N° P.17.0058.N
I. Y. K.,
Me Bart Verbelen, avocat au barreau d'Anvers,
II. A. A.,
Me Mounir Souidi, avocat au barreau d'Anvers,
III. H. I. A.,
Me Tim Smet, avocat au barreau d'Anvers, Turnhout et Malines,
IV. 1. M. H.,
2. A. A.O.,
Me Mounir Souidi, avocat au barreau d'Anvers,
prévenus,
demandeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 22 décembre 2016 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
Le demandeur II invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Les autres demandeurs ne présentent aucun moyen.
Le conseiller Antoine Lievens a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
(...)
Sur le moyen :
2. Le moyen est pris de la violation de l'article 324ter, § 1er, du Code pénal : l'arrêt considère, à tort, à la lumière des faits qu'il constate, que le demandeur II savait qu'il appartenait à une organisation utilisant les méthodes visées par la disposition légale précitée et qu'ainsi, il faisait sciemment et volontairement partie d'une organisation criminelle.
3. L'article 324ter, § 1er, du Code pénal dispose : « Lorsque l'organisation criminelle utilise l'intimidation, la menace, la violence, des manœuvres frauduleuses ou la corruption ou recourt à des structures commerciales ou autres pour dissimuler ou faciliter la réalisation des infractions, toute personne qui, sciemment et volontairement, en fait partie, est punie d'un emprisonnement d'un an à trois ans et d'une amende de cent euros à cinq mille euros ou d'une de ces peines seulement, même si elle n'a pas l'intention de commettre une infraction dans le cadre de cette organisation ni de s'y associer d'une des manières prévues par les articles 66 à 69 ».
4. Les termes « sciemment et volontairement » impliquent que la personne qui se contente d'appartenir à une organisation criminelle ne peut être poursuivie si elle ignore que cette organisation utilise les méthodes visées à l'article 324ter du Code pénal.
5. L'arrêt constate que :
- toutes les réservations de vols par le demandeur II, pour le compte des coprévenus ou d'autres personnes, étaient effectuées ouvertement, relevaient de son core business et figuraient dans la comptabilité ;
- il réservait des vols pour des personnes qui ne disposaient pas d'une carte de crédit ;
- ces personnes le payaient en liquide et il comptait une commission de 15 euros ;
- les réservations auprès de compagnies aériennes anglophones ont été faites par le co-gérant W.M. parce que le demandeur II ne comprend pas l'anglais ;
- en effet, il a réservé un vol par l'intermédiaire de son magasin pour le compte de S.R., au moyen du passeport de ce dernier sans que le demandeur II soit présent au magasin, et les vols d'A.S. ont également été réservés par l'intermédiaire de son magasin ;
- le contrat de location avec T.A.S. a été officiellement enregistré mais qu'il ressort clairement d'une conversation interceptée entre le demandeur II et T.A.S. qu'une adresse d'inscription était nécessaire à T.A.S. pour pouvoir bénéficier de l'aide du CPAS ;
- le demandeur II savait qu'il fournissait des services à une organisation impliquée dans la traite des êtres humains, ce que confirment les écoutes de conversations en langage codé ;
- le demandeur IV.1 semble avoir proposé les services du demandeur II à des tiers, dans le but d'obtenir des contrats de travail falsifiés ;
- ces documents étaient nécessaires pour obtenir un regroupement familial, ce qui ressort indéniablement des conversations interceptées.
Par ces motifs, l'arrêt considère légalement que le demandeur II savait que l'organisation criminelle à laquelle il appartenait utilisait les méthodes visées à l'article 324ter du Code pénal, à savoir la mise à disposition d'une adresse, la réservation de vols par l'intermédiaire de son magasin et l'offre de services afin d'obtenir des contrats de travail falsifiés.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d'office
5. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et les décisions sont conformes à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette les pourvois ;
Condamne chacun des demandeurs aux frais de son pourvoi.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Paul Maffei, président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Erwin Francis et Ilse Couwenberg, conseillers, et prononcé en audience publique du neuf janvier deux mille dix-huit par le président Paul Maffei, en présence de l'avocat général délégué Alain Winants, avec l'assistance du greffier Frank Adriaensen.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Michel Lemal et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.
Le greffier, Le conseiller,