-traitements pour les prestationsaccomplies par la défenderesse dans les académies de B. et de S.-G. depuisle 1^er décembre 1995, ordonne à la demanderesse de déposer au greffe dela cour [d'appel] et de communiquer à la défenderesse le décompte de cesarriérés avec ses pièces justificatives, sous peine d'astreinte, etcondamne la défenderesse à la somme provisionnelle de 10.000 euros à fairevaloir sur les arriérés de traitement et de subventions-traitements, pourles motifs suivants, réputés ici intégralement reproduits :
« (La défenderesse) expose en substance qu'aucune disposition légale nepermettait à (la demanderesse) de réputer accessoires les fonctionsqu'elle exerçait dans les académies litigieuses et de limiter lestraitements qu'elle pouvait en retirer tandis que selon (la demanderesse),ces traitements devaient être réduits tant par l'effet de l'arrêté royaln° 63 du 20 juillet 1982 précité que de l'article 77 de la loi du 24décembre 1976 relative aux propositions budgétaires 1976-1977.
L'article 1^er, alinéa 2, de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982précité dispose `le présent arrêté ne s'applique pas à la fonction nonexclusive au sens de l'article 5 de l'arrêté royal du 15 avril 1958 ...'.
Ainsi que la Cour de cassation l'a constaté dans son arrêt du 2 septembre2005, cassant l'arrêt de la cour d'appel de Mons du 13 novembre 2003,rendu en la présente cause, aux termes de l'article 5, alinéa 4, de cetarrêté royal du 15 avril 1958 portant statut pécuniaire du personnelenseignant, scientifique et assimilé du ministère de l'Instructionpublique, telle que cette disposition était applicable à l'espèce,l'expression fonction non exclusive désigne la fonction qu'exerce dans uneou plusieurs écoles ou institutions d'enseignement artistique de l'État leprofesseur enseignant les cours artistiques et l'accompagnateur.
Il est établi que [la défenderesse] exerçait des fonctionsd'accompagnatrice au conservatoire de M.
Les dispositions de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982 précité nejustifient donc pas la suppression de son traitement pour ses fonctions ausein des académies litigieuses. (...)
L'article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976 avait pour objectifbudgétaire de limiter, en cas de cumul de fonctions dans le chef del'enseignant, le coût des rémunérations dues par l'État dans lesétablissements qui dépendaient directement de lui et la charge dessubventions-traitements qu'il payait aux établissements subventionnés.
Comme il ressort de cette disposition, l'application de l'article 77, §1^er, requiert que soit définie la notion d'emploi à prestationscomplètes.
Cette notion parut résulter d'un arrêté royal du 15 décembre 1978 abrogéet remplacé par un autre du 8 août 1984. (...)
Cependant, par la suite, dans un arrêt du 7 octobre 2004, la Cour decassation estima que l'arrêté royal du 8 août 1984 devait être tenu pourillégal (...). Par un arrêt du 10 octobre 2006, n° 163.325, le Conseild'État rejoignit cette analyse, en ajoutant qu'il en était de même, pourles mêmes motifs, de l'arrêté royal du 15 décembre 1978.
L'arrêté royal du 9 novembre 1978 fixant au 1^er avril 1972 les échellesde traitement dans l'enseignement artistique et celui du 25 juin 1973fixant les conditions d'admission des élèves et la durée des cours dansles conservatoires royaux de musique, tel que modifié par l'arrêté royaldu 30 mars 1976, ne déterminent pas la notion d'emploi à prestationscomplètes visée par l'article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976précitée.
