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08/03/1971 | CANADA | N°[1971]_R.C.S._501

Canada | Brown c. Gentleman, [1971] R.C.S. 501 (8 mars 1971)


Cour Suprême du Canada

Brown c. Gentleman, [1971] R.C.S. 501

Date: 1971-03-08

Lester A. Brown (Défendeur) Appelant;

et

W.J.B. Gentleman, syndic de l’actif de L.A. Brown Limited, faillie (Demandeur) Intimé.

1971: les 27 et 28 janvier; 1971: le 8 mars.

Présents: Les Judges Ritchie, Hall, Spence, Pigeon et Laskin.

EN APPEL DE LA CHAMBRE D’APPEL DE LA COUR SUPRÊME DU NOUVEAU-BRUNSWICK

APPEL et APPEL INCIDENT d’un jugement de la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick[1], rejetant un appel d’un jugement d

u Juge Pichette. Jugement modifié.

J.D. Harper, pour le défendeur, appelant.

D.M. Gillis, c.r., pour le demandeur, ...

Cour Suprême du Canada

Brown c. Gentleman, [1971] R.C.S. 501

Date: 1971-03-08

Lester A. Brown (Défendeur) Appelant;

et

W.J.B. Gentleman, syndic de l’actif de L.A. Brown Limited, faillie (Demandeur) Intimé.

1971: les 27 et 28 janvier; 1971: le 8 mars.

Présents: Les Judges Ritchie, Hall, Spence, Pigeon et Laskin.

EN APPEL DE LA CHAMBRE D’APPEL DE LA COUR SUPRÊME DU NOUVEAU-BRUNSWICK

APPEL et APPEL INCIDENT d’un jugement de la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick[1], rejetant un appel d’un jugement du Juge Pichette. Jugement modifié.

J.D. Harper, pour le défendeur, appelant.

D.M. Gillis, c.r., pour le demandeur, intimé.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE SPENCE — Dans la présente affaire, Lester A. Brown, défendeur en première instance, se pourvoit contre l’arrêt de la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau‑Brunswick[2], prononcé le 4 septembre 1969. Dans cet arrêt, la Chambre d’appel a modifié le jugement de première instance et a adjugé, contre ledit défendeur, un montant de $19,432.48. L’appelant demande que l’action soit rejetée, en tout ou en partie.

Par un pourvoi incident, le demandeur en première instance, W.J.B. Gentleman, syndic de l’actif de la L.A. Brown Limited, faillie, demande que les crédits de $4,707.60 et $10,000 alloués à l’appelant Brown dans l’arrêt de la Chambre d’appel soient rejetés.

Jusqu’à 1957, Lester A. Brown, marchand de voitures à Chipman, dans la province du Nouveau-Brunswick, exploitait son entreprise en son propre nom. Cette année-là il a fait constituer la compagnie L.A. Brown Limited en vertu des lois de la province du Nouveau‑Brunswick et transporté l’actif de son entreprise au compte de la nouvelle compagnie qui a continué à être exploitée de façon semblable comme commerce de voitures. Lester A. Brown a fait émettre à son nom à lui 97 des 100 actions de la L.A. Brown Limited. Son épouse détenait deux actions et son père, une action. Au décès de celui-ci, en 1964,

[Page 504]

cette dernière action est devenue la propriété d’un certain Smit, comptable de la L.A. Brown Limited dont, d’autre part, Lester A. Brown était président. Au sujet de sa situation, Lester A. Brown a déclaré ce qui suit au cours de l’interrogatoire préalable:

[TRADUCTION] Q. Je vois. Vous étiez, dites-vous, non seulement actionnaire, mais encore président?

R. Je l’étais, oui.

Q. Durant toute la période en question?

R. Oui.

Q. Et je présume que vous étiez également administrateur?

R. Je ne sais pas au juste ce que le titre d’administrateur… J’étais, si l’on peut dire, celui qui prenait les décisions.

Q. Vous étiez à la tête de l’entreprise?

R. C’est exact.

Q. Et vous en dirigiez les activités?

R. Oui.

En présentant les motifs de la décision de la Chambre d’appel, le Juge d’appel Ritchie a déclaré:

[TRADUCTION] Je suis toutefois convaincu, qu’à toutes fins pratiques, le défendeur était le directeur général de la compagnie.

Aucune conclusion différente ne peut être tirée de la preuve.

En 1963, Lester A. Brown a décidé d’élargir les cadres de la L.A. Brown Limited par l’exploitation, à l’autre extrémité de la ville de Chipman, d’une station-service où seraient vendus les produits Texaco. Il possédait un lot depuis «quelque temps» déjà et en a acheté un deuxième afin de réunir suffisamment de terrain pour y construire la station-service. Le prix d’achat total des deux lots était de $3,100. Immédiatement après l’achat du deuxième lot, il a transporté les deux lots en question à la L.A. Brown Limited pour $10,000, mais rien ne montre comment fut payée cette somme.

La L.A. Brown Limited a conclu une convention avec la Compagnie Texaco en vertu de laquelle cette dernière devait assumer les frais de la construction d’une station-service sur ledit bien-fonds et la L.A. Brown Limited exploiter cette station-service pour y vendre les produits Texaco. La Banque de la Nouvelle-Écosse a con-

[Page 505]

senti un financement temporaire de $32,500 à cette fin. La Compagnie Texaco a appris que le contrat passé entre la L.A. Brown Limited et la Irving Oil Company interdisait à la première de vendre les produits pétroliers de quelque autre compagnie que ce soit dans un rayon de dix milles de son emplacement primitif à Chipman. La Compagnie Texaco a dès lors refusé de donner suite à l’accord avec la L.A. Brown Limited ou d’avancer les fonds nécessaires au remboursement de la Banque de la Nouvelle-Écosse. A partir de ce moment-là, les affaires et la situation financière de la L.A. Brown Limited se sont rapidement détériorées.

