ORDONNANCE DE LA COUR (dixième chambre)
21 mars 2013 (*)
«Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Marque communautaire – Marque figurative comportant la lettre ‘G’ et les deux symboles de genre – Opposition du titulaire de la marque figurative comportant la lettre ‘G’ et le symbole ‘+’ – Refus d’enregistrement par la chambre de recours»
Dans l’affaire C‑341/12 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 16 juillet 2012,
Mizuno KK, établie à Osaka (Japon), représentée par M^es T. Raab et H. Lauf, Rechtsanwälte,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant:
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M^me D. Walicka, en qualité d’agent,
partie défenderesse en première instance,
Golfino AG, établie à Glinde (Allemagne),
partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI,
LA COUR (dixième chambre),
composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. D. Šváby et C. Vajda (rapporteur), juges,
avocat général: M. P. Cruz Villalón,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, Mizuno KK (ci-après «Mizuno») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 mai 2012, Mizuno/OHMI – Golfino (G) (T‑101/11, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 20 décembre 2010 (affaire n° R‑0821/2010‑1) (ci-après la «décision litigieuse»), relative à
une procédure d’opposition entre Golfino AG (ci-après «Golfino») et Mizuno.
Le cadre juridique
2 Le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), qui est entré en vigueur le 13 avril 2009.
3 Sous l’intitulé «Motifs relatifs de refus», l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 dispose:
«Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:
[...]
b) lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité et de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.»
4 L’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 était rédigé dans les mêmes termes.
Les faits à l’origine du litige
5 Le 24 juillet 2008, Mizuno a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’OHMI, en vertu du règlement n° 40/94.
6 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant:
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7 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’«arrangement de Nice»), et correspondent à la description suivante, à savoir «Chaussures, chaussures d’athlétisme, chaussures de sport, chaussures décontractées».
8 La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 41/2008, partie A, du 13 octobre 2008.
9 Le 9 janvier 2009, Golfino a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée.
10 L’opposition était fondée sur la marque figurative antérieure déposée le 9 juin 2006 en tant que marque communautaire sous le numéro 515 79 38 (ci-après la «marque antérieure»), reproduite ci-après:
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11 La marque antérieure désigne des produits qui relèvent des classes 18 et 25 de l’arrangement de Nice et des services qui relèvent de la classe 35 de l’arrangement de Nice. S’agissant des produits relevant de ladite classe 25, ils correspondent à la description suivante, à savoir «Vêtements, chaussures, chapellerie, ceintures».
12 Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].
13 Par décision du 18 mars 2010, la division d’opposition a conclu à une absence de risque de confusion et a rejeté l’opposition.
14 Le 11 mai 2010, Golfino a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de la division d’opposition.
15 Par la décision litigieuse, la première chambre de recours de l’OHMI a accueilli le recours et, à ce titre, a considéré, en substance, qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit pour les produits relevant de la classe 25 de l’arrangement de Nice.
Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
16 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 février 2011, Mizuno a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.
17 À l’appui de son recours, Mizuno a soulevé un moyen unique, tiré d’une violation de règles de droit, qui se divise en deux branches et dont seul celle tirée d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 fait l’objet du présent pourvoi. Mizuno a soutenu devant le Tribunal que c’est à tort que la chambre de recours a conclu, d’une part, au caractère similaire, aux niveaux visuel, phonétique et conceptuel, des signes en conflit et, d’autre part, à l’existence
d’un risque de confusion entre les marques en cause.
18 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours introduit par Mizuno et a confirmé la décision de la chambre de recours.
19 En ce qui concerne la similitude des signes, le Tribunal a constaté que l’appréciation globale du risque de confusion entre deux marques repose, notamment, sur une comparaison des signes en conflit, qui doit être effectuée en tenant compte des caractéristiques visuelle, phonétique ou conceptuelle de l’ensemble des composants desdits signes. Le Tribunal a jugé que la chambre de recours a appliqué cette même méthode d’analyse à chacun des signes en conflit et les a examinés dans leur ensemble.
Le Tribunal a estimé que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu, d’une part, que les deux signes en conflit contenaient plusieurs éléments et, d’autre part, au caractère globalement très similaire des signes en conflit.
20 En ce qui concerne l’appréciation du risque de confusion, le Tribunal a constaté que la chambre de recours a appréhendé les signes en conflit dans leur ensemble afin d’apprécier le risque de confusion entre la marque antérieure et la marque dont l’enregistrement est demandé. Il a jugé que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les deux éléments de la marque antérieure étaient des caractères usuels, que leur combinaison n’avait aucune signification par rapport aux
produits pour lesquels elle avait été enregistrée et que le caractère distinctif de cette marque devait donc être considéré comme normal. Il a estimé que c’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré que la lettre «G» occupait une place dominante tant dans la marque dont l’enregistrement est demandé que dans la marque antérieure. Il a par ailleurs considéré que, compte tenu du caractère distinctif normal de la marque antérieure, de l’identité des produits concernés et du fait
que les deux signes en conflit sont globalement très similaires, il existait un risque de confusion pour le consommateur moyen.
