ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
7 septembre 2017 (*)
« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Directive 2010/18/UE –Accord-cadre révisé sur le congé parental – Clause 5, points 1 et 2 – Retour de congé parental – Droit de retrouver son poste de travail ou un travail équivalent ou similaire – Maintien en l’état des droits acquis ou en cours d’acquisition – Fonctionnaire d’un Land promu en tant que fonctionnaire stagiaire à un poste de direction – Réglementation dudit Land prévoyant la fin du stage de plein droit et sans possibilité de prolongation à
l’expiration d’une période de deux ans, même en cas d’absence résultant d’un congé parental – Incompatibilité –Conséquences »
Dans l’affaire C‑174/16,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne), par décision du 2 juillet 2015, parvenue à la Cour le 24 mars 2016, dans la procédure
H.
contre
Land Berlin,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M^me A. Prechal (rapporteur), M. A. Rosas, M^me C. Toader et M. E. Jarašiūnas, juges,
avocat général : M. P. Mengozzi,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour M^me H., par elle-même,
– pour le Land Berlin, par MM. M. Theis, E.-N. Voigt et K.-P. Nießner ainsi que par M^me A. Hollmann, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par M^me C. Valero et M. M. Kellerbauer, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 avril 2017,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé sur le congé parental, conclu le 18 juin 2009 (ci-après l’« accord-cadre révisé »), qui figure à l’annexe de la directive 2010/18/UE du Conseil, du 8 mars 2010, portant application de l’accord-cadre révisé sur le congé parental conclu par BUSINESSEUROPE, l’UEAPME, le CEEP et la CES et abrogeant la directive 96/34/CE (JO 2010, L 68, p. 13), ainsi que de l’article 14,
paragraphe 1, sous a) et c), et des articles 15 ainsi que 16 de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail (JO 2006, L 204, p. 23).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M^me H. au Land Berlin (Land de Berlin, Allemagne) au sujet d’une décision de ce dernier, adressée à M^me H. durant son congé parental et informant celle-ci que, n’ayant pas, du fait de son absence liée à ce congé, accompli avec succès le stage de deux ans dans le poste de direction auquel elle avait été affectée antérieurement audit congé, son statut de fonctionnaire stagiaire avait pris fin et qu’elle était, en conséquence,
réintégrée à son poste précédent, de niveau inférieur.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La directive 2010/18 et l’accord-cadre révisé
3 La directive 2010/18 a abrogé, avec effet au 8 mars 2012, la directive 96/34/CE du Conseil, du 3 juin 1996, concernant l’accord-cadre sur le congé parental conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES (JO 1996, L 145, p. 4), conclu le 14 décembre 1995 (ci-après l’« accord-cadre de 1995 »).
4 Aux termes des considérants 8 et 11 de la directive 2010/18 :
« (8) Étant donné que les objectifs de la directive, à savoir permettre aux parents qui travaillent de mieux concilier leur vie professionnelle, leur vie privée et leur vie de famille et œuvrer à l’égalité entre hommes et femmes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du travail et le traitement dans le travail dans l’ensemble de l’Union, ne peuvent être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc être mieux réalisés au niveau de l’Union, l’Union peut adopter des
mesures conformément au principe de subsidiarité consacré à l’article 5 du traité sur l’Union européenne. [...]
[...]
(11) La clause 1, paragraphe 1, de l’accord-cadre révisé indique que l’accord énonce des prescriptions minimales, dans l’esprit des principes généraux du droit de l’Union dans le domaine social. »
5 L’article 3, paragraphe 1, de cette directive prévoit :
« Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive ou s’assurent que les partenaires sociaux ont mis en place les mesures nécessaires par voie d’accord, au plus tard le 8 mars 2012. [...] »
6 Le préambule de l’accord-cadre révisé énonce notamment ce qui suit :
« Le présent accord-cadre [...] révise [l’accord-cadre de 1995] mettant en place les prescriptions minimales sur le congé parental, en tant que moyen important de concilier les responsabilités professionnelles et familiales et de promouvoir l’égalité des chances et de traitement entre les hommes et les femmes.
[...]
I. Considérations générales
[...]
3. vu la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000 et ses articles 23 et 33, relatifs à l’égalité entre les hommes et les femmes et à la conciliation de la vie professionnelle, de la vie privée et de la vie familiale,
[...]
22. considérant que le régime du congé parental est destiné à aider, pendant une durée déterminée, les parents qui travaillent, de manière à les inciter à demeurer dans la vie active [...]
[...] »
7 La clause 1, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé prévoit :
« 1. Le présent accord énonce des prescriptions minimales visant à faciliter la conciliation des responsabilités professionnelles et familiales des parents qui travaillent, compte tenu de la diversité de plus en plus grande des structures familiales, dans le respect de la législation, des conventions collectives et/ou de la pratique nationales.
2. Le présent accord s’applique à tous les travailleurs, des hommes ou femmes, ayant un contrat ou une relation de travail définie par la législation, des conventions collectives et/ou la pratique en vigueur dans chaque État membre. »
8 Aux termes de la clause 2 de cet accord-cadre :
« 1. En vertu du présent accord, un droit individuel à un congé parental est accordé aux travailleurs, hommes ou femmes, en raison de la naissance ou de l’adoption d’un enfant, de manière à leur permettre de prendre soin de cet enfant jusqu’à ce qu’il atteigne un âge déterminé pouvant aller jusqu’à huit ans, à définir par les États membres et/ou les partenaires sociaux.
2. Le congé est accordé pour une période d’au moins quatre mois [...] »
9 La clause 3, point 1, dudit accord-cadre énonce :
« Les conditions d’accès au congé parental et ses modalités d’application sont définies par la loi et/ou par les conventions collectives dans les États membres, dans le respect des prescriptions minimales du présent accord. Les États membres et/ou les partenaires sociaux peuvent notamment :
a) décider d’accorder le congé parental à temps plein, à temps partiel, de manière fragmentée, ou sous la forme d’un crédit-temps, en tenant compte des besoins des employeurs et des travailleurs ;
b) subordonner le droit au congé parental à une période de travail et/ou à une période d’ancienneté qui ne peut dépasser un an. [...]
c) définir les circonstances dans lesquelles l’employeur, après consultation conformément à la législation, aux conventions collectives et/ou à la pratique nationales, est autorisé à reporter l’octroi du congé parental pour des raisons justifiables liées au fonctionnement de l’entreprise [...]
d) en plus du point c), autoriser des arrangements particuliers pour répondre aux besoins de fonctionnement et d’organisation des petites entreprises. »
10 Intitulée « Droits en matière d’emploi et non-discrimination », la clause 5 du même accord-cadre stipule :
« 1. À l’issue du congé parental, le travailleur a le droit de retrouver son poste de travail ou, si cela se révèle impossible, un travail équivalent ou similaire conforme à son contrat ou à sa relation de travail.
