CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. ANTHONY M. COLLINS
présentées le 16 novembre 2023 ( 1 )
Affaires jointes C‑345/22 à C‑347/22
Maersk A/S
contre
Allianz Seguros y Reaseguros SA (C‑345/22 et C‑347/22)
et
Mapfre España Compañía de Seguros y Reaseguros SA
contre
MACS Maritime Carrier Shipping GmbH & Co. (C‑346/22)
[demandes de décision préjudicielle formées par l’Audiencia Provincial de Pontevedra (cour provinciale de Pontevedra, Espagne)]
« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile et commerciale – Règlement (UE) no 1215/2012 – Article 25, paragraphe 1 – Contrat de transport maritime de marchandises consigné dans un connaissement – Clause attributive de juridiction insérée dans le connaissement – Opposabilité au tiers porteur du connaissement – Droit applicable – Législation nationale exigeant une négociation individuelle et séparée de la clause attributive de juridiction par le tiers porteur du connaissement »
Introduction
1. Par les présentes demandes de décision préjudicielle, l’Audiencia Provincial de Pontevedra (cour provinciale de Pontevedra, Espagne) interroge la Cour sur l’interprétation de l’article 25, paragraphe 1, du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (ci‑après le « règlement Bruxelles I bis ») ( 2 ). Ces demandes sont présentées dans le
cadre de procédures opposant Maersk A/S (ci‑après « Maersk »), un transporteur maritime danois, à Allianz Seguros y Reaseguros SA (ci-après « Allianz »), une compagnie d’assurance espagnole, dans les affaires C‑345/22 et C‑347/22, et Mapfre España Compañía de Seguros y Reaseguros SA (ci-après « Mapfre »), une compagnie d’assurance espagnole, à MACS Maritime Carrier Shipping GmbH & Co. (ci-après « MACS »), une société de transport allemande, dans l’affaire C‑346/22. Ces deux procédures concernent
des recours en réparation du dommage découlant de la perte partielle de marchandises transportées par mer. Elles soulèvent la question des conditions auxquelles une clause attributive de juridiction insérée dans un contrat de transport maritime de marchandises, consigné dans un connaissement, est opposable au tiers qui a acquis ultérieurement ces marchandises, devenant ainsi tiers porteur de ce connaissement.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La convention de Bruxelles
2. L’article 17, premier alinéa, de la convention de Bruxelles dispose :
« Si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État contractant, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État contractant pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État sont seuls compétents. Cette convention attributive de juridiction est conclue :
a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite, soit
b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles, soit
c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée. »
Le règlement Bruxelles I
3. L’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I prévoit :
« Si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Cette convention attributive de juridiction est conclue :
a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite, ou
b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles, ou
c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée. »
Le règlement Bruxelles I bis
4. Les considérants 15, 19 et 20 du règlement Bruxelles I bis énoncent :
« (15) Les règles de compétence devraient présenter un haut degré de prévisibilité et s’articuler autour de la compétence de principe du domicile du défendeur. Cette compétence devrait toujours être disponible, sauf dans quelques cas bien déterminés où la matière en litige ou l’autonomie des parties justifie un autre critère de rattachement. [...]
[...]
(19) L’autonomie des parties à un contrat autre qu’un contrat d’assurance, de consommation et de travail pour lequel n’est prévue qu’une autonomie limitée quant à la détermination de la juridiction compétente devrait être respectée sous réserve des fors de compétence exclusifs prévus dans le présent règlement.
(20) Lorsque la question se pose de savoir si un accord d’élection de for en faveur d’une ou des juridictions d’un État membre est entaché de nullité quant à sa validité au fond, cette question devrait être tranchée conformément au droit de l’État membre de la ou des juridictions désignées dans l’accord, y compris conformément aux règles de conflit de lois de cet État membre. »
5. L’article 25 du règlement Bruxelles I bis, inséré dans la section 7, intitulée « Prorogation de compétence », qui fait elle-même partie du chapitre II, intitulé « Compétence », de ce règlement dispose :
« 1. Si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d’une juridiction ou de juridictions d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. La convention attributive de
juridiction est conclue :
a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite ;
b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ; ou
c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties ont connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.
[...]
5. Une convention attributive de juridiction faisant partie d’un contrat est considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat.
La validité de la convention attributive de juridiction ne peut être contestée au seul motif que le contrat n’est pas valable. »
Le droit espagnol
6. Le point XI du préambule de la Ley 14/2014, de 24 de julio, de Navegación Marítima (loi 14/2014 sur la navigation maritime, du 24 juillet 2014 ; ci-après la « LNM ») ( 3 ) se lit comme suit :
« [...]
Le chapitre I porte sur lesdites spécificités de juridiction et de compétence et, sur le fondement de l’application préférentielle en la matière des règles figurant dans les conventions internationales et dans le droit de l’Union, vise à éviter les abus constatés en déclarant la nullité des clauses attribuant la compétence à une juridiction étrangère ou des clauses d’arbitrage à l’étranger contenues dans les contrats d’utilisation du navire ou dans les contrats accessoires à la navigation si ces
clauses n’ont pas été négociées individuellement et séparément.
[...] »
7. L’article 251 de la LNM, intitulé « Effet translatif », dispose :
« Le transfert du connaissement produit les mêmes effets que la livraison des marchandises y indiquées, sans préjudice des actions pénales et civiles pouvant être exercées par quiconque aurait été illégalement dépossédé desdites marchandises. L’acquéreur du connaissement acquiert tous les droits et actions du cédant à l’égard des marchandises, à l’exception des conventions en matière de juridiction et d’arbitrage, qui nécessitent le consentement de l’acquéreur dans les conditions prévues au
titre IX, chapitre I. »
8. L’article 468 de la LNM, intitulé « Clauses attributives de juridiction et clauses d’arbitrage », prévoit :
« Sans préjudice des dispositions des conventions internationales en vigueur en Espagne et des règles du droit de l’Union, les clauses attribuant la compétence à une juridiction étrangère ou les clauses d’arbitrage à l’étranger contenues dans les contrats d’utilisation du navire ou dans les contrats accessoires à la navigation sont nulles et réputées non écrites si elles n’ont pas été négociées individuellement et séparément.
