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12/10/2016 | CJUE | N°C-511/15

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, Renata Horžić et Siniša Pušić contre Privredna banka Zagreb d.d. et Božo Prka., 12/10/2016, C-511/15


ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

12 octobre 2016 ( *1 ) ( 1 )

[Texte rectifié par ordonnance du 15 décembre 2016]

«Renvoi préjudiciel — Article 99 du règlement de procédure de la Cour — Contrats de crédit aux consommateurs — Directive 2008/48/CE — Contrat de crédit immobilier — Taux d’intérêt variable — Obligations incombant au prêteur — Réglementation nationale applicable aux contrats en cours à la date de son entrée en vigueur — Inapplicabilité de la directive 2008/48»

Dans les affaires jointes C‑511/15

et C‑512/15,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introdui...

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

12 octobre 2016 ( *1 ) ( 1 )

[Texte rectifié par ordonnance du 15 décembre 2016]

«Renvoi préjudiciel — Article 99 du règlement de procédure de la Cour — Contrats de crédit aux consommateurs — Directive 2008/48/CE — Contrat de crédit immobilier — Taux d’intérêt variable — Obligations incombant au prêteur — Réglementation nationale applicable aux contrats en cours à la date de son entrée en vigueur — Inapplicabilité de la directive 2008/48»

Dans les affaires jointes C‑511/15 et C‑512/15,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par le Prekršajni sud u Bjelovaru (tribunal correctionnel de Bjelovar, Croatie), par décisions du 15 septembre 2015, parvenues à la Cour le 25 septembre 2015, dans les procédures

Renata Horžić (C‑511/15),

Siniša Pušić (C‑512/15)

contre

Privredna banka Zagreb d.d.,

Božo Prka

LA COUR (sixième chambre)

composée de M. E. Regan (rapporteur), président de chambre, MM. J.‑C. Bonichot et A. Arabadjiev, juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : M. A. Calot Escobar,

considérant les observations présentées :

— pour la République de Croatie, par Mme A. Metelko-Zgombić, en qualité d’agent,

— pour la République tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

— pour la Commission européenne, par Mme G. Goddin et M. M. Mataija, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 [Tel que rectifié par ordonnance du 15 décembre 2016] Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation des articles 23 et 30, paragraphe 1, de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66, ainsi que rectificatifs JO 2009, L 207, p. 14, JO 2010, L 199, p. 40, JO 2011, L 234, p. 46, et JO 2015, L 36, p. 15).

2 Ces demandes ont été présentées dans le cadre de procédures pénales engagées à la suite de dépôts de plainte de Mme Renata Horžić et de M. Siniša Pušić, qui se sont constitués parties civiles, visant Privredna banka Zagreb d.d. et M. Božo Prka, responsable de cette société (ci-après, ensemble, les « prévenus »), en raison de la violation alléguée de certaines obligations de ces derniers en matière de crédit à la consommation.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 Les considérants 9 et 10 de la directive 2008/48 énoncent :

« (9) Une harmonisation complète est nécessaire pour assurer à tous les consommateurs de [l’Union] un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts et pour créer un véritable marché intérieur. Par conséquent, les États membres ne devraient pas être autorisés à maintenir ou introduire des dispositions nationales autres que celles prévues par la présente directive. Cependant, une telle restriction ne devrait s’appliquer que dans le cas où il existe des dispositions harmonisées dans la
présente directive. En l’absence de telles dispositions harmonisées, les États membres devraient cependant être libres de maintenir ou d’introduire des dispositions législatives nationales. […]

(10) Les définitions contenues dans la présente directive déterminent la portée de l’harmonisation. L’obligation qui incombe aux États membres de mettre en œuvre les dispositions de la présente directive devrait, dès lors, être limitée au champ d’application de la présente directive, tel qu’il résulte de ces définitions. Toutefois, la présente directive devrait être sans préjudice de l’application par les États membres, conformément au droit [de l’Union], des dispositions de la présente directive
à des domaines qui ne relèvent pas de son champ d’application. Dès lors, un État membre pourrait maintenir ou introduire des dispositions nationales correspondant aux dispositions de la présente directive ou à certaines de ses dispositions pour les contrats de crédit n’entrant pas dans le champ d’application de la présente directive […] »

4 Le considérant 14 de cette directive est libellé comme suit :

« Il convient d’exclure du champ d’application de la présente directive les contrats de crédit ayant pour objet l’octroi d’un crédit garanti par un bien immobilier. Ce type de crédit a en effet une spécificité propre. De même, il y a lieu d’exclure du champ d’application de la présente directive les contrats de crédit visant à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété d’un terrain ou d’un immeuble existant ou à construire. […] »

5 L’article 2 de ladite directive, intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.   La présente directive s’applique aux contrats de crédit.