Après avoir considéré, dans un arrêt du 21 avril 1993, que l'arrêté royaldu 9 novembre 1978 déterminait uniquement des échelles de traitement paremploi (arrêt n° 46.628), le Conseil d'État a décidé plus tard que `levolume des prestations que le requérant pouvait être appelé à assurer entant que professeur de musique dans un conservatoire royal de musiquependant l'année académique 2000-2001 ne s'élève qu'à douze heures parsemaine, se décomposant comme suit :
- les six heures de cours de base que l'intéressé doit dispenser pourpouvoir bénéficier d'un traitement correspondant à l'intégralité del'échelle barémique selon l'article 2, chapitre III, de l'arrêté royal du9 novembre 1978 fixant au 1^er avril 1972 les échelles de traitement desmembres du personnel enseignant des établissements d'enseignementartistique de plein exercice ;
- les six heures de cours complémentaires qu'un professeur d'harmonieécrite peut, sauf empêchement motivé, être tenu d'assurer en vertu desarticles 13 et 23 de l'arrêté royal du 25 juin 1973 fixant les conditionsd'admission des élèves et la durée des cours dans les conservatoiresroyaux de musique' (arrêt du Conseil d'État n° 163.325 du 10 octobre2006).
Il est ainsi admis que l'arrêté royal du 9 novembre 1978 déterminel'horaire de base à six heures par semaine pour les professeurs de musiquedans un conservatoire royal et que l'article 13 de l'arrêté royal du 25juin 1973 permet pour certains cours d'imposer au professeur des heurescomplémentaires, à concurrence de six heures par semaine maximum, de sorteque l'horaire complet de ces professeurs s'établit à douze heures parsemaine.
Il n'est pas démontré que cette notion d'horaire complet se confondraitavec celle d'emploi à prestations complètes requises pour la mise en œuvrede l'article 77, § 1^er, de la loi précitée du 24 décembre 1976.
En effet, si tel avait été le cas, le Roi n'aurait pas éprouvé lanécessité d'adopter les arrêtés royaux des 15 décembre 1978 et 8 août 1984précités, aux côtés de cet arrêté royal du 9 novembre 1978.
Il se justifie dès lors de condamner [la demanderesse] à payer à [ladéfenderesse] le traitement et la subvention-traitement qu'elle est endroit de percevoir pour ses prestations dans les académies de musique deB. et de S.-G. et dont elle a été injustement privée et d'ordonner laréouverture des débats aux fins précisées dans le dispositif du présentarrêt. Il est également justifié d'ordonner à [la demanderesse] derestituer à [la défenderesse] la somme de 670,73 euros injustementprélevée sur son traitement, augmentée des intérêts moratoires aux tauxlégaux depuis le 24 février 1995 ».
Griefs
Première branche
L'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982 modifiant les dispositions desstatuts pécuniaires applicables au personnel enseignant et assimilé del'enseignement de plein exercice et de l'enseignement de promotion socialeou à horaire réduit contient des règles communément appelées« anti-cumul », règles exprimées dans ses articles 2 et 10, § 2, telsqu'ils ont été modifiés par l'arrêté royal n° 161 du 30 décembre 1982.
L'arrêté royal n° 63, tel qu'il a été modifié par l'arrêté royal n° 161,définit son champ d'application par son article 1^er et énonce en sondernier alinéa :
« À l'exception de l'article 7, le présent arrêté ne s'applique pas à lafonction non exclusive au sens de l'article 5 de l'arrêté royal du 15avril 1958 visé au a) ci-avant ».
L'article 2, § 2, e, de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982, tel qu'ila été modifié par l'arrêté royal n° 161 du 30 décembre 1982, énonce :
« § 2. Par fonction accessoire au sens du § 1^er, il faut entendre lafonction à prestations complètes ou incomplètes, exercées dansl'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit par un membre dupersonnel qui simultanément : (...)
e) exerce une fonction non exclusive dans l'enseignement de plein exercicepour laquelle il bénéficie d'un traitement complet, dont le montant estégal ou supérieur au minimum de son échelle de traitement ».
L'article 10, § 2, 2°, de l'arrêté royal n° 63 fixe les règles anti-cumulet énonce :
« Hormis les dispositions des §§ 3, 4 et 6, il ne sera pas octroyé derémunération à partir de l'année scolaire 1982-1983 : (...)
2° pour des prestations effectuées dans l'enseignement de promotionsociale ou à horaire réduit qui, conformément au présent arrêté, sontconsidérées comme accessoires ».
