Cour de cassation de Belgique
Arret
4653
NDEG F.12.0061.F
A. T.,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation, etMaitre Dominique Lambot, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Vilain XIIII, 17, ou il est fait election dedomicile,
contre
ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
defendeur en cassation,
represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 10 septembre2010 par la cour d'appel de Liege.
Le conseiller Gustave Steffens a fait rapport.
L'avocat general Andre Henkes a conclu.
II. Le moyen de cassation
Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :
Dispositions legales violees
Articles 31, specialement alinea 2, 4DEG, et 171, specialement 5DEG, a, duCode des impots sur les revenus tel que coordonne par l'arrete royal du
10 avril 1992 et confirme par la loi du 12 juin 1992
Decisions et motifs critiques
L'arret declare l'appel de l'Etat belge fonde et reforme le jugement dupremier juge aux motifs suivants :
« L'article 171, 5DEG, a, du Code des impots sur les revenus 1992prevoit la taxation des indemnites payees à la suite de la rupture d'uncontrat de travail d'un certain montant au taux moyen afferent àl'ensemble des revenus imposables de la derniere annee anterieure pendantlaquelle le contribuable à eu une activite professionnelle normale' ;
cette disposition tend à ce que le taux d'imposition de revenus qu'ilmentionne soit le plus proche possible de celui de la derniere anneeanterieure au cours de laquelle les revenus professionnels du contribuableresultaient de l'exercice d'une activite professionnelle normale (cf.Cass., 12.06.1992, Pas., 1992, I, p. 902 ; Cass., 17.01.2008, Pas.,p.138) ;
par ailleurs, une annee pendant laquelle une activite a ete exercee sansprocurer de revenus professionnels ne peut servir d'annee de referencepour le taux moyen d'imposition (cf. Cass., 17.01.2008, precite) ;
[le demandeur], qui fut pilote de ligne au service de la Sabena jusqu'ennovembre 2001 et à la faillite de cette societe, n'a exerce cetteactivite professionnelle que durant les trois derniers mois de l'annee2002 au service d'une compagnie aerienne italienne [...] et n'a exerceaucune activite professionnelle durant les 9 premiers mois de cetteannee ;
l'on ne peut dans ce contexte considerer qu'il a exerce au cours de cetteannee 2002 une activite professionnelle normale et il importe peu à cetegard qu'il ait neanmoins perc,u durant la periode pendant laquelle il n'apas exerce d'activite professionnelle des revenus professionnels deremplacement taxables globalement ;
ceux-ci se limitent du reste finalement au seul montant de 30 euros selonla derniere cotisation en supplement de l'exercice 2003 [...] qui tientcompte des remboursements d'allocations de chomage que [le demandeur] a dueffectuer ;
l'annee 2001 retenue par [le defendeur] au cours de laquelle [ledemandeur] a exerce son metier de pilote de ligne au service de la Sabenajusqu'au 7 novembre 2001 [...], soit durant l'essentiel de l'annee,correspond à une activite normale par rapport à l'annee 2002 ou [ledemandeur] n'a exerce son metier de pilote que durant trois mois et a etedemandeur d'emploi le reste de l'annee ;
pour l'annee 2003, [le demandeur] declare qu'il n'a exerce aucune activiteprofessionnelle [...] et c'est à juste titre que cette annee n'est pasprise en consideration par les parties ;
les parties ne soutiennent pas qu'une autre annee anterieure à 2004serait la derniere annee d'activite normale à prendre en consideration enl'espece et aucune piece relative à d'autres annees n'est d'ailleursversee aux debats ;
aussi est-ce à tort que [le demandeur] pretend que le taux moyen del'annee 2002 devrait etre retenu pour taxer distinctement l'indemnite dededit litigieuse en application de l'article 171, 5, a, du Code des impotssur les revenus 1992 et la cotisation litigieuse qui retient le tauxmoyen de l'annee 2001 sera confirmee ».
Griefs
Premiere branche
Les indemnites de dedit sont taxables au titre des revenus professionnelsen vertu de l'article 31, alinea 2, 3DEG, du Code des impots sur lesrevenus 1992. Selon l'article 171, 5DEG, a, du Code des impots sur lesrevenus 1992, ces indemnites de dedit sont taxables distinctement, au tauxmoyen afferent à l'ensemble des revenus imposables de la derniere anneeanterieure pendant laquelle le contribuable a eu une activiteprofessionnelle normale.
Par derniere annee anterieure pendant laquelle le contribuable a eu uneactivite professionnelle normale, il y a lieu d'entendre l'anneeanterieure la plus rapprochee de celle au cours de laquelle l'indemnite aete perc,ue, pendant laquelle l'interesse a recueilli, pendant douze mois,en Belgique ou à l'etranger, des revenus professionnels imposables(quelle que soit leur nature) qui ont ete soumis à l'impot des personnesphysiques aux taux d'imposition progressifs ou qui auraient ete imposes àcet impot, si l'interesse avait ete soumis à cet impot sur le montantdesdits revenus. Les revenus professionnels dont question, pourl'application de cette disposition, s'entendent des revenus lies àl'exercice d'une activite professionnelle mais aussi des indemnites etrevenus perc,us en remplacement de revenus professionnels, qui rentrentaussi dans la categorie des revenus professionnels en vertu de l'article31, specialement alinea 2, 3DEG et 4DEG, du Code des impots sur lesrevenus 1992. C'est, d'ailleurs, le point de vue exprime parl'administration des contributions directes dans son commentaireadministratif (Com. I.R.92, 171/324 et 171/325), ce que le demandeurrappelait, page 7 de ses conclusions de synthese d'appel. En d'autrestermes, il n'est pas requis qu'une activite professionnelle ait eteexercee du 1er janvier au 31 decembre de l'annee civile concernee pour quel'annee dont question puisse etre prise en consideration comme une anneed'activite professionnelle normale. Il faut que le contribuable aitperc,u, pour chacun des douze mois de l'annee consideree, des revenusprofessionnels imposables, en ce compris des revenus de remplacement oudes pensions, rentes, etc.