En particulier, l’insertion d’une clause attributive de juridiction ou d’une clause d’arbitrage dans les conditions préimprimées de l’un quelconque des contrats visés au paragraphe précédent n’atteste pas, en soi, le respect des conditions qui y sont requises. »
Les faits des procédures au principal et les questions préjudicielles
L’affaire C‑345/22
9. Maersk Line Perú S.A.C. ( 4 ), en qualité de transporteur, et Aguafrost Perú S.A.C., en qualité de chargeur, ont conclu un contrat de transport maritime de marchandises aux conditions « coût et fret » (ci‑après « CFR »), consigné dans un connaissement délivré le 9 avril 2018. Au verso de ce connaissement figurait une clause attributive de juridiction rédigée dans les termes suivants : « Dans tous les autres cas, le présent connaissement est régi et interprété conformément au droit anglais et tous
les différends en découlant sont tranchés par la High Court of Justice [(England & Wales) (United Kingdom)] of London [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles) (Royaume-Uni) de Londres], la compétence des juridictions d’un autre pays étant exclue. Par ailleurs et à la discrétion du transporteur, ce dernier peut engager une procédure contre le commerçant devant une juridiction compétente du lieu où celui-ci exerce son activité ». Oversea Atlantic Fish SL (ci-après « Oversea »), un
fournisseur espagnol de poissons et de fruits de mer, a acquis les marchandises transportées et est ainsi devenue tiers porteur du connaissement.
10. Les marchandises sont arrivées endommagées au port de destination. Allianz, en qualité de compagnie d’assurance subrogée dans les droits d’Oversea, a introduit un recours contre Maersk devant le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra, Espagne), réclamant la somme de 67449,71 euros à titre de dommages et intérêts ( 5 ).
11. Maersk a contesté la compétence des juridictions espagnoles en se fondant sur la clause attributive de juridiction précitée. Par ordonnance du 26 mai 2020, le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra) a rejeté ce déclinatoire de compétence. Maersk a formé un recours interne contre cette ordonnance devant la même juridiction. Ce recours a été rejeté par ordonnance du 2 décembre 2020.
12. Par jugement du 7 juillet 2021, le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra) a fait droit au recours d’Allianz au fond. Maersk a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi, dont le seul objet est de contester la compétence des juridictions espagnoles. Elle a soutenu que, dès lors que l’article 251 de la LNM est contraire au droit de l’Union, la juridiction de renvoi est tenue d’appliquer l’article 25 du règlement Bruxelles I bis. La
clause attributive de juridiction est par conséquent opposable au tiers porteur du connaissement.
13. La juridiction de renvoi se demande si une clause attributive de juridiction telle que celle en cause au principal, dont les parties initiales au contrat sont convenues, est opposable au tiers porteur du connaissement qui n’a pas expressément, individuellement ni séparément consenti à cette clause.
14. La juridiction de renvoi relève que la notion de « clause attributive de juridiction » est une notion autonome du droit de l’Union. Le secteur du transport maritime international recourt fréquemment aux clauses attributives de juridiction, de sorte que, conformément à l’article 25, paragraphe 1, sous c), du règlement Bruxelles I bis, les parties contractantes devaient avoir connaissance de leur existence. Dans ces conditions, l’arrêt du 16 mars 1999, Castelletti ( 6 ), étaye l’existence d’une
présomption de consentement de la personne à laquelle on oppose une telle clause. La juridiction de renvoi indique également que les clauses attributives de juridiction sont, de par leur nature, autonomes et séparables. La loi matérielle qui régit ces clauses peut donc relever d’un régime juridique distinct de celui qui régit le reste du contrat. Une clause attributive de juridiction peut ainsi être valide même si le contrat lui-même est considéré comme étant nul.
15. La juridiction de renvoi explique que, dans le cas des connaissements acquis par un tiers qui contiennent une clause attributive de juridiction, l’article 251 de la LNM renvoie à l’article 468 de la LNM, qui dispose que les clauses attributives de juridiction sont nulles si elles n’ont pas été négociées individuellement et séparément ( 7 ). La juridiction de renvoi rappelle le principe énoncé par la Cour dans son arrêt du 19 juin 1984, Russ ( 8 ), et réitéré par celle-ci dans son arrêt du
9 novembre 2000, Coreck ( 9 ), selon lequel, « dans la mesure où la clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement est valide au sens de l’article 17 de la convention [de Bruxelles] dans le rapport entre le chargeur et le transporteur, elle peut être invoquée à l’égard du tiers porteur du connaissement dès lors que, en vertu du droit national applicable, le porteur du connaissement succède au chargeur dans ses droits et obligations ». La mention, dans ce passage, du « droit
national applicable » peut être interprétée comme renvoyant à l’article 251 de la LNM. Étant donné que, dans ce cas, il aurait été nécessaire que les parties négocient individuellement et séparément la clause attributive de juridiction, la cession des droits au titre du connaissement ne serait pas intégrale. La juridiction de renvoi souhaite donc savoir si l’article 251 de la LNM est contraire au principe susmentionné.
16. La juridiction de renvoi indique également que le droit national applicable pour déterminer la validité de la clause attributive de juridiction pourrait être celui de l’État auquel cette clause attribue la compétence, en l’occurrence le Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord. À l’appui de cette position, elle se réfère à l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis et aux arrêts du 3 juillet 1997, Benincasa ( 10 ), et du 18 novembre 2020, DelayFix ( 11 ), dont il
ressortirait que la validité au fond d’une clause attributive de juridiction doit être appréciée selon la législation de l’État membre dont les juridictions sont désignées dans cette clause.
