ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)
21 septembre 2023 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Union douanière – Règlement (UE) no 952/2013 – Code des douanes de l’Union – Article 60, paragraphe 2 – Acquisition de l’origine des marchandises – Règlement délégué (UE) 2015/2446 – Article 32 – Marchandises dans la production desquelles interviennent plusieurs pays ou territoires – Annexe 22-01 – Règle primaire applicable aux marchandises relevant de la sous-position 730441 du système harmonisé – Notion de “profilé creux” – “Ébauches de tube” en acier relevant de la
sous-position 730449 du système harmonisé, obtenues par formage à chaud et permettant la production de tubes en acier par formage à froid, relevant de la sous-position 730441 du système harmonisé – Validité de la règle primaire »
Dans l’affaire C‑210/22,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg, Allemagne), par décision du 2 mars 2022, parvenue à la Cour le 18 mars 2022, dans la procédure
Stappert Deutschland GmbH
contre
Hauptzollamt Hannover,
LA COUR (neuvième chambre),
composée de M. D. Gratsias, président de la dixième chambre, faisant fonction de président de la neuvième chambre, M. S. Rodin (rapporteur) et Mme O. Spineanu–Matei, juges,
avocat général : M. P. Pikamäe,
greffier : Mme K. Hötzel, administratrice,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 mars 2023,
considérant les observations présentées :
– pour Stappert Deutschland GmbH, par Mes K. H. Felderhoff, Rechtsanwalt, K. Harden, Rechtsanwältin, et H.-M. Wolffgang, Steuerberater,
– pour le Hauptzollamt Hannover, par M. T. Röper,
– pour le gouvernement belge, par Mme S. Baeyens et M. P. Cottin, en qualité d’agents, assistés de M. B. Coene et Mme Z.-Z. De Decker, en qualité d’experts,
– pour le gouvernement hongrois, par M. M. Z. Fehér et Mme K. Szíjjártó, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par M. B.-R. Killmann, Mmes F. Moro et M. Salyková, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la règle primaire applicable aux marchandises relevant de la sous-position 730441 du système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci–après le « SH »), prévue à l’annexe 22-01 du règlement délégué (UE) 2015/2446 de la Commission, du 28 juillet 2015, complétant le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil au sujet des modalités de certaines dispositions du code des douanes de l’Union (JO
2015, L 343, p. 1), tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2018/1063 de la Commission, du 16 mai 2018 (JO 2018, L 192, p. 1) (ci-après la « règle primaire »), en tant que celle-ci comporte un critère spécifique relatif aux « profilés creux du no 730449 » (ci-après le « critère relatif aux profilés creux ») et sur la validité de cette règle.
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Stappert Deutschland GmbH (ci-après « Stappert ») au Hauptzollamt Hannover (bureau principal des douanes de Hanovre, Allemagne) (ci-après le « bureau des douanes ») au sujet de l’acquisition d’origine de produits creux droits et d’une épaisseur régulière relevant de la sous-position 730441 du SH.
Le cadre juridique
Le droit international
3 Le SH a été institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, conclue à Bruxelles le 14 juin 1983 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 1503, p. 4, no 25910 (1988)], dans le cadre de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1). Les notes
explicatives du SH sont élaborées au sein de l’OMD conformément aux dispositions de cette convention.
4 Le chapitre 72 du SH s’intitule « Fonte, fer et acier ».
5 Les notes explicatives du SH relatives à ce chapitre 72, qui s’appliquent mutatis mutandis aux produits du chapitre 73 du SH, énoncent, sous le titre « Considérations générales » :
« [...]
IV. Production des produits finis
Les demi-produits et, dans certains cas, les lingots, sont transformés ultérieurement en produits finis.
On les distingue généralement en produits plats (larges plats, larges bandes, tôles, feuillards) et produits longs (fil machine, barres, profiles, fils).
Ces transformations sont obtenues, notamment, par déformation plastique soit à chaud à partir des lingots ou demi produits (laminage à chaud, forgeage, filage à chaud) soit à froid à partir des produits finis à chaud (laminage à froid, extrusion, tréfilage, étirage) éventuellement suivie, dans certains cas (par exemple, barres obtenues à froid par meulage, tournage, calibrage) d’opérations de parachèvement.
[...]
B. Déformations plastiques à froid
[...]
Les produits obtenus à froid peuvent être distingués de ceux laminés ou filés à chaud par les caractéristiques suivantes :
– la surface des produits obtenus à froid est d’un meilleur aspect que celle des produits obtenus à chaud, et ne présente jamais de couche de battitures ;
– les tolérances sur les dimensions sont plus réduites pour les produits obtenus à froid ;
– le laminage à froid concerne surtout les produits plats minces ;
– l’examen microscopique des produits obtenus à froid fait apparaître une nette déformation des grains et leur orientation dans le sens du laminage. Par contre, lorsque les produits sont obtenus à chaud, les grains apparaissent presque réguliers par suite de la recristallisation. »
6 Les considérations générales des notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 de celui-ci indiquent :
« [...]
