N° P.24.0205.F
F. N.,
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Ricardo Bruno, avocat au barreau de Charleroi.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 17 janvier 2024 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Ignacio de la Serna a fait rapport.
L’avocat général délégué Véronique Truillet a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision de condamnation rendue sur l’action publique exercée à charge du demandeur :
Sur le moyen :
Le moyen est notamment pris de la violation de l’article 65, alinéa 2, du Code pénal. Il fait valoir qu’en considérant que l’unité d’intention entre les faits à juger et ceux, d’une nature similaire, qui avaient donné lieu à une précédente condamnation, avait été rompue en raison d’une interpellation et d’une audition du demandeur par la police, la cour d’appel a illégalement refusé l’application de cette disposition.
Le demandeur s’est vu poursuivre pour avoir, comme auteur ou coauteur, cultivé du cannabis dans le cadre des activités d’une association, participé à la prise des décisions au sein d’une organisation criminelle, établi un faux document d’identité et en avoir fait usage, et pour avoir commis des vols d’électricité. Ces faits ont été commis, d’après l’arrêt, depuis le 22 juin 2018 jusqu’au 10 septembre 2019.
La demandeur a fait valoir devant les juges d’appel, et il soutient devant la Cour, qu’il a déjà été condamné, par un jugement rendu le 19 juin 2019, du chef d’infractions notamment de même nature commises entre le 31 août 2014 et le 20 avril 2018.
En vertu de l'article 65, alinéa 2, du Code pénal, lorsque le juge du fond constate que des infractions ayant antérieurement fait l'objet d'une décision passée en force de chose jugée et d'autres faits dont il est saisi et qui, à les supposer établis, sont antérieurs à ladite décision, constituent la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse, il tient compte, pour la fixation de la peine, des peines déjà prononcées.
Il suit de cette disposition que les conditions d’application de l’article 65, alinéa 2, du Code pénal sont les suivantes :
- le juge est saisi d’un délit collectif ;
- le prévenu a un antécédent judiciaire ;
- les infractions composant le délit à juger sont toutes antérieures à cet antécédent ;
- et entre les faits déjà jugés et ceux, contemporains, qui doivent encore l’être, il existe une unité d’intention.
La condition de l’antériorité des nouveaux faits par rapport à l’antécédent est substantielle puisque l’article 65, alinéa 2, procède de l’idée que si le juge précédent avait eu connaissance, grâce à une meilleure coordination des poursuites, du volume exact de l’activité délictueuse à réprimer, sa décision quant à la peine aurait été la même ou différente en fonction de l’éventuelle unité d’intention reliant tous les faits.
L’arrêt relève que l’antécédent est du 19 juin 2019 alors que la période délictueuse relative aux nouveaux faits dont la cour d’appel était saisie, et dont l’arrêt décide qu’ils sont tous unis par la même unité d’intention, s’étend jusqu’au 10 septembre 2019.
La condition de l’antériorité de tous les éléments qui composent le délit collectif restant à juger, n’est dès lors pas remplie.
Ainsi, en tout état de cause, les juges d’appel n’auraient pu faire bénéficier le demandeur du régime de l’article 65, alinéa 2, du Code pénal.
Dès lors, critiquant la motivation des juges d’appel qui ont estimé qu’une interpellation et une audition du demandeur, le 15 avril 2018, avait rompu l’intention délictueuse entre les faits jugés le 19 juin 2019 et ceux dont la cour d’appel était saisie, le moyen, dépourvu d’intérêt, est irrecevable.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre l’ordre d’arrestation immédiate :
En raison du rejet du pourvoi dirigé contre elle, la décision de condamnation acquiert force de chose jugée.
Le pourvoi dirigé contre le mandement d’arrestation immédiate devient sans objet.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de cent quatre-vingt-neuf euros quatre-vingt-un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président de section, Françoise Roggen, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du douze juin deux mille vingt-quatre par le chevalier Jean de Codt, président de section, en présence de Véronique Truillet, avocat général délégué, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.