2. Les droits acquis ou en cours d’acquisition par le travailleur à la date du début du congé parental sont maintenus en l’état jusqu’à la fin du congé parental. Ces droits s’appliquent à l’issue du congé parental, tout comme les modifications apportées à la législation, aux conventions collectives et/ou à la pratique nationales.
3. Les États membres et/ou les partenaires sociaux définissent le régime du contrat ou de la relation de travail pour la période du congé parental.
[...] »
La directive 2006/54
11 L’article 14, paragraphe 1, de la directive 2006/54 dispose :
« Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe est proscrite dans les secteurs public ou privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne :
a) les conditions d’accès à l’emploi [...] y compris en matière de promotion ;
[...]
c) les conditions d’emploi et de travail [...]
[...] »
12 L’article 15 de cette directive énonce :
« Une femme en congé de maternité a le droit, au terme de ce congé, de retrouver son emploi ou un emploi équivalent à des conditions qui ne lui soient pas moins favorables [...] »
13 L’article 16 de ladite directive prévoit :
« La présente directive est aussi sans préjudice de la faculté dont disposent les États membres de reconnaître des droits distincts au congé de paternité et/ou d’adoption. Les États membres qui reconnaissent de tels droits prennent les mesures nécessaires [...] pour veiller à ce que, à l’issue de ce congé, [les travailleurs et travailleuses] aient le droit de retrouver leur emploi ou un emploi équivalent à des conditions qui ne leur soient pas moins favorables [...] »
Le droit allemand
14 Le statut du fonctionnaire stagiaire nommé à un poste de direction est régi, s’agissant du Land de Berlin, par l’article 97 du Landesbeamtengesetz (loi du Land relative aux fonctionnaires, ci-après le « LBG »), du 19 mars 2009.
15 L’article 97, paragraphe 1, du LBG prévoit, notamment, que le stage effectué sur un tel poste s’étend sur une durée de deux ans qui ne peut être prolongée.
16 Aux termes de l’article 97, paragraphe 2, deuxième phrase, du LBG :
« À partir du jour de la nomination, les droits et obligations afférents au poste qui a été attribué à la ou au fonctionnaire en dernier lieu en tant que fonctionnaire à vie [...] sont suspendus pour la durée du stage [...] »
17 En vertu de l’article 97, paragraphe 4, du LBG, tel que modifié par le Dienstrechtsneuordnungsgesetz (loi portant réforme et modernisation du droit fédéral de la fonction publique), du 22 juin 2011 :
« Le ou la stagiaire qui a accompli son stage avec succès est titularisé [...] Le ou la fonctionnaire non titularisé(e) en fin de stage perd tout droit à la rémunération afférente au poste non attribué. Il ou elle n’a pas acquis de plus amples droits. Le ou la fonctionnaire ne peut, pendant une période d’un an, être admis(e) à un stage portant sur le même poste. Lorsque le ou la stagiaire n’a pas réussi son stage une première fois en raison du seul fait qu’il ou qu’elle n’a pas pu exercer les
fonctions attachées à ce poste de direction pendant une période prolongée, le pouvoir hiérarchique supérieur peut autoriser des exceptions à la septième phrase. »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
18 M^me H. est entrée au service du Land de Berlin au cours de l’année 1999 et bénéficie du statut de fonctionnaire à vie dans l’administration de celui-ci. Depuis le 23 septembre 2008, elle occupait un poste de conseillère relevant de la classe salariale A 16. Au terme d’une procédure de sélection, M^me H. a, le 20 septembre 2011, été promue, en application de l’article 97, paragraphe 1, du LBG, fonctionnaire stagiaire ayant rang de conseillère relevant de la classe salariale supérieure B 2.
En conséquence, elle a été affectée, le 18 octobre 2011, à un poste, alors vacant, relevant de cette dernière classe salariale et comportant des tâches de direction.
19 M^me H. n’a cependant pas pris ses fonctions à ce nouveau poste. En effet, celle-ci s’est trouvée en situation de congé de maladie, pour des raisons liées à sa grossesse, du 25 juillet 2011 au 19 janvier 2012, puis, en congé de maternité du 20 janvier au 27 avril 2012. À l’issue de ce congé de maternité, M^me H. a été en congé jusqu’au 29 mai 2012, avant de se voir accorder un congé parental, qui a débuté le 30 mai 2012 et a été prolongé à plusieurs reprises pour prendre fin le 20 février
2015.
20 Entre-temps, le poste auquel M^me H. avait été affectée en tant que fonctionnaire stagiaire a fait l’objet d’un nouveau concours durant le second semestre de l’année 2012, avant d’être confié à un autre titulaire.
21 Le 4 septembre 2014, le Landesverwaltungsamt Berlin (office de l’administration du Land de Berlin, Allemagne) a avisé M^me H. qu’elle n’avait pas accompli avec succès le stage de deux ans dans le poste susmentionné, faute d’avoir effectivement occupé celui-ci, et que son statut de fonctionnaire stagiaire avait, de ce fait, pris fin le 19 septembre 2013, conformément à l’article 97, paragraphe 4, du LBG. Cet office a également informé l’intéressée qu’elle serait réintégrée à son poste
précédent de conseillère de classe salariale A 16.
22 La réclamation introduite par M^me H. ayant été rejetée par ledit office par une décision du 10 novembre 2014, l’intéressée a saisi le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne) d’un recours visant à obtenir l’annulation de cette décision et à faire juger qu’elle devait conserver son statut de fonctionnaire en stage de promotion à un poste de direction de classe salariale B 2, au-delà du 19 septembre 2013. Au soutien de ce recours, M^me H. a notamment fait valoir
que la décision attaquée méconnaissait les directives 2006/54 et 2010/18.
