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14/02/2019 | CJUE | N°C-58/18

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 14 février 2019., Michel Schyns contre Belfius Banque SA., 14/02/2019, C-58/18


CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 14 février 2019 ( 1 )

Affaire C‑58/18

Michel Schyns

contre

Belfius Banque SA

[demande de décision préjudicielle formée par la justice de paix du canton de Visé (Belgique)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 2008/48/CE – Obligations précontractuelles – Obligation pour le prêteur de rechercher le type et le montant du crédit les mieux adaptés compte tenu de la situation financière du con

sommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit – Obligation pour le prêteur de renoncer à conclure le contrat ...

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 14 février 2019 ( 1 )

Affaire C‑58/18

Michel Schyns

contre

Belfius Banque SA

[demande de décision préjudicielle formée par la justice de paix du canton de Visé (Belgique)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 2008/48/CE – Obligations précontractuelles – Obligation pour le prêteur de rechercher le type et le montant du crédit les mieux adaptés compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit – Obligation pour le prêteur de renoncer à conclure le contrat s’il doit raisonnablement présumer que le consommateur ne sera pas en mesure de faire face aux obligations qui lui incombent en
vertu du contrat de crédit »

I. Introduction

1. Dans la présente procédure préjudicielle, la Cour doit interpréter la directive 2008/48/CE ( 2 ) concernant les contrats de crédit aux consommateurs. À cette occasion, elle est appelée en substance à clarifier l’articulation entre les différentes obligations précontractuelles du prêteur. Plus spécifiquement, il s’agit, d’une part, de la portée de l’obligation d’explication précontractuelle prévue à l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 et, d’autre part, des conséquences éventuelles
sur la conclusion du contrat de l’évaluation de la solvabilité du consommateur prévue à l’article 8 de ladite directive.

2. Les questions d’interprétation déférées à cet égard par un tribunal belge de première instance doivent être examinées à la lumière de « l’harmonisation complète [ciblée]» ( 3 ), que la directive 2008/48 entend réaliser. La question ultime est de savoir dans quelle mesure une telle harmonisation fait obstacle à des dispositions plus strictes du droit national, même si ces dispositions sont susceptibles de protéger efficacement le consommateur contre un engagement prématuré ou reposant sur un
manque d’information et répondre ainsi à l’un des objectifs essentiels de la directive 2008/48. Cette question illustre à nouveau ( 4 ) la tension susceptible de se manifester entre, d’une part, le niveau élevé de protection des consommateurs ( 5 ), qui est fondamentalement visé par la directive 2008/48, et, d’autre part, l’achèvement d’un marché intérieur en limitant la fragmentation juridique, lui aussi recherché ( 6 ).

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

3. Conformément à l’article 1er, la directive 2008/48 a pour objet d’harmoniser certains aspects des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de contrats de crédit aux consommateurs.

4. L’article 5 de la directive 2008/48 concerne les informations précontractuelles. Son paragraphe 6 dispose :

« Les États membres veillent à ce que les prêteurs et, le cas échéant, les intermédiaires de crédit, fournissent au consommateur des explications adéquates grâce auxquelles celui-ci sera en mesure de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, le cas échéant en expliquant l’information précontractuelle qui doit être fournie conformément au paragraphe 1, les caractéristiques essentielles des produits proposés et les effets particuliers qu’ils
peuvent avoir sur le consommateur, y compris les conséquences d’un défaut de paiement du consommateur. Les États membres peuvent adapter les modalités d’octroi et l’étendue de cette assistance, et établir l’identité de la personne qui la fournit, en fonction du contexte particulier dans lequel le contrat de crédit est proposé, de la personne à qui il est proposé, et du type de contrat de crédit proposé. »

5. L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 impose au prêteur une obligation d’évaluer la solvabilité du consommateur préalablement à la conclusion du contrat. Il est libellé comme suit :

« Les États membres veillent à ce que, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur évalue la solvabilité du consommateur, à partir d’un nombre suffisant d’informations, fournies, le cas échéant, par ce dernier et, si nécessaire, en consultant la base de données appropriée. Les États membres dont la législation prévoit l’évaluation obligatoire par le prêteur de la solvabilité du consommateur sur la base d’une consultation de la base de données appropriée peuvent maintenir cette
obligation. »

6. S’agissant de l’objectif d’harmonisation, l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48 prévoit :

« Dans la mesure où la présente directive contient des dispositions harmonisées, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive. »

7. Enfin, l’article 23 de la directive 2008/48 dispose que les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à ladite directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

B.   Le droit belge

8. La directive 87/102/CEE du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation ( 7 ), a été transposée en Belgique par la loi relative au crédit à la consommation et ses dispositions d’application ( 8 ). La directive 2008/48 a été transposée par une modification de cette loi ( 9 ). La loi du 19 avril 2014 (Moniteur belge du 28 mai 2014, p. 41686, version allemande publiée
au Moniteur belge du 10 janvier 2017) a finalement abrogé la loi relative au crédit à la consommation et a intégré ses dispositions dans le Code de droit économique à compter du 1er avril 2015.

9. L’article 10 de la loi relative au crédit à la consommation visait, dans le cadre l’évaluation de la solvabilité du consommateur, « les renseignements exacts et complets [demandés au consommateur] que [le prêteur et l’intermédiaire de crédit] juge[nt] nécessaires afin d’apprécier [sa] situation financière et [ses] facultés de remboursement [...] et, en tout état de cause, leurs engagements financiers en cours» ( 10 ).

10. L’article 11, paragraphe 4, premier alinéa, de la loi relative au crédit à la consommation, dans la version applicable aux faits de l’affaire ( 11 ), était libellé comme suit :

« Les prêteurs et, le cas échéant, les intermédiaires de crédit, fournissent au consommateur des explications adéquates grâce auxquelles celui‑ci sera en mesure de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, le cas échéant en expliquant l’information précontractuelle qui doit être fournie conformément au § 1er, les caractéristiques essentielles des produits proposés et les effets particuliers qu’ils peuvent avoir sur le consommateur, y
compris les conséquences d’un défaut de paiement du consommateur. »

11. L’article 15, paragraphes 1 et 2, de la loi relative au crédit à la consommation, dans la version applicable aux faits de l’affaire ( 12 ), disposait :

« 1.   Le prêteur et l’intermédiaire de crédit sont tenus de rechercher, dans le cadre des contrats de crédit qu’ils offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit.

2.   Le prêteur ne peut conclure de contrat de crédit que si, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, notamment sur la base de la consultation organisée par l’article 9 de la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers, et sur la base des renseignements visés à l’article 10, il doit raisonnablement estimer que le consommateur sera à même de respecter les obligations découlant du contrat. »

12. L’article 19, paragraphes 1 et 2, de la loi relative au crédit à la consommation ( 13 ) était libellé comme suit :

« 1.   Lorsque le contrat de crédit mentionne le bien ou la prestation de service financé ou que le montant du contrat de crédit est versé directement par le prêteur au vendeur ou prestataire de services, les obligations du consommateur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la prestation du service ; en cas de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison du produit ou de la prestation du service et
cessent en cas d’interruption de celles-ci, sauf si le consommateur reçoit lui-même le montant du crédit et que l’identité du vendeur ou du prestataire de service n’est pas connue par le prêteur.

