Cour de cassation de Belgique
Arret
2198
NDEG P.11.2083.F
M. J-M.
prevenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maitre Christophe Delait, avocat au barreau d'Arlon,
contre
A. J-L., fonctionnaire delegue de la direction de l'urbanisme et del'amenagement du territoire pour la province de Luxembourg, dont lesbureaux sont etablis à Arlon, place des Chasseurs Ardennais, 4,
partie intervenue volontairement,
defendeur en cassation,
represente par Maitre Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation.
I. la procedure devant la cour
Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 8 novembre 2011 par la courd'appel de Liege, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.
Le president de section chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat general Damien Vandermeersch a conclu.
II. la decision de la cour
Sur le premier moyen :
Il est reproche à l'arret d'imputer l'infraction au demandeur malgrel'erreur qui en a altere le caractere conscient.
L'erreur est une cause de justification si tout homme raisonnable etprudent aurait pu la commettre en etant place dans les memes circonstancesque celles ou le prevenu s'est trouve.
L'erreur invincible profite à l'auteur de l'infraction à condition deporter sur un de ses elements essentiels.
Une autorisation delivree par l'autorite competente et qui paraitreguliere alors qu'elle ne l'est pas peut, nonobstant la presomption deconnaissance de la loi, creer la conviction erronee d'agir conformement àcelle-ci. L'acte accompli dans de telles conditions n'est alors paspunissable.
L'article 159 de la Constitution prescrit aux cours et tribunaux derefuser l'application d'un acte reglementaire ou administratif illegal. Ilne leur interdit pas, pour autant, d'allouer, s'il y a lieu, le beneficede l'erreur invincible à l'agent dans le chef duquel cet acte a cree desdroits.
Le demandeur s'est vu poursuivre pour la construction et le maintien d'unhangar sans permis d'urbanisme.
L'arret constate que le demandeur a beneficie d'un permis delivre par lacommune mais que cet acte administratif est illegal, d'une part, parcequ'il a ete delivre sans consultation du fonctionnaire delegue et, d'autrepart, parce qu'il est en contradiction avec le reglement communald'urbanisme quant aux materiaux de parement et de couverture.
Les juges d'appel ont rejete la defense deduite par le demandeur del'erreur invincible engendree par ce permis. L'arret s'en explique enconsiderant notamment que le demandeur, entrepreneur de travaux publics àla retraite, ne pouvait ni ignorer les prescriptions decretales relativesà l'obligation pour l'administration de recueillir l'avis dufonctionnaire delegue, ni les regles applicables en zone agricole quant àla construction.
L'arret releve egalement que le demandeur n'a pas depose de pland'architecte à l'appui de sa demande de permis, de sorte que des ledepart, la procedure qu'il avait engagee etait viciee et qu'il devait lesavoir.
Les considerations resumees ci-dessus ne justifient pas legalement ladecision.
La delivrance d'un permis respectant la procedure de consultation et lereglement d'urbanisme releve du pouvoir de l'administration, en manieretelle que le titulaire du permis ne saurait etre tenu pour responsable desmanquements commis par elle.
L'article 159 de la Constitution est denue d'incidence sur l'appreciationdu caractere invincible de l'erreur induite par l'acte administratifillegal.
La presomption de connaissance de la loi ne permet pas d'affirmer que touthomme normalement raisonnable et prudent se serait aperc,u desillegalites, imputables à l'administration, dont le permis etait entache.
L'arret ne constate pas que l'irregularite soit telle que le demandeuraurait du raisonnablement tenir l'acte pour inexistant.
Le moyen est fonde.
Il n'y a pas lieu d'examiner le second moyen, qui ne saurait entrainer unecassation sans renvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arret attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;
Laisse les frais à charge de l'Etat ;
Renvoie la cause à la cour d'appel de Bruxelles.
Lesdits frais taxes à la somme de cent trente-neuf euros soixante-neufcentimes dus.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le chevalier Jean de Codt, president de section, president,Frederic Close, president de section, Benoit Dejemeppe, Pierre Cornelis etFranc,oise Roggen, conseillers, et prononce en audience publique duvingt-huit mars deux mille douze par le chevalier Jean de Codt, presidentde section, en presence de Damien Vandermeersch, avocat general, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
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| F. Gobert | F. Roggen | P. Cornelis |
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| B. Dejemeppe | F. Close | J. de Codt |
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28 MARS 2012 P.11.2083.F/4