Les défendeurs, en qualité d’acheteurs, avaient présenté une réquisition, relative au titre d’un immeuble, portant sur des restrictions à la construction enregistrées à l’égard de celui-ci. Les appelants, en qualité de vendeurs, ont par la suite demandé et obtenu une ordonnance en vertu de l’art. 62 du Conveyancing and Law of Property Act, R.S.O. 1970, c. 85, accordant la levée des restrictions. Aucun de ceux à qui a été signifiée la requête ne l’a contestée ou n’a même comparu pour la contester. Le jour fixé pour la signature du contrat, le délai d’appel de l’ordonnance n’était pas expiré. Les acheteurs intimés ont offert la somme due le jour de clôture mais ont demandé la preuve de la levée des restrictions, savoir, la preuve soit que le délai d’appel de l’ordonnance était expiré, soit que les parties intéressées s’étaient engagées à ne pas interjeter appel. Comme on n’a pas satisfait à ces exigences, les acheteurs intimés ont refusé de signer le contrat et les vendeurs ont intenté une action en dommages‑intérêts. Le juge de première instance a accueilli l’action mais son jugement a été infirmé par la Cour d’appel.
Arrêt: Le pourvoi doit être accueilli.
S’il est vrai qu’une ordonnance dont on peut appeler ne saurait être considérée valable à toutes fins avant l’expiration du délai d’appel, le fait que celui-ci n’est pas encore expiré ne suspend pas invariablement l’effet de l’ordonnance, même à l’encontre des tiers, si la possibilité d’un appel n’est qu’éphémère. Il faut toujours examiner la raison pour laquelle on insiste sur le caractère définitif d’une ordonnance; il faut également se deman-
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der qui est touché par elle et dans quel contexte on allègue qu’elle est définitive ou qu’elle ne l’est pas lorsque le délai n’est pas expiré. Il ressort du dossier qu’aucune des personnes ayant reçu signification de la requête n’a fait objection ou n’a comparu pour faire objection et l’on ne peut pas dire que l’avocat des acheteurs pouvait douter du fait que la possibilité d’appel était inexistante. Les vendeurs avaient raison d’affirmer qu’ils avaient répondu à la réquisition des intimés.
Distinction faite avec les arrêts Re West (1928), 61 O.L.R. 540 et Leonard v. Wharton (1921), 50 O.L.R. 609.
POURVOI à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario[1] accueillant un appel d’un jugement du juge Keith qui accordait des dommages-intérêts aux demandeurs appelants.
Earl A. Cherniak, c.r., et J.G. Quinn, pour les demandeurs appelants.
W.J. Hemmerick, c.r., pour les défendeurs intimés.
Le jugement de la Cour a été rendu par
LE JUGE EN CHEF — Ce pourvoi attaque un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario qui infirme la décision du juge Keith. Il soulève la question de savoir si, au jour fixé pour la signature d’un contrat de vente d’une maison, les vendeurs avaient répondu de façon satisfaisante à une réquisition relative à l’observation des restrictions à la construction. La réquisition a été présentée le 28 avril 1971, quelques semaines avant l’arpentage de la propriété, dont les acheteurs ont obtenu le rapport le 24 mai 1971. Le 10 juin 1971, les vendeurs ont obtenu du tribunal des directives quant au mode de signification d’une requête qu’ils entendaient présenter conformément à l’art. 62 du Conveyancing and Law of Property Act, R.S.O. 1970, c. 85, visant la levée des restrictions à la construction. La requête a été présentée le 11 juin 1971 et l’ordonnance accordant la levée des restrictions a été rendue le 23 juin 1971. Personne n’a comparu pour contester la requête.
Le litige en l’espèce vient de ce que le délai d’appel de l’ordonnance accordant la levée des restrictions n’était pas expiré le 30 juin 1971, le jour fixé pour la signature du contrat et, les gran-
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des vacances étant proches, ce délai se serait prolongé jusqu’en septembre 1971. L’exposé conjoint des faits montre que c’est à la suite d’un échange de correspondance entre les avocats des parties que les vendeurs ont demandé, le 23 juin 1971, la levée des restrictions à la construction. Il n’est pas contesté non plus que le 30 juin, les vendeurs ont présenté non seulement un contrat à signer mais aussi l’ordonnance accordant la levée des restrictions à la construction. Cette ordonnance, sans spécifier que ceux auxquels la requête avait été signifiée n’avaient pas comparu, approuvait les directives quant au mode de signification données le 10 juin 1971 et énonçait qu’elle avait été rendue «après avoir entendu l’avocat des requérants», c’est-à-dire des vendeurs, sans mention d’aucun autre avocat ni d’aucune autre personne.
Les acheteurs intimés ont offert la somme due le 30 juin 1971 mais en même temps ils ont exigé une ordonnance définitive et décisive portant que les restrictions à la construction avaient été levées, savoir la preuve soit que le délai d’appel de l’ordonnance était expiré, soit que les parties intéressées visées par les directives quant à la signification s’étaient engagées à ne pas interjeter appel ou y avaient renoncé. Comme on n’a pas satisfait à ces exigences, ils ont refusé de signer le contrat et les vendeurs ont intenté une action en dommages-intérêts.
Il semble qu’on ait plaidé l’affaire en adoptant la position suivante: existait-il, oui ou non, une ordonnance définitive et décisive que pouvaient invoquer les vendeurs pour répondre de façon satisfaisante à la réquisition des acheteurs? D’après les faits en l’espèce, je considère cet énoncé du point en litige comme indûment rigide de part et d’autre. Une ordonnance dont on peut appeler ne saurait être considérée valable à toutes fins, même à l’égard des tiers, avant l’expiration du délai d’appel. D’un autre côté, le fait que le délai d’appel n’est pas encore expiré ne suspend pas invariablement l’effet de l’ordonnance, même à l’encontre des tiers, si la possibilité d’un appel n’est qu’éphémère. Il faut toujours examiner la raison pour laquelle on insiste sur le caractère définitif d’une ordonnance; il faut également se demander qui est touché par elle et dans quel contexte on allègue
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qu’elle est définitive ou qu’elle ne l’est pas lorsque le délai d’appel n’est pas expiré. C’est pourquoi je ne pense pas que ni l’arrêt Re West[2] sur lequel s’est appuyé le juge de première instance ni l’arrêt Leonard c. Wharton[3] sur lequel s’est fondée la Cour d’appel puissent dicter la conclusion du présent pourvoi.
Il ressort du dossier qu’aucune des personnes ayant reçu signification de la requête n’a fait objection ou n’a comparu pour faire objection à l’ordonnance du 23 juin 1971. Mise à part toute question de procédure visant à déterminer si des parties qui n’ont pas comparu et auxquelles on a signifié la requête en question jouiraient automatiquement du droit d’interjeter appel de l’ordonnance rendue, (voir Ontario Rules, art. 35(3) et 48(2)), on ne peut pas dire que l’avocat des acheteurs pouvait douter du fait que la possibilité d’appel était inexistante. Selon moi, les vendeurs avaient raison d’affirmer que, dans les circonstances, ils avaient répondu de façon satisfaisante à la réquisition des intimés.
En conséquence, je suis d’avis d’accueillir le pourvoi, d’infirmer l’arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario et de rétablir le jugement du juge Keith. Les appelants ont droit à leurs dépens dans toutes les cours.
Appel accueilli avec dépens.
Procureurs des demandeurs, appelants: Bondy, Kirwin & Associates, Windsor.
Date de l'import : 06/04/2012 Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1975-11-13;.1976..2.r.c.s..255
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