17. À supposer que l’article 251 de la LNM s’applique et qu’il y ait lieu d’examiner si le tiers porteur du connaissement a donné son consentement individuel et séparé à la clause attributive de juridiction, la juridiction de renvoi soulève la question de la forme que doit revêtir ce consentement. Elle estime que cette question est régie par le droit de l’Union et observe que, lorsque les conditions visées à l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis sont remplies, un critère de
consentement présumé s’applique.
18. Enfin, la juridiction de renvoi s’interroge sur la conformité de l’article 251 de la LNM à la jurisprudence de la Cour dans la mesure où cette disposition prévoit que la clause attributive de juridiction insérée dans le connaissement est soumise à un droit différent de celui qui régit le transfert de ce connaissement ( 12 ).
19. L’Audiencia Provincial de Pontevedra (cour provinciale de Pontevedra) a donc décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) La règle visée à l’article 25 du règlement [Bruxelles I bis], qui prévoit que la nullité de la convention attributive de juridiction doit être appréciée conformément au droit de l’État membre auquel les parties ont attribué la compétence, s’applique-t-elle également – dans une situation telle que celle du litige au principal – à la question de la validité de l’extension de la clause à un tiers n’étant pas partie au contrat dans lequel la clause est insérée ?
2) En cas de transfert du connaissement à un tiers destinataire des marchandises qui n’est pas intervenu dans le contrat entre le chargeur et le transporteur maritime, une règle telle que celle figurant à l’article 251 [de la LNM], qui exige, pour que la clause attributive de juridiction soit opposable à ce tiers, qu’elle ait été négociée avec celui-ci “individuellement et séparément”, est-elle conforme à l’article 25 du règlement [Bruxelles I bis] et à la jurisprudence de la Cour interprétant
cette disposition ?
3) Est-il possible, conformément au droit de l’Union, que la législation des États membres prévoie des conditions supplémentaires de validité pour que les clauses attributives de juridiction insérées dans des connaissements produisent effet à l’égard de tiers ?
4) Une règle telle que celle figurant à l’article 251 [de la LNM] – qui prévoit que la subrogation du tiers porteur n’a lieu que de manière partielle, à l’exclusion des clauses de prorogation de compétence – suppose-t-elle l’introduction d’une condition supplémentaire de validité de telles clauses, contraire à l’article 25 du règlement [Bruxelles I bis] ? »
L’affaire C‑346/22
20. MACS, en qualité de transporteur, et Tunacor Fisheries Ltd, en qualité de chargeur, ont conclu un contrat de transport maritime de marchandises aux conditions CFR, ce contrat ayant été consigné dans un connaissement délivré le 13 avril 2019. Au verso du connaissement figurait la clause attributive de juridiction suivante : « Le présent connaissement est régi par le droit anglais et tous les différends en découlant sont tranchés par la High Court of Justice [(England & Wales)] of London [Haute
Cour de justice (Angleterre et pays de Galles) de Londres] ». La société espagnole Fortitude Shipping SL (ci‑après « Fortitude ») a acquis les marchandises en question et est ainsi devenue tiers porteur de ce connaissement.
21. Les marchandises sont arrivées endommagées au port de destination. Mapfre, en qualité de compagnie d’assurance subrogée dans les droits de Fortitude, a introduit un recours contre MACS devant le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra), réclamant la somme de 80187,90 euros à titre de dommages et intérêts ( 13 ).
22. MACS a contesté la compétence des juridictions espagnoles en se fondant sur la clause attributive de juridiction précitée. Par ordonnance du 3 mai 2020, le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra) a décliné sa compétence. Mapfre a interjeté appel de cette ordonnance devant la juridiction de renvoi. Elle a soutenu, en se référant à l’article 251 de la LNM, que la clause attributive de juridiction était inopposable à Fortitude puisque cette dernière
n’était pas partie au contrat de transport de marchandises et qu’elle n’avait joué aucun rôle dans l’exécution de ce contrat. MACS a affirmé que, dès lors que l’article 251 de la LNM est contraire au droit de l’Union, la juridiction de renvoi doit appliquer l’article 25 du règlement Bruxelles I bis, rendant ainsi la clause attributive de juridiction opposable au tiers porteur du connaissement.
23. Éprouvant les mêmes doutes que ceux suscités par l’affaire C‑345/22, la juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour des questions préjudicielles identiques, en substance, à celles posées dans cette affaire.
L’affaire C‑347/22
24. Maersk, en qualité de transporteur, et Aguafrost Perú, en qualité de chargeur, ont conclu un contrat de transport maritime de marchandises aux conditions CFR, ce contrat ayant été consigné dans un connaissement délivré le 2 août 2018. Au verso du connaissement figurait une clause attributive de juridiction rédigée dans des termes identiques à ceux reproduits au point 9 des présentes conclusions. Oversea a acquis les marchandises en question et est ainsi devenue tiers porteur de ce connaissement.
25. Les marchandises sont arrivées endommagées au port de destination. Allianz, en qualité de compagnie d’assurance subrogée dans les droits d’Oversea, a introduit un recours contre Maersk devant le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra), réclamant la somme de 106093,65 euros à titre de dommages et intérêts ( 14 ).
26. Maersk a contesté la compétence des juridictions espagnoles en se fondant sur la clause attributive de juridiction. Par ordonnance du 20 octobre 2020, le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra) a rejeté ce déclinatoire de compétence.
27. Par jugement du 9 juillet 2021, le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Pontevedra (tribunal de commerce no 3 de Pontevedra) a fait droit au recours d’Allianz au fond. Maersk a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi en contestant la compétence des juridictions espagnoles. L’article 251 de la LNM étant contraire au droit de l’Union, la juridiction de renvoi est tenue d’appliquer l’article 25 du règlement Bruxelles I bis, de sorte que la clause attributive de juridiction est
opposable au tiers porteur du connaissement.