23 S’agissant de la directive 2010/18 et de l’accord-cadre révisé, le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin) se demande, en particulier, si l’article 97 du LBG est compatible avec la clause 5, point 1, de cet accord-cadre, en ce que, à l’expiration de son congé parental, M^me H. n’a pu retrouver le poste de travail qu’elle occupait antérieurement à ce congé ou un poste équivalent, mais a été réaffectée à un poste statutairement moins élevé. Cette juridiction s’interroge
également sur la compatibilité de cet article 97 avec la clause 5, point 2, dudit accord-cadre, prévoyant le maintien des droits acquis ou en cours d’acquisition, en raison du fait que cette réaffectation a pour conséquence une baisse de salaire. Selon ladite juridiction, il ne pourrait toutefois pas être exclu que, ainsi que le soutient le Land de Berlin, les règles énoncées à l’article 97 du LBG puissent constituer une législation, au sens de la clause 5, point 2, deuxième phrase, du même
accord-cadre, dont pourraient résulter légalement, à la fin du congé parental, des modifications des droits du travailleur.
24 Par ailleurs, la juridiction de renvoi indique que, à supposer que l’article 97 du LBG méconnaisse l’accord-cadre révisé et/ou la directive 2006/54, il serait impossible d’interpréter cet article 97 de manière à en assurer la conformité auxdites normes du droit de l’Union, de sorte qu’il conviendrait, dans ce cas, de laisser cette règle nationale inappliquée.
25 À cet égard, ladite juridiction considère que la solution la plus idoine consisterait à imposer une prolongation du stage à raison de la durée non encore écoulée au début du congé parental, soit sur le poste initial, soit, lorsque, comme en l’occurrence, ce poste a entre-temps été réattribué à un autre fonctionnaire, sur un poste de direction comparable. Toutefois, elle se demande également quelle serait la solution qu’il conviendrait de retenir dans l’hypothèse où aucun poste comparable ne
serait disponible. Enfin, dans la mesure où le droit national exige, en cas d’attribution d’un nouveau poste, la tenue d’une nouvelle procédure de sélection, avec le risque, dans ce cas, qu’un candidat autre que le fonctionnaire de retour de congé parental doive être retenu, la juridiction de renvoi se demande si le droit de l’Union impose de renoncer à une telle procédure.
26 C’est dans ces conditions que le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Les dispositions de la directive [2010/18] ainsi que les dispositions de l’[accord-cadre révisé] doivent-elles être interprétées en ce sens qu’elles font obstacle à une réglementation de droit national conformément à laquelle le stage de promotion à un poste de direction dans la fonction publique prend légalement fin, sans possibilité de prorogation, même lorsque, pendant la majeure partie de ce stage, le ou la fonctionnaire stagiaire se trouvait en situation de congé parental et s’y
trouve encore ?
2) Les dispositions de la directive [2006/54], en particulier son article 14, paragraphe 1, sous a) ou c), son article 15 ou son article 16, doivent-elles être interprétées en ce sens qu’une réglementation de droit national telle que celle qui est décrite dans la première question comporte une discrimination indirecte fondée sur le sexe lorsqu’un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes tombent ou sont susceptibles de tomber sous le coup de ladite réglementation ?
3) En cas de réponse affirmative à la première ou à la deuxième question, l’interprétation des dispositions susvisées du droit de l’Union fait-elle obstacle à une telle réglementation nationale même lorsqu’elle est justifiée par l’objectif de ce stage, qui vise à permettre d’évaluer l’aptitude du ou de la fonctionnaire stagiaire à occuper le poste de direction à pourvoir, aptitude qui ne peut être établie que s’il ou si elle exerce effectivement les charges liées à ce poste pendant une période
prolongée ?
4) En cas de réponse affirmative à la troisième question, l’interprétation du droit de l’Union autorise-t-elle un autre effet juridique que la poursuite du stage au même poste ou à un poste comparable immédiatement à la fin du congé parental, pour la durée du stage non encore écoulée au début de ce congé, par exemple lorsqu’un tel poste ou un poste correspondant n’est plus disponible ?
5) L’interprétation du droit de l’Union impose-t-elle, en pareil cas, de renoncer à toute nouvelle procédure de recrutement selon les dispositions du droit national faisant appel à de nouveaux candidats, organisée en vue de pourvoir un autre poste ou une autre fonction de direction ? »
Sur les questions préjudicielles
Sur la première question et la première branche de la troisième question
27 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui soumet la promotion définitive à un poste de direction de la fonction publique à la condition que le candidat sélectionné effectue avec succès un stage préalable de deux années sur ce poste et en vertu de laquelle, dans une situation où un
tel candidat s’est trouvé, durant la majeure partie de ce stage, en congé parental, et s’y trouve toujours, ledit stage prend légalement fin à l’issue de cette période de deux années, sans qu’une prorogation de celle-ci soit possible, l’intéressé étant, par conséquent, réintégré, lors de son retour de congé parental, dans la fonction, de niveau inférieur, tant sur le plan statutaire qu’en matière de rémunération, qu’il occupait antérieurement à son admission audit stage. En cas de réponse
affirmative à cette première question, la juridiction de renvoi demande, par la première branche de sa troisième question, si cette clause 5, points 1 et 2, doit être interprétée en ce sens qu’une telle réglementation nationale peut néanmoins être justifiée par l’objectif poursuivi par le même stage, qui consiste à permettre l’évaluation de l’aptitude à occuper le poste de direction à pourvoir et requiert, par conséquent, que ledit stage s’étende sur une période prolongée.
Considérations liminaires
28 Il convient de préciser d’emblée que, M^me H. ayant été absente en raison de son congé parental durant la majeure partie du stage requis pour l’obtention du poste de direction concerné, et se trouvant encore en congé parental au moment où l’office de l’administration du Land de Berlin l’a informée qu’elle serait réintégrée à son poste précédent, c’est uniquement à la lumière de la directive 2010/18 et de l’accord-cadre révisé que la réglementation nationale en cause au principal doit être
examinée.
29 Ainsi qu’il ressort du premier alinéa du préambule de l’accord-cadre révisé, cet accord-cadre constitue un engagement des partenaires sociaux, représentés par les organisations interprofessionnelles à vocation générale, de mettre en place, par des prescriptions minimales sur le congé parental, des mesures destinées à permettre une conciliation des responsabilités professionnelles et familiales et de promouvoir l’égalité des chances et de traitement entre les hommes et les femmes.
30 Le considérant 8 de la directive 2010/18 portant application dudit accord-cadre révisé, souligne, de même, que les objectifs poursuivis par cette directive consistent à permettre aux parents qui travaillent de mieux concilier leur vie professionnelle, leur vie privée et leur vie de famille et à œuvrer à l’égalité entre hommes et femmes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du travail et le traitement dans le travail dans l’ensemble de l’Union.
31 Il convient de rappeler, par ailleurs, que le principe d’égalité entre femmes et hommes, notamment en matière d’emploi, de travail et de rémunération, d’une part, et le droit à un congé parental aux fins de pouvoir concilier vie familiale et professionnelle, d’autre part, sont respectivement consacrés aux articles 23 et 33, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), dispositions auxquelles renvoie le point 3 des considérations générales
de l’accord-cadre révisé.