La Banque de la Nouvelle-Écosse a poursuivi la L.A. Brown Limited pour le montant de l’avance consentie en vue de la construction de la station-service et Lester A. Brown, personnellement, pour fausse déclaration. La L.A. Brown Limited a actionné la Texaco (Canada) Limited.

En conséquence, $32,500 furent adjugés à la Banque de la Nouvelle-Écosse, à l’encontre de la L.A. Brown Limited, mais la réclamation dirigée contre Lester A. Brown, personnellement, fut rejetée. La L.A. Brown Limited s’est vu adjuger, à l’encontre de la Texaco (Canada) Limited, «un montant à fixer, s’il y a lieu».

Toujours au cours de l’interrogatoire préalable, Lester A. Brown a déclaré qu’en juin 1964, la compagnie, savoir la L.A. Brown Limited, était «sur le point de faire faillite» et qu’il «devait faire quelque chose ou fermer boutique». C’est alors qu’il a décidé de prendre une hypothèque mobilière de $10,000. Je reviendrai plus loin sur la preuve présentée au sujet de cette présumée prise de garantie.

Le 20 novembre 1964, moins de six mois après la présumée prise d’hypothèque mobilière, Lester A. Brown a informé les personnes présentes à une réunion des administrateurs de la L.A. Brown Limited que la compagnie lui était redevable pour ladite hypothèque mobilière de $10,000, ainsi que de $250, représentant l’intérêt y afférent. Il a été résolu que la compagnie signerait un contrat de vente à Lester A. Brown, personnellement, en acquittement de l’obligation de la compagnie à l’égard de ladite hypothèque mobilière et dudit intérêt et, en outre, que la L.A. Brown Limited transporterait à Lester A. Brown

[Page 506]

les dettes actives. A cette époque, Lester A. Brown a fait constituer une autre compagnie, la Chipman Motors Limited. Cette dernière a également émis 100 actions dont Lester A. Brown en a fait émettre 97 à son nom, comme prix de l’achat, par ladite compagnie, de l’actif que la L.A. Brown Limited était censée avoir transporté à son compte dans l’opération susmentionnée et que, de son côté, il était censé transporter à la Chipman Motors Limited.

Aucun contrat de vente n’a été produit en première instance. Aucune cession des dettes actives n’a été produite en première instance. Le résultat net de l’opération a été de réduire la L.A. Brown Limited à néant alors que Lester A. Brown Limited a continué d’exploiter exactement la même entreprise sur les mêmes lieux et avec les mêmes marchandises en magasin, sous la raison sociale de Chipman Motors Limited.

Le 14 juillet 1967, sur requête de la Banque de la Nouvelle-Écosse, qui agissait en qualité de créancier pétitionnaire, la Cour suprême du Nouveau-Brunswick (division du banc de la reine, en matière de faillite) a déposé une ordonnance de séquestre contre la L.A. Brown Limited et nommé le demandeur W.J.B. Gentleman, intimé en cette Cour, syndic de faillite. Par un bref lancé le 21 mai 1968, W.J.B. Gentleman, en sa qualité de syndic, a actionné Lester A. Brown. La déclaration présentait la demande suivante:

(a) État de la dépense et de l’épuisement de l’actif du demandeur lorsque cet actif était sous la supervision et le contrôle du défendeur et dont il est question à l’alinéa 5, ainsi qu’un état des sommes reçues par ledit défendeur au nom du demandeur, y compris les sommes mentionnées aux alinéas 7 et 8 de la présente demande.

(b) Une déclaration portant que le bénéfice de $6,900 réalisé par le défendeur et décrit à l’alinéa 6 de la présente demande représente une somme touchée par lui à titre de mandataire du demandeur et payable au demandeur par le défendeur.

(c) Des dommages-intérêts, pour négligence du défendeur, en sa qualité de membre du bureau et administrateur de la L.A. Brown Limited, dans le soin qu’il a pris des biens du demandeur.

(d) Le remboursement, par le défendeur, de toutes les sommes reçues par lui du demandeur sans contrepartie et toutes les sommes détenues et

[Page 507]

reçues par le défendeur au nom du demandeur mais non payées au demandeur et les dépens de la présente action.

L’action a été portée devant la division du banc de la reine de la Cour suprême du Nouveau‑Brunswick. Le procès a été assez inusité. Deux témoins seulement ont été interrogés pour le demandeur, Norman Sinclair et Roland Bosence, tous deux employés du syndic de faillite. La seule autre preuve présentée en première instance consistait en extraits de l’interrogatoire préalable du défendeur, Lester A. Brown, appelant en cette Cour. On n’a pas présenté de preuve au nom du défendeur et celui-ci n’a pas témoigné, bien que son procureur ait obtenu la permission, après l’exposé de la preuve du demandeur, de lire d’autres extraits de son contre-interrogatoire préalable, parce que ceux-ci, disait-il, étaient nécessaires à l’explication des réponses dont venait de donner lecture le procureur du demandeur. Cette présentation fragmentaire de la preuve a suscité de grandes difficultés dans l’examen de l’affaire tant à la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau‑Brunswick qu’en cette Cour. Le juge d’appel Ritchie, qui a rendu le jugement à la Chambre d’appel, a déclaré:

[TRADUCTION] J’ai étudié l’opportunité d’ordonner un nouveau procès qui se limiterait à la détermination du montant net, s’il en est, dont le défendeur est recevable au syndic. Toutefois, comme l’appel incident du demandeur ne tend pas à obtenir de nouveaux calculs, j’ai décidé de suivre l’exemple du savant juge de première instance et de tirer le meilleur parti possible de la preuve peu satisfaisante, dont se sont contentées les deux parties en cause.

J’ai également étudié cette possibilité et comme le juge de première instance et le Juge d’appel Ritchie, j’ai conclu qu’il fallait tirer le meilleur parti possible de la preuve peu satisfaisante qui existe plutôt que d’imposer à l’actif en cause les frais et délais supplémentaires qu’entraînerait un renvoi sur le quantum.