2.   La présente directive ne s’applique pas :

[…]

b) aux contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété d’un terrain ou d’un immeuble existant ou à construire ;

[…] »

6 Aux termes de l’article 11 de la même directive, intitulé « Information sur le taux débiteur » :

« 1.   Le cas échéant, le consommateur est informé d’une modification du taux débiteur, sur un support papier ou sur un autre support durable, avant que la modification n’entre en vigueur. Cette information indique le montant des paiements à effectuer après l’entrée en vigueur du nouveau taux débiteur et précise si le nombre ou la périodicité des paiements change.

2.   Toutefois, les parties peuvent convenir dans le contrat de crédit que l’information visée au paragraphe 1 est communiquée périodiquement au consommateur, lorsque la modification du taux débiteur résulte d’une modification d’un taux de référence, que le nouveau taux de référence est rendu public par des moyens appropriés et que l’information relative au nouveau taux de référence est également disponible dans les locaux du prêteur. »

7 L’article 22 de la directive 2008/48, intitulé « Harmonisation et caractère impératif de la présente directive », dispose, à son paragraphe 1 :

« Dans la mesure où la présente directive contient des dispositions harmonisées, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive. »

8 L’article 23 de cette directive, intitulé « Sanctions », prévoit :

« Les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. »

9 Intitulé « Mesures transitoires », l’article 30 de ladite directive énonce :

« 1.   La présente directive ne s’applique pas aux contrats de crédit en cours à la date d’entrée en vigueur des mesures nationales de transposition.

2.   Toutefois, les États membres veillent à ce que [l’article] 11 […] [s’applique] également aux contrats de crédit à durée indéterminée en cours à la date d’entrée en vigueur des mesures nationales de transposition. »

Le droit croate

10 La Zakon o potrošačkom kreditiranju (loi relative au crédit à la consommation) (Narodne novine, br. 75/09), entrée en vigueur le 1er janvier 2010, a pour objet de transposer, dans le droit national, les dispositions de la directive 2008/48.

11 L’article 3 de cette loi énumère les types de contrats de crédit auxquels celle-ci ne s’applique pas, parmi lesquels ne figurent ni les contrats de crédit garantis par une hypothèque ou une autre sûreté comparable ni les contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété d’un terrain ou d’un immeuble existant ou à construire.

12 L’article 11 de ladite loi, intitulé « Information sur le taux d’intérêt », dispose :

« (1)   Si des taux d’intérêt variables ont été convenus, le créancier informe le consommateur de tout changement de ces taux, sur papier ou sur un autre support durable, au moins 15 jours avant l’entrée en vigueur du changement. Cette information indique le montant des versements périodiques à effectuer après l’entrée en vigueur du nouveau taux d’intérêt et précise, si le nombre et la périodicité des paiements changent, les modalités de ce changement.

(2)   Les parties peuvent convenir dans le contrat de crédit que les informations visées au paragraphe 1 sont communiquées périodiquement au consommateur, si la modification du taux d’intérêt résulte d’une modification d’un taux de référence, à condition que le nouveau taux de référence soit publiquement accessible, notamment dans les locaux commerciaux du prêteur. »

13 La loi relative au crédit à la consommation a été modifiée, avec effet au 1er janvier 2014, par la Zakon o izmjenama i dopunama Zakona o potrošačkom kreditiranju (loi modifiant et complétant la loi relative au crédit à la consommation, Narodne novine, br. 143/13).

14 Inséré par l’article 3 de cette dernière loi, l’article 11a de la loi relative au crédit à la consommation, telle que modifiée, intitulé « Taux d’intérêt variable », dispose :

« (1)   Si des taux d’intérêt variables ont été convenus, le créancier doit :

a) définir un paramètre clair et connu des consommateurs pour adopter des décisions en matière de correction de ces taux ;

b) élaborer sur les plans qualitatif et quantitatif un lien de causalité entre les fluctuations du paramètre visé au point a) et leur impact sur les taux d’intérêt variables, et

c) déterminer à quelles périodes se rapporte l’adoption de la décision de correction des taux d’intérêt variables (quelle est la période de base et quelle est la période de référence).

