Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG P.14.1221.F
I. BAM TECHNICS, societe anonyme, dont le siege est etabli àChaudfontaine, rue Joseph Dupont, 73,
prevenue et civilement responsable,
II. AMLIN CORPORATE INSURANCE, societe anonyme, dont le siege est etablià Saint-Josse-ten-Noode, boulevard Albert II, 9,
partie intervenue volontairement,
demanderesses en cassation,
representee par Maitre Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,
contre
1. LES ASSURANCES FEDERALES, association d'assurances mutuelles sur lavie, dont le siege est etabli à Bruxelles, rue de l'Etuve, 12,
2. P. B.
parties civiles,
defendeurs en cassation.
III. LES ASSURANCES FEDERALES, association d'assurances mutuelles sur lavie, mieux qualifiee ci-dessus,
partie civile,
demanderesse en cassation,
contre
1. BAM TECHNICS, societe anonyme, mieux qualifiee ci-dessus,
prevenue et civilement responsable,
2. AMLIN CORPORATE INSURANCE, societe anonyme, mieux qualifiee ci-dessus,
partie intervenue volontairement,
3. TRAVHYDRO IMMOBILIERE, societe anonyme, dont le siege est etabli àCharleroi (Marcinelle), avenue Emile Rousseaux, 40,
prevenue et civilement responsable,
4. CONTROLE INDUSTRIEL BELGE, societe anonyme, dont le siege est etabli àMons (Maisieres), rue des Pierres, 18B,
prevenue et civilement responsable,
defendeurs en cassation,
IV. TRAVHYDRO IMMOBILIERE, societe anonyme, mieux qualifiee ci-dessus,
prevenue et civilement responsable,
representee par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation,
contre
1. LES ASSURANCES FEDERALES, association d'assurances mutuelles sur lavie, mieux qualifiee ci-dessus,
2. P. B.
parties civiles,
defendeurs en cassation.
I. la procedure devant la cour
Les pourvois sont diriges contre un arret rendu le 11 juin 2014 par lacour d'appel de Mons, chambre correctionnelle.
Les deux premieres demanderesses invoquent deux moyens dans un memoireannexe au present arret, en copie certifiee conforme.
A l'audience du 18 fevrier 2015, le conseiller Gustave Steffens a faitrapport et l'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.
II. la decision de la cour
Les demanderesses appelees societes anonymes Travaux Galere et FortisCorporate Insurance dans l'arret attaque, s'identifient avec les societesanonymes Bam Technics et Amlin Corporate Insurance, ci-dessus designees.
A. Sur le pourvoi de la societe anonyme Bam Technics :
1. En tant que le pourvoi est dirige contre la decision de condamnationrendue sur l'action publique exercee à charge de la demanderesse :
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
Le moyen est pris de la violation des articles 13, 3DEG et 5DEG, del'arrete royal du 27 mars 1998 relatif à la politique du bien-etre destravailleurs lors de l'execution de leur travail et 81, 1DEG, de la loi du4 aout 1996 relative au bien-etre des travailleurs lors de l'execution deleur travail.
Ces dispositions sanctionnent les membres de la ligne hierarchiqueexecutant la politique de l'employeur dans l'exercice du controle effectifdes equipements de travail et de protection, et dans le controle de larepartition des taches.
Poursuivie sous la prevention B.1.3 pour avoir, en qualite d'auteur ou decoauteur, viole ces regles, la demanderesse soutient que sa responsabilitepenale ne pouvait etre engagee des lors que l'infraction visee àl'article 13, 3DEG et 5DEG, de l'arrete royal precite n'est imputablequ'aux membres de la ligne hierarchique qui executent la politique de leuremployeur.
Le transfert de la responsabilite penale de l'employeur sur ses preposesou mandataires ne prive toutefois pas le juge du pouvoir de constater que,concretement, l'employeur a commis, dans le cadre du controle precite, unefaute susceptible d'engager sa responsabilite penale.
L'arret enonce d'abord que la demanderesse est restee en defaut d'avoirpris les mesures idoines pour mettre fin aux manquements constates àtreize reprises par le coordinateur sante-securite et d'avoir verifie laconformite de l'echafaudage. Il considere ensuite qu'en sa qualited'entrepreneur principal charge de la construction du batiment oul'accident de travail s'est produit, la demanderesse n'a pas controle sila repartition des taches avait ete effectuee de sorte que celles-ci lesoient par des travailleurs ayant les competences necessaires et ayantrec,u la formation et les instructions requises à cet effet. Il releveencore que l'information que la demanderesse a donnee en debut de chantieretait insuffisante.