Pour l’application du présent chapitre on considère comme :
1) Tubes et tuyaux
Les produits creux concentriques de section constante, avec un seul creux fermé, sur toute leur longueur et dont les profils extérieur et intérieur ont la même forme. Les tubes et tuyaux en acier sont de section principalement circulaire, ovale, carrée ou rectangulaire. Ils peuvent, en outre, être de section triangulaire équilatérale ou polygonale convexe régulière. On considère également comme tubes et tuyaux les produits de section autre que circulaire présentant des angles arrondis sur toute
leur longueur, ainsi que les tubes à extrémités surépaissies. Ils peuvent être polis, revêtus, cintrés (y compris les serpentins), filetés et manchonnés ou non, percés, rétreints, évasés, coniques ou munis de brides, de collerettes ou de bagues.
2) Profilés creux
Les produits creux ne répondant pas à la définition ci-dessus et, en particulier, ceux dont les profils extérieur et intérieur n’ont pas la même forme.
Les dispositions des considérations générales des notes explicatives du chapitre 72, s’appliquent mutatis mutandis aux produits du présent chapitre. »
7 La note explicative relative à la position 7304 du SH précise :
« Les tubes, tuyaux et profilés creux de la présente position peuvent être obtenus par divers procédés :
[...]
B) Filage à chaud par extrusion dans une presse, soit sous verre (procédé UgineSéjournet), soit sous un autre lubrifiant, d’un rond. Ce procédé comprend, en fait, les opérations suivantes : perçage, expansion ou non et filage.
Les opérations définies ci-dessus, sont suivies d’opérations de finissage :
– soit à chaud : dans ce cas le tube brut, après réchauffage, passe dans un calibreur-réducteur, tireur ou non, puis dans une dresseuse ;
– soit à froid sur mandrin par étirage sur banc ou par laminage sur laminoir à pas de pèlerin (procédés Mannesmann ou Megaval). Ces procédés permettent d’obtenir à partir de tubes laminés ou filés à chaud, utilisés comme ébauches, des tubes de diamètre et d’épaisseur plus faibles que par les procédés à chaud (à noter que le procédé Transval permet d’obtenir directement des tubes de faible épaisseur), ainsi que des tubes à tolérances réduites sur le diamètre et l’épaisseur. Les opérations à froid
permettent aussi d’obtenir différents degrés de finition de surface, notamment la surface glacée (tubes à faible degré de rugosité) exigée, par exemple, pour les vérins pneumatiques et les cylindres hydrauliques.
[...]
En ce qui concerne la distinction entre les tubes et tuyaux d’une part et les profilés creux d’autre part, se reporter aux considérations générales du présent chapitre.
[...] »
Le droit de l’Union
Le code des douanes
8 L’article 33 du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1, et rectificatif JO 2016, L 267, p. 2, ci-après le « code des douanes »), intitulé « Décisions en matière de renseignements contraignants », prévoit, à son paragraphe 1 :
« Les autorités douanières prennent, sur demande, des décisions en matière de renseignements tarifaires contraignants (ci-après dénommées “décisions RTC”), ou des décisions en matière de renseignements contraignants en matière d’origine (ci-après dénommées “décisions RCO”).
[...] »
9 L’article 60 du code des douanes, intitulé « Acquisition de l’origine », prévoit, à son paragraphe 2 :
« Les marchandises dans la production de laquelle interviennent plusieurs pays ou territoires sont considérées comme originaires de celui où elles ont subi leur dernière transformation ou ouvraison substantielle, économiquement justifiée, effectuée dans une entreprise équipée à cet effet et ayant abouti à la fabrication d’un produit nouveau ou correspondant à un stade de fabrication important. »
10 L’article 62 du code des douanes, intitulé « Délégation de pouvoir », dispose :
« La Commission est habilitée à adopter des actes délégués en conformité avec l’article 284, établissant les règles selon lesquelles on considère que des marchandises dont l’origine non préférentielle doit être déterminée aux fins de l’application des mesures de l’Union visées à l’article 59 ont été entièrement obtenues dans un même pays ou territoire, ou ont subi leur dernière transformation ou ouvraison substantielle, économiquement justifiée, effectuée dans une entreprise équipée à cet effet
et ayant abouti à la fabrication d’un produit nouveau ou correspondant à un stade de fabrication important dans un pays ou territoire donné, conformément à l’article 60. »
11 L’article 284 de ce code, intitulé « Exercice de la délégation », précise les modalités de cet exercice.
Le règlement délégué 2015/2446
12 Dans l’exercice de la compétence que lui confère l’article 62 du code des douanes, la Commission a adopté le règlement délégué 2015/2446.