2.   Le montant du crédit ne peut être remis au vendeur ou au prestataire de services qu’après notification au prêteur de la livraison du bien ou de la prestation du service. »

III. Les faits et la procédure au principal

13. Par un contrat conclu avec M. Michel Schyns le 8 mai 2012, Home Vision SPRL s’est engagée à installer une installation photovoltaïque au prix de 40002 euros ( 14 ). Home Vision s’est en outre engagée à rembourser les mensualités d’emprunt d’un montant de 622,41 euros en contrepartie de la cession des certificats verts émis pour l’installation sur une période de dix ans. La décision de renvoi ne comporte pas de précisions supplémentaires sur ce prêt.

14. Le prix convenu a été facturé le 10 mai 2012. Le 22 mai 2012, Dexia Banque Belgique, prédécesseur légal de Belfius Banque, a accordé à M. Schyns un prêt de 40002 euros, dénommé « Eco-Crédit Habitat », d’une durée de 120 mois, remboursable par mensualités de 427,72 euros. Les fonds ont été versés à M. Schyns, qui les a versés à son tour à Home Vision.

15. L’installation photovoltaïque ayant fait l’objet de l’accord n’a jamais été effectuée et le financement convenu dans le contrat du 8 mai 2012 n’a donc pas pu être mis en œuvre. Le 5 décembre 2013, Home Vision a été déclarée en faillite.

16. Après avoir payé les mensualités du prêt conclu le 22 mai 2012 pendant plus de quatre ans, M. Schyns a engagé une action en justice contre le prêteur le 21 décembre 2016. Il a demandé la résiliation du contrat aux torts de Belfius Banque ainsi que sa libération de toute obligation de remboursement. Le 15 mai 2017, outre le remboursement, il a demandé au tribunal de constater que le contrat de crédit du 22 mai 2012 était caduc et qu’il était libéré de toute obligation de remboursement à compter
du mois de décembre 2016. Belfius Banque a contesté les demandes et a demandé, à titre subsidiaire, la saisine de la Cour à titre préjudiciel.

IV. La demande de décision préjudicielle et la procédure devant la Cour

17. Par décision du 22 janvier 2018, parvenue à la Cour le 30 janvier 2018, la justice de paix du canton de Visé (Belgique) a saisi la Cour, en application de l’article 267 TFUE, des questions préjudicielles suivantes :

« 1) a) l’article 5, paragraphe 6, de la [directive 2008/48], en ce qu’il a pour but de faire en sorte que le consommateur sera en mesure de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, ne s’oppose-t-il pas au texte de l’article 15, premier alinéa, de la loi sur le crédit à la consommation (abrogé et actuellement remplacé par l’article VII.75 du Code de droit économique), en ce qu’il dispose que le prêteur et l’intermédiaire de crédit sont
tenus de rechercher, dans le cadre des contrats de crédits qu’ils offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit, dans la mesure où ce dernier établit une obligation générale pour le prêteur ou l’intermédiaire de crédit de rechercher le crédit le mieux adapté pour le consommateur qui n’est pas
comprise dans le texte de la directive précitée ?

b) l’article 5, paragraphe 6, de la [directive 2008/48], en ce qu’il a pour but de faire en sorte que le consommateur sera en mesure de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, ne s’oppose-il pas au texte de l’article 15, deuxième alinéa, de la loi sur le crédit à la consommation (abrogé et actuellement remplacé par l’article VII.77, paragraphe 2, premier alinéa, du Code de droit économique), en ce que le prêteur ne peut conclure de
contrat de crédit que si, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, notamment sur la base de la consultation organisée par l’article 9 de la loi du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers, et sur la base des renseignements visés à l’article 10, il doit raisonnablement estimer que le consommateur sera à même de respecter les obligations découlant du contrat, dans la mesure où il a pour conséquence que le prêteur doit lui‑même se prononcer
sur l’opportunité de la conclusion éventuelle du crédit à la place du consommateur ?

2) Dans l’hypothèse d’une réponse négative à la première question, la [directive 2008/48] doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle impose toujours au prêteur et à l’intermédiaire de crédit d’apprécier à la place du consommateur l’opportunité de la conclusion éventuelle du crédit ?

18. Dans le cadre de la procédure préjudicielle devant la Cour, Belfius Banque, en qualité de partie défenderesse au principal, le Royaume de Belgique et la Commission européenne ont présenté des observations écrites. Ces mêmes parties étaient également représentées lors de l’audience de plaidoiries du 28 novembre 2018.

V. La recevabilité de la demande de décision préjudicielle

19. La motivation très sommaire de la demande de décision préjudicielle soulève des doutes quant à sa recevabilité, compte tenu des exigences de fond prévues à l’article 94 du règlement de procédure de la Cour.

20. Selon une jurisprudence constante, la Cour peut refuser de répondre à la question préjudicielle d’une juridiction nationale lorsqu’elle ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées ( 15 ). La nécessité de parvenir à une interprétation du droit de l’Union qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci définisse le cadre factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions qu’il pose ou que, à tout le
moins, il explique les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées ( 16 ).

21. Selon une autre jurisprudence constante, les informations fournies dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de donner des réponses utiles, mais également à offrir aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres parties intéressées la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Il incombe, en conséquence, à cette dernière de veiller à ce que cette possibilité soit préservée,
compte tenu du fait que, en vertu de ladite disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux parties intéressées, accompagnées d’une traduction dans la langue officielle de chaque État membre, à l’exclusion du dossier national éventuellement transmis à la Cour par la juridiction de renvoi ( 17 ).

22. En l’espèce, il convient toutefois de constater que la juridiction de renvoi s’est bornée à décrire les faits de manière trop sommaire ( 18 ) et à ne citer que quelques dispositions de droit national. La décision de renvoi ne reproduit, par exemple, que les deux premiers paragraphes de l’article 15 et, par extraits, l’article 10 de la loi relative au crédit à la consommation. Les obligations du prêteur en vertu de ces dispositions suscitent, en effet, les doutes de la juridiction de renvoi quant
à la l’interprétation de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48.

23. Il n’a pas été précisé à cet égard que l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 a été transposé mot pour mot en droit belge et plus précisément, comme l’a déclaré le gouvernement belge, à l’article 11, paragraphe 4, de la loi relative au crédit à la consommation. Les dispositions de la législation nationale relatives aux contrats de crédit liés, à savoir l’article 19 de cette loi, n’ont pas été citées, bien que la demande principale du requérant au principal se fonde sur cet article.
En outre, les conséquences juridiques prévues par le droit national en cas de violation des obligations découlant de l’article 15, paragraphes 1 et 2, sont passées sous silence ( 19 ), ce qui élimine déjà toute possibilité de comprendre le lien entre une éventuelle violation des obligations du prêteur et les demandes du requérant au principal.

24. Dans ces conditions, on peut se demander si la Cour dispose d’informations suffisantes sur les faits et la législation nationale qui leur est applicable pour répondre utilement aux questions posées.

25. Il est vrai que, selon une jurisprudence constante, une présomption de pertinence s’attache aux questions d’interprétation du droit de l’Union posées à titre préjudiciel ( 20 ). En outre, le gouvernement belge a pu, en l’occurrence, compléter la présentation des dispositions pertinentes du droit national dans ses observations écrites.

26. Toutefois, il n’en demeure pas moins que la présentation incomplète des règles de droit national et les constatations de faits sommaires ont limité inutilement la possibilité pour les États membres, aux termes de l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, de présenter des observations écrites. À cet égard, il y a lieu de ne pas tenir compte de la mesure dans laquelle les informations manquantes peuvent être complétées par des recherches effectuées par les parties ou par
la Cour. En tout état de cause, il convient de retenir que les informations incomplètes sur les faits et le droit national qui leur est applicable compliquent considérablement la tâche de la Cour dans la recherche de réponses utiles aux questions préjudicielles posées.

