N° P.22.1006.F
S.C.,
prévenu, détenu sous surveillance électronique,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Julie Crowet et Jonathan De Taye, avocats au barreau Bruxelles, et Jocelyn De Roeck, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Molenbeek-Saint-Jean, rue de l’Indépendance, 66-68, où il est fait élection de domicile,
contre
M. A.-M.,
partie civile,
défenderesse en cassation.
I. LA PROCEDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 30 juin 2022 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l’action publique :
Sur le premier moyen :
Pris de la violation de l’article 2 du Code pénal et de la méconnaissance du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale, le moyen reproche à la cour d’appel d’avoir invité le demandeur à se défendre du chef de l’infraction de viol visée à l’article 417/11 du Code pénal, et ainsi, d’avoir appliqué cette disposition légale, alors qu’elle est entrée en vigueur après les faits, qu’elle a un champ d’application plus large que celui de l’ancien article 375 du Code pénal et est partant plus sévère, et que, en outre, elle a aggravé la peine.
Lorsque le fait imputé au prévenu est incriminé par une loi abrogée au temps du jugement, le juge ne peut déclarer l’infraction établie que s’il constate que le fait punissable sous l’ancienne loi le demeure en application de la nouvelle loi.
L’arrêt relève que la loi du 21 mars 2022 modifiant le Code pénal en ce qui concerne le droit pénal sexuel a abrogé l’article 375 du Code pénal, que cette loi est entrée en vigueur le 1er juin 2022 et que, depuis cette date, le fait repris à la prévention B, en l’occurrence le viol qui aurait été commis sur la personne de la défenderesse au cours de la nuit du 24 au 25 octobre 2021, est demeuré punissable sur la base de l’article 417/11 du Code pénal. Cet article a été inséré dans le Code pénal par l’article 12 de la loi précitée du 21 mars 2022.
Dès lors que la cour d’appel avait constaté que le comportement reproché au demandeur était incriminé par une loi abrogée au moment de sa décision et qu’il était demeuré punissable en vertu de la loi nouvelle entrée en vigueur au moment de l’abrogation de la loi ancienne, elle devait, pour déclarer la prévention établie, appliquer la nouvelle loi.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
En vertu de l’article 2, alinéa 2, du Code pénal, si la peine établie au temps du jugement diffère de celle qui était portée au temps de l'infraction, la peine la moins forte sera appliquée.
La cour d’appel a constaté, en ce qui concerne l’emprisonnement, que la peine prévue par la loi du 21 mars 2022, précitée, est plus sévère que celle que prévoyait l’article 375, alinéa 3, du Code pénal. Les juges d’appel ont également relevé que l’article 417/59, § 1er, du Code pénal, qui a été inséré dans ce code par l’article 69 de ladite loi du 21 mars 2022, prévoit la même peine d’interdiction que celle qui était comminée par l’article 378 du Code pénal.
En ayant déterminé la peine d’emprisonnement infligée au demandeur en fonction de la peine prévue par l’ancien article 375, alinéa 3, du Code pénal, et en ayant fondé la condamnation à l’interdiction des droits visés à l’article 31, alinéa 1er, du Code pénal sur le nouvel article 417/59, § 1er, de ce code, les juges d’appel ont fait un exacte application de la disposition légale et du principe invoqués au moyen.
A cet égard également, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen invoque la violation de la foi due aux actes et des articles 54, 55, 55bis, 56 et 57 du Code pénal, ainsi que la méconnaissance du principe général du droit relatif à la motivation des décisions judiciaires : l’arrêt constate que la copie du jugement du tribunal correctionnel de Bruxelles du 30 octobre 2018 mentionne que cette décision est coulée en force de chose jugée et, sur le fondement de cette constatation, décide que le demandeur a commis les infractions en état de récidive, alors qu’aucune décision portant la mention qu’elle est passée en force de chose jugée n’est déposée au dossier.
Pour constater que le demandeur a commis les faits en état de récidive légale, l’arrêt se réfère à la copie certifiée conforme du jugement prononcé le 30 octobre 2018 par le tribunal correctionnel de Bruxelles, et il constate que cette décision est coulée en force de chose jugée.
Contrairement à ce que le moyen affirme, le dossier soumis à la cour d’appel contient une copie certifiée conforme du jugement précité, revêtue de la mention authentique selon laquelle la décision est coulée en force de chose jugée. Cette pièce est enliassée sous le numéro 8 de l’inventaire du dossier du tribunal de première instance du Brabant wallon.
Le moyen manque en fait.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l’action civile :
Le demandeur n’invoque aucun moyen spécifique.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de cent vingt-trois euros quatre-vingt-un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, Eric de Formanoir, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du dix-neuf octobre deux mille vingt-deux par Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.