32 Le droit au congé parental a, en effet, été inscrit à l’article 33, paragraphe 2, de la Charte, parmi les droits sociaux fondamentaux regroupés au sein du titre IV de celle-ci, sous l’intitulé « Solidarité ». Cette disposition énonce que, afin de pouvoir concilier vie familiale et vie professionnelle, toute personne a droit, notamment, à un congé parental à la suite de la naissance ou de l’adoption d’un enfant.
33 De surcroît, les objectifs ainsi poursuivis par l’accord-cadre révisé sont liés à l’amélioration des conditions de vie et de travail et à l’existence d’une protection sociale adéquate des travailleurs, qui, comme il ressort de l’article 151 TFUE, figurent au rang des objectifs poursuivis par la politique sociale de l’Union (voir, en ce sens, en ce qui concerne l’accord-cadre de 1995, arrêt du 22 octobre 2009, Meerts, C‑116/08, EU:C:2009:645, point 37).
34 Enfin, il y a lieu de rappeler que l’accord-cadre révisé a, à l’instar de l’accord-cadre de 1995, vocation à s’appliquer également aux travailleurs ayant, comme la requérante au principal, le statut de fonctionnaire. En effet, la clause 1, point 2, de l’accord-cadre révisé vise, de façon générale, « tous les travailleurs [...] ayant un contrat ou une relation de travail définie par la législation, des conventions collectives et/ou la pratique en vigueur dans chaque État membre » et la clause
2, point 1, de ce même accord-cadre vise « les travailleurs », sans opérer de distinction selon la qualité publique ou privée de l’employeur auquel ils sont liés, englobant ainsi l’ensemble des travailleurs (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2010, Chatzi, C‑149/10, EU:C:2010:534, points 28 à 30).
Sur la clause 5 de l’accord-cadre révisé
35 Il importe de relever, d’emblée, que les points 1 à 3 de la clause 5 de l’accord-cadre révisé sont libellés en des termes quasi identiques à ceux des points 5 à 7 de la clause 2 de l’accord-cadre de 1995, de sorte que l’interprétation fournie par la Cour en ce qui concerne ces dernières dispositions vaut également pour les premières (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2016, Rodríguez Sánchez, C‑351/14, EU:C:2016:447, point 47).
36 C’est dans la perspective de permettre aux nouveaux parents d’interrompre leur activité professionnelle pour se consacrer à leurs responsabilités familiales que l’accord-cadre révisé donne à ceux-ci l’assurance, inscrite à la clause 5, point 1, de cet accord-cadre, qu’ils retrouveront leur poste de travail ou, en cas d’impossibilité, un travail équivalent ou similaire conforme à leur contrat ou à leur relation de travail, à l’issue du congé parental. Cette disposition garantit ainsi, à
l’issue de ce congé, le retour sur le poste de travail aux mêmes conditions que celles qui existaient au moment où ledit congé a été pris (voir, en ce sens, arrêt du 13 février 2014, TSN et YTN, C‑512/11 et C‑513/11, EU:C:2014:73, point 39 ainsi que jurisprudence citée).
37 La clause 5, point 2, première phrase, de l’accord-cadre révisé a, dans la même perspective, pour objet d’éviter la perte ou la réduction des droits dérivés de la relation de travail, acquis ou en cours d’acquisition, auxquels le travailleur peut prétendre lorsqu’il entame son congé parental, et de garantir que, à l’issue de ce congé, il se retrouvera, s’agissant de ces droits, dans la même situation que celle dans laquelle il était à la date du début du congé (voir, en ce sens, arrêts du
16 juillet 2009, Gómez-Limón Sánchez-Camacho, C‑537/07, EU:C:2009:462, point 39, et du 22 octobre 2009, Meerts, C‑116/08, EU:C:2009:645, point 39 ainsi que jurisprudence citée).
38 Ladite disposition ne règle, certes, pas les droits et obligations dérivés de la relation d’emploi pendant la durée du congé parental, lesquels sont définis, en vertu de la clause 5, point 3, de l’accord-cadre révisé, par les États membres et/ou par les partenaires sociaux. Toutefois, ainsi que l’a jugé la Cour, un tel renvoi à la législation nationale et aux conventions collectives s’entend sans préjudice des prescriptions minimales fixées par l’accord-cadre révisé et notamment de celles
précisées à la clause 5, points 1 et 2, de cet accord-cadre (voir, en ce sens, arrêts du 16 juillet 2009, Gómez-Limón Sánchez-Camacho, C‑537/07, EU:C:2009:462, point 46, et du 22 octobre 2009, Meerts, C‑116/08, EU:C:2009:645, point 45).
39 Eu égard à l’argumentation développée par le Land de Berlin, il convient de préciser, en premier lieu, que, contrairement à ce qu’a soutenu celui-ci, le droit de retrouver le poste de travail occupé et le maintien des droits acquis ou en cours d’acquisition ainsi garantis par la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé doivent bénéficier au travailleur même lorsque le congé parental pris en vertu des dispositions nationales applicables excède la période minimale de quatre mois visée
à la clause 2, point 2, de l’accord-cadre révisé.
40 En effet, outre la circonstance, relevée par M. l’avocat général au point 20 de ses conclusions, que cette solution se déduit déjà, de manière implicite, de la jurisprudence de la Cour (voir, en ce sens, arrêt du 20 juin 2013, Riežniece, C‑7/12, EU:C:2013:410, points 12, 17, 32, 50 et 51), la thèse contraire, défendue par le Land de Berlin, ne trouve aucun fondement dans le texte de l’accord-cadre révisé, dont la clause 5 fait état, respectivement à ses points 1 et 2, du droit de retrouver
son poste de travail « à l’issue du congé parental » et du droit au maintien en l’état des droits acquis et en cours d’acquisition « jusqu’à la fin du congé parental ».
41 De surcroît, priver le travailleur concerné de la garantie de retrouver le poste précédemment occupé et de continuer à bénéficier de tels droits acquis ou en cours d’acquisition, lorsque le congé parental excède une durée minimale de quatre mois, aurait pour effet de dissuader ce travailleur de prendre la décision d’utiliser son droit à un tel congé, en portant, de la sorte, atteinte à l’effectivité de ce droit et à l’effet utile de la directive 2010/18 ainsi que de l’accord-cadre révisé
(arrêt du 13 février 2014, TSN et YTN, C‑512/11 et C‑513/11, EU:C:2014:73, point 51) et en contrecarrant ainsi l’objectif de conciliation des responsabilités professionnelles et familiales poursuivi par l’accord-cadre révisé (arrêt du 27 février 2014, Lyreco Belgium, C‑588/12, EU:C:2014:99, point 40).
