N° P.21.0665.F
B.K.,
personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt européen,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Pauline Delgrange, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Saint-Josse-ten-Noode, chaussée de Haecht, 55, où il est fait élection de domicile.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 30 avril 2021, par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, statuant comme juridiction de renvoi ensuite d'un arrêt de la Cour du 20 janvier 2021.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
Le moyen invoque notamment la violation des articles 7, 16 et 17 de la loi du 19 décembre 2003 relative au mandat d'arrêt européen et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Selon le moyen, pour rejeter la cause de refus d'exécution du mandat d'arrêt européen visant le demandeur, qu'il avait invoquée parce qu'il n'avait pas comparu en personne au procès qui a mené à son jugement par défaut, les juges d'appel n'ont pas légalement constaté que les conditions prévues à l'article 7, § 1er, 1°, de la loi du 19 décembre 2003 étaient réunies. Selon lui, des éléments portés à la connaissance de la chambre des mises en accusation par l'autorité d'émission du mandat d'arrêt européen et repris à l'arrêt attaqué, les juges d'appel n'ont pu déduire, d'une part, que le demandeur avait été informé officiellement et effectivement de la date et du lieu fixés pour ce procès, et, d'autre part, qu'il avait été informé qu'une décision allait pouvoir être prise à son issue en cas de non-comparution personnelle.
L'article 7, § 1er, 1°, de la loi précitée, introduit par l'article 80 de la loi du 25 avril 2014 portant des dispositions diverses en matière de Justice, transpose en droit belge l'article 4bis, § 1er, a, de la décision-cadre 2002/584 du Conseil, du 13 juin 2002, modifiée, relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres. Cette dernière disposition prévoit que, lorsque la personne recherchée n'a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision, il doit malgré tout être passé outre, dans l'Etat d'exécution, au refus facultatif de l'exécution du mandat d'arrêt européen si l'intéressé a soit été cité à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour le procès, soit été informé officiellement et effectivement par d'autres moyens de ces modalités, de telle sorte qu'il a été établi de manière non équivoque qu'il a eu connaissance du procès prévu. Dans ces hypothèses, il est en outre requis que cette information ait été donnée en temps utile et qu'elle ait inclus la précision qu'une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution.
Le respect des conditions visées à cette disposition et à l'article 7, § 1er, 1°, de la loi qui en assure la transposition est de nature à garantir que la personne recherchée a reçu suffisamment tôt l'information relative à la date et au lieu de son procès, ainsi que quant aux conséquences d'une éventuelle non-comparution. Il permet ainsi à l'autorité d'exécution de considérer que les droits de la défense ont été respectés.
Eu égard au libellé de l'article 4bis, § 1er, a), i), de la décision-cadre 2002/584 du Conseil du 13 juin 2002 selon lequel il doit être établi de manière non équivoque que la personne recherchée « a eu connaissance du procès prévu », la circonstance qu'une citation a été remise à un tiers, fût-il son avocat qui l'a ensuite représentée, ne saurait, à elle seule, satisfaire à ces exigences. Une telle modalité ne permet en effet d'établir sans équivoque ni le fait que l'intéressé a « effectivement » reçu l'information relative à la date et au lieu de son procès, ni, le cas échéant, le moment précis de cette réception, ni le contenu de l'information communiquée, quant aux conséquences de la non-comparution.
Pour rejeter la défense du demandeur, condamné par défaut, selon laquelle le mandat d'arrêt européen ne contenait aucune des indications prévues par l'article 7, § 1er, 1°, de la loi du 19 décembre 2003, de sorte qu'il y avait lieu d'envisager d'en refuser l'exécution, les juges d'appel ont respectivement énoncé que l'intéressé avait fait élection de domicile au cabinet de son avocat, que le jugement portant sa condamnation avait été rendu en présence de ce conseil ou du remplaçant de celui-ci, soit une circonstance que ne contredit pas le mandat d'arrêt européen, et que ce jugement était intervenu à la suite d'une décision de renvoi prise par la chambre du conseil du tribunal de Mantoue, devant laquelle le demandeur avait été représenté.
D'aucune de ces considérations, les juges d'appel n'ont pu légalement inférer que le demandeur avait été effectivement informé, en temps utile, d'une procédure le visant et susceptible de mener à sa condamnation, nonobstant sa non-comparution.
Le moyen est fondé.
Il n'y a pas lieu d'avoir égard au surplus du moyen, qui ne saurait entraîner une cassation sans renvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;
Réserve les frais pour qu'il soit statué sur ceux-ci par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, autrement composée.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-six mai deux mille vingt et un par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.