13 Le considérant 20 de ce règlement délégué énonce :
« Par la décision 94/800/CE [du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO 1994, L 336, p. 1)], le Conseil a approuvé l’accord sur les règles d’origine (OMC-GATT 1994), annexé à l’acte final signé à Marrakech le 15 avril 1994. L’accord sur les règles d’origine dispose que les règles spécifiques pour la
détermination de l’origine des produits de certains secteurs doivent avant tout se fonder sur le pays dans lequel le processus de production a entraîné un changement dans le classement tarifaire. Ce n’est que dans les cas où ce critère ne permet pas de déterminer le pays de la dernière transformation substantielle que d’autres critères peuvent être utilisés, comme un critère de valeur ajoutée ou la détermination d’une opération de transformation spécifique. L’Union étant partie à l’accord
considéré, il est opportun d’établir des dispositions dans la législation douanière de l’Union qui tiennent compte des principes énoncés dans cet accord pour déterminer le pays dans lequel les marchandises ont subi leur dernière transformation substantielle. »
14 L’article 32 dudit règlement délégué, intitulé « Marchandises dans la production desquelles interviennent plusieurs pays ou territoires (article 60, paragraphe 2, du code [des douanes]) », dispose :
« Les marchandises reprises à l’annexe 22-01 sont considérées comme ayant subi leur dernière transformation ou ouvraison substantielle, ayant abouti à la fabrication d’un produit nouveau ou représentant un stade de fabrication important, dans le pays ou territoire dans lequel les règles énoncées dans cette annexe sont remplies ou qui est identifié par ces règles. »
15 L’annexe 22-01 du même règlement délégué est intitulée « Notes introductives et liste des ouvraisons ou transformations substantielles conférant l’origine non préférentielle ». Cette annexe comprend une partie intitulée « Notes introductives » dont les points 2 et 3 sont libellés en ces termes :
« 2. Application des règles de la présente annexe
2.1. Les règles énoncées dans la présente annexe doivent être appliquées aux marchandises sur la base de leur classement dans le [SH] et d’autres critères susceptibles de venir s’ajouter aux positions ou sous-positions du [SH] créées spécifiquement aux fins de la présente annexe. Dans la présente annexe, une position ou sous-position du [SH] qui [fait] l’objet d’une nouvelle subdivision en appliquant ces critères est qualifiée de “position fractionnée” ou de “sous-position fractionnée”. [...]
Le classement des marchandises dans les positions et sous-positions du [SH] est régi par les règles générales pour l’interprétation du [SH] et par toute note relative aux sections, chapitres et sous-positions de ce système. Ces règles et notes font partie de la nomenclature combinée qui figure à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil[, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1)][NC]. Afin de
déterminer la position ou sous-position appropriée pour certaines marchandises énoncées dans la présente annexe, les règles générales pour l’interprétation du [SH] et toute note relative aux sections, chapitres et sous-positions de ce système s’appliquent mutatis mutandis, sauf dispositions contraires figurant dans la présente annexe.
[...]
3. Glossaire
Les règles primaires applicables au niveau des subdivisions, lorsqu’elles reposent sur un changement de classement tarifaire, peuvent être exprimées au moyen des abréviations ci-après.
[...]
CP : passage à la position concernée à partir de toute autre position
[...] »
16 Le chapitre 73 de ladite annexe est intitulé « Ouvrages en fonte, en fer ou en acier ». Il comprend notamment une « Règle résiduelle de chapitre » ainsi libellée :
« Lorsque le pays d’origine ne peut pas être déterminé en appliquant les règles primaires, le pays d’origine des marchandises est le pays dont est originaire la majeure partie des matières, déterminée sur la base de la valeur des matières. »
17 Ce chapitre 73 comprend un tableau indiquant les règles primaires qu’il convient d’appliquer aux fins de déterminer le pays ou le territoire d’origine des marchandises qui y sont mentionnées et identifiées selon leur position ou sous-position dans le SH, notamment la règle primaire applicable aux tubes et tuyaux étirés ou laminés à froid, en acier inoxydable sans soudure, de section circulaire relevant de la sous-position 730441 du SH. Ledit tableau se lit comme suit :
« Code SH 2017 Désignation des marchandises Règles primaires
[...]
7304 Tubes, tuyaux et profilés creux, sans soudure, en fer ou en acier Comme indiqué pour les sous-positions
[...]
- autres, de section circulaire, en aciers inoxydables :
7304 41 - - étirés ou laminés à froid (réduits à froid) CP, ou changement à partir des profilés creux du no 7304 49
7304 49 -- autres CP »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
18 Le 20 janvier 2016, Stappert, une société de négoce en acier, a demandé au bureau des douanes un RCO, conformément à l’article 33 du règlement no 952/2013, dans le but d’importer de Corée du Sud des tubes et tuyaux sans soudure en acier inoxydable relevant de la sous-position 730441 du SH (ci-après les « tubes concernés »). Le processus de fabrication des tubes est le suivant : des lingots d’acier massif subissent, dans un premier temps, en Chine, une transformation par voie d’une déformation
plastique à chaud par extrusion dans une presse (formage à chaud). Les produits semi-finis ainsi obtenus (ci-après les « ébauches de tube ») relèvent de la sous-position 730449 du SH. Dans un second temps, les ébauches de tube sont acheminées en Corée du Sud pour y subir un laminage à froid et un étirement pour former des tubes. Selon Stappert, la Corée du Sud doit être désignée comme étant le pays d’origine des tubes concernés, conformément à l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes. Ceci
aurait pour conséquence qu’aucun droit antidumping ne devrait être perçu sur les importations de ces tubes, ce qui ne serait pas le cas si le pays d’origine était la Chine.