28. Éprouvant les mêmes doutes que ceux suscités par l’affaire C‑345/22, la juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour des questions préjudicielles identiques, en substance, à celles posées dans cette affaire.
La procédure devant la Cour
29. Par décision du 15 juillet 2022, le président de la Cour a joint les affaires C‑345/22, C‑346/22 et C‑347/22 aux fins des phases écrite et orale de la procédure ainsi que de l’arrêt.
30. Les parties à la procédure au principal, le gouvernement espagnol et la Commission européenne ont présenté des observations écrites.
Appréciation juridique
Observation liminaire
31. L’accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique ( 15 ) (ci-après l’« accord de retrait ») a été adopté le 17 octobre 2019 et est entré en vigueur le 1er février 2020. Conformément à son article 67, paragraphe 1, sous a), intitulé « Compétence, reconnaissance et exécution des décisions judiciaires, et coopération connexe entre autorités centrales », les dispositions relatives à la compétence
du règlement Bruxelles I bis s’appliquent au Royaume‑Uni, ainsi que dans les États membres en cas de situations impliquant le Royaume-Uni, en ce qui concerne les actions judiciaires intentées avant la fin de la période de transition établie à l’article 126 de l’accord de retrait.
32. Les présentes affaires portent sur des clauses visant à attribuer la compétence aux juridictions du Royaume-Uni. Les décisions de renvoi précisent que les actions judiciaires au principal ont été intentées avant le 31 décembre 2020, date à laquelle la période de transition s’est achevée conformément à l’article 126 de l’accord de retrait. Ainsi que le gouvernement espagnol et la Commission le font observer à juste titre, l’interprétation du règlement Bruxelles I bis est nécessaire pour la
solution des litiges faisant l’objet des décisions de renvoi.
Sur la première question préjudicielle
33. Par sa première question, la juridiction de renvoi cherche à déterminer si la règle énoncée à l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, qui prévoit que la validité au fond de la clause attributive de juridiction doit être appréciée conformément au droit de l’État membre de la ou des juridictions désignées dans cette clause, s’applique également à la question de l’opposabilité d’une clause attributive de juridiction, qui est insérée dans un connaissement, au tiers porteur de ce
connaissement.
34. L’article 25 du règlement Bruxelles I bis régit les conventions en vertu desquelles les parties à un contrat attribuent la compétence à une ou plusieurs juridictions d’un État membre pour connaître de leurs différends nés ou à naître ( 16 ). La notion de « clause attributive de juridiction », qui est une notion autonome du droit de l’Union, doit être interprétée de manière à donner sa pleine application au principe de l’autonomie de la volonté, qui constitue le fondement de l’article 25,
paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis ( 17 ).
35. Une comparaison de l’article 25 du règlement Bruxelles I bis et des dispositions correspondantes de la convention de Bruxelles et du règlement Bruxelles I permet d’identifier les changements introduits par cet article s’agissant des clauses attributives de juridiction. Premièrement, ledit article a supprimé la condition selon laquelle au moins l’une des parties doit être domiciliée dans un État membre ( 18 ). Deuxièmement, l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis contient une
nouvelle règle de conflit de lois uniforme en vertu de laquelle la validité au fond de la clause attributive de juridiction doit être appréciée selon le droit de l’État membre des juridictions désignées dans cette clause, y compris, ainsi que l’énonce le considérant 20 de ce règlement, selon « les règles de conflit de lois de cet État membre » ( 19 ). J’observe que cette nouvelle règle s’applique lorsque la question de la validité au fond est soulevée tant devant la juridiction désignée par les
parties dans la clause attributive de juridiction que devant toute autre juridiction d’un État membre saisie en méconnaissance de cette clause ( 20 ). Troisièmement, l’article 25, paragraphe 5, du règlement Bruxelles I bis prévoit que les clauses attributives de juridiction sont détachables des autres clauses du contrat ( 21 ).
36. Ni l’article 25 du règlement Bruxelles I bis, ni aucune autre de ses dispositions ne régit expressément les effets des clauses attributives de juridiction à l’égard des tiers, et en particulier à l’égard des personnes autres que les parties au contrat initial auquel se rapporte la clause attributive de juridiction et qui deviennent ultérieurement parties à ce contrat en vertu d’une cession ou d’une autre convention ( 22 ). Selon la Cour, une clause attributive de juridiction insérée dans un
contrat ne peut, en principe, produire ses effets que dans les rapports entre les parties contractantes initiales ( 23 ). Pour qu’une telle clause puisse être opposable à un tiers, il est, en principe, nécessaire que celui-ci ait donné son consentement à cet effet ( 24 ). Cette approche est conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour concernant l’article 17 de la convention de Bruxelles et l’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I ( 25 ).
37. L’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis s’applique aux situations dans lesquelles les parties sont « convenues » d’une juridiction. Ainsi qu’il ressort du considérant 15 de ce règlement, cet accord de volontés entre les parties justifie la primauté accordée, au nom du principe de l’autonomie de la volonté, à la juridiction qu’elles ont choisie ( 26 ). La Cour a par conséquent jugé que l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis impose au juge saisi d’examiner, in
limine litis, si la clause attributive de juridiction a effectivement fait l’objet d’un consentement entre les parties, dont l’existence doit se manifester d’une manière claire et précise, les formes exigées par cette disposition ayant pour fonction d’établir l’existence de ce consentement ( 27 ).