27. À la lumière de ces considérations, j’estime que la demande de décision préjudicielle ne satisfait pas dans son ensemble aux exigences de l’article 94 du règlement de procédure de la Cour et, partant, doit être rejetée comme irrecevable.

VI. L’appréciation des questions préjudicielles au fond

28. Avant d’examiner les questions préjudicielles à titre subsidiaire, les réflexions faites par le gouvernement belge sur la notion de « contrat de crédit lié » dans ses observations écrites impliquent d’aborder au préalable la question de savoir s’il y a lieu, comme le suggère cet État membre, d’étendre l’examen des questions posées aux dispositions pertinentes de la directive.

A.   Sur la proposition du gouvernement belge d’inclure les dispositions de la directive sur les contrats de crédit liés dans l’appréciation

29. Il ressort de la demande de décision préjudicielle que le requérant au principal a fondé sa demande principale sur le fait que le transfert du montant du prêt est intervenu avant la notification de la fourniture du service convenu et donc en violation de la disposition protectrice de l’article 19 de la loi relative au crédit à la consommation. Cette disposition de droit national, qui n’a pas été reproduite dans la décision de renvoi ( 21 ), s’applique aux contrats de crédit liés et vise
notamment à garantir que les obligations du consommateur découlant du contrat de crédit ne prennent effet qu’à compter de la date de livraison du produit ou du service financé. Cette disposition transpose ainsi les exigences de l’article 11 de la directive 87/102 et de l’actuel article 15 de la directive 2008/48.

30. La juridiction de renvoi estime néanmoins que la disposition protectrice de l’article 19 de la loi relative au crédit à la consommation n’est pas applicable. Certes, elle admet qu’il existe un lien étroit entre le contrat conclu entre Home Vision et le consommateur et le contrat de crédit. Toutefois, les conditions d’application de cette disposition ne seraient pas remplies parce que, d’une part, le contrat de crédit ne mentionnerait pas le bien ou la prestation de services financé et que,
d’autre part, le prêteur n’aurait pas versé le prêt directement au vendeur ou au prestataire de services.

31. Dans ce contexte, le gouvernement belge souligne à juste titre que l’obligation du prêteur de mentionner la transaction financée dans le contrat de crédit découle, dans le cas des contrats de crédit liés, de l’article 10, sous e), de la directive 2008/48, et déclenche notamment l’applicabilité des règles protectrices prévues à l’article 15 de la directive 2008/48 ( 22 ). Toutefois, l’interprétation de l’obligation susmentionnée, retenue de manière implicite par la juridiction de renvoi, prive le
consommateur concerné de cette protection, l’indication de la transaction financée étant laissée en définitive à la discrétion du prêteur ( 23 ). La question se pose à tout le moins de savoir si, à la lumière de l’obligation incombant à une juridiction nationale d’interpréter cette obligation en conformité avec la directive ( 24 ), le résultat de cette interprétation est conforme à l’objectif poursuivi par la directive 2008/48.

32. Dans ce contexte, le gouvernement belge invite la Cour à se prononcer sur l’obligation pour le prêteur de mentionner l’opération financée en vertu de l’article 10, sous e), de la directive 2008/48 afin de clarifier sa portée dans les cas tels que celui au principal.

33. Une question d’interprétation découle en fait de la circonstance que les dispositions de la directive 2008/48 sur les « contrats de crédit liés » se caractérisent par une référence croisée qu’il y a lieu de qualifier de malheureuse : alors que, selon l’article 3, sous n), de la directive 2008/48, relèvent de la notion de « contrats de crédit liés » les contrats qui comportent une mention expresse du service spécifique ou de la prestation de services spécifique, l’article 10, sous e), dispose que
l’obligation d’indiquer le bien ou le service (financé) (ne) s’applique (que) dans le cas des contrats de crédit liés.

34. Cependant, la présente affaire ne se prête guère à résoudre la difficulté d’interprétation ainsi mise en évidence. Il est vrai que, en vue de fournir une réponse utile à la juridiction qui est à l’origine d’un renvoi préjudiciel, la Cour peut être amenée à prendre en considération des normes de droit de l’Union auxquelles le juge national n’a pas fait référence dans ses questions préjudicielles ( 25 ). Dans la présente demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi a néanmoins
précisé qu’elle considérait que les règles sur les contrats de crédit liés n’étaient pas pertinentes pour la solution du litige. Dans le contexte de la répartition des tâches entre la Cour et les juridictions nationales, cette détermination doit être acceptée puisque, dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, il n’appartient pas à la Cour de préciser les dispositions nationales pertinentes applicables au principal ( 26 ). Même si la Cour disposait des informations factuelles et juridiques
nécessaires pour examiner cette question d’interprétation de manière utile, sa réponse revêtirait en tout état de cause un caractère hypothétique. En définitive, il y a donc lieu de rejeter une extension de la procédure préjudicielle à cette question, sur laquelle les autres parties intéressées n’ont, au demeurant, pas été entendues.

B.   Sur la première question, sous a)

35. La première question, sous a), concerne l’interprétation de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48. La juridiction de renvoi demande en substance si l’objectif de l’obligation d’explication précontractuelle prévue par cette disposition, à savoir permettre au consommateur de « déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière », s’oppose à un aménagement national de cette obligation selon lequel le prêteur et, le cas échéant,
l’intermédiaire de crédit seraient tenus de rechercher, dans le cadre des contrats de crédit qu’ils offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit. On peut dès lors se demander si et dans quelle mesure l’obligation, prévue à l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48, d’expliquer l’information
précontractuelle requise en vertu du paragraphe 1, peut être étendue par des dispositions du droit national de manière à faire peser sur le prêteur ou l’intermédiaire de crédit une obligation de fourniture de conseils personnalisés au consommateur qui tiennent compte de la situation financière de ce dernier et du but du crédit.

36. Cette question sera examinée ci-après en fonction de la finalité poursuivie par la disposition concernée de la directive, de sa genèse et de considérations supplémentaires relatives à l’harmonisation visée.

1. Sur la finalité poursuivie par l’obligation d’expliquer l’information précontractuelle au titre de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48

37. Selon son libellé, l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 prévoit une obligation d’expliquer l’information précontractuelle requise en vertu du paragraphe 1, ainsi que les caractéristiques essentielles des produits proposés et les effets particuliers qu’ils peuvent avoir sur le consommateur, y compris les conséquences d’un défaut de paiement du consommateur. Ces explications, qui incombent autant au prêteur qu’à l’intermédiaire de crédit, doivent permettre au consommateur « de
déterminer si le contrat de crédit [envisagé] est adapté à ses besoins et à sa situation financière ».

38. Il ressort tout d’abord de ce libellé qu’il appartient en principe au consommateur de déterminer quel contrat correspond le mieux à ses besoins et à sa situation financière. Par conséquent, la Cour a déjà constaté qu’il appartenait au consommateur de décider, sur la base des informations fournies, s’il souhaitait se lier par les conditions préalablement rédigées par le professionnel ( 27 ). Cette constatation est également confirmée à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/48 par la
référence aux « différentes offres » et à la « décision en connaissance de cause » du consommateur sur la conclusion du contrat.