19 Par décision du 16 juin 2017, le bureau des douanes a considéré que les tubes avaient la même origine non préférentielle que les ébauches de tube, à savoir la Chine. Selon le bureau des douanes, conformément à la règle primaire, l’origine des tubes devait en effet être établie en fonction du pays de fabrication des ébauches de tube.
20 Stappert a introduit une réclamation contre cette décision en faisant valoir que la dernière étape de transformation substantielle, économiquement justifiée, doit être déterminante pour l’acquisition d’origine. Or, en l’occurrence, cette dernière étape serait effectuée en Corée du Sud.
21 Par décision du 23 novembre 2018, le bureau des douanes a rejeté cette réclamation. Selon ce dernier, d’une part, aucun changement de position tarifaire n’intervient en Corée du Sud. D’autre part, contrairement à ce que Stappert soutiendrait, les ébauches de tube fabriquées en Chine ne pourraient pas être considérées comme des « profilés creux » relevant de la sous-position 730449 du SH, au sens du critère relatif aux profilés creux, qui seraient ensuite transformés à froid en Corée du Sud. Selon
le bureau des douanes, la notion de « profilés creux » doit être interprétée conformément aux notes explicatives relatives au chapitre 73 du SH et il en résulterait que les ébauches de tube ne sont pas des « profilés creux », mais des « tubes ».
22 Stappert a saisi la juridiction de renvoi, le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg, Allemagne), d’un recours visant à obtenir, à titre principal, un RCO constatant que la Corée du Sud est le pays d’origine des tubes concernés et, à titre subsidiaire, la constatation de l’illégalité du refus du bureau des douanes de constater cette origine.
23 Dans ce contexte, la juridiction de renvoi se demande, tout d’abord, si la notion de « profilés creux », au sens de la règle primaire, couvre des produits tels que les ébauches de tube.
24 En premier lieu, selon cette juridiction, la portée de cette notion ne saurait être déduite de la genèse de la règle primaire, plus particulièrement par référence à des documents rédigés à l’occasion des négociations ayant eu lieu dans le cadre du programme de travail relatif à l’accord sur les règles d’origine, visé au considérant 20 du règlement délégué 2015/2446, qui ne précisent pas ce qu’il y a lieu d’entendre par « profilés creux » relevant de la sous-position 730449 du SH.
25 En deuxième lieu, selon la juridiction de renvoi, il convient de privilégier l’interprétation qui répond le mieux aux critères d’appréciation liés à l’origine et une interprétation en termes tarifaires ne devrait pas aller à l’encontre des critères prévus à l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes.
26 En troisième lieu, la juridiction de renvoi indique que les notes introductives de l’annexe 22-01 du règlement délégué 2015/2446 ne se réfèrent pas aux notes explicatives du SH.
27 En quatrième lieu, cette juridiction estime que le processus de fabrication envisagé dans la règle primaire est celui décrit notamment dans les notes explicatives relatives à la position 7304 du SH, dont il pourrait être déduit que les tubes laminés ou filés à chaud sont utilisés comme des produits intermédiaires, et correspondraient dès lors à des « profilés creux », au sens dudit critère.
28 En cinquième lieu, il n’existerait pas de taxinomie uniforme pour la description des opérations en cause au principal.
29 En sixième lieu, si la notion de « profilé creux » devait être interprétée conformément aux notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 de celui-ci, l’acquisition d’origine dépendrait uniquement de la forme de la matière, ce qui paraît à la juridiction de renvoi être une application arbitraire de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes.
30 En outre, il ressortirait du considérant 33 du règlement d’exécution (UE) 2017/2093 de la Commission, du 15 novembre 2017, clôturant l’enquête sur le contournement possible des mesures antidumping instituées par le règlement d’exécution (UE) no 1331/2011 du Conseil sur les importations de certains tubes et tuyaux sans soudure en acier inoxydable originaires de la République populaire de Chine par des importations expédiées depuis l’Inde, qu’ils aient ou non été déclarés originaires de ce pays, et
mettant fin à l’enregistrement de ces importations imposé par le règlement d’exécution (UE) 2017/272 de la Commission (JO 2017, L 299, p. 1), que le formage à froid transforme substantiellement un tube ou tuyau et altère de manière irréversible ses caractéristiques essentielles, de sorte que ses dimensions et ses propriétés physiques, mécaniques et métallurgiques s’en trouveraient modifiées, ainsi qu’il ressortirait des considérations générales des notes explicatives du SH relatives au
chapitre 72 du SH, qui sont pertinentes pour le chapitre 73 du SH.
31 En septième lieu, la juridiction de renvoi est d’avis que, sur le plan technique, une interprétation de la notion de « profilé creux » sur la base des notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 du SH n’a aucun intérêt en pratique. En effet, la transformation par formage à froid d’un profilé creux, au sens de la définition figurant dans ces notes explicatives, bien qu’elle soit techniquement possible, entraînerait des coûts prohibitifs, de telle sorte que le procédé de fabrication de tubes
le plus usité serait la transformation à froid de tubes usinés à chaud.