(2)   Le paramètre visé au paragraphe 1 du présent article est l’une des variables suivantes : Euribor, LIBOR, TNR (taux national de référence), rendement des bons du Trésor ou taux d’intérêt moyen sur les dépôts des particuliers dans une monnaie donnée. Le taux variable est fixé en ajoutant au paramètre convenu une marge fixe qu’il est interdit aux banques de dépasser au cours de la période de remboursement et qui doit être convenue en même temps que le paramètre.

(3)   Les fluctuations des taux d’intérêt dans une période de référence ne peuvent être supérieures, respectivement inférieures en cas de baisse, à la fluctuation du paramètre visé au paragraphe 1, exprimée en points de pourcentage.

(4)   Si le prêteur offre des taux d’intérêt variables, il doit clairement et sans ambiguïté communiquer au consommateur les éléments visés au paragraphe 1 avant la conclusion du contrat de crédit ; de même, il doit avertir le consommateur de tous les risques attachés à la variabilité et clairement et sans ambiguïté exposer dans le contrat les éléments variables sur la base desquels le taux d’intérêt variable est calculé.

(5)   Pour tous les contrats de crédit en cours conclus jusqu’à l’entrée en vigueur de la présente loi sans fixer le paramètre ni établir le lien de causalité, le créancier doit, conformément au présent article, définir le paramètre par l’une des variables suivantes :

— un taux d’intérêt de référence (Euribor, LIBOR) ou

— le TNR ou

— le taux de rendement des bons du Trésor du ministère des Finances ou

— le taux d’intérêt moyen sur les dépôts des particuliers dans une monnaie donnée ;

il doit également indiquer la partie fixe du taux d’intérêt et les intervalles de modification des taux d’intérêt. […]

[…] »

15 L’article 26, paragraphe 1, point 28, de la loi relative au crédit à la consommation, telle que modifiée, prévoit l’infliction d’une amende pour le prêteur ou l’intermédiaire de crédit qui ne respecte pas ses obligations au titre de l’article 11a, paragraphe 5, de celle‑ci.

16 Aux termes de l’article 13 de la loi modifiant et complétant la loi relative au crédit à la consommation:

« (1)   En tant qu’il se rapporte à l’article 11a, paragraphe 5, de la loi relative au crédit à la consommation […], l’article 3 de la présente loi, est applicable à tous les contrats de crédit à la consommation, indépendamment de la date de leur conclusion.

(2)   Pour les contrats de crédit en cours qui ont été conclus jusqu’à l’entrée en vigueur de la présente loi sans fixer les paramètres ni établir leur lien de causalité, les prêteurs doivent au plus tard au 1er janvier 2014 établir un taux d’intérêt avec le débiteur, moyennant des paramètres et des marges fixes, ainsi que la durée d’application des taux d’intérêt variables. »

Les litiges au principal et les questions préjudicielles

17 Mme Horžić et M. Pušić ont chacun conclu avec les prévenus, respectivement, le 12 octobre 2005 et le 21 septembre 2006, un contrat de crédit immobilier prévoyant un taux d’intérêt variable fixé, selon le cas, à 4,03 % et à 4,25 %. Par la suite, ce taux d’intérêt a été plusieurs fois relevé pour atteindre, respectivement, 5,95 % et 6,00 %.

18 À l’occasion de la dernière augmentation dudit taux, les requérants au principal ont reçu de Privredna banka Zagreb un avis leur indiquant que celle-ci s’expliquait par des changements intervenus dans les groupes de produits bancaires commercialisés ainsi que par la stabilité de l’entreprise. Cet avis ne fournissait, en revanche, aucune information quant aux paramètres appliqués pour calculer le montant de cette augmentation.

19 Lesdits requérants ont alors saisi le Prekršajni sud u Bjelovaru (tribunal correctionnel de Bjelovar, Croatie) d’une plainte visant les prévenus, au motif que ceux-ci avaient enfreint la loi relative au crédit à la consommation, telle que modifiée, en n’ayant pas établi, au 1er janvier 2014, une annexe à leur contrat de crédit définissant les paramètres et la partie fixe des taux d’intérêt ainsi que la période d’application de ceux-ci, conformément aux dispositions de l’article 11a, paragraphe 5,
de cette loi.

20 Les prévenus ont cependant fait valoir que ladite loi n’est pas conforme à la directive 2008/48, en particulier à l’article 30, paragraphe 1, de celle‑ci, dès lors qu’elle impose au prêteur des obligations en matière de définition du taux d’intérêt variable en ce qui concerne des contrats de crédit qui étaient en cours à la date d’entrée en vigueur de la même loi, à savoir le 1er janvier 2014, comportant ainsi un effet rétroactif contraire à cette disposition, et cela alors même que ladite
directive a réalisé une harmonisation complète.