39. Dans le même temps, il est toutefois indéniable que seule la communication d’informations précontractuelles et leur explication portant sur des produits correspondant à la situation financière du consommateur et au but concret du crédit peut constituer une information pertinente et utile du consommateur. En ce sens, la Cour a constaté dans l’arrêt CA Consumer Finance ( 28 ) que, « en dépit des informations précontractuelles qui doivent être fournies en vertu de l’article 5, paragraphe 1, de
cette directive, le consommateur peut, avant de conclure le contrat de crédit, avoir besoin d’une aide supplémentaire pour déterminer quel est le contrat de crédit qui correspond le mieux à ses besoins et à sa situation financière ».

40. À cet égard, le gouvernement belge souligne à juste titre que les conseils personnalisés donnés au consommateur, tels qu’ils sont prévus par la législation nationale en cause, ne portent pas atteinte à la liberté de choix du consommateur et ne l’exonèrent en aucun cas de sa responsabilité de veiller à ses propres intérêts. Il est notamment libre de suivre ou non l’avis du prêteur ou de l’intermédiaire de crédit. Il conserve également la possibilité, le cas échéant, d’opter pour un produit d’un
autre fournisseur.

41. L’obligation incombant au prêteur en vertu de l’article 15, paragraphe 1, de la loi relative au crédit à la consommation en cause est donc indéniablement de nature à contribuer, conformément à l’objectif poursuivi par la directive 2008/48, à « assurer […] un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts» ( 29 ). Une telle obligation garantit en effet que le consommateur peut choisir entre les types et les montants de crédit les plus appropriés au regard de sa situation financière.
Cette appréciation trouve également son expression dans la jurisprudence de la Cour, selon laquelle l’obligation de fournir des explications adéquates vise à permettre au consommateur de se déterminer en toute connaissance de cause par rapport à un type de contrat de prêt ( 30 ).

42. Toutefois, il convient de souligner que la directive 2008/48, ainsi que plusieurs autres instruments de droit dérivé déjà adoptés auparavant pour achever le marché intérieur, tels que le régime précédent prévu par la directive 87/102, reposent sur l’idée que des mesures concernant l’information des consommateurs ne servent pas exclusivement la protection des consommateurs.

43. La directive 2008/48 avait, ainsi, pour base juridique l’article 95 CE (devenu article 114 TFUE), en combinaison avec l’article 251 CE. Cela montre que la directive 2008/48 vise à concilier la garantie d’un haut niveau de protection des consommateurs et la nécessité d’un marché intérieur opérationnel grâce à un rapprochement des législations dans les domaines spécifiquement couverts par ladite directive. Le législateur de l’Union a estimé que la concurrence devrait être renforcée en permettant
aux consommateurs informés de choisir entre différentes offres de produits ( 31 ).

44. Bien qu’un conseil personnalisé au consommateur allant au-delà de l’explication de l’information précontractuelle ne semble pas préjudiciable à cet objectif, une comparaison avec d’autres instruments du droit dérivé régissant la distribution des services financiers montre néanmoins que le législateur de l’Union établit une distinction entre, d’une part, la communication précontractuelle de l’information et son explication et, d’autre part, les conseils personnalisés. La directive 2014/17/UE ( 32
), par exemple, prévoit également des obligations d’information et des obligations précontractuelles, mais elle établit une distinction plus nette entre les débiteurs desdites obligations ( 33 ) et comporte, dans un article spécifique, une exigence d’explication correspondant à l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48. Les services de conseil, en revanche, font l’objet d’une disposition distincte ( 34 ). Dans un autre domaine d’activité, le « conseil en investissement » est envisagé
comme une activité réglementée dans le cadre des règles de protection des investisseurs de la directive 2014/65/UE ( 35 ) dite « MiFID II ». La directive (UE) 2016/97 ( 36 ), qui envisage également le conseil ( 37 ) comme une activité réglementée du distributeur de produits d’assurances, repose sur une approche similaire. Cela semble approprié dans la mesure où l’obligation de fournir un conseil personnalisé au consommateur, à l’investisseur ou au preneur d’assurance devrait être modulée en
fonction du statut juridique de son débiteur. En revanche, l’obligation d’explication en vertu de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 vise indifféremment les prêteurs et les intermédiaires de crédit.

45. À titre de conclusion provisoire, il convient donc de retenir que l’obligation de fournir un conseil personnalisé au consommateur, telle que celle en cause, contribue à l’information précontractuelle du consommateur, sans le priver de la possibilité de choisir entre différents produits de crédit, et que dès lors, elle n’est pas contraire à l’objectif essentiel de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48.

2. Sur la genèse de l’obligation d’explication en vertu de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48

46. La genèse de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 illustre la proximité entre l’obligation de conseil et les obligations d’information et d’explication précontractuelles.

47. L’article 6 de la première proposition de directive ( 38 ) intitulé « Information réciproque et préalable et obligation de conseil » prévoyait encore à son paragraphe 3 que « [l]e prêteur et, le cas échéant, l’intermédiaire de crédit recherchent parmi les contrats de crédit qu’ils offrent ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant total du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur, des avantages et désavantages afférents au
produit proposé et du but du crédit ».

48. Il n’a été renoncé à cette formulation, et donc en définitive à une obligation de conseil du prêteur ou de l’intermédiaire de crédit identifiée comme telle, qu’au stade de la proposition modifiée de directive de 2005 ( 39 ). Le libellé de la version de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 actuellement en vigueur correspond, en substance, à celui de l’article 5, paragraphe 6, de la proposition modifiée, qui a remplacé l’article 6, paragraphe 3, de la proposition initiale.

49. La Commission a motivé cette modification de la manière suivante : « La notion d’obligation de conseil a été modifiée. Contrairement à certaines demandes émanant du secteur bancaire, la Commission maintient le principe selon lequel le prêteur devrait, non pas simplement satisfaire aux exigences d’information précontractuelle, mais fournir des explications supplémentaires pour permettre au consommateur de prendre une décision en connaissance de cause. Cependant, pour répondre à une demande du
secteur bancaire et de certains États membres, il a été clarifié que le consommateur est toujours responsable de sa décision finale de conclure un contrat de crédit. Par conséquent, la référence au conseil est précisée comme étant l’obligation de donner au consommateur les moyens de juger des avantages et inconvénients du prêt. En outre, une plus grande marge de manœuvre a été laissée aux États membres pour adapter leurs dispositions législatives de transposition à la situation commerciale de
leur marché» ( 40 ).

50. Il résulte donc de cette genèse de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 que l’obligation d’explication actuellement prévue par la disposition doit être interprétée comme une modification de l’obligation de conseil du prêteur ou de l’intermédiaire de crédit.

51. Il est donc nécessaire d’examiner les conclusions à tirer de cette constatation à la lumière de l’harmonisation envisagée par la directive 2008/48.

3. Sur l’harmonisation recherchée

52. La Cour a déjà précisé à cet égard dans l’arrêt SC Volksbank România ( 41 ) qu’il découle de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48, interprété à la lumière des considérants 9 et 10 de celle-ci, que, en ce qui concerne les contrats de crédit qui relèvent du champ d’application de cette directive, celle-ci prévoit une harmonisation complète. En outre la Cour a constaté qu’il résulte de l’intitulé dudit article 22, que cette harmonisation revêt un caractère impératif, qui doit être
compris en ce sens que, dans les matières spécifiquement visées par cette harmonisation ( 42 ), les États membres ne sont pas autorisés à maintenir ou à introduire des dispositions nationales autres que celles qui sont prévues par ladite directive.