Cette présentation fragmentaire de la preuve en première instance tient probablement à ce que le principal moyen de défense invoqué au nom de Lester A. Brown ne portait pas sur les divers montants réclamés par le demandeur mais plutôt sur le statut du demandeur. On a allégué

[Page 508]

que le demandeur n’avait pas été dûment élu syndic de l’actif de L.A. Brown Limited et que, par conséquent, le demandeur n’était pas habilité à poursuivre le défendeur en justice. On a également allégué comme moyen de défense «que le demandeur (s’il existe) est un pseudonyme de la Banque de la Nouvelle-Écosse, dont il est fait mention ci-dessus, et que lesdites questions dont il y est fait état sont chose jugée».

Dans ses motifs, le Juge Pichette, qui a rendu le jugement, a dit:

[TRADUCTION] J’ai rejeté les objections de M. Harper et déclaré que, à mon avis, M. Gentleman, en vertu de l’ordonnance de séquestre rendue le 14 juillet 1967, a été dûment nommé syndic de l’actif de la L.A. Brown Limited et que, d’après moi, M. Gentleman était à tous égards, pour les besoins de la présente affaire, syndic de l’actif de la L.A. Brown Limited jusqu’à ce qu’un tribunal de faillite l’ait révoqué.

Le juge de première instance a ensuite accordé les montants suivants dans ses motifs:

1. Deux chèques tirés sur le compte de la L.A. Brown Limited, établis à l’ordre du défendeur Lester A. Brown sans contrepartie établie, aux montants de.............

$ 3,800.00

et

5,000.00

2. Le montant des dettes actives figurant dans le dernier bilan annuel daté du 31 juillet 1964, soit....................................................................................................................

4,127.82

3. La valeur des machines et de l’outillage pris en novembre 1964 par le défendeur Lester A. Brown et que ce dernier a admis, au cours de l’interrogatoire préalable, être les mêmes machines et outillages qui figurent dans ledit bilan annuel, moins un article au titre de la dépréciation,.........................................................................................

2,925.46

4. Le montant d’un chèque tiré par la Traders Finance Company et établi à l’ordre de la L.A. Brown Limited montant dont, a-t-il conclu, le défendeur Lester A. Brown n’a pas rendu compte,.............................................................................................................

705.41

Total.............................

$ 16,558.69

[Page 509]

Le Juge Pichette n’a pas accordé au demandeur certaines autres réclamations, qui furent examinées par la Chambre d’appel et dont il sera question plus tard.

Le Juge d’appel Ritchie a présenté les motifs de jugement de la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick. Le savant juge d’appel y cite les six moyens d’appel qu’expose le factum produit par l’appelant et poursuit en ces termes:

[TRADUCTION] A la suite de plusieurs examens détaillés de la transcription des procédures en première instance et du factum produit au nom du défendeur, aucun des six moyens d’appel ne s’avère fondé. La division du banc de la reine est un forum devant lequel le demandeur était fondé à porter la présente action. La nomination du syndic a été faite par le Registraire en vertu de l’ordonnance de séquestre. Aucune erreur dans la nomination de l’inspecteur de l’actif ou du procureur du demandeur n’est opposable à la réclamation du demandeur. Si le défendeur avait voulu contester le statut du demandeur comme syndic de l’actif de la compagnie, ou le statut de l’inspecteur de l’actif, il aurait dû présenter une requête à cette fin à la division du banc de la reine en vertu de la compétence supplémentaire que confère à cette Cour, en matière de faillite, l’article 140 de la Loi sur la faillite. Les pièces ou copies de pièces relatives à des procédures en dehors de la présente action ne sont pas utiles en l’espèce. Toutes les pièces justificatives reçues en première instance étaient des éléments de preuve admissibles et convenablement identifiés. Le témoignage établit clairement l’obligation du défendeur de rendre compte au demandeur de la valeur réelle de tout élément d’actif de la compagnie qu’il s’est approprié pour son usage personnel. Toutefois, il a droit à des crédits, dans l’établissement des comptes, pour tout montant d’argent dont lui est redevable la compagnie.

Je souscris à cet énoncé et je n’ai que peu à ajouter.

Il est clair, du moins depuis l’affaire Lemieux c. McCauley[3] que le tribunal de faillite seul a juridiction pour décider si la nomination d’un syndic est légale et pareille requête devant un tribunal de faillite est expressément autorisée par l’art. 15 de la Loi sur la faillite.

[Page 510]

Je trouve très convaincant ce qu’a dit Holmsted, c.r., premier registraire en matière de faillite de l’Ontario, dans In re Lincoln Motors Company[4], à la p. 481:

[TRADUCTION] Il me paraît que les demandeurs ont raison de s’adresser à la juridiction de faillite plutôt qu’à la juridiction civile ordinaire de la Cour où les requérants ont eu gain de cause contre Beemer. Le syndic autorisé est un officier de la Cour et dans la situation d’un séquestre nommé par la Cour: Loi sur la faillite, art. 17(2) [1 C.B.R. 27]; et c’est du tribunal de faillite qu’il est officier; et ne serait pas une procédure opportune que les requêtes présentées contre lui le soient ailleurs qu’en la juridiction de faillite du tribunal.

L’action dont il s’agit ici a été portée devant la division du banc de la reine de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick; ce n’était pas une procédure de faillite.

En vertu de l’art. 21(6) de la Loi sur la faillite, S.R.C. 1952, c. 11, à l’audition (d’une pétition pour ordonnance de séquestre), le tribunal doit exiger la preuve des faits allégués dans la pétition et de la signification de celle-ci; et il peut, s’il juge la preuve suffisante, rendre une ordonnance de séquestre; le par. (9) décrète ce qui suit:

(9) Lorsqu’une ordonnance de séquestre est rendue, le tribunal doit nommer un syndic autorisé à titre de syndic des biens du failli, en tenant compte, dans la mesure où le tribunal le juge équitable, des désirs des créanciers.