21 Dans ces conditions, le Prekršajni sud u Bjelovaru (tribunal correctionnel de Bjelovar) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’application rétroactive de la loi [relative au crédit à la consommation, telle que modifiée,] peut-elle être interprétée ainsi qu’appréciée exclusivement suivant les dispositions de cette loi et une telle application de [ladite] loi […] est-elle conforme au droit de l’Union, en particulier à l’article 30 de la directive 2008/48 […], dont le paragraphe 1 énonce expressément que cette directive ne s’applique pas aux contrats de crédit conclus avant l’entrée en vigueur de la législation
nationale qui a transposé [ladite] directive dans le droit national ?

2) Dans le cadre évoqué ci-dessus, la disposition pénale de l’article 26, paragraphe 1, point 28, de la loi relative au crédit à la consommation[, telle que modifiée], peut-elle être interprétée, conformément à l’article 23 de la directive [2008/48] et à la lumière des dispositions transitoires de son article 30, en ce sens que les sanctions prévues pour la violation d’une disposition nationale adoptée sur la base de la directive en cause ne peuvent être appliquées à des violations éventuelles se
rattachant à des contrats de crédit en cours à la date de mise en œuvre des mesures nationales d’exécution ? »

22 Par une décision du président de la Cour du 28 octobre 2015, les affaires C‑511/15 et C‑512/15 ont été jointes aux fins de la procédure écrite et de la présente ordonnance.

Sur les questions préjudicielles

23 Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 23 et 30, paragraphe 1, de la directive 2008/48 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à des dispositions nationales, telles que celles en cause au principal, qui imposent au prêteur, sous peine de sanctions pénales, le respect d’obligations en matière de taux d’intérêt variable en ce qui concerne des contrats de crédit en cours à la date d’entrée en vigueur de ces
dispositions.

24 En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

25 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans les présentes affaires. En effet, ainsi que l’ont fait valoir, en substance, les gouvernements croate et tchèque ainsi que la Commission européenne, la réponse aux questions posées par la juridiction de renvoi peut être clairement déduite de la jurisprudence de la Cour, en particulier, de l’arrêt du 22 juillet 2012, SC Volksbank România (C‑602/10, EU:C:2012:443), et de l’ordonnance du 3 juillet 2014, Tudoran (C‑92/14, EU:C:2014:2051).

26 À cet égard, il convient de rappeler que, certes, ainsi que les prévenus l’ont fait valoir, il découle de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48, interprété à la lumière des considérants 9 et 10 de celle-ci, que, en ce qui concerne les contrats de crédit qui relèvent du champ d’application de cette directive, celle-ci prévoit une harmonisation complète et, ainsi qu’il résulte de l’intitulé dudit article 22, revêt un caractère impératif, qui doivent être compris en ce sens que, dans
les matières spécifiquement visées par cette harmonisation, les États membres ne sont pas autorisés à maintenir ou à introduire des dispositions nationales autres que celles qui sont prévues par la même directive (arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, point 38).

27 Il demeure, toutefois, que, en vertu du libellé sans équivoque de l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la directive 2008/48, et eu égard au considérant 14 de celle-ci, les contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété d’un terrain ou d’un immeuble existant ou à construire sont exclus du champ d’application matériel de cette directive (voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, point 42, et ordonnance
du 3 juillet 2014, Tudoran, C‑92/14, EU:C:2014:2051, point 30).

28 Il s’ensuit que, dans la mesure où il ressort des décisions de renvoi que les contrats de crédit en cause au principal sont des contrats de crédit « immobilier », la directive 2008/48 ne s’applique pas aux faits en cause au principal (voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, points 41 et 42, ainsi que ordonnance du 3 juillet 2014, Tudoran, C‑92/14, EU:C:2014:2051, point 31).

29 Cela étant, ainsi qu’il ressort du considérant 10 de cette directive, les États membres peuvent, conformément au droit de l’Union, appliquer des dispositions de ladite directive à des domaines qui ne relèvent pas de son champ d’application. Ainsi, la Cour a déjà jugé que les États membres peuvent maintenir ou introduire des mesures nationales correspondant aux dispositions de cette directive ou à certaines d’entre elles, en ce qui concerne des contrats de crédit n’entrant pas dans le champ
d’application de ladite directive (arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, point 40).