53. Dès lors qu’il était constant dans l’affaire au principal que le contrat de crédit litigieux relève du champ d’application de la directive 2008/48, l’appréciation d’une obligation telle que celle en cause dépend, en premier lieu, de la mesure dans laquelle l’obligation incombant au prêteur ou à l’intermédiaire de crédit en vertu du droit national peut être rattachée ou non à une matière spécifiquement visée par l’harmonisation que la directive 2008/48 entend réaliser.

54. À cet égard, il suffit de se baser sur le contenu normatif de la directive 2008/48. Une comparaison avec d’autres directives, qui visent également une harmonisation complète dans les domaines qu’elles couvrent ( 43 ), ne fournit aucune indication utile sur les matières spécifiquement visées par l’harmonisation qu’une directive donnée entend réaliser ( 44 ). Or, la question de savoir dans quelle mesure les États membres disposent ou non, dans les domaines spécifiquement couverts par
l’harmonisation, d’une marge de manœuvre ‑ par le recours à des options et des clauses de flexibilité ou par des clauses d’autorisation spéciale telles que celles prévues à l’article 5, paragraphe 6, deuxième phrase – dépend avant tout de la directive concernée ( 45 ). Au demeurant, il y a également lieu de prendre en considération le fait que ces marges de manœuvre, qui tiennent compte en définitive des limites de la compétence normative de l’Union au titre de l’article 114 TFUE, s’accompagne
d’une fragmentation persistante du droit, ce qui est précisément contraire à l’objectif de la directive concernée ( 46 ).

55. Ces marges de manœuvre varient également en fonction des différentes matières spécifiquement visées par l’harmonisation que la directive considérée entend réaliser. À cet égard, la disposition considérée de la directive est déterminante.

56. Selon son libellé, l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 prévoit une « obligation d’explication » de l’information précontractuelle prévue par ce même article. La disposition de droit national en question ajoute à l’obligation d’explication, prévue, en vertu de l’article 11, paragraphe 4, de la loi relative au crédit à la consommation, aux fins de transposer l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48, une obligation incombant au préteur, libellée de manière quasiment
identique à l’obligation de conseil prévue à l’article 6, paragraphe 3, de la proposition de directive initiale. On peut toutefois déduire de la genèse de l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 ( 47 ) que le législateur de l’Union a délibérément renoncé à une telle obligation et a introduit à la place une obligation d’explication. Dans ces conditions, force est de constater que la disposition de droit national en cause relève d’une matière spécifiquement visée par l’harmonisation que
la directive 2008/48 entend réaliser.

57. Il reste donc à déterminer si la réglementation nationale en cause relève de l’interdiction énoncée à l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48. À cet égard, il est déterminant de savoir dans quelle mesure cette réglementation comporte des dispositions dérogeant à l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48.

58. Il est vrai que la réglementation nationale en cause prévoit une obligation du prêteur allant au-delà des dispositions de l’article 5, paragraphe 6, première phrase, de la directive 2008/48. Toutefois, la deuxième phrase de cette disposition laisse aux États membres une certaine marge de manœuvre ( 48 ), tout en maintenant le principe de l’harmonisation totale, en leur permettant expressément d’adapter « les modalités d’octroi et l’étendue de cette assistance, et [d’]établir l’identité de la
personne qui la fournit, en fonction du contexte particulier dans lequel le contrat de crédit est proposé, de la personne à qui il est proposé, et du type de contrat de crédit proposé ».

59. Pour s’acquitter de l’obligation qui découle de l’article 15, paragraphe 1, de la loi relative au crédit à la consommation, le prêteur doit, conformément au libellé de cette norme, prêter attention à la situation financière du consommateur et au but du crédit. Ainsi, l’obligation du prêteur tient dûment compte de la situation particulière de la personne à laquelle le contrat de crédit est proposé et du type de crédit proposé. Toutefois, comme indiqué précédemment ( 49 ), cette obligation vise
autant les prêteurs que les intermédiaires de crédit, même si la portée des conseils que ces différents opérateurs économiques peuvent fournir est nécessairement différente en raison de leur statut différent. Ainsi, l’obligation en cause, telle qu’elle est formulée par le législateur national, ne comporte pas de différenciation en fonction de son débiteur. Toutefois, cela ne semble pas préjudiciable dans la mesure où l’article 5, paragraphe 6, deuxième phrase, de la directive 2008/48 laisse aux
États membres une marge de manœuvre sans exiger qu’ils en fassent usage.

60. Dans ce contexte, il convient également de garder à l’esprit que, selon le considérant 26, « [l]es États membres devraient prendre les mesures appropriées afin de promouvoir les pratiques responsables lors de toutes les phases de la relation de prêt, en tenant compte des caractéristiques particulières de leur marché du crédit» ( 50 ). L’obligation en cause, qui incombe au prêteur en vertu de l’article 15, paragraphe 1, de la loi relative au crédit à la consommation, constitue sans aucun doute
une telle mesure nationale visant à promouvoir des pratiques responsables lors de toutes les phases de l’octroi de crédit.

61. Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, nous concluons que l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 ne fait pas obstacle à une réglementation nationale, telle que celle prévue à l’article 15, paragraphe 1, de la loi relative au crédit à la consommation, selon laquelle le prêteur et l’intermédiaire de crédit sont tenus de rechercher, dans le cadre des contrats de crédits qu’ils offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant
du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit.

C.   Sur la première question, sous b)

62. Dans sa première question, sous b), la juridiction de renvoi demande en substance si l’appréciation, prévue à l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48, selon laquelle il appartient au consommateur de déterminer quel contrat répond à ses besoins et à sa situation financière, fait obstacle à une disposition de droit national, telle que l’article 15, paragraphe 2, de la loi belge relative au crédit à la consommation, selon laquelle le prêteur doit renoncer à conclure le contrat si, compte
tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, il existe des doutes raisonnables quant à la solvabilité future du consommateur.

63. Il convient néanmoins de clarifier au préalable l’articulation entre cette question et l’évaluation de la solvabilité du consommateur requise au titre de l’article 8 de la directive 2008/48.

1. Sur l’objet de la question

64. La première question préjudicielle, sous b), porte exclusivement sur l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48. Néanmoins, il convient tout d’abord de souligner que, selon son libellé et son contexte normatif ( 51 ), cette disposition a pour objet les obligations précontractuelles. Le champ d’application de la disposition ne couvre pas les questions relatives à la conclusion du contrat telles que la question, posée en l’espèce, de savoir s’il est nécessaire ou non de tenir compte, lors
de la conclusion du contrat, d’éventuelles informations sur la solvabilité future du consommateur, comme le prévoit manifestement l’article 15, paragraphe 2, de la loi relative au crédit à la consommation.

65. Il appartient toutefois à la Cour de fournir à la juridiction de renvoi une réponse pertinente pour la résolution du litige pendant devant elle. Par conséquent, la Cour est dans l’obligation de reformuler les questions qui lui sont posées et peut être amenée à tenir compte de dispositions de droit de l’Union que la juridiction de renvoi n’a pas citées dans sa question ( 52 ).

66. Dans leurs observations écrites, le gouvernement belge et la Commission ont fait référence à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 et à l’obligation qu’il prévoit de procéder à une évaluation précontractuelle de la solvabilité du consommateur. La question de savoir si et dans quelle mesure cette obligation précontractuelle peut affecter la conclusion du contrat doit donc être examinée à la lumière de cette disposition de la directive.

2. Sur le sens et la finalité de l’évaluation obligatoire de la solvabilité du consommateur et sa position dans l’économie de la directive

67. Comme le gouvernement belge et la Commission le soulignent à juste titre, l’obligation pour le prêteur d’évaluer la solvabilité du consommateur avant la conclusion du contrat de crédit vise à responsabiliser les prêteurs et à éviter l’octroi de prêts à des consommateurs non solvables ( 53 ).