32 En huitième lieu, selon cette juridiction, les produits relevant de la sous-position 730449 du SH ne sont pas tous susceptibles de transformations. Or, les ébauches de tube seraient des produits qui, quant à eux, ne sauraient être utilisés qu’une fois transformés. À cet égard, le fait que la matière à partir de laquelle sont fabriqués des tubes relevant de la sous-position 730441 du SH n’a pas fait l’objet d’essais de conformité par référence à une norme industrielle relative aux tubes et tuyaux
sans soudure usinés à chaud démontrerait que cette matière doit nécessairement faire l’objet d’une transformation ultérieure.
33 Ensuite, dans l’hypothèse où l’origine des tubes concernés ne devrait pas être déterminée conformément au critère relatif aux profilés creux ou s’il s’avérait impossible de répondre à la première question, la juridiction de renvoi se demande si ce critère est invalide en raison d’un défaut de motivation, d’un défaut de précision ou de son incompatibilité avec l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes.
34 Enfin, la juridiction de renvoi se demande, dans l’hypothèse où la règle primaire devait être invalidée en tant qu’elle vise le critère relatif aux profilés creux, quelle règle du droit de l’Union il conviendrait alors d’appliquer pour déterminer l’origine des tubes concernés.
35 Dans ces conditions, le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) La notion de “profilés creux”, au sens de la [règle primaire], qui subordonne l’acquisition d’origine au “changement à partir des profilés creux du no 730449” [...], couvre-t-elle une [marchandise relevant] de la sous-position 730449 du SH travaillée à chaud, droite et d’épaisseur de paroi uniforme, qui ne satisfait pas aux exigences d’une norme technique relative aux tubes sans soudure en acier inoxydable usinés à chaud et à partir desquelles sont fabriqués, par transformation à froid, des
tubes de section et d’épaisseur de paroi différentes ?
2) Si la première question appelle une réponse négative ou s’il n’est pas possible d’y répondre : [le critère relatif aux profilés creux] est-[il] contraire à l’article 60, paragraphe 2, et à l’article 284 du [code des douanes], ainsi qu’à l’article 290 TFUE, parce que
a) [il] est dépourvu de motivation,
b) [il] est trop vague ou
c) [il] exclut de la détermination de l’origine des opérations d’usinage qui seraient constitutives de l’origine conformément à l’article 60, paragraphe 2, du [code des douanes] [?]
3) Si la deuxième question appelle une réponse affirmative : dans le litige au principal, l’acquisition d’origine des produits relevant de la sous-position 730441 du [SH] est-elle déterminée par la [règle primaire] “CP”, par la règle résiduelle [prévue au chapitre 73 de l’annexe 22-01 du règlement délégué 2015/2446] ou par l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes ? »
Sur les questions préjudicielles
Sur la première question
36 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la règle primaire doit être interprétée en ce sens que relève de la notion de « profilé creux », au sens de cette règle, une « ébauche de tube » formée à chaud, droite et d’épaisseur de paroi uniforme, qui ne satisfait pas aux exigences d’une norme technique relative aux tubes sans soudure en acier inoxydable usinés à chaud, et à partir de laquelle sont fabriqués, par transformation à froid, des tubes de section et
d’épaisseur de paroi différentes, relevant de la sous-position 730441 du SH.
37 Conformément à la règle primaire, les tubes, tuyaux et profilés creux relevant de la sous-position 730441 du SH sont réputés être originaires du pays où ils ont été produits au moyen d’étirage ou de laminage à froid (réduction à froid) s’ils ont été fabriqués à partir soit de produits relevant d’une autre position du SH, soit de « profilés creux relevant de la sous-position 730449 » du SH.
38 Il ressort du point 2.1 des notes introductives de l’annexe 22-01 du règlement délégué 2015/2446, d’une part, que les règles énoncées dans cette annexe doivent être appliquées aux marchandises sur la base de leur classement dans le SH et d’autres critères susceptibles de venir s’ajouter aux positions ou sous-positions de ce système qui ont été créées spécifiquement aux fins de ladite annexe et, d’autre part, que, afin de déterminer la position ou sous-position appropriée pour certaines
marchandises visées dans la même annexe, les règles générales pour l’interprétation du SH et toute note relative aux sections, chapitres et sous-positions de ce système s’appliquent mutatis mutandis, sauf dispositions contraires figurant à cette annexe 22-01.
39 Par ailleurs, en ce qui concerne l’interprétation des positions et sous-positions du SH, il y a lieu de rappeler que les notes explicatives du SH fournissent, en tant que telles, des éléments valables à cette fin (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2020, Hydro Energo, C‑340/19, EU:C:2020:488, point 36).
40 Selon les considérations générales des notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 de celui-ci, auxquelles la note explicative relative à la position 7304 du SH fait une référence explicite, les produits creux concentriques de section constante, avec un seul creux fermé, sur toute leur longueur et dont les profils extérieur et intérieur ont la même forme, constituent des « tubes et tuyaux », au sens du chapitre 73 du SH, alors que les produits creux ne répondant pas à la définition des
tubes et tuyaux et, en particulier, ceux dont les profils extérieur et intérieur n’ont pas la même forme, constituent des « profilés creux ».