38. Dans plusieurs arrêts concernant l’interprétation de l’article 17 de la convention de Bruxelles, qui ont été rendus dans le contexte de litiges portant sur des contrats de services de transport maritime, la Cour a néanmoins jugé qu’une clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement est opposable à un tiers au contrat. C’est le cas lorsque cette clause est reconnue valide dans le rapport entre le transporteur et le chargeur ( 28 ) et que, en vertu du droit national applicable, le
tiers porteur, en acquérant le connaissement, succède au chargeur dans ses droits et obligations ( 29 ). Selon la Cour, dans ces circonstances, le consentement du tiers porteur du connaissement à la clause attributive de juridiction insérée dans le contrat initial n’a pas à être vérifié. L’acquisition du connaissement ne saurait avoir pour effet de conférer au tiers davantage de droits que n’en détenait le chargeur. Le tiers devient ainsi titulaire à la fois de tous les droits et de toutes les
obligations figurant dans le connaissement, y compris la clause attributive de juridiction ( 30 ). Si le droit national ne prévoit pas une telle substitution, il appartient à la juridiction saisie de vérifier la réalité du consentement du tiers à la clause attributive de juridiction ( 31 ).
39. Dans l’arrêt Refcomp, qui portait sur l’interprétation de l’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I, la Cour a indiqué que la portée de la jurisprudence précitée doit être appréciée en tenant compte du caractère très particulier des connaissements, qu’elle a décrit comme étant « [des] instrument[s] du commerce international destiné[s] à régir une relation impliquant au moins trois personnes, à savoir le transporteur maritime, l’expéditeur des marchandises ou chargeur et le
destinataire des marchandises », ainsi que des « titre[s] négociable[s] permettant au propriétaire de céder les marchandises, pendant leur acheminement, à un acquéreur qui devient le titulaire de tous les droits et les obligations du chargeur vis-à-vis du transporteur » ( 32 ). C’est en considération de ce rapport de substitution entre le chargeur et le tiers porteur du connaissement que ce dernier se trouve lié par la clause attributive de juridiction contenue dans ce connaissement. La Cour a
considéré que cette jurisprudence n’était pas applicable aux circonstances de cette affaire, dans laquelle il était question d’une clause attributive de juridiction convenue entre le fabricant et l’acquéreur initial des marchandises dans le cadre d’une chaîne de contrats translatifs de propriété des marchandises ( 33 ).
40. La Cour a par la suite adopté une approche moins restrictive et appliqué à d’autres contrats la jurisprudence qu’elle avait développée dans le contexte des connaissements.
41. L’arrêt CDC Hydrogen Peroxide portait sur l’interprétation, entre autres, de l’article 23 du règlement Bruxelles I. Une société de droit belge ayant pour objet le recouvrement de créances indemnitaires d’entreprises affectées par une entente avait introduit, devant une juridiction allemande, une action aux fins de renseignements et d’indemnisation à l’encontre de plusieurs sociétés immatriculées dans différents États membres qui avaient participé à une infraction à l’article 101 TFUE. La Cour a
jugé, en se référant à l’arrêt Coreck, que, « [e]n effet, ce serait uniquement dans le cas où, conformément au droit national applicable au fond, tel que déterminé en application des règles de droit international privé de la juridiction saisie, le tiers aurait succédé au contractant initial dans tous ses droits et obligations qu’une clause attributive de juridiction à laquelle ce tiers n’a pas consenti pourrait néanmoins jouer à l’encontre de celui‑ci » ( 34 ).
42. La Cour a suivi la même approche dans son arrêt du 20 avril 2016, Profit Investment SIM ( 35 ), dans lequel elle a jugé qu’une clause attributive de juridiction contenue dans un prospectus d’émission de titres est opposable au tiers qui a acquis ces titres auprès d’un intermédiaire financier s’il est établi, entre autres, que « ledit tiers a, en souscrivant sur le marché secondaire les titres en cause, succédé audit intermédiaire dans les droits et les obligations attachés à ces titres en vertu
du droit national applicable ».
43. Dans l’arrêt DelayFix, la question se posait de savoir si Ryanair pouvait opposer à DelayFix, une société active dans le recouvrement de créances de passagers aériens, une clause attributive de juridiction insérée dans un contrat de transport conclu entre cette compagnie aérienne et un passager qui avait cédé sa créance à DelayFix, alors que cette dernière n’avait pas consenti à la clause. Au point 47 de cet arrêt, la Cour a jugé que la clause attributive de juridiction n’était opposable que si
DelayFix – le tiers – avait succédé au contractant initial- en l’espèce, le passager – dans ses droits et obligations « conformément au droit national applicable au fond ».
44. Il ressort de la jurisprudence de la Cour que, en droit de l’Union, une clause attributive de juridiction dont le transporteur et le chargeur sont convenus dans un connaissement peut être opposée au tiers porteur de ce connaissement si celui-ci a consenti à cette clause ou s’il a succédé au chargeur dans ses droits et obligations ( 36 ). La question de savoir si le tiers succède au chargeur dans ses droits et obligations en acquérant le connaissement doit être tranchée selon le droit national.
Ainsi qu’Allianz, Mapfre et le gouvernement espagnol le font valoir à juste titre, le droit national est le droit national applicable au fond, tel que déterminé en application des règles de droit international privé de la juridiction saisie du litige ( 37 ).
45. Il semble que la Cour adopte la même approche au point 47 de l’arrêt DelayFix lorsqu’elle se réfère au « droit national applicable au fond », en citant le point 65 de l’arrêt CDC Hydrogen Peroxide, qui renvoie à son tour au point 30 de l’arrêt Coreck. Lorsqu’elle revient sur cette question au point 63 et dans le dispositif de l’arrêt, la Cour semble adopter une position différente, en jugeant que la question de savoir si la société de recouvrement succède au contractant initial dans tous ses
droits et obligations doit être tranchée à la lumière de « la législation de l’État dont les juridictions sont désignées dans [la] clause [attributive de juridiction] ».