42 En deuxième lieu, la thèse du Land de Berlin selon laquelle, à défaut d’avoir effectivement occupé le poste de stagiaire en cause au principal, M^me H. ne tirerait pas de la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé des droits à retrouver ledit poste au terme de son congé parental et à continuer à bénéficier des droits acquis ou en cours d’acquisition, notamment liés à ce poste, à la date du début de ce congé, ne saurait davantage être retenue.
43 Les notions de « poste de travail » et de « droits acquis ou en cours d’acquisition » figurant à ladite clause 5, points 1 et 2, doivent, en l’absence de renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer leur sens et leur portée, normalement trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme, qui doit être recherchée en tenant compte du contexte de ces dispositions et de l’objectif poursuivi par la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre 2009,
Meerts, C‑116/08, EU:C:2009:645, point 41).
44 Or, eu égard aux objectifs poursuivis par l’accord-cadre révisé et la directive 2010/18, tels que rappelés aux points 29 et 30 du présent arrêt et à la circonstance que la clause 5, points 1 et 2, première phrase, de l’accord-cadre révisé, d’une part, exprime un principe de droit social de l’Union qui revêt une importance particulière, et, d’autre part, concrétise le droit au congé parental garanti, par ailleurs, en tant que droit fondamental à l’article 33, paragraphe 2, de la Charte, cette
disposition ne saurait être interprétée de manière restrictive (voir, en ce sens, arrêts du 22 octobre 2009, Meerts, C‑116/08, EU:C:2009:645, point 42, et du 27 février 2014, Lyreco Belgium, C‑588/12, EU:C:2014:99, point 36).
45 Aussi est-il suffisant, aux fins de l’application de la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé, que, à la date à laquelle M^me H. a pris son congé parental, celle-ci ait, par suite d’une procédure de sélection et de sa promotion, déjà été affectée en qualité de fonctionnaire stagiaire au poste concerné, bénéficiant ainsi également de la rémunération correspondant à la classe salariale supérieure dont relève ce poste. La circonstance que, au moment où cette affectation est
intervenue, l’intéressée se trouvait en congé de maladie pour des raisons liées à la grossesse, demeure, en revanche, sans aucune incidence sur le fait que ce nouveau poste était, dès ce moment, devenu sien, de telle sorte qu’il y a lieu de considérer que, lorsque, ultérieurement, l’intéressée a pris son congé parental, elle occupait déjà ledit poste et bénéficiait des droits acquis ou en cours d’acquisition éventuellement liés à celui-ci.
46 Retenir l’interprétation préconisée par le Land de Berlin reviendrait, en outre, à dissuader les travailleurs concernés de prendre un congé parental et à contrecarrer les objectifs poursuivis par ledit accord.
47 En troisième lieu, il convient d’aborder le point de savoir si, en ce qu’elle ne prévoit aucune prorogation du stage lorsque le fonctionnaire stagiaire qui occupe un poste de direction se trouve en situation de congé parental, une réglementation telle que celle en cause au principal méconnaît la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé.
48 S’agissant, premièrement, des droits conférés au travailleur en congé parental à la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé, à savoir retrouver, à l’issue de ce congé, son poste de travail ou, si cela se révèle impossible, un travail équivalent ou similaire, conforme à son contrat ou à sa relation de travail, il ressort de la décision de renvoi que l’article 97 du LBG a, d’une part, pour conséquence automatique d’exclure qu’un fonctionnaire se trouvant dans la situation de la requérante
au principal puisse, à l’issue de son congé parental, retrouver le poste de fonctionnaire stagiaire qu’il occupait avant de prendre ce congé. En effet, l’intéressée s’étant trouvée en congé parental durant la durée autorisée du stage et n’ayant pas, de ce fait, exercé les fonctions attachées à ce poste ni pu, dès lors, faire la preuve de son aptitude à être nommée définitivement à celui-ci, il est constant que, à son retour de congé, celle-ci ne pouvait retrouver ledit poste.
49 D’autre part, ladite réglementation nationale a, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, également pour conséquence automatique d’exclure que l’intéressée puisse, à l’issue de son congé parental, se voir offrir un poste de fonctionnaire stagiaire équivalent ou similaire à celui qu’elle occupait antérieurement à ce congé, dès lors que la période de deux ans durant laquelle elle était autorisée à effectuer un stage aux fins de démontrer son aptitude à occuper un poste de direction était
alors écoulée et ne pouvait faire l’objet d’une prorogation.
50 Il s’ensuit que la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé s’oppose à une réglementation telle que celle en cause au principal.
51 S’agissant, deuxièmement, de la clause 5, point 2, première phrase, de l’accord-cadre révisé, prévoyant le maintien en l’état des « droits acquis et en cours d’acquisition », il importe de rappeler que cette notion recouvre l’ensemble des droits et des avantages, en espèces ou en nature, dérivés directement ou indirectement de la relation de travail, auxquels le travailleur peut prétendre à l’égard de l’employeur à la date du début du congé parental (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre
2009, Meerts, C‑116/08, EU:C:2009:645, point 43).
52 Parmi de tels droits et avantages figurent ceux découlant de dispositions qui établissent les conditions d’accès à un niveau supérieur de la hiérarchie professionnelle, ceux-ci étant, en effet, dérivés de la relation de travail (voir, en ce sens, arrêt du 18 novembre 2004, Sass, C‑284/02, EU:C:2004:722, point 31). Tel est, en l’occurrence, le cas du droit, réglementé à l’article 97 du LBG, pour un fonctionnaire d’obtenir une éventuelle promotion définitive à une fonction de direction en
effectuant, dans le cours de l’exécution de la relation de travail au service du Land de Berlin et à l’issue d’une procédure de sélection préalable, un stage d’une certaine durée.
53 Or, force est de constater, à cet égard, que, en conséquence du fait que M^me H. a pris un congé parental, l’article 97 du LBG a, en l’occurrence, eu pour effet de priver l’intéressée de toute possibilité de démontrer son aptitude à exercer la fonction de direction à laquelle elle aspirait et d’être, le cas échéant, définitivement promue à cette fonction à l’issue du stage pour lequel elle avait été sélectionnée antérieurement audit congé.