68. Toutefois, l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 ne comporte aucune disposition expresse sur le comportement que doit adopter le prêteur lorsque, dans le cadre de l’évaluation de la solvabilité du consommateur, des doutes raisonnables quant à la capacité future du consommateur à s’acquitter durablement des obligations découlant du contrat de crédit envisagé surgissent ou si de tels doutes auraient à tout le moins dû surgir.

69. La Cour a déjà précisé que, conformément à l’article 23 de la directive 2008/48, il appartient aux États membres d’adopter le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales en matière de vérification précontractuelle de la solvabilité de l’emprunteur, adoptées en application de l’article 8 de cette directive ( 54 ). Selon l’article 23, deuxième phrase, de la directive 2008/48, les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. L’obligation pour
le prêteur de renoncer à la conclusion du contrat, s’il existe des doutes raisonnables quant à la solvabilité future du consommateur, ne constitue toutefois pas une telle sanction. En effet, la disposition de droit national en cause a pour préalable la bonne exécution de l’obligation d’évaluer la solvabilité du consommateur conformément à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48.

70. Toutefois, l’harmonisation complète recherchée – de manière ciblée – par la directive 2008/48, ne fait pas obstacle, selon nous, à une telle obligation du prêteur, l’obligation en cause ne relevant pas des matières spécifiquement visées par l’harmonisation que la directive entend réaliser.

71. Les observations faites sur la première question, sous a), ont déjà montré qu’une distinction précise entre les domaines couverts par l’harmonisation de manière spécifique et les autres domaines, dans lesquels les États membres conservent leur compétence normative, n’est pas sans poser des difficultés. En ce qui concerne l’obligation du prêteur en cause, il convient toutefois de noter que la directive 2008/48 ne comporte par exemple aucune disposition connexe sur la conclusion d’un contrat. À
cet égard, il est nécessaire de se référer aux règles du droit national.

72. Ce faisant, il apparaît clairement que le paradigme, sous-jacent à la directive 2008/48, d’un consommateur mature et bien informé qui, sur la base des informations obtenues, éventuellement complétées par des explications appropriées, peut opter ou non pour un engagement contractuel ( 55 ) est sans préjudice du droit reconnu au prêteur, en tant que manifestation de la liberté contractuelle, de renoncer le cas échéant – par exemple en application de sa politique de prêt – à conclure un contrat de
crédit.

73. Le refus d’une demande de crédit est présupposé, par exemple, par l’article 9, paragraphe 2, en combinaison avec le considérant 29, de la directive 2008/48, en ce que, dans un tel cas, cette disposition impose au prêteur une obligation spécifique d’information. Cependant, la directive 2008/48 ne prévoit aucune autre exigence concernant un tel rejet de la demande de prêt.

74. À cet égard, la thèse défendue par Belfius Banque, selon laquelle une appréciation négative de la solvabilité dans le cadre de l’évaluation obligatoire en vertu de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 ne peut conduire, conformément à l’article 5, paragraphe 6, de cette directive, qu’à la simple obligation de mettre en garde le consommateur avant de souscrire un crédit, est peu convaincante. Il est vrai que les dispositions des directives visent à assurer, dans une très large
mesure, que le consommateur peut prendre sa décision de conclure le contrat « en pleine connaissance de cause» ( 56 ). Toutefois, l’article 9 de la directive 2008/48 montre précisément qu’il est possible de rejeter sa demande de crédit « sur [le fondement de] la consultation d’une base de données » effectuée aux fins de « l’évaluation de la solvabilité d[u] consommateu[r] ».

75. En définitive, il reste ainsi à déterminer si, dans certaines circonstances, des dispositions du droit national peuvent obliger le prêteur à rejeter les demandes de crédit ou, en tout état de cause, à renoncer à conclure un contrat.

76. L’obligation du prêteur de renoncer à la conclusion du contrat lorsqu’il existe des doutes raisonnables quant à la solvabilité future du consommateur, comme le prévoit par exemple la disposition en cause de l’article 15, paragraphe 2, de la loi relative au crédit à la consommation, est conforme à l’objectif de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 d’assurer une protection efficace des consommateurs contre l’octroi irresponsable de prêts, qui dépassent leurs ressources financières et
sont susceptibles de conduire à leur insolvabilité.

77. La Commission n’a pas tort d’indiquer que l’obligation découlant de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 serait vaine si le prêteur demeurait libre de conclure le contrat même en cas d’évaluation négative. À cet égard, nous pensons également qu’il y a lieu de veiller à la cohérence de la protection des consommateurs et des règles prudentielles : la gestion adéquate du risque de crédit par les prêteurs est l’une des préoccupations principales du contrôle prudentiel ( 57 ). L’octroi
responsable de prêts y contribue de manière décisive.

78. Cette analyse est confirmée par une comparaison avec les exigences correspondantes de la directive 2014/17 concernant les contrats de crédit relatifs aux biens immobiliers ( 58 ). L’article 18, paragraphe 5, sous a), de ladite directive impose aux États membres de veiller à ce que « le prêteur accorde uniquement le crédit au consommateur si le résultat de l’évaluation de la solvabilité indique que les obligations découlant du contrat de crédit seront vraisemblablement respectées conformément à
ce qui est prévu par ledit contrat ».

79. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre à la première question, sous b), que ni l’article 5, paragraphe 6, ni l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 ne fait obstacle à une disposition de droit national, telle que celle en cause, selon laquelle le prêteur ne peut conclure un contrat de crédit que si, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, il doit raisonnablement présumer que le consommateur sera en mesure de faire face
aux obligations qui lui incombent en vertu du contrat de crédit.

D.   Sur la seconde question

80. Par la seconde question, qui ne fait référence à aucune disposition spécifique de la directive, la Cour est appelée, en cas de réponse négative à la première question, à préciser dans quelle mesure la directive 2008/48 peut être comprise en ce sens qu’elle impose toujours au prêteur et à l’intermédiaire de crédit l’obligation d’apprécier, à la place du consommateur, l’opportunité de la conclusion éventuelle du contrat de crédit.

81. Il n’y a pas lieu de répondre à la question de savoir si cette question est pertinente aux fins de la solution du litige puisque la réponse résulte déjà de nos observations concernant les deux sous‑parties de la première question préjudicielle. Il ressort de ces considérations que la directive 2008/48 ne saurait être interprétée en ce sens qu’elle oblige toujours le prêteur et l’intermédiaire de crédit à apprécier, à la place du consommateur, l’opportunité de la conclusion du contrat de crédit.

82. D’une part, il résulte de l’examen de la première question, sous a), que l’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48 n’exclut pas une réglementation nationale obligeant le prêteur et l’intermédiaire de crédit à rechercher le type et le montant du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit. La disposition en cause tient dûment compte de l’objet de l’article 5, paragraphe 6, de la directive
2008/48, à savoir veiller à ce que le consommateur prenne la décision de conclure le contrat en pleine connaissance de cause, sans méconnaître à cet égard les limites de la marge de manœuvre permise par la deuxième phrase de cette disposition.

83. D’autre part, il résulte de l’examen de la question que ni l’article 5, paragraphe 6, ni l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 ne fait obstacle à une disposition de droit national obligeant le prêteur à renoncer à la conclusion d’un contrat si l’analyse de la solvabilité du consommateur est négative. En tout état de cause, une telle obligation limitée à un cas de figure particulier ne saurait être assimilée à une obligation générale d’évaluer systématiquement, à la place du
consommateur, l’opportunité de conclure le contrat.