En vertu des articles 2, § 2, e, et 10, § 2, 2°, de l'arrêté royal n° 63visé au moyen, il ne sera pas accordé de rémunération pour des prestationsconsidérées comme accessoires au sens dudit arrêté royal, soit notammentpour les prestations effectuées dans l'enseignement à horaire réduitexercées simultanément avec une fonction non exclusive pour laquelle letravailleur bénéficie d'un traitement complet, dont le montant brut estégal ou supérieur au minimum de son échelle de traitement.
La demanderesse soutenait que la défenderesse exerçait une activité ausein de l'enseignement à horaire réduit, soit au titre de professeur ausein des académies de musique de B. et de S.-G., ainsi qu'une fonction nonexclusive au sein du conservatoire de musique de M., au titred'accompagnatrice de musique, pour laquelle le montant brut de sontraitement complet était plus élevé que le montant minimum de son échellede traitement dans l'enseignement à horaire réduit. La demanderessesoutenait qu'en conséquence, l'activité de la défenderesse au sein del'enseignement à horaire réduit était accessoire au sens de l'arrêté royaln° 63 du 20 juillet 1982, et avait ainsi légalement été exposée à laréglementation sur la limitation des cumuls en vertu de l'arrêté royal n°63 du 20 juillet 1982.
L'arrêt attaqué dispose qu'en vertu de l'article 1^er, dernier alinéa, del'arrêté royal n° 63 visé au moyen, les dispositions dudit arrêté royal nes'appliquent pas à la fonction non exclusive au sens de l'article 5 del'arrêté royal du 15 avril 1958 portant statut pécuniaire du personnelenseignant, scientifique et assimilé du ministère de l'Instructionpublique et constate que la défenderesse exerçait au sein du conservatoireroyal de M. une fonction non exclusive au sens de l'article 5 de ladisposition précitée. En conséquence, l'arrêt examiné décide que lesdispositions de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982 ne s'appliquentpas à la défenderesse, et que ces dispositions ne pouvaient justifier lasuppression de son traitement pour ses fonctions exercées dansl'enseignement à horaire réduit, soit au sein des académies litigieuses.
Cette décision n'est pas légalement justifiée.
En effet, l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982 dispose, d'une part, enson article 1^er, dernier alinéa, que « le présent arrêté ne s'appliquepas à la fonction non exclusive », d'autre part, il dispose en son article2, § 2, e, que la fonction exercée dans l'enseignement à horaire réduitest une fonction accessoire si le membre du personnel exerce simultanémentune fonction non exclusive dans l'enseignement de plein exercice pourlaquelle il bénéficie d'un traitement complet dont le montant brut estégal ou supérieur au minimum de son échelle de traitement. La fonctionaccessoire ainsi définie est dès lors soumise aux règles anti-cumulcontenues notamment dans l'article 10, § 2, de l'arrêté royal n° 63 viséau moyen.
En vertu de l'article 1^er, dernier alinéa, de l'arrêté royal n° 63 du 20juillet 1982, tel qu'il a été modifié par l'arrêté royal n° 161 du 30décembre 1982, aucune fonction non exclusive ne peut donc être qualifiéede fonction accessoire, et faire l'objet des règles de limitation decumul. A contrario, l'article 1^er, dernier alinéa, de l'arrêté royal n°63 du 20 juillet 1982 n'empêche nullement que, conformément à l'article 2,§ 2, e, de l'arrêté royal n° 63 visé au moyen, une fonction exercée dansl'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit, soit qualifiée defonction accessoire lorsque le membre du personnel exerce simultanémentune fonction non exclusive pour laquelle il bénéficie d'un traitementcomplet dont le montant brut est égal ou supérieur au minimum de sonéchelle de traitement.