41 En revanche, la notion d’« ébauche de tube » n’est pas mentionnée dans les considérations générales mentionnées au point précédent. Il s’ensuit que, aux fins de l’application de la règle primaire, des produits qualifiés d’« ébauches de tube » constituent soit des « tubes et tuyaux », soit des « profilés creux », au sens du chapitre 73 du SH.
42 Il ressort du dossier dont dispose la Cour que les tubes concernés, dont l’importation est envisagée par Stappert, ont été obtenus à partir d’ébauches de tube qui relèvent de la notion de « tube et tuyau », au sens des notes explicatives relatives au chapitre 73 du SH, telle que rappelée au point 40 du présent arrêt, en particulier en tant qu’elles sont décrites comme étant droites et d’épaisseur de paroi uniforme.
43 En tant que telles, ces ébauches de tube ne sauraient donc relever de la notion de « profilé creux », que ce soit au sens du chapitre 73 du SH ou de la règle primaire.
44 Il y a lieu de préciser, à cet égard, qu’il ne ressort aucunement des définitions des notions de « profilé creux » et de « tube » ou de « tuyau » rappelées au point 40 du présent arrêt que les produits ainsi visés devraient être conformes aux exigences d’une norme technique pour qu’ils puissent relever de ces notions.
45 En outre, le fait que notamment la note explicative relative à la position 7304 du SH décrit un processus de production des tubes par voie de transformation à froid à partir de tubes laminés ou filés à chaud utilisés comme ébauches, sans mentionner la production de tubes ou de tuyaux à partir de profilés creux, ne signifie pas nécessairement que cette dernière production n’est pas possible, cette note explicative précisant, au demeurant, que les tubes, tuyaux et profilés creux de la position 7304
du SH « peuvent être obtenus par divers procédés ».
46 La juridiction de renvoi relève qu’une interprétation de la notion de « profilé creux » visée dans la règle primaire dans un sens conforme aux indications figurant dans les notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 de celui-ci serait de nature à mettre en cause la validité de cette règle, au regard notamment de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes.
47 Certes, selon un principe général d’interprétation, un acte de l’Union doit être interprété, dans la mesure du possible, d’une manière qui ne remet pas en cause sa validité (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2018, UBS Europe e.a., C‑358/16, EU:C:2018:715, point 53 ainsi que jurisprudence citée).
48 Toutefois, une interprétation des notions figurant dans les règles primaires qui s’écarterait de leur portée au sens du SH nuirait à la cohérence interne du règlement délégué 2015/2446 (voir, par analogie, arrêt du 17 juin 2021, République tchèque/Commission, C‑862/19 P, EU:C:2021:493, point 52).
49 Il s’ensuit qu’il y a lieu de répondre à la première question que la règle primaire doit être interprétée en ce sens que ne relève pas de la notion de « profilé creux », au sens de cette règle, une « ébauche de tube » formée à chaud, droite et d’épaisseur de paroi uniforme, qui ne satisfait pas aux exigences d’une norme technique relative aux tubes sans soudure en acier inoxydable usinés à chaud, et à partir de laquelle sont fabriqués, par transformation à froid, des tubes de section et
d’épaisseur de paroi différentes, relevant de la sous-position 730441 du SH.
Sur la deuxième question
50 La deuxième question porte sur la validité du critère relatif aux profilés creux en raison de l’exclusion d’acquisition d’origine des marchandises relevant de la sous-position 730441 du SH obtenues à froid à partir de tubes et tuyaux relevant de la sous-position 730449 du SH. Toutefois, ce critère ne constitue qu’un des deux critères alternatifs de la règle primaire, ces deux critères excluant une telle acquisition d’origine pour ces marchandises.
51 Partant, il convient de considérer que, par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande à la Cour, en substance, de se prononcer sur la validité de la règle primaire au regard de l’article 290 TFUE, du principe de sécurité juridique et de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes.
52 Il convient de relever, à titre liminaire, que, selon l’article 62 du code des douanes, la Commission est habilitée à adopter des actes délégués établissant les règles selon lesquelles l’on considère que des marchandises ont subi leur dernière transformation ou ouvraison substantielle, économiquement justifiée, effectuée dans une entreprise équipée à cet effet et ayant abouti à la fabrication d’un produit nouveau ou correspondant à un stade de fabrication important dans un pays ou un territoire
donné, conformément à l’article 60 de ce code. Ces actes ont pour objet de préciser la façon dont les critères abstraits énoncés à cette dernière disposition doivent être interprétés et appliqués dans des situations concrètes (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2021, Renesola UK, C‑209/20, EU:C:2021:400, point 33).
53 Toutefois, l’exercice de ce pouvoir de la Commission est soumis, ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour, au respect de certaines exigences (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2021, Renesola UK, C‑209/20, EU:C:2021:400, point 34). Les objectifs poursuivis par un règlement délégué doivent être de nature à justifier son adoption, ce règlement doit répondre à l’exigence de motivation qui s’impose à un tel acte et les appréciations de la Commission relatives à la détermination du
pays d’origine des produits auxquels ledit règlement est applicable ne doivent pas être entachées d’une erreur de droit ou d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2021, Renesola UK, C‑209/20, EU:C:2021:400, points 40 et 42).