54 Il s’ensuit que la clause 5, point 2, première phrase de l’accord-cadre révisé s’oppose également à une réglementation telle que celle en cause au principal. Étant de nature à dissuader un travailleur se trouvant dans la situation de M^me H. de prendre la décision d’utiliser son droit à un congé parental, ladite réglementation porte, en outre, atteinte à l’effectivité de ce droit tel que garanti par l’accord-cadre révisé.
55 Quant à l’argumentation invoquée par la juridiction de renvoi, selon laquelle les dispositions de l’article 97, paragraphe 1, et paragraphe 2, deuxième phrase, du LBG pourraient constituer des dispositions de la « législation nationale », au sens de la clause 5, point 2, seconde phrase, de l’accord-cadre révisé, dont pourraient licitement résulter, à l’issue du congé parental, des modifications des droits du travailleur tels que ceux en cause au principal, il convient de relever d’emblée que
des différences existent entre les différentes versions linguistiques de cette disposition. En effet, alors que certaines versions linguistiques, telles que, notamment, celle en langue allemande, disposent que les droits acquis ou en cours d’acquisition, y compris les modifications découlant entre autres de la législation nationale, s’appliquent à l’issue du congé parental, la version en langue française prévoit, pour sa part, que sont applicables, à l’issue du congé parental, les droits visés à la
clause 5, point 2, première phrase, dudit accord-cadre, tout comme les modifications apportées, entre autres, « à la législation nationale ».
56 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, en cas de disparité entre les versions linguistiques d’un texte de l’Union, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (voir, notamment, arrêts du 4 septembre 2014, Vnuk, C‑162/13, EU:C:2014:2146, point 46, et du 26 avril 2017, Popescu, C‑632/15, EU:C:2017:303, point 35).
57 En l’occurrence, eu égard aux objectifs poursuivis par l’accord-cadre révisé, tels que rappelés aux points 29 et 30 du présent arrêt, ainsi qu’à l’importance de la protection octroyée aux travailleurs en vertu de la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé, soulignée au point 44 de ce même arrêt, la clause 5, point 2, seconde phrase, de cet accord-cadre révisé ne saurait être interprétée d’une manière qui porte atteinte à l’effet utile de la protection octroyée aux travailleurs en
vertu de la clause 5, point 2, première phrase, dudit accord-cadre. Or, tel serait le cas s’il devait être admis, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, qu’il est possible de justifier, en vertu de la clause 5, point 2, seconde phrase, de l’accord-cadre révisé, l’extinction d’un droit acquis ou en cours d’acquisition d’un travailleur, en raison du fait que la législation nationale prévoit qu’un tel droit prend légalement fin au terme d’un délai non prorogeable, qui continue
à courir pendant l’absence du travailleur concerné résultant de son congé parental.
58 En quatrième et dernier lieu, il convient d’examiner l’interrogation de la juridiction de renvoi relative au point de savoir si les atteintes aux droits garantis à la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé, résultant ainsi de l’application de l’article 97 du LBG pourraient, le cas échéant, être justifiées par l’objectif du stage en cause au principal, qui vise à permettre une évaluation de l’aptitude à occuper le poste de direction à pourvoir, aptitude qui ne peut être établie
qu’en cas d’exercice effectif des charges afférentes à ce poste pendant une période prolongée.
59 À cet égard, il convient de relever, à l’instar de M. l’avocat général au point 30 de ses conclusions, que l’accord-cadre révisé ne comporte aucune disposition autorisant des dérogations aux droits ainsi garantis. En tout état de cause, les atteintes portées, en l’occurrence, à ceux-ci n’apparaissent aucunement nécessaires pour que soit atteint l’objectif ainsi poursuivi. En effet, un objectif tel que celui exposé par la juridiction de renvoi pourrait se trouver préservé moyennant certains
aménagements destinés à permettre que, ainsi que le requiert la clause 5, point 2, première phrase, de l’accord-cadre révisé, le processus de promotion professionnelle en cours soit pleinement préservé et le stage poursuivi, durant la durée requise, à l’issue du congé parental, soit sur le poste occupé au moment où ce congé a été pris, soit, en cas d’impossibilité avérée, sur un poste équivalent ou similaire, ainsi que l’exige la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé.
60 Ne saurait davantage être retenu l’argument du Land de Berlin selon lequel le fait, pour l’employeur, de devoir garantir le retour du travailleur sur le poste de travail précédemment occupé durant une période pouvant atteindre la durée maximale du congé parental autorisé, soit, en Allemagne, trois années, en étant le cas échéant contraint de laisser ce poste vacant durant une telle période, serait de nature à menacer le bon fonctionnement des services de ce Land, voire, dans le secteur
privé, l’existence même de l’entreprise.
61 Conformément à la clause 3, point 1, de l’accord-cadre révisé, c’est aux États membres qu’il appartient de fixer les modalités d’application du congé parental et, notamment, de déterminer la durée autorisée de celui-ci, et cela dans le respect des prescriptions minimales fixées par ledit accord-cadre. Or, ainsi qu’il ressort des termes mêmes de ladite clause 3, point 1, les besoins des employeurs, et notamment ceux liés au fonctionnement et à l’organisation des entreprises, en particulier
des petites entreprises, figurent, à l’instar des besoins des travailleurs, parmi les critères au regard desquels les États membres et/ou les partenaires sociaux sont, le cas échéant, appelés à définir les conditions d’accès au congé parental et les modalités d’application de ce dernier.
62 Il ne saurait dès lors être admis que, une fois déterminée, en application de ladite disposition, la durée autorisée du congé, les travailleurs ayant opté pour un congé parental couvrant la période ainsi autorisée puissent, au nom de ces mêmes besoins, se trouver privés des prescriptions minimales garanties par l’accord-cadre révisé, telles que, notamment, celles consacrées à la clause 5, points 1 et 2, de ce dernier.
63 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question et à la première branche de la troisième question, que la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui soumet la promotion définitive à un poste de direction de la fonction publique à la condition que le candidat sélectionné effectue avec succès un stage
préalable de deux années sur ce poste et en vertu de laquelle, dans une situation où un tel candidat s’est trouvé, durant la majeure partie de ce stage, en congé parental, et s’y trouve toujours, ledit stage prend légalement fin à l’issue de cette période de deux années, sans qu’une prorogation de celle-ci soit possible, l’intéressé étant, par conséquent, réintégré, lors de son retour de congé parental, dans la fonction, de niveau inférieur tant sur le plan statutaire qu’en matière de rémunération,
qu’il occupait antérieurement à son admission audit stage. Les atteintes ainsi portées à cette clause ne sauraient être justifiées par l’objectif poursuivi par le même stage, qui consiste à permettre l’évaluation de l’aptitude à occuper le poste de direction à pourvoir.