En tant qu'il décide que les dispositions de l'arrêté royal n° 63 du 20juillet 1982 ne sont pas applicables à la défenderesse et ne justifientpas la suppression de son traitement pour ses fonctions au sein desacadémies litigieuses, au motif que la défenderesse exerçait une fonctionnon exclusive au sens de l'article 1^er, dernier alinéa, de l'arrêté royaln° 63 du 20 juillet 1982, et que l'arrêté royal n° 63 précité nes'applique en aucun cas à un membre du personnel qui exerce une fonctionnon exclusive, alors que l'article 1^er, dernier alinéa, de l'arrêté royaln° 63 du 20 juillet 1982 interdit uniquement l'application directe desdispositions anti-cumul aux fonctions non exclusives, mais n'empêche pasl'application desdites dispositions anti-cumul aux fonctions exercées dansl'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit lorsque le membredu personnel exerce simultanément une fonction non exclusive, l'arrêtattaqué méconnaît l'article 1^er, dernier alinéa, de l'arrêté royal n° 63visé au moyen. L'arrêt attaqué méconnaît en outre les articles 2, § 2, e,et 10, § 2, 2°, de l'arrêté royal n° 63 visés au moyen, en refusantd'appliquer les règles anti-cumul qu'ils énoncent au motif que ladéfenderesse exerçait une fonction non exclusive.
Seconde branche
L'article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976 relative auxpropositions budgétaires 1976-1977, dispose :
« Sans préjudice de l'application d'autres dispositions légales plusrestrictives, il ne peut être attribué ni rémunération, nisubvention-traitement pour les prestations fournies dans l'enseignementorganisé ou subventionné par l'État, en cela compris l'enseignement depromotion sociale et l'enseignement à horaire réduit, par une personne quiexerce déjà une profession principale en dehors de l'enseignement ou desprestations dans l'enseignement égales à un emploi à prestations complètesau moins, pour l'ensemble des prestations complémentaires dansl'enseignement qui dépasse un tiers du minimum d'heures requis, pour unemploi à prestations complètes dans la ou les fonctions correspondant àces prestations.
Si la notion d'emploi à prestations complètes dans l'enseignement n'estpas définie, elle est déterminée par le Roi par comparaison avec unenseignement de plein exercice correspondant (...) ».
Afin d'appliquer l'article 77 de la loi du 24 décembre 1976, la notiond'emploi à prestations complètes devait partant être définie par un arrêtéroyal. Cette définition fut donnée par un arrêté royal du 15 décembre 1978portant exécution de la loi du 24 décembre 1976 relative aux propositionsbudgétaires 1976-1977, abrogé et remplacé par l'arrêté royal du 8 août1984 portant exécution de la loi du 24 décembre 1976 relative auxpropositions budgétaires 1976-1977. L'arrêt attaqué n'en fait pasapplication au motif que ces arrêtés royaux ont été déclarés illégaux parla Cour ainsi que par le Conseil d'État.
L'arrêté royal du 9 novembre 1978 fixant au 1^er avril 1972 les échellesde traitement des membres du personnel directeur et enseignant et dupersonnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignementartistique de plein exercice de l'État, relevant du ministre de la Culturenéerlandaise et du ministre de la Culture française, ainsi que des membresdu personnel du service d'inspection chargé de la surveillance desétablissements d'enseignement artistique dispose en son article 2,chapitre III :
« Article 2. L'échelle de traitement de chacune des fonctions des membresdu personnel directeur et enseignant et du personnel auxiliaired'éducation des établissements d'enseignement artistique de plein exercicede l'État, ainsi que des membres du personnel du service d'inspectionchargé de la surveillance des établissements d'enseignement artistique,est fixée comme suit : (...)
Chapitre III : Du personnel directeur et enseignant de l'enseignementartistique supérieur. (...)
Professeur de cours artistique (fonction non exclusive) : (...)
1. Enseignement de l'architecture et des arts plastiques (...)
2. Enseignement de la musique :
6 heures /semaine :
a) Enseignant un cours classé en 1^ère catégorie
b) Enseignant un cours classé en 2^ème catégorie (...)