30 Partant, s’agissant de contrats de crédit tels que ceux en cause au principal, l’harmonisation que prévoit la directive 2008/48 ne s’oppose pas à ce qu’un État membre inclue ces contrats dans le champ d’application d’une mesure nationale visant à transposer cette directive, afin d’appliquer toutes les dispositions de cette directive ou certaines d’entre elles à ces contrats (arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, points 40 et 43).

31 Ainsi qu’il ressort des considérants 9 et 10 de la directive 2008/48, il revient, en principe, aux États membres de déterminer les conditions dans lesquelles ils souhaitent étendre leur régime national transposant cette directive à des contrats de crédit, tels que ceux en cause au principal, qui ne relèvent pas de l’un des domaines pour lesquels le législateur de l’Union a entendu fixer des dispositions harmonisées (arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443,
point 52).

32 Il s’ensuit que, si, pour ces contrats, les États membres peuvent introduire, dans leur réglementation nationale visant à transposer la directive 2008/48, une règle correspondant spécifiquement à la mesure transitoire prévue à l’article 30, paragraphe 1, de ladite directive, ils peuvent, en principe, également, dans le respect des règles du traité FUE et sans préjudice d’autres actes de droit dérivé éventuellement pertinents, fixer une mesure transitoire différente qui implique que ladite
réglementation s’applique également aux contrats en cours à la date d’entrée en vigueur de celle‑ci (arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, point 53).

33 Il en est de même en ce qui concerne le régime de sanctions prévu à l’article 23 de la directive 2008/48. Ainsi, cet article ne s’oppose pas à ce qu’un État membre applique, dans sa réglementation nationale, en ce qui concerne des contrats de crédit en cours ne relevant pas du champ d’application matériel de la directive 2008/48, des dispositions relatives aux sanctions en cas de violation des dispositions de cette réglementation.

34 Cette interprétation s’impose à plus forte raison en l’occurrence, dès lors que, à la différence de l’article 11 de la loi relative au crédit à la consommation, qui constitue une mesure de mise en œuvre de l’article 11 de la directive 2008/48, concernant les informations relatives au taux débiteur, les dispositions nationales en cause dans les litiges au principal, relatives à la définition des taux d’intérêt variables, telles qu’édictées, en particulier, à l’article 11a de la loi relative au
crédit à la consommation, telle que modifiée, ne correspondent à aucune des dispositions de la directive 2008/48 et, partant, ne peuvent être considérées comme visant à transposer celle‑ci.

35 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que les articles 23 et 30, paragraphe 1, de la directive 2008/48 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à des dispositions nationales, telles que celles en cause au principal, qui imposent au prêteur, sous peine de sanctions pénales, le respect d’obligations en matière de taux d’intérêt variable en ce qui concerne des contrats de crédit en cours à la date d’entrée en vigueur
de ces dispositions, dès lors que ces contrats de crédit ne relèvent pas du champ d’application matériel de cette directive et que, en outre, ces obligations ne constituent pas une mise en œuvre de celle‑ci.

Sur les dépens

36 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

  Les articles 23 et 30, paragraphe 1, de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à des dispositions nationales, telles que celles en cause au principal, qui imposent au prêteur, sous peine de sanctions pénales, le respect d’obligations en matière de taux d’intérêt variable en ce qui concerne des
contrats de crédit en cours à la date d’entrée en vigueur de ces dispositions, dès lors que ces contrats de crédit ne relèvent pas du champ d’application matériel de cette directive et que, en outre, ces obligations ne constituent pas une mise en œuvre de celle‑ci.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le croate.

( 1 ) Le dispositif du présent texte a fait l’objet d’une modification d’ordre linguistique, postérieurement à sa mise en ligne initiale.


Synthèse
Formation : Sixième chambre
Numéro d'arrêt : C-511/15
Date de la décision : 12/10/2016
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demandes de décision préjudicielle, introduites par le Prekršajni Sud u Bjelovaru.

Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Contrats de crédit aux consommateurs – Directive 2008/48/CE – Contrat de crédit immobilier – Taux d’intérêt variable – Obligations incombant au prêteur – Réglementation nationale applicable aux contrats en cours à la date de son entrée en vigueur – Inapplicabilité de la directive 2008/48.

Rapprochement des législations

Protection des consommateurs


Parties
Demandeurs : Renata Horžić et Siniša Pušić
Défendeurs : Privredna banka Zagreb d.d. et Božo Prka.

Composition du Tribunal
Avocat général : Sharpston
Rapporteur ?: Regan

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2016:787

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