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28/06/1971 | CANADA | N°[1972]_R.C.S._175

Canada | Canadian General Insurance c. Western Pile, [1972] R.C.S. 175 (28 juin 1971)


Cour suprême du Canada

Canadian General Insurance c. Western Pile, [1972] R.C.S. 175

Date: 1971-06-28

Canadian General Insurance Company (Défenderesse) Appelante;

et

Western Pile and Foundation (Ontario) Ltd. (Demanderesse) Intimée.

1971: le 26 février; 1971: le 28 juin.

Présents: Les Juges Judson, Ritchie, Hall, Spence et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE L’ONTARIO.

APPEL d’un jugement de la Cour d’appel d’Ontario[1], accueillant un appel d’un jugement du Juge Thompson. Appel accueilli.

W.B. Williston,

c.r., W.M. Avery et W.C. Graham, pour la défenderesse, appelante.

D.K. Laidlaw, c.r., pour la demanderesse, intimée.

Le j...

Cour suprême du Canada

Canadian General Insurance c. Western Pile, [1972] R.C.S. 175

Date: 1971-06-28

Canadian General Insurance Company (Défenderesse) Appelante;

et

Western Pile and Foundation (Ontario) Ltd. (Demanderesse) Intimée.

1971: le 26 février; 1971: le 28 juin.

Présents: Les Juges Judson, Ritchie, Hall, Spence et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE L’ONTARIO.

APPEL d’un jugement de la Cour d’appel d’Ontario[1], accueillant un appel d’un jugement du Juge Thompson. Appel accueilli.

W.B. Williston, c.r., W.M. Avery et W.C. Graham, pour la défenderesse, appelante.

D.K. Laidlaw, c.r., pour la demanderesse, intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE RITCHIE — Le présent appel est interjeté par la Canadian General Insurance Company à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario daté du 3 avril 1970 et accueillant un appel interjeté par la Western Pile and Foundation (Ontario) Ltd. d’un jugement rendu le 3 avril 1969 par le Juge Thompson de la Cour suprême de l’Ontario. La Cour d’appel a donné raison à l’intimée et lui a adjugé la somme de $66,275.45 et les dépens.

[Page 177]

L’appel concerne le droit de l’intimée à être indemnisée par l’appelante pour la responsabilité qui lui incombe à la suite d’un accident découlant de travaux de construction qu’elle a exécutés à la fin de 1963 et au début de 1964.

L’appellante, une compagnie d’assurance, a passé un contrat d’assurance de responsabilité publique et générale avec l’intimée le 21 janvier 1963. Ce contrat a été en vigueur à toutes les époques pertinentes et, par un avenant sur les dommages matériels, l’appelante, entre autres choses, a convenu de:

[TRADUCTION] PAYER au nom de l’assuré toutes les sommes que l’assuré sera tenu de payer en raison de la responsabilité à lui imposée par la loi...pour dommages-intérêts résultant de l’endommagement ou de la destruction de biens matériels à la suite d’un accident survenu pendant la période d’assurance et la période d’application du présent avenant.

La convention d’assurance était cependant assortie de certaines exclusions dont deux sont pertinentes. La première se trouve dans les exclusions de la police générale:

[TRADUCTION] La présente police ne s’applique, ne s’étend et n’assure de couverture à aucune réclamation survenant ou existant en raison de l’une des activités suivantes:…

4.B. Des travaux de construction, d’installation ou de réparation de l’assuré pour un autre après la fin ou l’abandon de ces travaux.

La seconde exclusion, qui se trouve dans les avenants 1 et 2, limite à $10,000 l’obligation de l’assureur à l’égard de réclamations pour l’endommagement, la destruction ou la perte d’usage de:

[TRADUCTION] Tout (a) bien immeuble, terrain, ouvrage, bâtiment ou structure ou (b) de tout fil, conduite, tuyau, conduit principal, puits, égout, tunnel ou de tout dispositif s’y rattachant, si le dommage ou la destruction est causé par la vibration, le déplacement, l’étayement, la reprise en sous-œuvre, la surélévation, la reconstruction ou la démolition de tout bâtiment, structure ou support ou par des travaux d’excavation, le percement de tunnels ou par un autre ouvrage sous terre ou sous l’eau.

