N° C.23.0266.F-C.23.0340.F
ORES ASSETS, société coopérative, dont le siège est établi à Charleroi (Gosselies), avenue Jean Mermoz, 14, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0543.696.579,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
1. A. P.,
2. Y. B., avocat, agissant en qualité de curateur à la faillite de la société anonyme Algemene maatschappij voor beleggers,
défendeurs en cassation.
N° C.23.0340.F
ORES ASSETS, société coopérative, dont le siège est établi à Charleroi (Gosselies), avenue Jean Mermoz, 14, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0543.696.579,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
1. A. P.,
2. Y. B., avocat, agissant en qualité de curateur à la faillite de la société anonyme Algemene maatschappij voor beleggers,
défendeurs en cassation.
I. La procédure devant la Cour
Les pourvois en cassation sont dirigés contre l’arrêt rendu le 8 octobre 2020 par la cour d’appel de Liège.
Par un acte déposé au greffe de la Cour le 11 août 2023, la demanderesse se désiste du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.23.0266.F.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport.
L’avocat général Philippe de Koster a conclu.
II. Les moyens de cassation
À l’appui du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.23.0340.F,
la demanderesse présente deux moyens dans la requête en cassation jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.
III. La décision de la Cour
Les pourvois sont dirigés contre le même arrêt ; il y a lieu de les joindre.
Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.23.0266.F :
Il y a lieu de décréter le désistement.
Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.23.0340.F :
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
Aux termes de l’article 2265 de l’ancien Code civil, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans, si le véritable propriétaire habite le ressort de la cour d’appel dans l’étendue de laquelle l’immeuble est situé, et par vingt ans, s’il est domicilié hors dudit ressort.
Cette usucapion abrégée n’a d’autre but que d’effacer le fait que l’acquéreur tient son droit, sans le savoir, d’un non-propriétaire.
Il s’ensuit que le juste titre est celui qui, régulier en la forme, serait de nature à prouver la transmission de la propriété à l’acquéreur s’il émanait du véritable propriétaire.
En conclusions, la demanderesse se prévalait de cette prescription en faisant valoir qu’elle-même comme ses auteurs successifs disposaient d’un juste titre.
L’arrêt constate que l’immeuble litigieux, soit « une cabine électrique et [le] terrain y correspondant », faisait partie d’un ensemble immobilier divisé entre plusieurs acquéreurs à la suite d’une vente forcée en 1981 ; que, « par acte notarié du 24 février 1983, [l’un de ceux-ci] a explicitement vendu » ledit immeuble à une société tierce ; que, en 1990, cette dernière a fusionné avec une autre ; que, en 2010, la société issue de cette fusion a cédé « une série de biens immobiliers » à une autre personne, aux droits de laquelle la demanderesse a succédé en 2013, et que, en 2020, la demanderesse et la société issue de la fusion précitée ont « signé un ‘accord relatif à la cession de la propriété d’une cabine électrique’ dans lequel il était stipulé : ‘Les parties sont d’avis que, même si la cabine électrique [formant l’objet du litige] n’est pas expressément mentionnée dans le contrat de cession [de] 2010, la propriété sur celle-ci a été transférée [...] lors de [cette] vente’ [et que], ‘toutefois, si nécessaire, le transfert de propriété sur ladite cabine électrique est effectué par le présent accord avec effet rétroactif [en] 2010’ ».
Il considère ensuite, au terme de son examen des titres successifs des parties et de leurs auteurs respectifs, que « la [demanderesse] ne démontre pas qu’elle est la propriétaire légitime de [l’immeuble] revendiqué » mais que, « en revanche, les rapports de propriété [du défendeur] peuvent être reconstitués sans faille, de sorte que son titre de propriété doit être confirmé ».
En déduisant de ces considérations que « la [demanderesse] ne peut s’appuyer sur un délai de prescription acquisitive réduit découlant de l’article 2265 du Code civil » au motif qu’« elle ne dispos[e] d’aucun titre légal en lien avec la cabine électrique et le terrain correspondant au sens de [cette disposition] », sans rechercher si l’acte notarié du 24 février 1983 aurait été de nature à prouver la transmission de la propriété à l’acquéreur s’il avait émané du véritable propriétaire, l’arrêt viole ledit article.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Joint les pourvois inscrits au rôle général sous les numéros C.23.0266.F et C.23.0340.F ;
Statuant sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.23.0266.F :
Décrète le désistement du pourvoi et condamne la demanderesse aux dépens de ce pourvoi ;
Statuant sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.23.0340.F :
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d’appel de Liège, autrement composée.
Les dépens taxés, dans la cause C.23.0266.F, à la somme de mille cent trente-sept euros quatre-vingts centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt-quatre euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du dix mai deux mille vingt-quatre par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Philippe de Koster, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.