Accompagnateur :
- enseignement de la musique (fonction non exclusive) : 12 heures /semaine »
Les articles 12 et 13 de l'arrêté royal du 25 juin 1973 fixant lesconditions d'admission des élèves et la durée des cours dans lesconservatoires royaux de musique, tel qu'il a été modifié par l'arrêtéroyal du 30 mars 1976, fixent le nombre d'heures complémentaires que lesprofesseurs de composition, fugue, contrepoint, analyse musicale, harmonieécrite et pratique, direction d'orchestre, instruments, musique dechambre, chant, art lyrique, déclamation, art dramatique, diction pourchanteurs, lecture musicale et transposition, spécialisation en solfège etsolfège pour élèves chanteurs, au sein d'un conservatoire royal demusique, peuvent être tenus d'effectuer. L'arrêté royal du 25 juin 1973 nevise que les professeurs au sein d'un conservatoire, et non lesaccompagnateurs, alors que l'arrêté royal du 9 novembre 1978 les concerneet détermine ainsi leur horaire complet.
L'arrêt attaqué énonce que, sur la base des arrêtés royaux des 9 novembre1978 et 25 juin 1973, l'horaire complet des professeurs de musique dans unconservatoire royal s'établit à douze heures par semaine.
L'arrêté royal du 25 juin 1973 ne vise pas les accompagnateurs de musique,alors que l'arrêté royal du 9 novembre 1978 les concerne, et détermineainsi leur horaire complet.
L'arrêt attaqué dispose cependant qu' « il n'est pas démontré que cettenotion d'horaire complet se confondrait avec celle d'emploi à prestationscomplètes requises pour la mise en œuvre de l'article 77, § 1^er, de laloi précitée du 24 décembre 1976 ». L'arrêt attaqué dispose ainsi que,quel que soit l'horaire complet des professeurs de musique ou desaccompagnateurs de musique dans un conservatoire royal, il n'est pasdémontré que cette notion se confond avec celle d'emploi à prestationscomplètes. L'arrêt attaqué décide en conséquence que les règles anti-cumulde l'article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976 n'étaient pasapplicables à défaut de définition de la notion de prestations complètes.
L'article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976 limite la rémunérationet la subvention-traitement pour les prestations complémentaireseffectuées par une personne qui exerce déjà des prestations dansl'enseignement égales à un emploi à prestations complètes. Par les termesd'exercice d'un « emploi à prestations complètes », cet article 77 visel'exercice par une personne, dans la fonction correspondant auxprestations qu'il exécute, de prestations complètes, soit d'un horairecomplet. La notion d'emploi à prestations complètes ne peut signifierautre chose que l'horaire complet qu'une personne peut effectuer dans lecadre de l'emploi correspondant à ses prestations. Ces deux notions nesont pas distinctes.
Dès lors que l'arrêt attaqué avait établi que l'horaire complet, oul'emploi à prestations complètes, des professeurs de musique, et donc desaccompagnateurs de musique, était déterminé par les arrêtés royaux des 9novembre 1978 et 25 juin 1973, l'arrêt attaqué devait mettre en œuvrel'article 77, § 1^er, de la loi du 24 décembre 1976, visé au moyen.
En ce qu'il dispose que les arrêtés royaux des 9 novembre 1978 et 25 juin1973 définissent l'horaire complet des professeurs de musique, et partant,quant à l'arrêté royal du 9 novembre 1978, des accompagnateurs de musique,mais que cette notion d'horaire complet ne se confond pas avec la notionde prestations complètes, telle qu'elle est utilisée par l'article 77, §1^er, de la loi du 24 décembre 1976 relative aux propositions budgétaires1976-1977, l'arrêt attaqué fait une mauvaise application de la notion deprestations complètes telle qu'elle est utilisée aux termes de cet article77, § 1^er. En conséquence, il viole cette disposition en refusant d'enfaire application, et viole en outre l'arrêté royal du 9 novembre 1978visé au moyen en refusant d'établir que cet arrêté royal déterminel'horaire complet et partant l'emploi à prestations complètes d'unaccompagnateur de musique dans un conservatoire royal au sens de l'article77 § 1^er, précité, visé au moyen, dont il constitue objectivement lamesure d'exécution prévue par cette disposition légale.
