N° P.24.0433.F
LE PROCUREUR DU ROI DE BRUXELLES,
demandeur en cassation,
contre
de D. Ch.-A.,
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 29 février 2024 par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d’appel.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
L’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions reçues au greffe le 20 juin 2024.
A l’audience du 26 juin 2024, le conseiller Ignacio de la Serna a fait rapport et l’avocat général précité a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision statuant sur la prévention A :
Le moyen est pris de la violation de l’article 26 de l’arrêté royal du 21 avril 2007 relatif aux appareils de test et aux appareils d’analyse de l’haleine, ainsi que des points 3.6 et 4.3.3 de l’annexe 2 dudit arrêté.
Le demandeur reproche aux juges d’appel d’avoir requalifié la prévention A de conduite en état d’imprégnation alcoolique supérieure à 0,35 milligramme d’alcool par litre d’air alvéolaire expiré (article 34, § 2, 1°, de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière) en celle d’avoir conduit un véhicule en état d’imprégnation alcoolique d’au moins 0,22 milligramme et inférieure à 0,35 milligramme (article 34, § 1er, al. 1er, de la loi précitée).
Selon le moyen, une telle requalification ne pouvait être opérée au motif que l’analyse de l’haleine à laquelle le défendeur s’est soumis à deux reprises, a révélé chaque fois un taux d’imprégnation alcoolique de 0,36 milligramme d’alcool par litre d’air alvéolaire expiré.
Les juges d’appel ont justifié leur décision de s’écarter du résultat de l’analyse de l’haleine par le fait que, selon les points 4.3.1 et 4.3.3 de l’annexe 2 de l’arrêté royal du 21 avril 2007, les erreurs maximales autorisées sur toute indication sont, en plus ou en moins, de 0,03 mg/l pour toute concentration en éthanol inférieure à 0,4 milligramme d’alcool par litre d’air alvéolaire expiré. Selon le jugement, il ne peut raisonnablement être exclu que le taux réellement présent dans l’haleine du défendeur ait été inférieur à celui indiqué par le test en telle sorte que la prévention mise à charge du défendeur doit être requalifiée en celle d’avoir conduit un véhicule dans un état d’imprégnation alcoolique non pas supérieure à 0,35 milligramme mais d’au moins 0,22 milligramme et inférieure à 0,35 milligramme.
La conduite en état d’imprégnation alcoolique est un délit dont la preuve est spécialement réglementée par la loi lorsqu’elle est rapportée par une analyse de l’haleine ou sanguine.
Les articles 59 à 61 de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière règlementent les conditions dans lesquelles, pour vérifier le taux d’imprégnation alcoolique, il peut être procédé à un test ainsi qu’à une analyse de l’haleine. Les dispositions précitées déterminent également à partir de quelle concentration d’alcool, par litre d’air alvéolaire expiré, une interdiction temporaire de conduire peut être infligée.
Aucune des dispositions légales susvisées de la loi du 16 mars 1968 ne prévoit que le juge doit procéder d’office à une correction du taux de concentration d’alcool, obtenu à la suite d’une analyse de l’haleine effectuée par les agents qualifiés à l’aide d’un appareil agréé.
L’arrêté royal du 21 avril 2007 sur lequel se fonde le jugement attaqué pour procéder à une telle correction, concerne l’ouverture du marché de l’approbation de modèle, des vérifications et du contrôle technique, à d’autres organismes que l’Institut belge pour la sécurité routière. Il ne peut justifier la correction apportée d’office par les juges d’appel.
Le moyen est fondé.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision statuant sur les préventions B et C :
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse le jugement attaqué, en tant qu’il statue sur la prévention A et sur la peine infligée au défendeur pour cette prévention ainsi que sur la contribution au Fonds spécial d’aide aux victimes d’actes intentionnels de violence, liée à cette condamnation ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Laisse un tiers des frais du pourvoi à charge de l’Etat et réserve le surplus pour qu’il y soit statué par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, au tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, siégeant en degré d’appel, autrement composé.
Lesdits frais taxés à la somme de cent cinquante-neuf euros quatre-vingt-trois centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président de section, Françoise Roggen, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-six juin deux mille vingt-quatre par le chevalier Jean de Codt, président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Lutgarde Body, greffier.