54 En effet, cette origine doit, en tout état de cause, être déterminée en fonction du critère déterminant que constitue la « dernière transformation ou ouvraison substantielle » des marchandises concernées. Cette expression doit elle-même être comprise comme renvoyant à l’étape du processus de production au cours de laquelle ces marchandises acquièrent leur destination ainsi que des propriétés et une composition spécifiques, qu’elles ne possédaient pas auparavant et qui ne sont pas appelées à subir
ultérieurement des modifications qualitatives importantes (arrêt du 20 mai 2021, Renesola UK, C‑209/20, EU:C:2021:400, point 38 et jurisprudence citée).
55 L’examen juridictionnel du bien-fondé d’une disposition d’un acte tel que l’annexe 22-01 du règlement délégué 2015/2446 a vocation à porter sur le point de savoir si, indépendamment de toute erreur de droit, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en procédant à la mise en œuvre de l’article 60, paragraphe 2, du code de douanes, compte tenu de la situation concrète concernée (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2021, Renesola UK, C‑209/20, EU:C:2021:400, point 39 et jurisprudence
citée).
56 Il s’ensuit que, si la Commission dispose d’un pouvoir d’appréciation pour l’application des critères généraux de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes à des ouvraisons et transformations spécifiques, elle ne saurait, en l’absence de justifications objectives, adopter des solutions entièrement différentes pour des ouvraisons et transformations similaires (voir, par analogie, arrêt du 23 mars 1983, Cousin e.a., 162/82, EU:C:1983:93, point 21).
57 En ce qui concerne le critère du changement de position tarifaire prévu dans la règle primaire, la Cour a déjà jugé qu’il ne suffit pas de rechercher les critères définissant l’origine des marchandises dans le classement tarifaire des produits transformés, le tarif douanier commun ayant été conçu en fonction d’exigences propres et non en fonction de la détermination de l’origine des produits (voir, en ce sens, arrêt du 11 février 2010, Hoesch Metals and Alloys, C‑373/08, EU:C:2010:68, point 42 et
jurisprudence citée).
58 Bien que le changement de position tarifaire d’une marchandise, causé par l’opération de transformation de celle-ci, constitue une indication du caractère substantiel de sa transformation ou de son ouvraison, il n’en demeure pas moins qu’une transformation ou une ouvraison peut présenter un caractère substantiel même en l’absence d’un tel changement de position. Le critère du changement de position tarifaire couvre une majorité de situations, mais ne permet pas d’identifier toutes les situations
dans lesquelles la transformation ou l’ouvraison de la marchandise est substantielle (voir, en ce sens, arrêt du 11 février 2010, Hoesch Metals and Alloys, C‑373/08, EU:C:2010:68, point 43 et jurisprudence citée).
59 C’est ainsi que, pour accorder l’origine des marchandises relevant de la sous-position 730441 du SH, la règle primaire prévoit, outre le critère de changement de position tarifaire, le critère de changement à partir des profilés creux de la sous-position 730449 de ce système, qui a pour objet de compléter et de corriger le premier critère (voir, par analogie, arrêt du 23 mars 1983, Cousin e.a., 162/82, EU:C:1983:93, point 17).
60 Or, il convient de constater, à l’instar de la juridiction de renvoi, que le critère relatif aux profilés creux établit une différence de traitement. En effet, en vertu de ce critère, le formage à froid d’un produit relevant de la sous-position 730449 du SH dont les profils extérieur et intérieur n’ont pas la même forme, qui constitue donc un « profilé creux », au sens des notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 de celui-ci, en un produit de mêmes formes mais dont les propriétés sont
différentes du fait de ce type de formage, qui constitue donc également un « profilé creux », au sens de ces mêmes notes, détermine l’origine du produit fini, ce dernier étant donc réputé constituer le résultat d’une « transformation ou ouvraison substantielle », au sens de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes. En revanche, le formage à froid d’un produit, relevant lui aussi de la sous-position 730449 du SH, consistant en un produit creux concentrique dont les profils extérieur et
intérieur ont la même forme, qui constitue donc un « tube » ou un « tuyau », au sens des notes explicatives du SH relatives au chapitre 73 de celui-ci, en un produit de mêmes formes mais dont les propriétés sont également différentes en raison de ce type de formage, qui constitue donc un autre « tube ou tuyau », au sens de ces mêmes notes, ne détermine pas l’origine du produit fini. Ainsi, selon le critère relatif aux profilés creux, seul ce dernier produit est réputé ne pas être le résultat
d’une transformation substantielle, au sens de cet article 60, paragraphe 2.
61 Dans la mesure où la Commission n’a fourni aucune justification convaincante permettant d’expliquer objectivement cette différence de traitement entre, d’une part, des tubes ou tuyaux et, d’autre part, des profilés creux, qui, tous, relèvent de la sous-position 730441 du SH et ont été obtenus à partir de produits relevant de la sous-position 730449 du SH, il apparaît contradictoire et discriminatoire que la règle primaire prévoie que le formage à froid peut déterminer l’origine des profilés creux
en recourant à un critère alternatif, alors que le même type de formage appliqué à des tubes et tuyaux ne peut déterminer l’origine de ceux-ci que par référence à un unique critère, considérablement plus sévère (voir, par analogie, arrêt du 23 mars 1983, Cousin e.a., 162/82, EU:C:1983:93, point 21).