Sur la deuxième question et la seconde branche de la troisième question
64 Eu égard à la réponse donnée à la première question et à la première branche de la troisième question, il n’y a pas lieu de répondre à la deuxième question et à la seconde branche de la troisième question.
Sur les quatrième et cinquième questions
65 Par ses quatrième et cinquième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, quelles conséquences découlant du droit de l’Union s’attachent, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, à l’incompatibilité d’une réglementation telle que celle en cause au principal avec la clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé.
66 À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que, en appliquant le droit interne, les juridictions nationales sont tenues de l’interpréter dans toute la mesure du possible à la lumière du texte et de la finalité de la directive en cause, pour atteindre le résultat visé par celle-ci et, partant, se conformer à l’article 288, troisième alinéa, TFUE (voir, notamment, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C‑282/10, EU:C:2012:33, point 24 et jurisprudence citée).
Tel est également le cas en présence d’accords qui, tel l’accord-cadre révisé, ont été mis en œuvre par une directive du Conseil, dont ils font alors partie intégrante (voir, par analogie, arrêt du 16 septembre 2010, Chatzi, C‑149/10, EU:C:2010:534, points 43 et 44).
67 En l’occurrence, la juridiction de renvoi souligne toutefois expressément, dans sa demande de décision préjudicielle, qu’une telle interprétation conforme n’est pas possible en ce qui concerne la réglementation en cause au principal.
68 Dans ces conditions, il importe également de rappeler que, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, dans tous les cas où des dispositions d’une directive apparaissent comme étant, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, les particuliers sont fondés à les invoquer à l’encontre de l’État membre, notamment en sa qualité d’employeur. La Cour a, par ailleurs, déjà jugé qu’il était permis de transposer cette jurisprudence aux accords qui, tels les
accords-cadres sur le congé parental, sont nés d’un dialogue conduit entre partenaires sociaux au niveau de l’Union et qui ont été mis en œuvre, conformément à leur base juridique respective, par une directive du Conseil, dont ils font alors partie intégrante (voir, en ce sens, arrêt du 22 avril 2010, Zentralbetriebsrat der Landeskrankenhäuser Tirols, C‑486/08, EU:C:2010:215, points 22 et 23).
69 Or, la clause 5, points 1 et 2, première phrase, de l’accord-cadre révisé consacre, d’une manière générale et dans des termes dépourvus d’équivoque, les droits du travailleur de retrouver son poste de travail, ou, en cas d’impossibilité, un poste équivalent ou similaire, et de conserver les droits déjà acquis et ceux en cours d’acquisition au début de son congé parental, à l’issue de celui-ci. De telles dispositions ont, ainsi, un contenu inconditionnel et suffisamment précis pour pouvoir
être invoquées par un justiciable et appliquées par le juge (voir, par analogie, arrêt du 16 juillet 2009, Gómez-Limón Sánchez-Camacho, C‑537/07, EU:C:2009:462, point 36).
70 Il en résulte, selon la jurisprudence de la Cour, que, à défaut de pouvoir procéder à une interprétation et à une application de la réglementation nationale conformes aux exigences du droit de l’Union, les juridictions nationales et les organes de l’administration ont l’obligation d’appliquer intégralement le droit de l’Union et de protéger les droits que celui-ci confère aux particuliers, en laissant au besoin inappliquée toute disposition contraire du droit interne (arrêt du 25 novembre
2010, Fuß, C‑429/09, EU:C:2010:717, point 40 et jurisprudence citée).
71 En conséquence, c’est à la juridiction de renvoi qu’il appartiendra, notamment, de vérifier si, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, le Land de Berlin était, en sa qualité d’employeur, véritablement dans l’impossibilité de garantir à M^me H. qu’elle puisse retrouver son poste de travail à l’issue de son congé parental et, dans l’affirmative, de s’assurer que lui soit alors attribué, ainsi que l’exige la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé, un poste de
travail équivalent ou similaire et conforme à son contrat ou à sa relation de travail, afin qu’elle puisse y poursuivre un stage dans des conditions qui soient, par ailleurs, conformes aux exigences découlant de la clause 5, point 2, de cet accord-cadre (voir, par analogie, arrêt du 20 juin 2013, Riežniece, C‑7/12, EU:C:2013:410, point 51).
72 En ce qui concerne la circonstance que le poste de direction auquel M^me H. avait été affectée en tant que fonctionnaire stagiaire le 18 octobre 2011 a été, après que celle-ci a pris son congé parental le 30 mai 2012, réattribué, à titre définitif, à un autre titulaire, au terme d’un processus de sélection engagé au cours du second semestre de l’année 2012, il y a lieu de relever que le Land de Berlin n’a pas expliqué devant la Cour en quoi il lui aurait été objectivement impossible de faire
en sorte que M^me H. puisse retrouver sa position de fonctionnaire stagiaire sur le poste de direction concerné, à l’issue de son congé. Ce Land n’a notamment pas exposé les raisons objectives pour lesquelles il lui aurait été impossible soit de maintenir ce poste provisoirement vacant soit, si nécessaire, d’y nommer, à titre transitoire, un autre fonctionnaire, jusqu’au retour de M^me H.
73 Si la Cour a, certes, déjà reconnu, que, aux fins d’une gestion rationnelle de son établissement, un employeur est libre de réorganiser ses services, elle n’en a pas moins précisé que c’est à condition qu’il respecte les dispositions du droit de l’Union applicables (voir, par analogie, à propos de l’accord-cadre de 1995, arrêt du 20 juin 2013, Riežniece, C‑7/12, EU:C:2013:410, point 36).
74 Dans ce contexte, c’est donc à l’employeur qu’incombe la charge d’établir devant la juridiction de renvoi qu’il lui était, pour des raisons objectives, impossible de faire en sorte que la requérante au principal puisse retrouver, à l’issue de son congé parental, le poste de direction auquel elle avait été affectée en tant que fonctionnaire stagiaire avant de prendre ce congé.
75 À supposer que la juridiction de renvoi conclue à l’existence d’une telle impossibilité en l’espèce, il demeurerait, alors, et en tout état de cause, que le poste de travail que le Land de Berlin a réattribué à M^me H. dans la perspective de son retour au travail au terme du congé parental ne saurait être tenu pour « équivalent ou similaire » au poste de direction que l’intéressée occupait lorsqu’elle a pris ce congé, au sens de la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé, puisqu’il est
constant que l’intéressée a été réaffectée au poste qu’elle occupait antérieurement à sa promotion à ce poste de direction, à savoir un poste de niveau inférieur tant sur le plan statutaire qu’en matière de rémunération.