84. Il n’y a donc pas lieu de procéder à un examen spécifique de la seconde question.

VII. Conclusion

85. À la lumière des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de rejeter comme irrecevable la demande de décision préjudicielle présentée par la justice de paix du canton de Visé (Belgique).

86. À titre subsidiaire, au cas où la Cour ne suivrait pas cette proposition, nous proposons de répondre à la première question de la manière suivante :

1) L’article 5, paragraphe 6, de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, ne fait pas obstacle à une réglementation nationale, telle que celle prévue à l’article 15, paragraphe 1, de la loi belge relative au crédit à la consommation, selon laquelle le prêteur et l’intermédiaire de crédit sont tenus de rechercher, dans le cadre des contrats de crédits qu’ils
offrent habituellement ou pour lesquels ils interviennent habituellement, le type et le montant du crédit les mieux adaptés, compte tenu de la situation financière du consommateur au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit.

2) Ni l’article 5, paragraphe 6, ni l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 ne fait obstacle à une disposition de droit national, telle que celle prévue à l’article 15, paragraphe 1, de la loi belge relative au crédit à la consommation, selon laquelle le prêteur ne peut conclure un contrat de crédit que si, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, il doit raisonnablement présumer que le consommateur sera en mesure de faire face aux obligations qui lui
incombent en vertu du contrat de crédit.

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( 1 ) Langue originale : l’allemand.

( 2 ) Directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66).

( 3 ) Voir considérant 9 de la directive 2008/48. Sur cette notion, voir de manière générale Steennot, R., « Case Volksbank România : Limits off the full harmonization approach of the Consumer Credit Directive », Revue européenne de droit de la consommation, 2013, p. 87 et références citées.

( 4 ) Voir, notamment, arrêt du 9 novembre 2016, Home Credit Slovakia (C‑42/15, EU:C:2016:842), et conclusions de l’avocate générale Sharpston dans l’affaire Home Credit Slovakia (C‑42/15, EU:C:2016:431, point 2).

( 5 ) Voir considérant 9 de la directive 2008/48. Le fondement d’un niveau élevé de protection des consommateurs résulte déjà du choix de l’article 95 CE (devenu article 114 TFUE) comme base juridique de la directive 2008/48.

( 6 ) Voir considérants 4, 6, 7 et 9 de la directive 2008/48.

( 7 ) JO 1987, L 42, p. 48.

( 8 ) Loi du 12 juin 1991 (Moniteur belge du 9 juillet 1991, p. 15203), telle que modifiée par les lois du 7 janvier 2001 (Moniteur belge du 25 janvier 2001, p. 2101) et du 24 mars 2003 (Moniteur belge du 2 mai 2003, p. 23749) (ci-après la « loi relative au crédit à la consommation »).

( 9 ) Loi du 13 juin 2010 modifiant la loi du 12 juin 1991 relative au crédit à la consommation (Moniteur belge du 21 juin 2010, p. 38338, version allemande publiée au Moniteur belge du 31 mai 2011), modifiée en dernier lieu par la loi du 27 novembre 2012 (Moniteur belge du 30 novembre 2012, p. 76567).

( 10 ) Article 10 dans la version de la loi du 24 mars 2003. Cette disposition a été codifiée en tant qu’article VII.69, paragraphe 1, du Code de droit économique à compter du 1er avril 2015.

( 11 ) Article 11, paragraphe 4, de la loi du 12 juin 1991, telle que modifiée par la loi du 13 juin 2010.

( 12 ) Article 15, paragraphe 1, de la loi du 12 juin 1991, telle que modifiée par la loi du 13 juin 2010. Cette disposition a été codifiée en tant qu’article VII.75 du Code de droit économique à compter du 1er avril 2015.

L’article 15, paragraphe 2, de la loi relative au crédit à la consommation découle de l’article 15 de la loi du 12 juin 1991, modifiée par la loi du 10 août 2001 et reformulée par la loi du 24 mars 2003. Cette disposition a été codifiée, après quelques modifications mineures, en tant qu’article VII.77, paragraphe 2, premier alinéa, du Code de droit économique à compter du 1er avril 2015.

( 13 ) Loi du 12 juin 1991, telle que modifiée par la loi du 13 juin 2010. Cette disposition a été codifiée en tant qu’article VII.91 du Code de droit économique à compter du 1er avril 2015.

( 14 ) Il ressort des pièces du dossier transmis à la Cour par la juridiction de renvoi que le contrat conclu avec Home Vision prévoyait la mise en place de deux installations photovoltaïques, l’une en Belgique et l’autre en Italie. Toutefois, la décision de renvoi ne comporte pas de constatations en ce sens.

( 15 ) Voir, ex multis, arrêts du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania (C‑74/16, EU:C:2017:496, point 25), et du 20 décembre 2017, Asociación Profesional Elite Taxi (C‑434/15, EU:C:2017:981, point 23).

( 16 ) En outre, concernant l’article 94, sous a) et b), du règlement de procédure de la Cour, voir notamment arrêts du 10 mai 2017, de Lobkowicz (C‑690/15, EU:C:2017:355, point 28), et du 20 décembre 2017, Asociación Profesional Elite Taxi (C‑434/15, EU:C:2017:981, point 24).

( 17 ) Arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 26 et jurisprudence citée).

( 18 ) Il reste encore à déterminer si l’engagement pris par Home Vision de « reverser la totalité de son emprunt par mensualités de 622,41 euros » fait référence à une convention de financement distincte ou à un emprunt bancaire, tel que l’accord de crédit du 22 mai 2012.

( 19 ) Le gouvernement belge se réfère à cet égard à l’article 92 de la loi relative au crédit à la consommation (devenu article VII.201 du Code de droit économique).

( 20 ) Arrêts du 7 septembre 1999, Beck et Bergdorf (C‑355/97, EU:C:1999:391, point 22) ; du 23 janvier 2018, F. Hoffmann-La Roche e.a. (C‑179/16, EU:C:2018:25, point 45) ; du 29 mai 2018, Liga van Moskeeën en Islamitische Organisaties Provincie Antwerpen e.a. (C‑426/16, EU:C:2018:335, point 31), et du 25 juillet 2018, Confédération paysanne e.a. (C‑528/16, EU:C:2018:583, point 73).

( 21 ) À cet égard, voir déjà point 23 des présentes observations. Concernant le libellé de cette disposition voir point 12.

( 22 ) Selon l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2008/48, le consommateur a notamment le droit d’exercer un recours à l’encontre du prêteur s’il n’a pas été en mesure de faire valoir, à l’encontre du cocontractant, ses droits au titre du contrat financé en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution de ce contrat.

( 23 ) Sur la situation juridique au regard de la directive 87/102, voir par exemple arrêt du 4 octobre 2007, Rampion et Godard (C‑429/05, EU:C:2007:575), et notamment la constatation selon laquelle cela irait à l’encontre des dispositions pertinentes de la directive que « le droit d’exercer un recours […] dont bénéficie le consommateur à l’encontre du prêteur, soit subordonné à la condition que l’offre préalable de crédit mentionne le bien ou la prestation de services financé » (point 50).

( 24 ) Concernant la directive 2008/48, voir arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais (C‑565/12, EU:C:2014:190, point 54). Voir également arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, point 64).

( 25 ) Arrêt du 26 mai 2016, Kohll et Kohll-Schlesser (C‑300/15, EU:C:2016:361, point 35 et jurisprudence citée).