46. Cette approche présente les trois difficultés suivantes, et c’est pourquoi je ne la recommande pas à la Cour ( 38 ).
47. Premièrement, il ressort du point 45 des présentes conclusions que le raisonnement adopté par la Cour dans l’arrêt DelayFix est incohérent, voire totalement contradictoire. On ne saurait prétendre suivre la jurisprudence constante de la Cour, telle que résumée au point 44 des présentes conclusions, selon laquelle le droit régissant la question de savoir si le tiers succède au chargeur dans ses droits et obligations en acquérant le connaissement est le droit national applicable au fond, tel que
déterminé en application des règles de droit international privé de la juridiction saisie du litige, pour ensuite conclure que c’est en fait la législation de l’État membre désigné dans la clause attributive de juridiction qui est applicable à cet égard.
48. Deuxièmement, j’estime que l’approche retenue au point 63 et dans le dispositif de l’arrêt DelayFix ne se limite pas à préciser ou nuancer l’arrêt Coreck et l’arrêt CDC Hydrogen Peroxide ( 39 ). À moins qu’elle procède d’une simple erreur matérielle – une possibilité que je n’exclus pas, ainsi que je l’exposerai au point 50 des présentes conclusions – cette approche s’écarte manifestement de ces arrêts antérieurs. Si la Cour n’est pas nécessairement liée par sa jurisprudence antérieure et peut
certainement l’adapter pour tenir compte, par exemple, de changements intervenus dans les règles de droit applicables ou de la présence de nouveaux éléments, il est surprenant qu’elle n’explique pas, dans l’arrêt DelayFix, son changement de position sur le droit national applicable.
49. Troisièmement, on pourrait interpréter l’approche retenue au point 63 et dans le dispositif de l’arrêt DelayFix en ce sens que la règle de conflit de lois instaurée par l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis quant à la validité au fond de la clause attributive de juridiction régit la cession des droits et obligations de la partie au contrat initial à un tiers. Aux points 54 à 56 des présentes conclusions, j’expose les raisons pour lesquelles je considère que la Cour ne saurait
adopter une telle interprétation.
50. Eu égard au raisonnement adopté aux points 48 à 62 de l’arrêt DelayFix, je n’exclus pas que l’intention de la Cour était de renvoyer à la législation de l’État dont les juridictions sont désignées dans la clause attributive de juridiction aux fins de l’examen de la validité de cette clause entre les parties contractantes initiales, à savoir la compagnie aérienne et le passager. Dans ce cas, la référence à cette législation au point 63 et dans le dispositif de cet arrêt ne serait rien d’autre
qu’une erreur de plume.
51. Selon moi, et malgré les changements introduits par l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, trois motifs justifient de continuer d’appliquer les principes établis par la jurisprudence interprétant l’article 17, premier alinéa, de la convention de Bruxelles et l’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I, à laquelle renvoient les points 38, 39 et 41 à 44 des présentes conclusions.
52. Tout d’abord, j’observe que la Cour a jugé que, dans la mesure où l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis a remplacé l’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I en des termes quasiment identiques, l’interprétation qu’elle a donnée de la deuxième de ces dispositions s’applique également à la première ( 40 ).
53. Ensuite, je considère que la suppression de l’exigence selon laquelle au moins l’une des parties doit être domiciliée dans un État membre vise principalement à renforcer l’autonomie de la volonté des parties quant au choix de la ou des juridictions compétentes, et qu’elle n’a aucune incidence sur l’application ou l’effet des clauses attributives de juridiction à l’égard des tiers.
54. Enfin (et il semble que cet élément soit au centre de la première question préjudicielle), je souscris à l’analyse du gouvernement espagnol et de la Commission selon laquelle la nouvelle règle de conflit de lois, prévoyant que la validité au fond de la clause attributive de juridiction doit être déterminée selon le droit de l’État membre de la ou des juridictions désignées dans cette clause, n’a pas pour objet de régir les effets des clauses attributives de juridiction à l’égard des tiers, et
notamment la question de savoir si un tiers au contrat initial succède à la partie contractante initiale dans ses droits et obligations.
55. À cet égard, je partage ce qui semble être la position unanime de la doctrine, selon laquelle la notion de « validité au fond », visée à l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, englobe la validité au fond d’une clause attributive de juridiction lorsqu’elle est contestée sur le fondement de sa nullité, y compris sur le fondement de l’erreur, du dol, de la violence, de la fraude, de l’incompétence ou de l’incapacité ( 41 ). Dans leur rapport explicatif concernant la convention de
La Haye du 30 juin 2005 sur les accords d’élection de for, les professeurs Hartley et Dogauchi partagent ce point de vue lorsqu’ils commentent l’article 5, paragraphe 1, de cette convention dans les termes suivants : « La disposition “nullité” ne s’applique qu’aux causes matérielles (non formelles) de nullité » et « vise principalement les motifs généralement reconnus tels que la fraude, l’erreur, le dol, la violence et l’incapacité » ( 42 ).
56. Il s’ensuit que les effets des clauses attributives de juridiction à l’égard des tiers ne relèvent pas de la notion de « validité au fond » visée à l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis ( 43 ). La validité d’une clause attributive de juridiction est une question distincte de celle de son applicabilité ou de son opposabilité aux tiers.
57. Eu égard à ce qui précède, je propose à la Cour de répondre à la première question préjudicielle que l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis doit être interprété en ce sens qu’une clause attributive de juridiction convenue entre un transporteur et un chargeur, et insérée dans un connaissement, est opposable au tiers porteur du connaissement si, en acquérant ce connaissement, il a succédé au chargeur dans ses droits et obligations. Il appartient à la juridiction saisie du litige
de répondre à cette question conformément au droit national applicable au fond, tel que déterminé en application des règles de droit international privé de cette juridiction. La règle contenue dans cette disposition, prévoyant que la validité au fond d’une clause attributive de juridiction doit être appréciée selon le droit de l’État membre de la ou des juridictions désignées dans cette clause, ne régit pas le point de savoir si une clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement
est opposable au tiers porteur de ce connaissement.