En l’espèce, la division du banc de la reine de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick, constituée en tribunal de faillite, a accueilli, le 14 juillet 1967, la pétition de la Banque de la Nouvelle-Écosse, rendu une ordonnance de séquestre contre la L.A. Brown Limited, et désigné comme syndic le demandeur, W.J.B. Gentleman. En ce qui concerne la première assemblée des créanciers, l’art. 68(5) de la Loi sur la faillite, prévoit, il est vrai, ce qui suit:

68. (5) Cette assemblée à pour objet l’examen des affaires du failli, la confirmation de la nomination du syndic ou son remplacement, la nomination des inspecteurs et la communication au syndic des instructions que les créanciers peuvent juger opportunes quant à l’administration de l’actif.

[Page 511]

Mais cette action des inspecteurs n’a pour objet que de confirmer la nomination antérieure du syndic dont le titre et le statut viennent de sa nomination par le tribunal et demeurent jusqu’à sa révocation soit par un vote des créanciers soit par une décision du tribunal compétent, pour un motif déterminé. L’article 10(1)(d) de la loi, autorise le syndic à intenter une action avec la permission des inspecteurs mais le défaut d’obtenir telle permission ne peut être opposé comme moyen de défense à une action intentée par le syndic, cette disposition ne visant qu’à protéger l’actif quant à des questions de frais: In re Branson, ex parte Trustee[5]; In re H.O. Kirkham and Company Limited[6]; In re Soucier[7]. En effet, l’art. 6(7) de la Loi sur la faillite décrète:

6. (7) Aucune erreur ou irrégularité dans la nomination d’un syndic ne vicie un acte accompli de bonne foi par lui.

Je crois donc, comme le Juge d’appel Ritchie, que n’est fondé aucun des six moyens d’appel que l’appelant a présentés à la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick et également à cette Cour, en ce qui concerne l’habilité du syndic à intenter l’action.

Le Juge d’appel Ritchie a ensuite étudié les divers articles de la réclamation du demandeur, intimé devant la Chambre d’appel et en cette Cour. Comme je l’ai dit plus tôt, le jugement de première instance a accueilli une réclamation pour un chèque au montant de $705.41 tiré par la Traders Finance Company en faveur de la L.A. Brown Limited et, déposé au crédit personnel de l’appelant. A ce chèque, le Juge d’appel Ritchie en a ajouté un autre, pour lequel il a jugé que la situation était la même, et qui s’établit à $700. Le même juge a également ajouté la somme de $6,900, soit la différence entre le prix auquel l’appelant a vendu les deux lots à la L.A. Brown Limited et le prix auquel il les a achetés. Le Juge d’appel Ritchie a en outre accueilli la réclamation pour toutes les dettes actives, ce qui représente une somme de $4,127.82, et la valeur des machines et de l’outillage que l’appelant a pris en mettant fin à l’entreprise de la L.A. Brown

[Page 512]

Limited, sait $2,925.46. Il a aussi ajouté une somme de $9,981.39 pour les pièces et accessoires, estimant que la réclamation du demandeur pour cette somme devait être considérée exactement de la même façon que la réclamation pour les dettes actives et la valeur des machines et de l’outillage. Le Juge d’appel Ritchie a confirmé qu’il devait être fait droit à la réclamation pour les deux chèques de $5,000 et de $3,800 que l’appelant avait tirés sur le compte de sa compagnie, la L.A. Brown Limited, et qu’il avait déposés, a-t-on allégué, à son propre compte. Les divers montants adjugés contre l’appelant Lester A. Brown par le Juge d’appel Ritchie, s’élèvent, par conséquent, à un total de $34, 140.08. Le juge a, toutefois, accordé à l’appelant des crédits s’établissant à $14,707.60, soit le total de deux montants: d’une part le montant de $4,707.60, jugé avoir été versé par l’appelant au nom de la L.A. Brown Limited et, d’autre part, la somme de $10,000. Voici les motifs du Juge d’appel Ritchie au sujet de ce dernier montant:

[TRADUCTION] Quant à la dette de $10,000 à l’égard de laquelle le défendeur prétend détenir une garantie sous forme d’hypothèque mobilière, la preuve pourrait être plus forte. L’origine de la dette n’a pas été expliquée. L’hypothèque mobilière n’a pas été produite. Aucune dette de $10,000 envers le défendeur ou quelque autre administrateur que ce soit de la compagnie n’est divulguée dans le bilan de 1964. Toutefois, rien ne contredit directement la preuve du défendeur en ce qui concerne l’existence de la dette de $10,000. Les passages des procès-verbaux des réunions des administrateurs qui ont trait à la dette de $10,000 et à l’autorisation de signer une hypothèque mobilière pour garantir le paiement de ladite dette n’ont pas été mis en doute. Si l’hypothèque mobilière existe réellement, le demandeur n’en a pas demandé le rejet. En me fondant sur les éléments de preuve à ma disposition, j’estime que le défendeur a droit à un crédit pour la somme de $10,000, dont le paiement, affirme-t-il, est garanti par une hypothèque mobilière grevant les biens de la compagnie.

En somme, l’arrêt de la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick déclare le défendeur, l’appelant en cette Cour, redevable au demandeur, l’intimé en cette Cour, d’une somme de $19,432.48.