Au cours de la période d’application de la police, l’intimée dirigeait une entreprise de battage de pieux dans la province de l’Ontario; le 11 novembre 1963, elle passa un contrat avec Louis Donolo (Ontario) Limited pour le battage de

[Page 178]

palplanches d’acier dans un batardeau que cette dernière compagnie construisait afin de pouvoir creuser à un certain endroit au Greenway Pollution Centre à London (Ontario). En vertu du contrat, l’intimée devait fournir la main-d’œuvre, l’équipement et les autres matériaux requis pour le battage des palplanches. L’entrepreneur, Donolo, devait fournir les palplanches. Le contrat stipulait qu’il devait payer une somme forfaitaire à l’intimée et, en vertu de la convention, le paiement final devait être fait dans les 37 jours suivant la fin des travaux et leur réception par Donolo et par l’architecte ou l’ingénieur du chantier, et sur présentation du certificat d’exécution délivré par l’architecte ou l’ingénieur.

Le 15 décembre 1963, l’intimée a amené ses employés, son équipement et ses matériaux sur le chantier et a commencé les travaux de construction. La main-d’œuvre était formée de six ou sept hommes et d’un contremaître. Il y avait aussi beaucoup d’équipement lourd. Plus tard, un marteau trépideur et plusieurs génératrices furent ajoutés.

En fait, le travail de construction de l’intimée consistait simplement à enfoncer les palplanches d’acier dans le sol à une profondeur déterminée en les emboîtant les unes dans les autres, et, autant qu’on a pu le vérifier par un examen de surface, les palplanches avaient été correctement enfoncées aux profondeurs prescrites le 29 janvier. Le même jour, l’intimée quittait les lieux avec ses hommes et son équipement.

Deux jours plus tard, le 31 janvier 1964, l’intimée a présenté à Donolo un état de compte pour le montant total du prix forfaitaire, plus certains suppléments, moins la retenue statutaire de 20 pour cent requise par le Mechanics Lien Act, S.R.O. 1960, c. 233, tel que modifié. Voici l’en-tête de cet état de compte:

[TRADUCTION] Installation et parachèvement du batardeau de palplanches au West End Sewage Plant — London (Ontario)

Après que les employés de l’intimée eurent quitté le chantier, l’excavation proprement dite pour l’usine d’épuration des eaux commença. Au cours de ces opérations, soit entre le 5 et le 26 février, le surintendant et le secrétaire-trésorier de l’intimée se sont rendus à plusieurs reprises sur le chantier pour examiner les palplan-

[Page 179]

ches. Cependant, à ce moment-là, l’intimée n’avait aucun employé sur le chantier et elle n’a pas fait d’autres travaux ayant trait aux palplanches. En fait, lorsque des réparations mineures se sont révélées nécessaires le 17 février pour fermer une petite fissure qui s’était formée entre les palplanches, l’entrepreneur principal, Donolo, a fait lui-même les réparations qui s’imposaient et il a ensuite débité l’intimée du coût des réparations.

Peu de temps avant le 4 mars 1964, l’intimée a reçu le chèque de Donolo en paiement de son état de compte du 31 janvier, moins la retenue de 20 pour cent et le coût des réparations mineures. Le paiement a été fait sans que l’architecte ou l’ingénieur n’ait délivré de certificat d’exécution.

Le 5 mars, il s’est produit ce qu’on a décrit comme «une implosion» dans un des coins du batardeau. Le mur a cédé à un certain endroit dans le coin et une grande quantité de sable, de terre et d’eau a pénétré dans le caisson ce qui a causé des dommages très étendus. Ces dommages ont amené Louis Donolo (Ontario) Limited à intenter une action contre l’intimée.

Après le procès, l’intimée a été condamnée, le 5 décembre 1966, à payer des dommages‑intérêts de $45,416.99 et des dépens par la suite fixés à $6,347.02. Le Juge Morand a présidé le procès et a conclu dans ses motifs qu’il y avait un vide entre les palplanches enfoncées par l’intimée et que l’intimée était responsable de ce vide qui était la cause de l’accident. L’intimée ayant demandé que l’appelante assure la défense à l’action, conformément aux conditions de la police de responsabilité publique et générale, l’appelante a nié qu’elle était liée par le contrat et elle a refusé d’assurer la défense à l’action. L’intimée a donc intenté la présente action sur le contrat d’assurance; elle réclame des dommages‑intérêts correspondant au montant qu’elle a dû payer à Donolo par suite de la première action et elle réclame de plus les frais qu’elle y a engagés à titre de défenderesse. L’appelante a cherché à écarter toute obligation en se fondant sur trois moyens principaux:

[TRADUCTION] (a) Il n’y a eu aucun «accident» aux termes de la police;

[Page 180]

(b) tous les dommages ont été causés par «un ouvrage sous terre» et la responsabilité était alors limitée; et,

(c) les dommages allégués ont résulté de travaux de construction de l’assuré pour un autre, après l’achèvement de ces travaux.

