N° P.19.0732.N
D. R.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
Mes Eline Tritsmans et Louis De Groote, avocats au barreau de Gand.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 5 juillet 2019 par la cour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation de l'article 23, 4°, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive : en se contentant de renvoyer aux éléments contenus dans le mandat d'arrêt et en motivant sa décision par le fait que l'interprétation que le demandeur donne aux faits est sans incidence sur les indices sérieux de culpabilité, l'arrêt ne répond pas à la défense du demandeur soutenant qu'il n'existe pas d'indices sérieux de culpabilité pour les faits qui lui sont reprochés ou que ces faits ne sont pas constitutifs d'infractions.
2. La juridiction d'instruction appelée à statuer dans un bref délai sur le maintien de la détention préventive n'est pas tenue de répondre dans le détail à la défense de l'inculpé et doit préciser (1) les éléments requis par l'article 23, 4°, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive.
3. Par adoption des motifs du mandat d'arrêt, l'arrêt énonce les éléments révélant les indices sérieux de culpabilité à charge du demandeur. Il résulte également de ces motifs que les faits reprochés au demandeur, s'ils sont établis, sont susceptibles de constituer des infractions. Pour le surplus, l'arrêt rejette la défense du demandeur, qui repose sur le soutènement contraire. Ainsi, il répond à cette défense et satisfait aux conditions prescrites à l'article 23, 4°, de la loi du 20 juillet 1990.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
4. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : en raison du défaut de motivation allégué au moyen, en sa première branche, la chambre des mises en accusation n'a pas soumis la détention du demandeur à un véritable contrôle légal et a violé ses droits de défense.
5. Entièrement déduit de l'illégalité vainement invoquée au moyen, en sa première branche, le moyen, en cette branche, est irrecevable.
Sur le second moyen :
6. Le moyen est pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 21, § 3, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense : ni le demandeur ni son conseil ne se sont vu offrir la possibilité de numériser le dossier répressif par leurs propres moyens en vue d'opposer une défense ; l'arrêt ne remédie pas à cette illégalité en levant le mandat d'arrêt.
7. L'article 21, § 3, alinéa 1er, de la loi du 20 juillet 1990, telle qu'il a été modifié par l'article 156 de la loi du 5 mai 2019 portant dispositions diverses en matière d'informatisation de la justice, de modernisation du statut des juges consulaires et relativement à la banque des actes notariés, publiée au Moniteur belge du 19 juin 2019 et entrée en vigueur le 29 juin 2019, dispose :
« § 3. Le dossier est mis à la disposition de l'inculpé et de son conseil pendant le dernier jour ouvrable avant la comparution. La consultation du dossier implique que l'inculpé ou son avocat peuvent eux-mêmes et par leurs propres moyens, en prendre une copie gratuitement, sur place. Le juge d'instruction peut toutefois, de manière motivée, interdire la prise de copie du dossier ou de certaines pièces si les nécessités de l'instruction le requièrent, ou si cette prise de copie présente un danger pour les personnes ou porte gravement atteinte à leur vie privée. »
8. D'une part, les articles 5 et 6 de la Convention ne requièrent pas que l'inculpé reçoive une copie du dossier de la détention préventive. D'autre part, l'article 21, § 3, deuxième et troisième phrases, de la loi du 20 juillet 1990 n'est pas prescrit à peine de nullité. Par conséquent, la juridiction d'instruction ne peut lever la détention préventive que si elle constate que l'impossibilité de prendre copie a irrémédiablement porté atteinte aux droits de défense de l'inculpé.
Dans la mesure où il procède d'une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
9. L'arrêt considère que : « Il n'y a pas violation des articles 5 et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ressort de l'attestation établie le 4 juillet 2019 que l'inculpé a expressément déclaré avoir pleine connaissance du dossier répressif, si bien qu'il était en état de présenter sa défense. Ses avocats, qui lui ont prêté assistance dès son audition, ont également pu prendre connaissance du dossier complet, comme le révèlent d'ailleurs les conclusions. Le simple fait qu'ils auraient été dans l'impossibilité de numériser le dossier est sans incidence à cet égard. L'égalité des armes a dès lors été respectée. » Ainsi, la décision est légalement justifiée.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d'office
10. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, chambre des vacations, à Bruxelles, où siégeaient Beatrijs Deconinck, premier président, Erwin Francis, Sabine Geubel, Eric de Formanoir et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du dix-sept juillet deux mille dix-neuf par Beatrijs Deconinck, premier président, en présence de l'avocat général Michel Nolet de Brauwere, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric de Formanoir et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.
(1) Lire: ni de préciser dans le détail