[Page 513]

L’appelant s’est pourvu devant cette Cour et dès le début de l’audition a présenté deux avis de requête. Par la première requête il demandait l’autorisation de présenter une nouvelle preuve sous forme de nombreux documents relatifs aux procédures de faillite. Pour les raisons que j’ai déjà exposées, les documents en question n’étaient pas pertinents et la requête a été rejetée. Par la deuxième, l’appelant demandait à produire des déclarations sous serment attestant le dépôt de trois chèques qu’intéressaient trois articles du montant adjugé contre l’appelant par la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick. Il est clair, évidemment, que la demande de production de tels documents ne répond pas aux exigences établies par cette Cour dans l’affaire Dormuth et al. v. Untereiner et al.[8], où il a été décidé que pour pouvoir invoquer des motifs particuliers à l’appui d’une demande de production d’une nouvelle preuve présentée en vertu des dispositions de l’art. 67 de la Loi sur la Cour suprême, il faut qu’il ait été impossible malgré une diligence raisonnable de découvrir la preuve en question avant l’audition du pourvoi incident et que cette preuve, si elle était acceptée, soit quasi concluante. La preuve qu’on a demandé l’autorisation de produire, par cet avis de requête, était la série de bordereaux de dépôt dans les banques attestant le dépôt au compte de la L.A. Brown Limited de chèques s’établissant respectivement à $700, $705.41 et $5,000. Les dépôts en question avaient été faits des années avant l’instruction de la présente affaire et l’appelant aurait pu se procurer les bordereaux de dépôt n’importe quand par la suite. Il y a lieu de noter, cependant, que l’intimé en l’espèce est le syndic de la faillite. Or, celui-ci a le devoir de prendre possession de tous les effets et papiers du faili et le devoir également, en qualité de syndic, de présenter au tribunal tous les documents pertinents. L’intimé a présenté le témoignage d’un certain Norman Sinclair, employé de l’intimé, qui a produit un chèque de $5,000 signé «L.A. Brown Limited, per L.A. Brown», établi à l’ordre de L.A. Brown et portant le numéro 10176. Daté du 24 août 1964, le chèque portait en endos «L.A. Brown» et était estampillé au recto: «Paid August 24, 1964».

[Page 514]

Le procureur de l’intimé a donné lecture, en tant que preuve de l’intimé en première instance, de l’interrogatoire préalable de l’appelant se rapportant à ce chèque de $5,000:

[TRADUCTION] Q. Voici un document censé être un chèque daté du 24 août 1964 et portant la marque d’identification «I» — Le reconnaissez-vous?

R. Oui, je reconnais bien cette signature.

Q. C’est votre signature?

R. Oui, c’est mon écriture.

Q. Un chèque établi à l’ordre de L.A. Brown, vous-même?

R. Oui.

Q. Et émis par…

R. L.A. Brown Limited.

Q. Par vous, en qualité de président de la L.A. Brown Limited?

R. C’est juste.

Q. Et quel est le nom de l’endosseur au verso de ce chèque?

R. L.A. Brown.

Le procureur de l’intimé a omis de donner lecture de ce passage qui suit l’extrait précité:

[TRADUCTION] Q. Maintenant, qu’est-ce… ditesnous ce que vous avez fait avec le… je suppose que vous avez négocié ce chèque?

R. Oui. Pourquoi ce chèque a été écrit, je n’en ai pas la moindre idée. Il a été déposé le même jour au compte de L.A. Brown Limited.

Q. Le chèque ou l’argent?

R. Le chèque. Le chèque a été déposé sur le bordereau de dépôt de la L.A. Brown Limited le jour même où il a été établi.

Q. La question est: pourquoi?

R. Ça, je ne peux pas vous le dire. Vraiment, en toute franchise, je n’en sais rien.

Q. Témoin, vous avez dit que ce chèque a été déposé à quel compte?

R. L.A. Brown Limited.

Il est donc évident que l’appelant fonde sa défense, en ce qui concerne cet article de $5,000, sur le fait qu’il a déposé le chèque en question au crédit de la compagnie, à la Banque de la Nouvelle-Écosse, le jour même où le chèque a été tiré. Parmi les autres éléments de preuve à l’appui de la requête pour présenter une nouvelle preuve, il y avait le fac-similé d’un bordereau de

[Page 515]

dépôt de la Banque de la Nouvelle-Écosse daté du 24 août 1964, montrant qu’un montant total de $5,271.85, composé des articles suivants, a été porté au crédit de la L.A. Brown Limited. Je cite un extrait du bordereau de dépôt:

Gouvernement du Canada........

28.00

Banque de la Nouvelle-Écosse

100.00

Banque de la Nouvelle-Écosse

12.00

Banque de la Nouvelle-Écosse

5,000.00

Banque de la Nouvelle-Écosse

12.00

Banque de la Nouvelle-Ecosse

120.00

$5,272.00

Moins frais de change

.15

$5,271.85

Le procureur de l’intimé a été bien incapable de répliquer de quelque façon que ce soit à cette preuve très convaincante que le chèque de $5,000 tiré par l’appelant pour lui-même sur le compte de sa propre compagnie a été, pour un motif inexpliqué et presque inexplicable, déposé de nouveau au crédit de la compagnie le même jour. Il ne fait pas de doute que l’appelant a droit à un crédit de $5,000 à l’égard de cet article et pour les raisons que j’ai déjà mentionnées, la requête présentée par l’appelant pour qu’il soit autorisé à exposer de nouveaux éléments de preuve doit être accueillie.

Comme je l’ai dit plus tôt, le savant juge de première instance a accueilli une réclamation de $705.41 contre l’appelant, soit le montant d’un chèque signé par la Traders Finance Company et établi à l’ordre de la L.A. Brown Limited, mais dont le témoin de l’intimé, Sinclair, a dit ne pouvoir retrouver trace dans les comptes de la L.A. Brown Limited à la Banque de commerce canadienne. Le témoin Sinclair a fait la même déposition au sujet d’un autre chèque de $700 tiré et établi de façon semblable. Le savant juge de première instance semble ne pas avoir tenu compte de ce dernier chèque dans son calcul du montant à adjuger au demandeur. Comme je l’ai dit, la Chambre d’appel, dans ses motifs, accorde au demandeur devant ce tribunal, l’intimé en cette Cour, les montants de ces deux chèques.