III. La décision de la Cour
Quant à la première branche :
Par son arrêt du 2 septembre 2005, la Cour a cassé, sur le pourvoi de ladéfenderesse, l'arrêt rendu le 13 novembre 2003 par la cour d'appel deMons au motif qu'en décidant que la règle anti-cumul contenue dans lesarticles 2 et 10, § 2, de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982modifiant les dispositions des statuts pécuniaires applicables aupersonnel enseignant et assimilé de l'enseignement de plein exercice et del'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit s'appliquait à ladéfenderesse, il avait violé l'article 1^er, alinéa 2, de cet arrêté, danssa version applicable au litige.
L'arrêt attaqué, qui refuse de soumettre la défenderesse à cette règleanti-cumul, est conforme à l'arrêt de la Cour du 2 septembre 2005.
En vertu de l'article 1119, alinéa 2, du Code judiciaire, aucun recours encassation n'est admis contre cette décision.
Le moyen, en cette branche, est dès lors irrecevable.
Quant à la seconde branche :
Aux termes de l'article 77, § 1^er, alinéa 2, de la loi du 24 décembre1976 relative aux propositions budgétaires 1976 - 1977, « si la notiond'emploi à prestations complètes dans l'enseignement n'est pas définie,elle est déterminée par le Roi par comparaison avec un enseignement deplein exercice correspondant (…) ».
L'arrêt constate que deux arrêtés royaux du 15 décembre 1978 et du 8 août1984 contenaient une définition des prestations complètes de diversesfonctions dans l'enseignement, mais que le premier a été abrogé par lesecond et que le second a été considéré comme illégal par un arrêt de laCour du 7 octobre 1984.
Il énonce ensuite que l'arrêté royal du 9 novembre 1978 fixant au 1^eravril 1972 les échelles de traitement des membres du personnel directeuret enseignant et du personnel auxiliaire d'éducation des établissementsd'enseignement artistique de plein exercice de l'État, relevant duministre de la Culture néerlandaise et du ministre de la Culturefrançaise, ainsi que des membres du personnel du service d'inspectionchargé de la surveillance des établissements d'enseignement artistiquedétermine l'horaire de base des professeurs de musique et que l'article 13de l'arrêté royal du 25 juin 1973 fixant les conditions d'admission desélèves et la durée des cours dans les conservatoires royaux de musiquepermet d'imposer des heures complémentaires aux professeurs chargés decertains cours, jusqu'à concurrence de six heures par semaine, de sorteque l'horaire complet des professeurs concernés s'établit alors à 12heures par semaine.
L'arrêt, qui décide qu' « il n'est pas démontré que cette notion d'horairecomplet se confondrait avec celle d'emploi à prestations complètesrequises pour la mise en œuvre de l'article 77, § 1^er, de la loi […] du24 décembre 1976 », considère dès lors que le Roi n'a pas, en adoptant lesarrêtés royaux des 9 novembre 1978 et 25 juin 1973, défini la notiond'emploi à prestations complètes et que cette notion ne peut êtreconfondue avec celle d'horaire complet.
Il ajoute que si les deux coïncidaient, « le Roi n'aurait pas éprouvé lanécessité d'adopter les arrêtés royaux des 15 décembre 1978 et 8 août 1984[…] aux côtés de [l']arrêté royal du 9 novembre 1978 ».
Par ces considérations, l'arrêt justifie légalement sa décision decondamner la demanderesse au paiement des traitements etsubventions-traitements dus à la défenderesse pour ses prestations dansles académies de musique de B. et de S.-G. et à la restitution de la sommede 670,73 euros à la défenderesse.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de cinq cent trente-huit euros dix-huitcentimes envers la partie demanderesse et à la somme de deux centquatre-vingt-neuf euros deux centimes envers la partie défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président de section Paul Mathieu, les conseillers DidierBatselé, Albert Fettweis, Sylviane Velu et Martine Regout, et prononcé enaudience publique du dix février deux mille onze par le président desection Paul Mathieu, en présence de l'avocat général André Henkes, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | M. Regout | S. Velu |
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| A. Fettweis | D. Batselé | P. Mathieu |
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10 FEVRIER 2011 C.09.0406.F/2