N° P.23.1741.F
D. Th.,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Chloé Fricke, avocat au barreau de Mons.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 22 novembre 2023 par la cour d’appel de Mons, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen pris, d’office, de la violation de l’article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :
Le demandeur a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel du Hainaut rendu par défaut. La signification de ce jugement a été faite à domicile. Le jugement entrepris dit l’opposition du demandeur tardive et, partant, irrecevable. L’arrêt attaqué confirme le jugement.
En vertu de l’article 187, § 1er, du Code d’instruction criminelle, le condamné peut faire opposition au jugement dans les quinze jours qui suivent celui où il aura eu connaissance de la signification, lorsque celle-ci n’a pas été faite à personne ; s’il n’est pas établi qu’il a eu connaissance de la signification, le condamné par défaut pourra faire opposition jusqu’à l’expiration des délais de prescription de la peine.
Le délai extraordinaire d’opposition ne court pas si la signification de la décision rendue par défaut n’est pas régulière. A cet égard, l’article 6.1 de la Convention impose que la signification mentionne le droit de former opposition ainsi que le délai imparti pour l’exercer.
Par ailleurs, le juge apprécie souverainement en fait si l’opposant avait connaissance de la signification de la décision rendue par défaut, la Cour vérifiant s’il n’a pas déduit de ses constatations des conséquences qu’elles ne sauraient justifier.
Selon les juges d’appel, en signant le 21 janvier 2023 un formulaire que lui avait présenté un agent de police, l’informant du fait que la signification du jugement précité avait eu lieu, le demandeur a reconnu avoir pris connaissance à cette date de ladite signification. L’arrêt ajoute que la connaissance par le prévenu de la signification du jugement rendu par défaut suffit à faire courir le délai d’opposition et qu’il n’est pas requis que la démonstration soit faite de la circonstance que l’intéressé a reçu la copie de l’exploit de signification. L’arrêt en conclut que, formée le 26 avril 2023, l’opposition est tardive.
De la seule circonstance qu’à la demande du ministère public, la police a informé le prévenu du fait que la signification du jugement l’ayant condamné par défaut avait eu lieu précédemment, sans qu’il soit constaté qu’à l’occasion de cette démarche de la police, l’intéressé soit a reçu la copie de cet acte précisant les formes et délais à observer en vue de former opposition, soit a été autrement informé de ces formes et délais, les juges d’appel n’ont pu déduire que l’opposition était tardive.
L’arrêt viole l’article 6.1 de la Convention.
Et il n’y a pas lieu d’avoir égard aux moyens du demandeur, qui ne sont pas susceptibles d’entraîner une cassation dans des termes différents de ceux du dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les frais pour qu’il y soit statué par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d’appel de Liège.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt et un février deux mille vingt-quatre par Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.