Cour suprême du Canada
Dupré c. Commissaires d'école pour St-Bernard de Lacolle, [1966] S.C.R. 642
Date: 1966-06-28
Léo Dupré (Demandeur) Appelant;
et
Les Commissaires d'école pour la municipalité de St-Bernard de Lacolle (Défenderesse) Intimée.
1966: 2 juin; 1966: 28 juin.
Coram: Le Juge en chef Taschereau et les Juges Fauteux, Abbott, Hall et Spence.
EN APPEL DE LA COUR DU BANC DE LA REINE, PROVINCE DE QUÉBEC
APPEL d'un jugement de la Cour du banc de la reine, province de Québec[2] , renversant le verdict d'un jury. Appel maintenu.
Jacques Cartier, pour le demandeur, appelant.
Jean Duchesne, c.r., et Ovide Loiselle, pour la défenderesse, intimée.
Le jugement de la Cour fut rendu par
LE JUGE EN CHEF: — En novembre 1963, l'honorable Juge René Duranleau, siégeant à la Cour supérieure,
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district de Montréal, a confirmé le verdict d'un jury condamnant les Commissaires d'école de la municipalité de St-Bernard de Lacolle à payer au demandeur-appelant la somme de $12,000, en sa qualité de tuteur à sa fille mineure, Jocelyne, et $840 à lui personnellement.
Les faits qui entourent les circonstances de cette réclamation ont été récités au long dans les jugements des honorables juges de la Cour d'appel et il serait inutile de les analyser de nouveau. La Cour a maintenu l'appel de la Commission scolaire et a rejeté l'action, M. le Juge en chef Tremblay et M. le Juge Brossard étant dissidents.
II suffira pour l'intelligence du jugement de cette Cour de rappeler qu'une institutrice à l'emploi des défendeurs, et alors dans l'exercice de ses fonctions, laissa dans un « tambour » à l'extérieur de l'école, durant environ une heure et demie, l'enfant du demandeur, en bas âge, alors que la température était de trente degrés en-dessous du point de congélation.
Cette enfant, comme conséquence de cette exposition au froid, alors que la porte intérieure de l'école avait été verrouillée pour lui interdire tout accès à l'intérieur, fut affectée de sérieux troubles physiques et mentaux qui ont, d'après la preuve, un caractère de permanence.
C'est la conclusion à laquelle en sont arrivés les membres du jury quand ils ont affirmativement déclaré que l'institutrice était dans l'exercice de ses fonctions et que les maux qui affligent maintenant la jeune fille ont été causés par la négligence volontaire et la faute de l'institutrice. Le montant des dommages accordés n'est pas contesté.
Je suis d'opinion qu'il ne s'agit pas ici d'un cas où le verdict d'un jury doit être mis de côté. Évidemment, il existe des cas où les Cours d'appel peuvent et doivent intervenir, si, par exemple, le verdict est contraire à la loi ou au poids de la preuve (C.P. 498). Comme l'a dit cette Cour déjà et c'est la jurisprudence unanime, Laporte v. C.P.R.[3] :
……An appellate court is not entitled to substitute its opinion on the facts for that of the jury. Its duty is to accept the verdict if there be evidence to support it, however much it may disagree with the conclusion arrived at by the jury.
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Dans le cas qui nous est soumis il y a évidemment amplement de preuve sur laquelle le jury pouvait se baser pour conclure comme il l'a fait.
Je crois que l'appel doit être maintenu, que le verdict du jury doit être rétabli, ainsi que le jugement de M. le Juge Duranleau qui le confirmait, le tout avec dépens de toutes les Cours contre les intimés.
Appel maintenu avec dépens.
Procureur du demandeur, appelant: J. Cartier, Saint-Jean.
Procureurs de la défenderesse, intimée: Pagé, Beauregard, Duchesne & Renaud, Montréal.
[1] [1966] B.R. 458.
[2] [1966] B.R. 458.
[3] [1924] R.C.S. 278.