Les conclusions des parties devant la Cour
21 Mizuno conclut à l’annulation de l’arrêt attaqué et de la décision litigieuse ainsi qu’à la condamnation de Golfino aux dépens exposés par elle tant en première instance que dans le cadre de la procédure de pourvoi.
22 L’OHMI conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de Mizuno aux dépens.
Sur le pourvoi
23 En vertu de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, le rejeter totalement ou partiellement par voie d’ordonnance motivée.
24 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.
25 À l’appui de son pourvoi, Mizuno soulève un moyen unique tiré de l’existence d’erreurs dans l’interprétation et l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En substance, Mizuno reproche au Tribunal d’avoir omis de tenir compte de l’ensemble des circonstances pertinentes du cas d’espèce et, par conséquent, d’avoir incorrectement évalué la portée de la protection de la marque antérieure et la similitude entre les signes. Spécifiquement, le Tribunal aurait non
pas fondé son appréciation de la similitude entre les signes sur l’impression générale suscitée par les marques en conflit, mais erronément procédé à une appréciation analytique basée sur leur décomposition.
26 À la lumière de l’argumentation développée par Mizuno, il convient, d’emblée, de rappeler que, conformément aux articles 256, paragraphe 1, TFUE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de
leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, notamment, arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 22, et du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, Rec. p. I‑10053, point 68).
27 Il importe également de rappeler qu’il ressort des articles 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour ainsi que 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure (devenu, depuis le 1^er novembre 2012, article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure), qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande
(voir, notamment, arrêt du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, point 34, ainsi que ordonnance du 23 octobre 2009, Commission/Potamianos et Potamanios/Commission, C‑561/08 P et C‑4/09 P, point 58).
28 Il s’ensuit que les griefs soulevés par Mizuno qui tendent à remettre en cause des appréciations factuelles du Tribunal ou qui n’indiquent pas de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt attaqué ainsi que l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal doivent être rejetés comme étant manifestement irrecevables.
29 Dans la mesure où le pourvoi de Mizuno satisfait aux conditions rappelées aux points 26 et 27 du présent arrêt quant à la recevabilité, il convient de constater qu’il est manifestement non fondé.
30 Tout d’abord, Mizuno reproche au Tribunal d’avoir violé le principe de l’appréciation globale, tant dans son appréciation de la similitude des signes en conflit que dans son appréciation de la marque dont Mizuno demande l’enregistrement. Le Tribunal ne se serait pas basé sur l’impression d’ensemble produite par les marques en cause, mais aurait appliqué un critère erroné d’appréciation analytique fragmentée.
31 Cet argument est manifestement dénué de fondement étant donné que le Tribunal a, d’une part, expressément rappelé, aux points 28, 35 et 36 de l’arrêt attaqué, la jurisprudence selon laquelle le risque de confusion doit bien être apprécié globalement et c’est l’impression d’ensemble produite par les signes en cause qui doit être examinée et, d’autre part, a itérativement mentionné au cours de son examen des arguments de Mizuno, aux points 37, 38, 43, 48, 66 à 68, 71, 72 et 76 de l’arrêt
attaqué, les principes découlant de cette jurisprudence et les a correctement appliqués.
32 Ensuite, selon Mizuno, en contradiction avec le principe de l’appréciation globale, le Tribunal a jugé, au point 41 de l’arrêt attaqué, que la marque de Mizuno était un signe figuratif composé de trois éléments et, au point 42 de l’arrêt attaqué, que chacun des signes en conflit contenait plusieurs éléments. Mizuno considère, par ailleurs, que le Tribunal a commis une erreur de droit que ce soit en ne prenant pas en compte son propre constat, émis au point 41 de l’arrêt attaqué, selon lequel
la marque de Mizuno se composait de trois éléments accolés entre eux ou en concluant que le fait que ces éléments étaient accolés entre eux n’avait pas pour conséquence qu’ils formaient un signe figuratif homogène.
33 À cet égard, il convient de constater que, manifestement, l’appréciation globale d’un signe n’exclut pas la possibilité d’identifier les différents éléments qui le composent, notamment afin de déterminer si l’un de ceux-ci constitue éventuellement un élément dominant et si les autres sont négligeables (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, points 41 et 42). Cet argument est, par conséquent, manifestement non fondé.
34 Mizuno estime, enfin, que le Tribunal a également commis une erreur de droit en accordant une importance excessive à la lettre «G», au détriment du symbole global, la considérant comme plus forte que l’impression produite dans la mémoire du public par les autres éléments figuratif, violant ainsi, aux points 44, 52 et 55 de l’arrêt attaqué, le principe de l’appréciation globale.
35 Cet argument est également manifestement non fondé étant donné qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour (voir arrêt OHMI/Shaker, précité, point 41 et jurisprudence citée), au demeurant citée par le Tribunal au point 36 de l’arrêt attaqué, qu’un examen des marques dans leur ensemble n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants.
36 Eu égard à l’ensemble de ce qui précède, il convient de rejeter le présent pourvoi comme en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.
Sur les dépens
37 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, dudit règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant conclu à la condamnation de Mizuno et celle-ci ayant succombé en son moyen unique, il y a lieu de la condamner
aux dépens de la présente instance.
Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) ordonne:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Mizuno KK est condamnée aux dépens.
Signatures
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* Langue de procédure: l’allemand.