Sur les deuxième, troisième et quatrième questions préjudicielles
58. Par ses deuxième, troisième et quatrième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis s’oppose à une législation nationale en vertu de laquelle un tiers au contrat de transport maritime de marchandises conclu entre un transporteur et un chargeur, qui acquiert le connaissement consignant ce contrat, est subrogé dans tous les droits et obligations du chargeur, à l’exception de la clause
attributive de juridiction insérée dans ce connaissement, qui ne lui est opposable que s’il l’a négociée individuellement et séparément.
59. Il ressort de l’examen de la première question préjudicielle que, selon ce qui semble être l’interprétation correcte de l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, une clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement peut être opposée au tiers porteur de ce connaissement dès lors que cette clause a été reconnue valide dans le rapport entre le transporteur et le chargeur, et que, en vertu du droit national applicable, le tiers a succédé au chargeur dans ses droits et
ses obligations en acquérant le connaissement. Dans ce cas, il n’y a pas lieu de vérifier le consentement du tiers porteur à la clause attributive de juridiction.
60. À mon sens, il ressort des demandes de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi part du principe que le droit espagnol s’applique en l’espèce, et en particulier l’article 251 de la LNM, lu en combinaison avec l’article 468 de la LNM ( 44 ). Ces deux dispositions, lues conjointement, semblent indiquer qu’un tiers qui acquiert un connaissement succède au chargeur dans tous ses droits et actions sur les marchandises, à l’exception de ceux découlant d’une clause attributive de
juridiction. Cette clause n’est valide que si le tiers porteur du connaissement l’a négociée individuellement et séparément.
61. Contrairement à la position adoptée par Allianz, Mapfre et le gouvernement espagnol, je partage le point de vue de la Commission selon lequel cette législation nationale a pour effet de contourner l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis tel qu’interprété par la jurisprudence de la Cour, et qu’elle est donc contraire à cette disposition.
62. J’observe toutefois que l’article 468 de la LNM dispose qu’il s’applique « [s]ans préjudice [...] des règles du droit de l’Union » ( 45 ). Eu égard à cette réserve, dans ses observations, le gouvernement espagnol interprète cette disposition, envisagée isolément, comme étant seulement applicable aux clauses attributives de juridiction qui ne relèvent pas de l’article 25 du règlement Bruxelles I bis, et en particulier à celles qui attribuent la compétence aux juridictions de pays tiers. De même,
la juridiction de renvoi soutient que la règle contenue dans l’article 468 de la LNM est inapplicable si la clause attributive de juridiction confère la compétence aux juridictions d’un État membre.
63. À cet égard, je soulignerais que la juridiction de renvoi a l’obligation d’interpréter la législation nationale en conformité avec le droit de l’Union. Par conséquent, si la réserve contenue à l’article 468 de la LNM devait permettre à la juridiction de renvoi d’interpréter la législation nationale en cause en conformité avec l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, tel qu’il est interprété par la jurisprudence de la Cour, sans que cette interprétation soit contraire au droit
espagnol, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer, il y aurait lieu de retenir cette solution.
64. Partant, je propose à la Cour de répondre aux deuxième, troisième et quatrième questions préjudicielles que l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale en vertu de laquelle un tiers au contrat de transport maritime de marchandises conclu entre un transporteur et un chargeur, qui acquiert le connaissement consignant ce contrat, est subrogé dans tous les droits et obligations du chargeur, à l’exception de la
clause attributive de juridiction insérée dans ce connaissement, qui ne lui est opposable que s’il l’a négociée individuellement et séparément.
Conclusion
65. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit aux questions préjudicielles posées par l’Audiencia Provincial de Pontevedra (cour provinciale de Pontevedra, Espagne) :
1) L’article 25, paragraphe 1, du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale
doit être interprété en ce sens que :
une clause attributive de juridiction convenue entre un transporteur et un chargeur et insérée dans un connaissement est opposable au tiers porteur du connaissement si, en acquérant ce connaissement, il a succédé au chargeur dans ses droits et obligations. Il appartient à la juridiction saisie du litige de répondre à cette question conformément au droit national applicable au fond, tel que déterminé en application des règles de droit international privé de cette juridiction. La règle contenue
dans cette disposition, prévoyant que la validité au fond d’une clause attributive de juridiction doit être appréciée selon le droit de l’État membre de la ou des juridictions désignées dans cette clause, ne régit pas le point de savoir si une clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement est opposable au tiers porteur de ce connaissement.
2) L’article 25, paragraphe 1, du règlement 1215/2012
doit être interprété en ce sens que :
cette disposition s’oppose à une législation nationale en vertu de laquelle un tiers au contrat de transport maritime de marchandises conclu entre un transporteur et un chargeur, qui acquiert le connaissement consignant ce contrat, est subrogé dans tous les droits et obligations du chargeur, à l’exception de la clause attributive de juridiction insérée dans ce connaissement, qui ne lui est opposable que s’il l’a négociée individuellement et séparément.
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( 1 ) Langue originale : l’anglais.
( 2 ) JO 2012, L 351, p. 1. Le règlement Bruxelles I bis a remplacé le règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1) (ci-après le « règlement Bruxelles I »), qui a lui-même remplacé la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), telle
qu’elle a été modifiée par les conventions successives d’adhésion de nouveaux États membres à cette convention (ci-après la « convention de Bruxelles »).
( 3 ) BOE no 180 du 25 juillet 2014, p. 59193.
( 4 ) Maersk Line Perú est une filiale péruvienne de Maersk. Dans les présentes conclusions, cette filiale sera également désignée comme « Maersk ».
( 5 ) La décision de renvoi indique que l’action a été intentée avant le 31 décembre 2020.
( 6 ) C‑159/97, EU:C:1999:142.