En première instance, le Juge Thompson a évalué les dommages de l’intimée à $66,275.45, mais il a rejeté l’action. Bien qu’il ait conclu que «l’implosion» était un accident aux termes de la police, que les dommages avaient bien résulté de cet accident et que la clause de limitation de responsabilité ne s’appliquait pas dans les circonstances divulguées par les témoignages, il était d’avis que l’action de l’intimée n’était pas fondée parce que les travaux de construction qu’elle avait entrepris étaient terminés et, par conséquent, la clause générale d’exclusion s’appliquait.

L’appel de l’intimée a été accueilli. Dans un arrêt unanime dont le Juge d’appel Jessup a rédigé les motifs, la Cour d’appel a statué qu’aucune des deux exclusions de la police précitée ne s’appliquait aux faits en cause. En particulier, relativement à la clause d’exclusion générale, la Cour d’appel a conclu que les travaux de l’assurée n’étaient pas terminés tant qu’elle avait l’intention subjective de retourner au chantier pour réparer tout défaut qu’elle pourrait être tenue de réparer en vertu de son obligation contractuelle envers Donolo. La conclusion du juge de première instance selon laquelle le dommage résultait d’un «accident» au sens de la police n’a pas été modifiée et elle n’est pas en question ici.

Les arguments présentés en cette Cour portaient sur les conclusions du Juge d’appel Jessup au sujet de la fin des travaux. L’avocat s’est fortement appuyé sur l’arrêt de la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique dans Baynes Manning (Alberta) Ltd. v. Employers Liability Assurance Corp. Ltd.[2] La ressemblance entre les faits de cette dernière affaire et ceux de la présente espèce est remarquable. La demanderesse s’était engagée à construire un réseau de distribution d’eau et d’égouts dans la ville de Forest Lawn pour le 31 décembre 1955 et les travaux avaient été terminés le 23 décembre 1955. Le réseau a commencé à fonctionner le même jour. Cepen-

[Page 181]

dant, au printemps de l’année suivante, des fuites ont nécessité d’autres travaux et le délai pour la fin des travaux a été prorogé. En août 1957, un tronçon de tuyau qui avait été posé le 30 juillet 1955 s’est brisé et la demanderesse a été tenue de payer la somme de $1,926.09 en dommages-intérêts. Lorsque la demanderesse a demandé d’être indemnisée pour ce paiement en vertu d’une police de responsabilité générale qu’elle tenait de la défenderesse, cette dernière a refusé d’indemniser en se fondant sur une clause d’exclusion dont les termes étaient presque identiques à ceux de la présente espèce. La clause stipulait ce qui suit:

[TRADUCTION] 1…l’article N.-1 de la présente police…ne s’étend pas à la responsabilité pour réclamations resultant …

(b) de travaux de construction, d’installation ou de réparation de l’assuré pour un autre hors de l’établissement de l’assuré après la fin ou l’abandon de ces travaux...

(Les italiques sont de moi)

L’action de la demanderesse a été accueillie en première instance mais elle a été rejetée en appel. Bien qu’il ait été reconnu que la construction proprement dite avait été terminée, l’avocat de la demanderesse a invoqué l’obligation légale de la demanderesse de tenir les ouvrages en parfait état pour restreindre l’application de la clause d’exclusion. La prétention de la demanderesse revenait à alléguer que «les travaux de construction» n’étaient pas terminés tant que «des obligations contractuelles» subsistaient en vertu du contrat de construction. Le Juge d’appel Davey (alors juge puîné) a rejeté cette allégation en des termes qui me paraissent s’appliquer particulièrement à l’affaire dont cette Cour est saisie:

[TRADUCTION] L’expression «travaux de construction» signifie le travail proprement dit et non un rapport juridique entre l’assuré et un tiers pouvant exiger ou non qu’un certain travail soit fait.

En concluant, comme l’a fait la Cour d’appel de l’Ontario, que «les travaux de construction» ne sont pas terminés pour la simple raison que l’assurée a l’intention de réparer tout défaut qui devient apparent bien que toute la main-d’œuvre et tout l’équipement aient été retirés du chantier, on confond la question du rapport juridique entre

[Page 182]

l’assurée et un tiers pouvant exiger ou non qu’un certain travail soit fait à l’avenir, avec la question de l’exécution proprement dite du travail lui-même. Il est clair en l’espèce que le travail proprement dit ou «le travail de construction» dont l’intimée devait s’acquitter, consistait à enfoncer des palplanches à des profondeurs déterminées de façon qu’elles s’emboîtent les unes dans les autres. Ce «travail» a été «terminé» le 29 janvier 1964 et c’est ce même travail, accompli avec négligence, qui a donné lieu à la demande d’indemnité de l’intimée.