[Page 516]

D’autre part, les éléments nouveaux que l’appelant a demandé l’autorisation de produire dans cet appel, comprennent des bordereaux de dépôt établis au nom de la L.A. Brown Limited, l’un daté du 17 février 1967 pour un montant de $705.41, à la Banque de la Nouvelle-Écosse, et un autre daté du 18 décembre 1964, à la Banque de commerce canadienne où figure entre autres choses, un article intitulé «Traders Fin. $700.» Le procureur de l’intimé a été bien incapable de donner une explication pouvant jeter le moindre doute sur ce fort élément de preuve, savoir que les deux chèques ont été déposés au crédit de la L.A. Brown Limited. Les montants qu’ils représentent doivent être déduits du montant adjugé contre l’appelant.

Je passe maintenant à l’article de $6,900 adjugé contre l’appelant dans l’arrêt de la Chambre d’appel. J’ai déjà parlé de la ventilation de ce montant. L’appelant a acheté deux lots à un prix total de $3,100. Il les a achetés pour que la L.A. Brown Limited puisse y construire une station-service dont l’exploitation ferait partie de son entreprise commerciale. Immédiatement après l’achat du deuxième lot, l’appelant a transporté lesdits lots à la L.A. Brown Limited, dont il était le maître absolu, moyennant un prix d’achat de $10,000. La différence est de $6,900. La L.A. Brown Limited, sous la direction de l’appelant, a entrepris la construction, sur les deux lots en question, d’une station-service, au coût de $32,500. La L.A. Brown Limited n’a pas retenu les services d’un entrepreneur car Brown lui-même a fait fonction d’entrepreneur et consacré beaucoup d’énergie et d’efforts à la construction de la station-service. L’appelant, au cours de son interrogatoire préalable, a juré qu’au cours de la période où il s’est occupé de la construction de la station-service, il n’a touché ni salaire ni paye. Le savant juge de première instance a déclaré ce qui suit au sujet de cette réclamation:

[TRADUCTION] En ce qui concerne le bénéfice de $6,900 réclamé par le demandeur à l’alinéa 3 cidessus, et réalisé à la vente de deux lots de terrain, à mon avis, le demandeur ne peut avoir gain de cause. Le défendeur a payé $3,100 ces deux lots et

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les a revendus peu après à la L.A. Brown Limited pour la somme de $10,000 (transcription, p. 128). Il est à remarquer que le demandeur a présenté comme preuve une partie de l’interrogatoire préalable du défendeur et de ce fait il est ici encore lié par cette preuve. A la page 128, ligne 16 de la transcription, qui fait partie de l’interrogatoire préalable, on a posé la question suivante au défendeur:

«Q. Vous avez transporté ces lots à la L.A. Brown Limited, dites-vous, pour une somme de $10,000, mais une partie de cette somme de $10,000 était destinée au paiement de quoi?

R. Eh bien, à me payer pour faire fonction d’entrepreneur».

Le défendeur a construit une station-service à deux baies sur ces lots au coût de $30,000 environ. Il avait certainement droit à une rémunération pour cette tâche même si, comme l’allègue le procureur du demandeur dans ses conclusions, le défendeur était par rapport à la compagnie tel un fiduciaire et devait rendre compte à son commettant des bénéfices personnels réalisés dans des affaires menées au nom de la compagnie.

Par conséquent, le savant juge de première instance a rejeté la réclamation de $6,900. D’autre part, le Juge d’appel Ritchie, dans les motifs qu’il a exposés au nom de la Chambre d’appel, a décrit l’explication de l’appelant comme trop vague pour être admise. Il fait remarquer que le contrat n’a pas été produit, qu’aucune mention n’en est faite dans les procès-verbaux des réunions des administrateurs et que, par conséquent, lorsque l’appelant a acquis les biens-fonds, il l’a fait à titre de mandataire de la compagnie et à la fin expresse de permettre à la compagnie d’y exploiter une station-service. Le savant juge d’appel a donc décidé que l’appelant était devenu fiduciaire de la compagnie et qu’il était redevable à la compagnie des bénéfices réalisés.

Sans contester que l’appelant était fiduciaire de la L.A. Brown Limited et tenu de lui rendre compte du bénéfice réalisé dans la vente, je suis d’avis que l’appelant est fondé à prétendre qu’il a droit à une indemnité pour le travail qu’il a accompli et les services qu’il a rendus non à titre de président de la compagnie mais en qualité d’entrepreneur qui a mené à bonne fin la construction de la station-service. Je ne vois aucune injus-

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tice à fixer cette indemnité à un montant égal à celui du bénéfice réalisé lors de la vente des biens-fonds. Par conséquent, je suis d’avis de rejeter la réclamation de $6,900 contre l’appelant et de déduire cette somme du montant adjugé contre l’appelant.

Je passe maintenant aux crédits que la Chambre d’appel a adjugés à l’appelant, c’est-à-dire ceux qui atteignent un total de $14,707.60. A l’égard des $4,707.60, le procureur de l’intimé n’a rien dit; le crédit pour ce montant semble être bien fondé. A mon avis, la situation est bien différente quant aux $10,000. L’appelant prétend qu’en juin 1964, sa compagnie, la L.A. Brown Limited, lui devant $10,000, il a décidé de prendre une hypothèque mobilière pour garantir cette dette. L’appelant a admis qu’aucune avance de fonds n’avait été faite.