Par ces considerations, les juges d'appel ont legalement declare lademanderesse coupable de la prevention B.1.3.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Quant à la deuxieme branche :
La demanderesse reproche à l'arret de dire la prevention B.1.4 etabliesur la base de l'article 81, 1DEG, de la loi du 4 aout 1996 relative aubien-etre des travailleurs lors de l'execution de leur travail, alors queles comportements sanctionnes etaient vises par l'article 87, 5DEG et6DEG, de la meme loi.
L'article 81,1DEG precite punit l'employeur qui a enfreint lesdispositions de la presente loi et de ses arretes d'execution, sansprejudice de ce qui est prevu à l'article 87 de ladite loi qui recensedes infractions plus specifiques en les reprimant de maniere plus lourde.
Reprochant aux juges d'appel d'avoir applique une disposition generalemoins severe, le moyen est irrecevable à defaut d'interet.
Quant aux troisieme, quatrieme, cinquieme et sixieme branches reunies :
Le moyen critique la declaration de culpabilite de la demanderesse du chefdes preventions B.1.4 et B.1.5. Il reproche à l'arret de ne retenirqu'une infraction aux articles 23, 24, 25, 26 et 29, 3DEG, de la loi du 4aout 1996 ou à des dispositions du Reglement general sur la protection dutravail dont la legalite de l'application au cas d'espece est contestee.
Par adoption des motifs du premier juge, qui a lui-meme fait expressementapplication des dispositions visees à la citation, l'arret dit lespreventions etablies parce que ce comportement etait vise par les articlesvises du Reglement general sur la protection du travail, entre-tempsabroges mais applicables au moment des faits, et que ce comportement restepunissable sur la base des dispositions de l'arrete royal du 25 janvier2001 relatif aux chantiers temporaires ou mobiles, et specialement sonarticle 51.
Procedant d'une lecture incomplete de l'arret, le moyen manque en fait.
Quant à la septieme branche :
La demanderesse soutient qu'elle ne pouvait pas etre declaree coupable decoups ou blessures involontaires, prevention fondee sur celles visees sousB.1.3, B.1.4 et B.1.5, et qui n'ont pas ete legalement etablies.
Ayant legalement justifie leur decision relative aux preventions B.1.3,B.1.4 et B.1.5, les juges d'appel ont, sans violer les articles 418 et 420du Code penal, considere que ces faits constituaient la faute requise parces dispositions.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen soutient que l'arret ne peut, sans contradiction, enoncer qu'ilcondamne la demanderesse au minimum de la peine d'amende prevue par la loiet, statuant à l'unanimite de ses membres, porter à six mille euros lapeine d'amende de cinquante euros infligee par le premier juge.
Les juges d'appel ont condamne la demanderesse à une seule peine du chefde coups ou blessures involontaires et de diverses infractions aureglement general pour la protection du travail.
Plus severe que la peine prevue par l'article 399 du Code penal, la peineapplicable en l'espece est, non celle que prevoit l'article 128, alinea 2,du Code penal social, mais celle prevue par les dispositions de la loi quietait en vigueur à la date des faits, à savoir la loi du 4 aout 1996relative au bien-etre des travailleurs lors de l'execution de leurtravail.
Pour les infractions declarees etablies en l'espece, l'article 81 de laloi du 4 aout 1996 prevoyait la condamnation à une peine d'emprisonnementde huit jours à un an et/ou une peine d'amende minimum de cinquanteeuros.
Lorsque la peine privative de liberte est de moins d'un mois et s'exprimeen jours, l'article 41bis du Code penal ne prevoit, à l'egard de lapersonne morale, aucune multiplication du minimum de l'amende de 500euros, de sorte qu'en pareil cas, la peine appliquee est ce minimum, sansqu'il puisse etre inferieur au minimum de l'amende prevu pour le fait.
En l'espece, la peine minimale applicable à la societe demanderesse etaitde 500 euros, de sorte qu'il est contradictoire de lui infliger une amendede 6.000 euros apres avoir decide de ne la condamner qu'au minimum legal.
Dans cette mesure, le moyen est fonde.
Cette illegalite entraine la cassation de la peine et de la contributionau Fonds d'aide aux victimes d'actes intentionnels de violence mais restesans incidence sur la declaration de culpabilite.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est, sauf l'illegalite à censurer ci-apres,conforme à la loi.