L'arret constate que le demandeur a perc,u, au cours de l'annee 2002, desrevenus de remplacement et des revenus lies à l'exercice d'une activitede pilote de ligne pour une societe italienne. Il n'est pas conteste parailleurs que les revenus dont question couvraient l'annee 2002 dans sonintegralite.
Il s'ensuit que l'arret n'a pu legalement decider que l'indemnite dededit, perc,ue par le demandeur au cours de l'annee 2004, devait etretaxee au taux moyen afferent à l'ensemble des revenus imposables del'annee 2001, des lors que l'annee à prendre en consideration comme etantla derniere annee anterieure pendant laquelle le contribuable a eu uneactivite professionnelle normale n'etait pas l'annee 2001, mais l'annee2002, soit la derniere annee anterieure pendant laquelle le demandeuravait perc,u des revenus professionnels (en ce compris des revenus deremplacement) couvrant les douze mois de l'annee (violation de l'article171, 5DEG, a, du Code des impots sur les revenus 1992 ainsi que del'article 31, specialement alinea 2, 4DEG, du meme code).
Deuxieme branche
Selon l'article 171, 5DEG, a, du Code des impots sur les revenus 1992, lesindemnites de dedit sont taxables distinctement, au taux moyen afferent àl'ensemble des revenus imposables de la derniere annee anterieure pendantlaquelle le contribuable a eu une activite professionnelle normale.
A supposer que la derniere annee anterieure pendant laquelle lecontribuable a eu une activite professionnelle normale au sens del'article 171, 5DEG, a, du Code des impots sur les revenus 1992 doive etreentendue comme etant la derniere annee civile, la plus rapprochee de cellede la perception de l'indemnite de dedit, pendant laquelle le contribuablea exerce, effectivement, une activite professionnelle, generatrice derevenus professionnels, pendant les douze mois, il ressort desconstatations de l'arret attaque que :
- durant l'annee 2002, le demandeur a exerce son metier de pilote duranttrois mois et a ete demandeur d'emploi le reste de l'annee ;
- durant l'annee 2001, le demandeur n'a exerce son metier de piloted'avion que jusqu'au 7 novembre 2001, soit seulement pendant une partie del'annee 2001 ;
Il s'ensuit que l'arret attaque n'a pas pu legalement decider quel'indemnite de dedit, perc,ue par le demandeur en 2004, devait etre taxeeau taux moyen afferent à l'ensemble des revenus imposables de l'annee2001, puisque le demandeur, selon les constatations memes de l'arretattaque, n'a pas exerce une activite professionnelle normale pendant lesdouze mois de l'annee 2001, de sorte que l'annee 2001 ne pouvait etreconsideree comme l'annee de reference pour la determination du tauxd'imposition des indemnites de dedit (violation de l'article 171, 5DEG, a,du Code des impots sur les revenus 1992).
III. La decision de la Cour
Sur le moyen :
Sur la premiere branche :
En vertu de l'article 171, 5DEG, a, du Code des impots sur les revenus1992, les indemnites, payees contractuellement ou non, ensuite de lacessation de travail ou de la rupture d'un contrat de travail, sont taxeesau taux moyen afferent à l'ensemble des revenus imposables de la derniereannee anterieure pendant laquelle le contribuable a eu une activiteprofessionnelle normale.
L'arret constate « que [le demandeur] qui fut pilote de ligne au servicede la SABENA jusqu'en novembre 2001, [date de] la faillite de cettesociete, n'a exerce cette activite professionnelle que durant les troisderniers mois de l'annee 2002 au service d'une compagnie aerienneitalienne et n'a exerce aucune activite professionnelle durant les 9premiers mois de cette annee ».
Sur la base de ces constatations, l'arret a pu considerer, sansmeconnaitre la notion d'activite professionnelle normale, que le demandeurn'a pas « exerce au cours de cette annee 2002 une activiteprofessionnelle normale et qu'il importe peu à cet egard qu'il aitneanmoins perc,u durant la periode pendant laquelle il n'a pas exerced'activite professionnelle des revenus professionnels de remplacementtaxables globalement ».
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Sur la seconde branche :
La decision suivant laquelle « la cotisation litigieuse qui retient letaux moyen de l'annee 2001 sera confirmee » est fondee sur le motif que« les parties ne soutiennent pas qu'une autre annee anterieure à 2004serait la derniere annee d'activite normale à prendre en consideration enl'espece et qu'aucune piece relative à d'autres annees n'est d'ailleursversee aux debats ».
Le moyen qui, en cette branche, ne critique pas cette motivation, nesaurait entrainer la cassation et, partant, est irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux depens.
Les depens taxes à la somme de quatre cent nonante-huit eurosseptante-cinq centimes envers la partie demanderesse et à la somme decent quatre-vingt-huit euros quarante-neuf centimes envers la partiedefenderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Gustave Steffens, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel,et prononce en audience publique du quatorze mars deux mille treize par lepresident de section Albert Fettweis, en presence de l'avocat generalAndre Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | S. Geubel | M.-Cl. Ernotte |
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| G. Steffens | M. Regout | A. Fettweis |
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14 MARS 2013 F.12.0061.F/9