76 Le respect de ladite clause 5, point 1, exigeait, en effet, que le Land de Berlin affecte M^me H., en qualité de fonctionnaire stagiaire, à un poste de direction caractérisé, à tout le moins, par un rang statutaire, un niveau de rémunération et des tâches de direction correspondant à ceux afférents au poste pour lequel elle avait initialement été sélectionnée.
77 En outre, la juridiction de renvoi devra s’assurer que la poursuite du stage sur le poste de direction initialement occupé, ou, en cas d’impossibilité objectivement établie, sur un poste équivalent ou similaire, s’effectue, au regard de la durée de ce stage, dans le respect des exigences découlant de la clause 5, point 2, de l’accord-cadre révisé.
78 Un tel respect implique que, à l’issue de son congé parental, M^me H. conserve la possibilité de poursuivre son stage dans l’un ou l’autre de ces postes de telle manière qu’elle bénéficie d’un stage effectif d’une durée totale identique à celle dont elle aurait bénéficié si elle n’avait pas pris un congé parental. L’intéressée doit, en effet, continuer à bénéficier, au terme de son congé parental, des mêmes possibilités de démontrer son aptitude à exercer la fonction de direction occupée,
et, partant, de la même perspective de nomination définitive éventuelle à cette fonction au terme dudit stage.
79 Enfin, et s’agissant de l’exigence éventuelle consistant à subordonner l’attribution à la requérante au principal, en sa qualité de fonctionnaire stagiaire, d’un poste de direction similaire ou équivalent, à la tenue préalable d’une nouvelle procédure de sélection, force est de constater que celle-ci serait de nature à vider de sa substance le droit dont bénéficie un travailleur, tel que celui en cause au principal, ayant pris un congé parental, d’être transféré sur un poste de travail
similaire ou équivalent, dans les conditions prévues à la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé, afin d’y poursuivre un stage dans des conditions qui soient, par ailleurs, conformes aux exigences découlant de la clause 5, point 2, première phrase, de cet accord-cadre (voir, par analogie, arrêt du 20 juin 2013, Riežniece, C‑7/12, EU:C:2013:410, point 54).
80 En effet, abstraction faite de la circonstance que l’intéressée a déjà participé à une telle procédure de sélection ayant conduit à sa nomination en tant que fonctionnaire stagiaire et à son affectation au poste de direction occupé au moment où elle a pris son congé parental, une telle procédure de sélection aurait pour conséquence de retarder d’autant la nomination de l’intéressée sur ce nouveau poste et, en conséquence, la possibilité pour celle-ci de démontrer ses capacités à être
définitivement nommée sur ce poste. Elle aurait, en outre et plus fondamentalement encore, pour effet de conférer à une telle nomination un caractère aléatoire, puisque celle-ci serait alors fonction des résultats de ladite procédure de sélection.
81 Une exigence telle que celle mentionnée au point 79 du présent arrêt ne saurait dès lors être admise et il incombe, par conséquent, à la juridiction de renvoi de laisser celle-ci inappliquée, conformément à la jurisprudence rappelée au point 70 du présent arrêt.
82 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre aux quatrième et cinquième questions qu’il appartient à la juridiction de renvoi, au besoin en écartant la réglementation nationale en cause au principal, de vérifier, ainsi que l’exige la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé, si, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, le Land concerné était, en sa qualité d’employeur, dans l’impossibilité objective de permettre à l’intéressée de retrouver
son poste de travail à l’issue de son congé parental et, dans l’affirmative, de veiller à ce que soit attribué à celle-ci un poste de travail équivalent ou similaire et conforme à son contrat ou à sa relation de travail sans que cette attribution de poste puisse être subordonnée à la tenue préalable d’une nouvelle procédure de sélection. Il appartient également à ladite juridiction de veiller à ce que l’intéressée puisse, à l’issue de ce congé parental, poursuivre, sur son poste ainsi retrouvé ou
nouvellement attribué, un stage dans des conditions qui soient conformes aux exigences découlant de la clause 5, point 2, de l’accord-cadre révisé.
Sur les dépens
83 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :
1) La clause 5, points 1 et 2, de l’accord-cadre révisé sur le congé parental qui figure à l’annexe de la directive 2010/18/UE du Conseil, du 8 mars 2010, portant application de l’accord-cadre révisé sur le congé parental conclu par BUSINESSEUROPE, l’UEAPME, le CEEP et la CES et abrogeant la directive 96/34/CE, doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui soumet la promotion définitive à un poste de direction de la
fonction publique à la condition que le candidat sélectionné effectue avec succès un stage préalable de deux années sur ce poste et en vertu de laquelle, dans une situation où un tel candidat s’est trouvé, durant la majeure partie de ce stage, en congé parental, et s’y trouve toujours, ledit stage prend légalement fin à l’issue de cette période de deux années, sans qu’une prorogation de celle-ci soit possible, l’intéressé étant, par conséquent, réintégré, lors de son retour de congé parental, dans
la fonction, de niveau inférieur tant sur le plan statutaire qu’en matière de rémunération, qu’il occupait antérieurement à son admission audit stage. Les atteintes ainsi portées à cette clause ne sauraient être justifiées par l’objectif poursuivi par le même stage, qui consiste à permettre l’évaluation de l’aptitude à occuper le poste de direction à pourvoir.
2) Il appartient à la juridiction de renvoi, au besoin en écartant la réglementation nationale en cause au principal, de vérifier, ainsi que l’exige la clause 5, point 1, de l’accord-cadre révisé sur le congé parental qui figure à l’annexe de la directive 2010/18, si, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, le Land concerné était, en sa qualité d’employeur, dans l’impossibilité objective de permettre à l’intéressée de retrouver son poste de travail à l’issue de son
congé parental et, dans l’affirmative, de veiller à ce que soit attribué à celle-ci un poste de travail équivalent ou similaire et conforme à son contrat ou à sa relation de travail sans que cette attribution de poste puisse être subordonnée à la tenue préalable d’une nouvelle procédure de sélection. Il appartient également à ladite juridiction de veiller à ce que l’intéressée puisse, à l’issue de ce congé parental, poursuivre, sur son poste ainsi retrouvé ou nouvellement attribué, un stage dans des
conditions qui soient conformes aux exigences découlant de la clause 5, point 2, de cet accord-cadre révisé.
Signatures
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* Langue de procédure : l’allemand.