( 26 ) Arrêt du 26 juin 2008, Burda (C‑284/06, EU:C:2008:365, point 39).

( 27 ) Arrêt du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová (C‑377/14, EU:C:2016:283, point 64).

( 28 ) Arrêt du 18 décembre 2014 (C‑449/13, EU:C:2014:2464, point 41). Voir également le considérant 27 identique.

( 29 ) Considérant 9 de la directive 2008/48.

( 30 ) Arrêt du 18 décembre 2014, CA Consumer Finance (C‑449/13, EU:C:2014:2464, point 42).

( 31 ) Voir toutefois l’appréciation critique de cette approche par Micklitz, H.-W., « The Targeted Full Harmonisation Approach : Looking Behind the Curtain », p. 47 (p. 75 et suivantes), in Howells, G./Schulze, R. (Eds.), Modernising and Harmonising Consumer Contract Law, 2009 [à l’occasion de la publication de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux droits des consommateurs, COM (2008) 614 final].

( 32 ) Directive 2014/17/UE du Parlement européen et du Conseil, du 4 février 2014, sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et modifiant les directives 2008/48/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 60, p. 34).

( 33 ) L’article 15 de la directive 2014/17 prévoit par exemple des exigences d’information applicables aux intermédiaires de crédit ou à leurs représentants désignés.

( 34 ) Article 22 de la directive 2014/17. Voir, à cet égard, Gourio, A./Thebault, L. « Adoption de la directive sur le crédit immobilier », Revue de Droit bancaire et financier, 2014, p. 64 (à la page 65) : « En revanche, malgré les velléités d’un État membre, la directive ne prévoit pas d’obligation de conseil. Le conseil constitue au contraire un service distinct de l’octroi de prêt, fourni sur une base contractuelle et susceptible de rémunération. »

( 35 ) Directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE (MiFID II) (JO 2014, L 173, p. 349).

( 36 ) Directive (UE) 2016/97 du Parlement européen et du Conseil du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances (JO 2016, L 26, p. 19).

( 37 ) Selon l’article 20, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2016/97, le conseil est « une recommandation personnalisée [du distributeur de produits d’assurance] expliquant pourquoi un produit particulier correspondrait le mieux à ses exigences et à ses besoins ».

( 38 ) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l’harmonisation des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit aux consommateurs [COM(2002) 443 final].

( 39 ) Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux contrats de crédit aux consommateurs modifiant la directive 93/13/CE du Conseil (présentée par la Commission conformément à l’article 250, paragraphe 2 du traité CE) [COM(2005) 483 final].

( 40 ) Proposition modifiée citée note 39. Motifs sous le point 5.4, p. 6 et 7.

( 41 ) Arrêt du 12 juillet 2012 (C‑602/10, EU:C:2012:443, point 38).

( 42 ) Dans le même temps, cette expression montre que l’harmonisation complète visée par la directive 2008/48 doit être considérée comme ciblée. En effet, l’article 1er de la directive 2008/48 ne vise à harmoniser que certains aspects de la législation et des dispositions réglementaires des États membres relatifs aux contrats de crédit à la consommation. Voir, sur l’ensemble de cette question, Steennot, R., « Case Volksbank România : Limits of the full harmonization approach of the Consumer Credit
Directive », Revue européenne de droit de la consommation, 2013, p. 87 (à la p. 93).

( 43 ) Le gouvernement belge invoque notamment la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis‑à‑vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales ») (JO
2005, L 149, p. 22), et en particulier le considérant 11 de cette directive.

( 44 ) Par conséquent, il est sans importance par exemple que l’article 3, paragraphe 9, de la directive 2005/29 dispense les États membres, dans le secteur des services financiers et de l’immobilier, d’imposer des obligations « plus restrictives ou plus rigoureuses que celles prévues par la présente directive dans le domaine dans lequel cette dernière vise au rapprochement des dispositions en vigueur (mise en italique par nos soins). Voir, à cet égard, Verdure, C., « La directive 2005/29/CE : base
légale et degré d’harmonisation », Revue européenne de droit de la consommation, 2013, p. 149 (à la page 162).

( 45 ) Steennot, R., loc.cit. (note 42), p. 90. Voir également de manière générale : Riehm, T./Schreindorfer, B., « Das Harmonisierungskonzept der neuen Verbraucherkreditrichtlinie », GPR 2008, p. 244 (à la page 247).

( 46 ) Steenot, R., loc. cit. (note 42), p. 90. Voir également Riehm, T./Schreindorfer, B., loc. cit. (note 45), p. 247.

( 47 ) Voir points 46 et suivants des présentes conclusions.

( 48 ) Voir, plus généralement, les explications données par la Commission concernant la proposition modifiée au point 5.11 de celle-ci, précitée note 39, p. 8.

( 49 ) Voir point 44 des présentes conclusions.

( 50 ) L’article 9 de la proposition initiale de directive prévoyait une obligation d’octroi de prêt responsable distincte. Toutefois, cette disposition ne figure plus dans la proposition modifiée ni dans la directive 2008/48 adoptée.

( 51 ) Il ressort déjà du titre de l’article 5 de la directive 2008/48 que les « informations précontractuelles » font l’objet de cette disposition.

( 52 ) Voir, en dernier lieu, arrêt du 7 août 2018, Smith (C‑122/17, EU:C:2018:631, point 34). Voir également, ex multis, arrêt du 22 juin 2017, E.ON Biofor Sverige (C‑549/15, EU:C:2017:490, point 72).

( 53 ) Arrêt du 18 décembre 2014, CA Consumer Finance (C‑449/13, EU:C:2014:2464, point 35). Voir également arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais (C‑565/12, EU:C:2014:190, point 43).

( 54 ) Arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais (C‑565/12, EU:C:2014:190, point 43).

( 55 ) Voir points 38 et suivants des présentes conclusions.

( 56 ) Voir, par exemple, considérant 19 au début.

( 57 ) Voir, ex multis, « Principes fondamentaux pour un contrôle bancaire efficace » élaborés par le comité de Bâle sur le contrôle bancaire, notamment le principe 17 sur le « Risque de crédit ». Consultables sous https://www.bis.org/publ/bcbs230_fr.pdf. À cet égard, le considérant 26 de la directive 2008/48 indique également que « [s]ans préjudice des dispositions en matière de risque de crédit de la directive 2006/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 concernant l’accès à
l’activité des établissements de crédit et son exercice […], les prêteurs devraient avoir la responsabilité de vérifier la solvabilité de chaque consommateur cas par cas ».

( 58 ) La directive 2014/17 a été adoptée à la suite de la crise financière internationale, en raison notamment des risques systémiques liés à l’octroi irresponsable de prêts. À cet égard, voir par exemple Partsch, P.-E., Droit bancaire et financier européen, volume 1, 2e édition, point 1237.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-58/18
Date de la décision : 14/02/2019
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par la justice de paix du canton de Visé.

Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 2008/48/CE – Obligations précontractuelles – Article 5, paragraphe 6 – Obligation pour le prêteur de rechercher le crédit le mieux adapté – Article 8, paragraphe 1 – Obligation pour le prêteur de s’abstenir de conclure le contrat de prêt en cas de doutes sur la solvabilité du consommateur – Obligation pour le prêteur d’apprécier l’opportunité du crédit.

Protection des consommateurs

Rapprochement des législations


Parties
Demandeurs : Michel Schyns
Défendeurs : Belfius Banque SA.

Composition du Tribunal
Avocat général : Kokott

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2019:120

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