L’appelant a produit ce qui est censé être le registre des procès-verbaux des assemblées des actionnaires de la L.A. Brown Limited. Ce registre inusité est tenu de façon très simple, comme semblent l’être, d’ailleurs, la plupart des registres de compagnie relatifs aux questions en litige. Le registre des procès-verbaux est un de ces cahiers ordinaires à reliure rigide dont se servent les étudiants. Toutes les pages de ce cahier sont vierges, mais on y a attaché, au moyen de ruban gommé, sauf dans deux cas où l’on s’est servi d’une agrafeuse, des feuilles courtes portant un texte dactylographié censé être le procès-verbal des diverses assemblées. Les feuilles agrafées sont celles des deux derniers procès-verbaux à figurer dans ce qu’on a appelé le registre des procès-verbaux. Si nous prenons dans l’orde les quatre derniers procès-verbaux du registre, nous y trouvons tout d’abord un procès-verbal censé être celui d’une assemblée des actionnaires et administrateurs, tenue le 24 novembre 1963 et qui ne fait que consigner l’examen de l’état financier. Ce procès-verbal est censé avoir été signé par L.A. Brown, président, et Vera V. Brown, secrétaire. Le procès-verbal suivant est censé être celui d’une assemblée des actionnaires et administrateurs, tenue le 22 octobre 1964; il fait état du décès de M. Arthur W. Brown, vice-président, et de l’élection d’un certain Tom H. Smit à sa place. Ce procès-verbal

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est censé avoir été signé par les mêmes membres du bureau. Les deux procès-verbaux ont été attachés aux feuilles du cahier au moyen de ruban gommé. Le procès-verbal suivant est censé être celui d’une assemblée des administrateurs, tenue le 15 juin 1964. Je cite ce procès-verbal en entier:

[TRADUCTION] Procès-verbal d’une assemblée des administrateurs de la L.A. Brown Limited, tenue au bureau de la compagnie à Chipman (Nouveau-Brunswick) le 15 juin 1964.

Présents: Lester A. Brown, président

Vera V. Brown, secrétaire

Arthur W. Brown, vice-président

Tous les administrateurs étant présents, l’assemblée est déclarée être régulièrement constituée. Le président de la compagnie préside et Vera V. Brown fait fonction de secrétaire.

Le président déclare que la compagnie lui doit la somme de $10,000 et qu’il désire obtenir une garantie de la compagnie sous forme d’hypothèque mobilière sur le matériel de bureau, l’équipement du garage et les marchandises en magasin, et de cession des dettes actives de la compagnie.

Il est dûment proposé, appuyé et adopté à l’unanimité que la compagnie donne à M.L.A. Brown une hypothèque mobilière sur ses meubles et son matériel de bureau, sur son équipement de garage et sur ses marchandises en magasin pour garantir le paiement de la somme de $10,000 et de l’intérêt y afférent, calculé au taux de 6 pour cent par an, à partir du 17 juin, pour une période d’un an, et, en outre, que les membres du bureau de la compagnie soient autorisés à signer ladite hypothèque mobilière au nom de la compagnie. Proposition adoptée.

Aucune autre affaire ne devant être étudiée, l’assemblée s’ajourne.

L.A. Brown

Président

Secrétaire

Il convient de remarquer que dans le registre, ce procès-verbal suit celui du 22 octobre 1964, bien qu’il soit censé se rapporter à une assemblée tenue plusieurs mois plus tôt. Il est également à noter qu’au bas de ce procès-verbal, on ne trouve qu’une seule signature: «L.A. Brown, président», et aussi que le procès-verbal en question est agra-

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fé aux feuilles du registre. Le dernier procès-verbal à figurer dans le registre est censé se rapporter à une assemblée des administrateurs, tenue le 20 novembre. L’année n’est pas précisée, mais je supposerai qu’il s’agit de 1964. Une inscription dactylographiée, dans ce procès-verbal, indique comme étant présents: Lester A. Brown, président; Vera V. Brown, secrétaire, et Arthur W. Brown, vice-président. Ce dernier nom a été rayé à l’encre et on peut lire en dessous, écrit à l’encre, le nom «Tom H. Smit». Le procès-verbal n’est signé que par «L.A. Brown, président». Il est également agrafé aux feuilles du registre.

Aucune hypothèque mobilière n’a été déposée ni enregistrée. Rien ne montre qu’on ait donné instruction à qui que ce soit d’entamer des procédures relativement à l’hypothèque mobilière. Rien ne montre l’origine de la dette que l’on dit être de $10,000. Il faut se souvenir que l’appelant était non seulement président de la compagnie mais qu’il détenait aussi 97 des 100 actions. Le procureur de l’appelant a lui-même insisté à plus d’une reprise dans sa plaidoirie sur le fait que Tom Smit était présent au procès de première instance et à la disposition de l’intimé en qualité de témoin. Il était également à la disposition de l’appelant.

Dans ces circonstances, je suis d’avis qu’il y avait une preuve, que je viens d’exposer, à l’encontre de cette prétention formulée par l’appelant dans son interrogatoire préalable, prétention qu’il n’a pas reprise en première instance puisqu’il n’a pas témoigné, savoir que sa compagnie lui devait un montant de $10,000, garanti par hypothèque mobilière. Je ne vois pas comment un crédit peut être alloué pour cette prétendue dette envers l’appelant; je suis donc d’avis de rejeter le crédit.

Par conséquent, je suis d’avis qu’il y a lieu d’accorder à l’intimé les montants suivants:

Dettes actives..................................................

$ 4,127.82

Machines et équipement................................

2,925.46

Pièces et accessoires....................................

9,981.39

Chèque de la Traders Finance......................

3,800.00

Total

$ 20,834.67

[Page 521]

Je déduis de ce montant la somme de $4,707.60, de sorte que je fixe le montant net à adjuger à l’intimé à $16,127.07.

L’intimé a droit aux dépens de l’action en première instance. Étant donné que les montants en cause ont été modifiés tant par la Chambre d’appel que par cette Cour, il n’y a pas d’adjudication de dépens ni en la Chambre d’appel ni en cette Cour. L’intimé a également droit aux dépens en ce qui concerne la requête présentée par l’appelant en vue de produire la preuve des diverses procédures en division de faillite.

Comme, à mon avis, les parties étaient toutes deux en défaut quant à la production de la preuve relative aux bordereaux de dépôt, il n’y a pas d’adjudication de dépens pour la requête concernant la présentation de nouveaux éléments de preuve à leur sujet.