2. En tant que le pourvoi est dirige contre les decisions qui, rendues surles actions civiles exercees par les defendeurs contre la demanderesse,statuent sur
a. le principe de la responsabilite :
La demanderesse ne fait valoir aucun moyen specifique.
b. l'etendue des dommages :
L'arret alloue des indemnites provisionnelles aux defendeurs, reserve àstatuer sur le surplus des demandes, rouvre les debats et renvoie la causesine die.
Pareilles decisions ne sont pas definitives au sens de l'article 416,alinea 1er, du Code d'instruction criminelle, dans sa version applicableà la cause, et sont etrangeres aux cas vises par le second alinea de cetarticle.
Le pourvoi est irrecevable.
B. Sur le pourvoi de la societe anonyme Amlin Corporate Insurance :
1. En tant que le pourvoi est dirige contre la decision qui statue sur leprincipe de la responsabilite :
La demanderesse ne fait valoir aucun moyen.
2. En tant que le pourvoi est dirige contre les decisions qui statuent surl'etendue des dommages :
Pour le motif mentionne ci-dessus sous A.2.b, le pourvoi est irrecevable.
C. Sur le pourvoi de la societe anonyme Les Assurances federales :
1. En tant que le pourvoi est dirige contre la decision qui statue sur leprincipe de la responsabilite :
La demanderesse ne fait valoir aucun moyen.
2. En tant que le pourvoi est dirige contre la decision qui statue surl'etendue du dommage :
Pour le motif mentionne ci-dessus sous A.2.b, le pourvoi est irrecevable.
D. Sur le pourvoi de la societe anonyme Travhydro :
1. En tant que le pourvoi est dirige contre la decision de condamnationrendue sur l'action publique exercee à charge de la demanderesse :
Sur le moyen pris, d'office, de la violation de l'article 149 de laConstitution :
Pour les motifs mentionnes en reponse au second moyen de la societeanonyme Bam Technics, il est contradictoire d'infliger à la demanderesseune amende de 6.000 euros apres avoir enonce qu'il y avait lieu de lacondamner au minimum de l'amende prevue par la loi.
Cette illegalite entraine la cassation de la peine et de la contributionau Fonds d'aide aux victimes d'actes intentionnels de violence mais restesans incidence sur la declaration de culpabilite.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est, sauf l'illegalite à censurer ci-apres,conforme à la loi.
2. En tant que le pourvoi est dirige contre les decisions qui, rendues surles actions civiles exercees par les defendeurs contre la demanderesse,statuent sur
a. le principe de la responsabilite :
La demanderesse ne fait valoir aucun moyen.
b. l'etendue des dommages :
La demanderesse se desiste de son pourvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Decrete le desistement du pourvoi de la societe anonyme Travhydro en tantqu'il est dirige contre les decisions qui statuent sur l'etendue desdommages des defendeurs societe anonyme Les Assurances federales et B P ;
Casse l'arret attaque en tant qu'il statue sur la peine infligee àchacune des societes anonymes Bam Technics et Travhydro ainsi que sur leurcontribution au Fonds d'aide aux victimes d'actes intentionnels deviolence ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;
Condamne chacune des demanderesses societes anonymes Bam Technics etTravhydro à la moitie des frais de son pourvoi et laisse l'autre moitieà charge de l'Etat ;
Condamne chacun des autres demandeurs aux frais de son pourvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitee, à la cour d'appel de Liege.
Lesdits frais taxes en totalite à la somme de quatre cent cinquante-septeuros nonante-six centimes dont I) sur le pourvoi de la societe anonymeBam Technics : cent soixante-trois euros treize centimes dus ; II) sur lepourvoi de la societe anonyme Amlin Corporate Insurance : centvingt-quatre euros soixante-trois centimes dus et trente-cinq euros payespar cette demanderesse ; III) sur le pourvoi de la societe anonymeAssurances Federales : trente euros quatre-vingt-cinq centimes dus ettrente-cinq euros payes par cette demanderesse et IV) sur le pourvoi de lasociete anonyme Travhydro Immobiliere : soixante-neuf euros trente-cinqcentimes dus.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Frederic Close, president de section, Benoit Dejemeppe, PierreCornelis, Gustave Steffens et Franc,oise Roggen, conseillers, et prononceen audience publique du quatre mars deux mille quinze par Frederic Close,president de section, en presence de Michel Palumbo, avocat generaldelegue, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.
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| T. Fenaux | F. Roggen | G. Steffens |
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| P. Cornelis | B. Dejemeppe | F. Close |
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4 MARS 2015 P.14.1221.F/2