N° P.24.1147.F
B. A.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Yassin Hachlaf, avocat au barreau de Liège-Huy.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 16 juillet 2024 par la cour d’appel de Liège, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 24 juillet 2024, l’avocat général Bénédicte Inghels a déposé des conclusions au greffe.
A l’audience du 30 juillet 2024, le président de section chevalier Jean de Codt a fait rapport et l’avocat général précité a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
1. Le moyen unique est pris de la violation des articles 149 de la Constitution, 28septies, 46bis et 88bis du Code d’instruction criminelle, ainsi que de la méconnaissance de la foi due aux actes.
Devant les juridictions d’instruction d’instance et d’appel, le demandeur a déposé des conclusions invoquant la nullité des ordonnances des 8 et 29 mai 2024 du juge d’instruction de Liège prescrivant des repérages téléphoniques. Il a fait valoir que ces devoirs ont été requis par le procureur du Roi en application de l’article 28septies précité, que ce mode de saisine n’est prévu, en règle, qu’à l’égard des actes d’instruction pour lesquels seul le juge d’instruction est compétent, que les ordonnances querellées portent sur des actes que le procureur du Roi pouvait accomplir par lui-même en vertu de l’article 46bis dudit code, qu’il s’ensuit que le magistrat instructeur a été saisi irrégulièrement, en manière telle que le mandat d’arrêt est illégal.
2. L’article 149 de la Constitution ne s’applique pas aux juridictions d’instruction statuant sur le contrôle de la détention préventive.
Dans la mesure où il est pris de la violation de cet article, le moyen manque en droit.
Le demandeur n’identifie pas l’acte dont l’arrêt violerait la foi qui lui est due, et il ne précise pas par quelle énonciation il aurait méconnu celle-ci.
A cet égard, le moyen est irrecevable.
3. L’article 46bis du Code d’instruction criminelle permet au procureur du Roi de requérir la collaboration d’un opérateur de réseau de communications électroniques ou d’un fournisseur d’accès, à l’effet d’identifier soit l’abonné ou l’utilisateur habituel d’un service de communications électroniques, soit les services utilisés habituellement par une personne déterminée ou auxquels celle-ci est abonnée.
L’article 88bis a une portée plus large. Il autorise le juge d’instruction à faire procéder au repérage des données de trafic de moyens de communications électroniques à partir desquels ou vers lesquels des communications sont ou ont été adressées, ainsi qu’à la localisation de l’origine ou de la destination des communications électroniques.
En règle, le repérage et la localisation de communications électroniques relèvent de la compétence du juge d’instruction.
4. Les ordonnances contestées par le moyen ont pour objet de repérer, au départ de trois numéros suspects, les données de trafic de ces moyens de communication, en ce compris la liste des appels entrants et sortants, l’identification des titulaires des numéros révélés par cette recherche, les numéros d’identification des appareils ayant activé les appels, la localisation des pylônes ayant relayé ceux-ci.
Ces investigations ressortissent à celles que l’article 88bis réserve au juge d’instruction, d’où il suit que le procureur du Roi n’a pas méconnu l’article 28septies en décidant qu’il ne lui appartenait pas d’accomplir ces actes par lui-même.
Partant, en considérant que les actes d’instruction susdits ne pouvaient être ordonnés par le ministère public seul sur la base de l’article 46bis, qui ne les vise pas, l’arrêt attaqué justifie légalement sa décision.
5. Le demandeur soutient que les ordonnances litigieuses mentionnent également « l’identification de l’utilisateur d’un service de communication électronique », acte visé selon lui par l’article 46bis, § 1er, 1°, du Code d’instruction criminelle.
Mais ni l’article 28septies dudit code ni aucune autre disposition légale ne frappent de nullité l’ordonnance qui, requise sur la base de cet article, porterait sur un acte d’instruction relevant autant de la compétence du procureur du Roi que de celle du juge d’instruction. A cet égard, la compétence du premier n’est pas exclusive de celle du second.
Il en résulte qu’en tout état de cause, la mention que le moyen dénonce est dépourvue d’incidence sur la validité des ordonnances à l’origine de la perquisition et du mandat d’arrêt qui a suivi.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
6. Et les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de quarante-sept euros nonante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, chambre des vacations, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président de section, président, Geert Jocqué et Mireille Delange, présidents de section, Ignacio de la Serna et Michael Traest, conseillers, et prononcé en audience publique du trente juillet deux mille vingt-quatre par le chevalier Jean de Codt, président de section, en présence de Bénédicte Inghels, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.