Jugement modifié, pas d’adjudication de dépens. Requête en vue de produire de nouveaux éléments de preuve accueillie.

Procureur du défendeur, appelant: James D. Harper, Fredericton.

Procureurs du demandeur, intimé: Gilbert, McGloan & Gillis, Saint-Jean.

[1] (1969), 1 N.B.R. (2d) 836.

[2] (1969), 1 N.B.R. (2d) 836.

[3] (1938), 21 C.B.R. 127 (Qué.).

[4] (1921), 2 C.B.R. 480.

[5] [1914] 2 K.B. 701.

[6] (1939), 20 C.B.R. 223.

[7] (1939), 20 C.B.R. 298.

[8] [1964] R.C.S. 122.


Synthèse
Référence neutre : [1971] R.C.S. 501 ?
Date de la décision : 08/03/1971
Sens de l'arrêt : Le jugement de la Chambre d’appel doit être modifié en fixant le montant net à adjuger à l’intimé à $16,127.07

Analyses

Droit des compagnies - Faillite - Requête pour faire déclarer une compagnie en faillite - L’appelant étant le président et le principal actionnaire - Action par syndic de faillite contre l’appelant - Habilité du syndic à intenter l’action - Divers montants adjugés contre l’appelant - Construction de station-service - Indemnité due à l’appelant en qualité d’entrepreneur - Indemnité fixée à un montant égal à celui du bénéfice réalisé lors de la vente des biens-fonds à la compagnie - Crédit pour prétendue dette garantie par hypothèque mobilière rejeté.

Preuve — Requête pour être autorisé à exposer de nouveaux éléments de preuve concernant certains bordereaux de dépôt — Requête accueillie.

La Cour suprême du Nouveau-Brunswick (Division du banc de la reine, en matière de faillite) a déposé une ordonnance de séquestre contre une compagnie dont l’appelant était le président et principal actionnaire, et a nommé l’intimé syndic de faillite. Quelques mois plus tard, l’intimé, en sa qualité de syndic, a actionné l’appelant. L’action a été portée devant la Division du banc de la reine de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick; ce n’était pas une procédure de faillite. Le juge de première instance a déclaré l’appelant redevable d’une somme de $16,558.69. En appel, la Chambre d’appel de la Cour suprême du Nouveau‑Brunswick a rejeté l’appel de l’appelant et accueilli l’appel incident de l’intimé, augmentant à $19,432.48 la somme redevable. L’appelant a appelé à cette Cour et l’intimé a produit un appel incident. Les divers montants adjugés contre l’appelant par le jugement de la Cour d’appel s’élèvent à un total de $34,140.08. La Cour a accordé à l’appelant deux crédits s’établissant à $14,707.60.

Arrêt: Le jugement de la Chambre d’appel doit être modifié en fixant le montant net à adjuger à l’intimé à $16,127.07.

[Page 502]

Aucun des moyens d’appel en ce qui concerne l’habilité du syndic à intenter l’action n’est fondé.

Bien que la requête présentée par l’appelant pour qu’il soit autorisé à exposer de nouveaux éléments de preuve ne répond pas aux exigences établies par cette Cour dans Dormuth et al. v. Untereiner et al., [1964] R.C.S. 122, elle doit quand même être accueillie. La preuve qu’on a demandé l’autorisation de produire était une série de bordereaux de dépôt attestant le dépôt au compte de la compagnie de chèques s’établissant respectivement à $700, $705.41 et $5,000. Ces dépôts avaient été faits des années avant l’instruction de la présente affaire et l’appelant aurait pu se procurer les bordereaux de dépôt n’importe quand par la suite. Cependant, le syndic a le devoir de prendre possession de tous les effets et papiers du failli et le devoir également, en qualité de syndic, de présenter au tribunal tous les documents pertinents.

Le procureur de l’intimé a été incapable de répliquer de quelque façon que ce soit à cette preuve que le chèque de $5,000 tiré par l’appelant lui-même sur le compte de sa propre compagnie a été, pour un motif inexpliqué, déposé de nouveau au crédit de la compagnie le même jour. De plus, le procureur de l’intimé a été bien incapable de donner une explication pouvant jeter le moindre doute sur cet élément de preuve, savoir que les deux autres chèques ont été déposés au crédit de la compagnie. Par conséquent, l’appelant a droit à un crédit concernant ces trois articles pour le montant de chacun.

L’appelant a réalisé un profit de $6,900 sur la vente à la compagnie de certains terrains sur lesquels une station-service a été construite. Sans contester la décision de la Cour d’appel que l’appelant était fiduciaire de la compagnie et tenu de lui rendre compte du bénéfice réalisé dans la vente, l’appelant est fondé à prétendre qu’il a droit à une indemnité pour le travail qu’il a accompli et les services qu’il a rendus non à titre de président de la compagnie mais en qualité d’entrepreneur qui a mené à bonne fin la construction de la station-service. Il n’y a aucune injustice à fixer cette indemnité à un montant égal à celui du bénéfice réalisé lors de la vente des biens-fonds. Par conséquent, la réclamation de $6,900 contre l’appelant doit être rejetée et cette somme doit être déduite du montant adjugé contre l’appelant.

Il y a une preuve à l’encontre de la prétention formulée par l’appelant dans son interrogatoire préalable, prétention qu’il n’a pas reprise en première instance puisqu’il n’a pas témoigné, savoir que sa

[Page 503]

compagnie lui devait un montant de $10,000, garanti par hypothèque mobilière. Le crédit pour cette prétendue dette doit être rejeté.

Par conséquent, il y a lieu d’accorder à l’intimé une somme de $20,834.67. On doit déduire de ce montant la somme de $4,707.60, qui a été versée par l’appelant au nom de la compagnie.


Parties
Demandeurs : Brown
Défendeurs : Gentleman
Proposition de citation de la décision: Brown c. Gentleman, [1971] R.C.S. 501 (8 mars 1971)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1971-03-08;.1971..r.c.s..501 ?
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