62 Cette conclusion est confirmée par le constat figurant au considérant 33 du règlement d’exécution 2017/2093, selon lequel les tubes et les tuyaux subissent, du fait de leur formage à froid, une transformation substantielle. En effet, ce constat repose sur l’observation que ce formage entraîne des modifications irréversibles quant à leurs propriétés physiques, mécaniques et métallurgiques. Or, de telles modifications sont susceptibles de déterminer l’origine d’un produit, ainsi qu’il résulte de la
jurisprudence rappelée au point 54 du présent arrêt.
63 Par ailleurs, l’allégation contraire formulée par la Commission dans le cadre du présent renvoi préjudiciel, selon laquelle un formage à froid ne modifie pas les propriétés métallurgiques des tubes et des tuyaux, ne repose sur aucun fondement objectivement vérifiable et apparaît en tout état de cause contredite par les énonciations contenues dans le point IV, B, deuxième alinéa, des considérations générales des notes explicatives du SH relatives au chapitre 72 de celui-ci.
64 Dans ces conditions, il convient de constater que, pour autant qu’elle exclut que le changement de position tarifaire résultant de la transformation de tubes et tuyaux relevant de la sous-position 730449 du SH en tubes, tuyaux et profilés creux, sans soudure, en fer ou en acier, étirés ou laminés à froid (réduits à froid) relevant de la sous–position 730441 du SH confère à ces derniers le caractère de produits originaires du pays où ce changement a eu lieu, la règle primaire n’est pas conforme
aux dispositions de l’article 60, paragraphe 2, du code des douanes, de telle sorte que, en adoptant cette règle, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation.
65 Dans ce contexte, il y a lieu de considérer que la règle primaire est invalide pour autant qu’elle exclut que des opérations données confèrent à un produit le caractère de produit originaire du pays où ces opérations ont eu lieu alors que des opérations analogues déterminent l’acquisition d’origine pour des produits similaires (voir, par analogie, arrêt du 23 mars 1983, Cousin e.a., 162/82, EU:C:1983:93, points 20 ainsi que 21).
66 Il en résulte qu’il y a lieu de répondre à la deuxième question que la règle primaire est invalide, pour autant qu’elle exclut que le changement de position tarifaire résultant de la transformation de tubes et tuyaux de la sous–position 730449 du SH en tubes, tuyaux et profilés creux, sans soudure, en fer ou en acier, étirés ou laminés à froid (réduits à froid) de la sous–position 730441 du SH confère à ces derniers le caractère de produits originaires du pays où ce changement a eu lieu.
Sur la troisième question
67 La troisième question repose sur la prémisse selon laquelle la règle primaire est invalide, à tout le moins en ce qui concerne le critère de changement à partir de profilés creux de la sous–position 730449. Or, il ressort de la réponse à la deuxième question que ce critère de ladite règle n’est invalide qu’en ce qu’il exclut de la détermination de l’origine d’un produit fini de la sous-position 730441 du SH, le changement à partir des tubes et tuyaux de la sous-position 730449 du SH, ce qui
signifie que la règle primaire trouve à s’appliquer également à un tel changement. Partant, il n’y a pas lieu de répondre à la troisième question.
Sur les dépens
68 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :
1) La règle primaire applicable aux marchandises relevant de la sous-position 730441 du système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, prévue à l’annexe 22-01 du règlement délégué (UE) 2015/2446 de la Commission, du 28 juillet 2015, complétant le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil au sujet des modalités de certaines dispositions du code des douanes de l’Union, tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2018/1063 de la Commission, du 16 mai
2018,
doit être interprétée en ce sens que :
ne relève pas de la notion de « profilé creux », au sens de cette règle, une « ébauche de tube » formée à chaud, droite et d’épaisseur de paroi uniforme, qui ne satisfait pas aux exigences d’une norme technique relative aux tubes sans soudure en acier inoxydable usinés à chaud, et à partir de laquelle sont fabriqués, par transformation à froid, des tubes de section et d’épaisseur de paroi différentes, relevant de la sous-position 730441 du système harmonisé de désignation et de codification des
marchandises.
2) La règle primaire applicable aux marchandises relevant de la sous-position 730441 du système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, prévue à l’annexe 22-01 du règlement délégué 2015/2446, tel que modifié par le règlement délégué 2018/1063, est invalide, pour autant qu’elle exclut que le changement de position tarifaire résultant de la transformation de tubes et tuyaux de la sous–position 730449 de ce système harmonisé en tubes, tuyaux et profilés creux, sans soudure, en
fer ou en acier, étirés ou laminés à froid (réduits à froid) de la sous–position 730441 dudit système harmonisé confère à ces derniers le caractère de produits originaires du pays où ce changement a eu lieu.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.