N° C.21.0470.F
C. C.,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Daniel Garabedian, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Bonté, 5, où il est fait élection de domicile,
contre
A. P.,
défendeur en cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 22 septembre 2020 par la cour d’appel de Liège.
Le conseiller Ariane Jacquemin a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
En vertu de l’article 27, alinéas 1er et 2, du décret de la Communauté française du 18 janvier 2018 portant le Code de la prévention, de l’aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse, l’enfant, sa famille et ceux de ses familiers qui sont concernés par la mesure ainsi que leur avocat peuvent prendre connaissance de toutes les pièces du dossier du conseiller de l’aide à la jeunesse, selon les modalités prévues par le gouvernement, à l’exception des pièces portant la mention « confidentiel » communiquées au conseiller par les autorités judiciaires ; toutefois, le conseiller peut refuser la consultation ou la communication d’une ou plusieurs pièces du dossier si l’intérêt de l’enfant l’exige.
L’alinéa 5 de cet article dispose que toute copie d’une pièce du dossier mentionne qu’elle ne peut être communiquée que dans le respect des alinéas 1er et 2 et qu’elle ne peut être utilisée dans aucune autre procédure que celle qui est relative à la mesure d’aide qui fait l’objet du dossier dont elle est extraite.
Aux termes de l’article 3.1 de la Convention de New York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant, dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.
La primauté d’une norme internationale sur des dispositions de droit interne suppose que la norme internationale soit dotée d’un effet direct.
Pour bénéficier de l’effet direct, la norme d’une convention internationale doit être suffisamment précise et complète.
L’article 3.1 de la convention précitée n’est, en soi, pas suffisamment précis et complet pour avoir un effet direct dès lors qu’il laisse à l’État plusieurs possibilités de satisfaire aux exigences de l’intérêt de l’enfant. Il ne peut servir de source de droits subjectifs et d’obligations dans le chef des particuliers.
L’arrêt, qui, pour refuser d’écarter des pièces extraites du dossier du conseiller de l’aide à la jeunesse que le défendeur veut utiliser dans une procédure autre que celle relative à la mesure d’aide faisant l’objet de ce dossier, considère que « l’article 3.1 de la convention relative aux droits de l’enfant [est une] norme supranationale qui prime la norme décrétale » précitée et qu’« il appartient [au juge] de statuer en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant », viole l’article 27, alinéa 5, du décret du 18 janvier 2018.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d’appel de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Ariane Jacquemin et Simon Claisse, et prononcé en audience publique du vingt-six janvier deux mille vingt-quatre par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.