N° S.23.0033.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre de l’Économie et du Travail, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue Ducale, 61, agissant par la direction générale de l’humanisation du travail, dont les bureaux sont établis à Anderlecht, rue Ernest Blerot, 1,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile,
contre
LEM INTÉRIM, société anonyme, dont le siège est établi à Liège (Grivegnée), boulevard de Froidmont, 9, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0445.252.566,
défenderesse en cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 15 février 2023 par la cour du travail de Liège.
Le 5 décembre 2023, l’avocat général Hugo Mormont a déposé des conclusions au greffe.
Le président de section Christian Storck a fait rapport et l’avocat général Hugo Mormont a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Aux termes de l’article 69, alinéa 1er, du Code pénal social, les infractions punies d’une sanction de niveau 1 visées au livre 2 peuvent donner lieu, à l’initiative de l’administration compétente, à une amende administrative, à une déclaration de culpabilité ou à un classement sans suite.
L’alinéa 2 de cet article poursuit que l’administration dispose des mêmes pouvoirs lorsque le ministère public renonce à poursuivre l’auteur d’une infraction punie d’une sanction de niveau 2, 3 ou 4 visée au livre 2.
L’article 83 du même code dispose que, si la durée des poursuites par l’administration dépasse le délai raisonnable, celle-ci peut se limiter à une simple déclaration de culpabilité ou infliger une amende administrative inférieure au minimum prévu par la loi.
Il suit de la combinaison de ces dispositions qu’une sanction limitée à une déclaration de culpabilité ne peut, dans le cadre d’une poursuite administrative, être infligée à l’auteur d’une infraction qu’en cas de dépassement du délai raisonnable.
L’arrêt constate que la défenderesse a commis une infraction qui a donné lieu à une poursuite administrative et que le premier juge a réduit la sanction qui lui a été infligée à une déclaration de culpabilité au motif que la durée des poursuites par l’administration a dépassé le délai raisonnable.
Il considère que la cour du travail peut « confirmer le jugement [entrepris] […] sur la base de motifs propres qui ne sont pas exclusivement liés à l’écoulement d’un certain délai », que « la simple déclaration de culpabilité est en l’espèce la sanction adéquate au regard de l’ensemble des faits de la cause, dont le délai mis par [l’administration] à prendre une décision », et qu’il « n’est donc pas nécessaire à la solution du litige, qui repose sur l’article 69 du Code de droit pénal social », de « trancher la question de la prise de cours du délai raisonnable au sens de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales », que contestait le demandeur.
En confirmant la déclaration de culpabilité prononcée par le premier juge sans constater de dépassement du délai raisonnable, l’arrêt viole les dispositions légales précitées.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué, sauf en tant qu’il reçoit l’appel ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Ariane Jacquemin et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du quinze janvier deux mille vingt-quatre par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Hugo Mormont, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.