Par conséquent, compte tenu de l’énoncé sans équivoque de la clause générale d’exclusion et des motifs susmentionnés, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de l’intimée. Je suis donc d’avis d’accueillir l’appel avec dépens en cette Cour et en Cour d’appel et de rétablir le jugement de première instance.

Appel accueilli avec dépens.

Procureurs de la défenderesse, appelante: MacMillan, Rooke, Avery et Forbes, Toronto.

Procureurs de la demanderesse, intimée: McCarthy & McCarthy, Toronto.

[1] [1970] 3 O.R. 172, 12 D.L.R. (3d) 552.

[2] [1956-60] I.L.R. 814.


Synthèse
Référence neutre : [1972] R.C.S. 175 ?
Date de la décision : 28/06/1971
Sens de l'arrêt : L’appel doit être accueilli

Analyses

Assurance - Responsabilité - Exclusion de couverture pour travaux de construction terminés - Assuré s’obligeant à faire le battage de pieux dans un ba-tardeau - Dommages considérables résultant de la négligence dans l’opération - Responsabilité imposée à l’assuré - Demande d’indemnité ne peut réussir.

Le 11 novembre 1963, l’intimée, qui dirigeait une entreprise de battage de pieux, passa un contrat avec D pour le battage de palplanches d’acier dans un batardeau que D construisait. En fait, le travail de construction de l’intimée consistait simplement à enfoncer les palplanches d’acier dans le sol à une profondeur déterminée en les emboîtant les unes dans les autres, et, autant qu’on a pu le vérifier par un examen de surface, les palplanches avaient été correctement enfoncées aux profondeurs prescrites le 29 janvier. Le même jour, l’intimée quittait les lieux avec ses hommes et son équipement.

Le 5 mars, il s’est produit une «implosion» dans un des coins du batardeau. Le mur a cédé à un certain endroit dans le coin et une grande quantité de sable, de terre et d’eau a pénétré dans le caisson ce qui a causé des dommages très étendus. D a intenté une action contre l’intimée et a obtenu des dommages-intérêts. Le juge a conclu qu’il y avait un vide entre les palplanches enfoncées par l’intimée et que cett dernière était responsable de ce vide qui était la cause de l’accident.

L’intimée ayant demandé que l’appelante assure la défense à l’action de D, conformément aux conditions d’une police de responsabilité publique et générale, l’appelante a nié qu’elle était liée par le contrat et a refusé d’assurer la défense à l’action. L’intimée a donc intenté la présente action sur le contrat d’assurance; elle réclame des dommages‑intérêts correspondant au montant qu’elle a dû payer à D par suite de l’action de D et elle réclame de

[Page 176]

plus les frais qu’elle y a engagés à titre de défenderesse. L’action de l’intimée a été rejetée en première instance mais, accueillie en appel. La compagnie d’assurance a appelé à cette Cour.

Une clause de la police n’assure pas de couverture aux «Travaux de construction, d’installation ou de réparation de l’assuré par un autre après la fin ou l’abandon de ces travaux.»

Arrêt: L’appel doit être accueilli.

En concluant, comme l’a fait la Cour d’appel, que «les travaux de construction» ne sont pas terminés pour la simple raison que l’assurée a l’intention de réparer tout défaut qui devient apparent bien que toute la main-d’œuvre et tout l’équipement aient été retirés du chantier, on confond la question du rapport juridique entre l’assurée et un tiers pouvant exiger ou non qu’un certain travail soit fait à l’avenir, avec la question de l’exécution proprement dite du travail lui-même. Le «travail» dont l’intimée devait s’acquitter a été terminé le 29 janvier 1964, et c’est ce même travail, accompli avec négligence, qui a donné lieu à la demande d’indemnité de l’intimée. Par conséquent, la clause générale d’exclusion s’applique et il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de l’intimée.

Renvoi à l’arrêt: Bayne Manning (Alberta) Ltd. v. Employers Liability Assurance Corp. Ltd., [1956-60] I.L.R. 814.


Parties
Demandeurs : Canadian General Insurance
Défendeurs : Western Pile
Proposition de citation de la décision: Canadian General Insurance c. Western Pile, [1972] R.C.S. 175 (28 juin 1971)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1971-06-28;.1972..r.c.s..175 ?
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