( 7 ) La juridiction de renvoi indique que la finalité de la LNM est de garantir que les clauses attributives de juridiction et les clauses d’arbitrage ne lient les parties que si elles ont négocié ces clauses individuellement et séparément. Cela est nécessaire pour protéger les intérêts des destinataires nationaux, porteurs de connaissements dans lesquels une clause attributive de juridiction a été introduite par les parties initiales, qui se trouvent dans une position contractuelle d’infériorité,
notamment dans le cas de contrats de transport maritime de ligne. Obliger les entreprises nationales, les chargeurs et les destinataires de marchandises à porter leurs petits litiges devant des juridictions étrangères peut, en pratique, saper l’effectivité de leur protection juridictionnelle.
( 8 ) 71/83, EU:C:1984:217, point 24.
( 9 ) C‑387/98, ci-après l’« arrêt Coreck , EU:C:2000:606, point 23.
( 10 ) C‑269/95, EU:C:1997:337.
( 11 ) C‑519/19, ci-après l’« arrêt DelayFix ; EU:C:2020:933.
( 12 ) La juridiction de renvoi se réfère au point 23 de l’arrêt Coreck et aux conclusions de l’avocat général Alber dans l’affaire Coreck (C‑387/98, EU:C:2000:157).
( 13 ) La décision de renvoi indique que l’action a été intentée avant le 31 décembre 2020.
( 14 ) La décision de renvoi indique que l’action a été intentée avant le 31 décembre 2020.
( 15 ) JO 2020, L 29, p. 7.
( 16 ) Souvent qualifiées d’« accords d’élection de for » ou de « clauses attributives de juridiction ».
( 17 ) Arrêt DelayFix (point 38 et jurisprudence citée).
( 18 ) La seule exigence qui subsiste est celle selon laquelle les parties doivent choisir une juridiction située dans un État membre.
( 19 ) Il ressort de l’exposé des motifs de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale [COM(2010) 748 final, p. 9)] que le législateur entendait aligner le texte de cette disposition sur celui de l’article 5 de la convention de La Haye du 30 juin 2005 sur les accords d’élection de for, dans le but de faciliter l’adhésion de l’Union à cette convention (pour le
texte de la convention, voir JO 2009, L 133, p. 3). Selon cet article 5, paragraphe 1, « [l]e tribunal ou les tribunaux d’un État contractant désignés dans un accord exclusif d’élection de for sont compétents pour connaître d’un litige auquel l’accord s’applique, sauf si celui-ci est nul selon le droit de cet État ». Il convient donc d’interpréter la nouvelle règle de conflit de lois à la lumière de la règle équivalente contenue dans la convention sur les accords d’élection de for. Dans ce contexte,
voir Hartley, T., et Dogauchi, M., Rapport explicatif, disponible à l’adresse https://assets.hcch.net/upload/expl37final.pdf.
( 20 ) Voir Nuyts, A., « La refonte du règlement Bruxelles I », Revue critique de droit international privé, 2013, p. 56. Si la validité au fond des clauses attributives de juridiction devait être contestée dans la procédure au principal, ce qui ne semble pas être le cas, les juridictions espagnoles se prononceraient sur cette question en application du droit du Royaume-Uni, y compris des règles de conflit de lois de ce pays. Les juridictions de l’État membre saisies en méconnaissance d’une clause
attributive de juridiction peuvent toutefois statuer sur la validité au fond de cette clause aussi longtemps que la juridiction désignée n’a pas été saisie. Dès qu’une partie saisit une juridiction de l’État membre désigné, l’article 31, paragraphe 2, du règlement Bruxelles I bis impose aux juridictions des autres États membres de surseoir à statuer sur toute affaire portée devant elles.
( 21 ) La Cour a déjà reconnu, dans sa jurisprudence, le caractère détachable de ces clauses : voir arrêt du 3 juillet 1997, Benincasa (C‑269/95, EU:C:1997:337, point 25).
( 22 ) Voir, en ce sens, point 40 de l’arrêt DelayFix, dans lequel la Cour indique que « l’article 25, paragraphe 1, du règlement [Bruxelles I bis] ne précise pas si une clause attributive de juridiction peut être cédée, au‑delà du cercle des parties à un contrat, à un tiers, partie à un contrat ultérieur et successeur, en tout ou partie, aux droits et aux obligations de l’une des parties au contrat initial ».
( 23 ) Arrêt DelayFix (point 42 et jurisprudence citée).
( 24 ) Arrêt du 21 mai 2015, CDC Hydrogen Peroxide (C‑352/13, ci-après l’« arrêt CDC Hydrogen Peroxide , EU:C:2015:335, point 64 et jurisprudence citée).
( 25 ) Arrêts du 20 février 1997, MSG (C‑106/95, EU:C:1997:70, points 15 et 17) ; du 16 mars 1999, Castelletti (C‑159/97, EU:C:1999:142, points 19 et 34), ainsi que du 7 février 2013, Refcomp (C‑543/10, ci-après l’« arrêt Refcomp , EU:C:2013:62, points 26 à 29).
( 26 ) En ce qui concerne l’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I, voir, en ce sens, arrêt Refcomp (point 26).
( 27 ) Arrêt DelayFix (point 41 et jurisprudence citée). Le règlement Bruxelles I bis régit la validité formelle des clauses attributives de juridiction. Les États membres ne peuvent ni prescrire d’autres exigences de forme, ni modifier les exigences de forme établies à l’article 25, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis ou en écarter l’application (voir, en ce sens, arrêt du 24 juin 1981, Elefanten Schuh, 150/80, EU:C:1981:148, point 26).
( 28 ) Dans les présentes affaires, rien n’indique que les clauses attributives de juridiction ne sont pas valides entre les transporteurs et les chargeurs.
( 29 ) Arrêts du 19 juin 1984, Russ (71/83, EU:C:1984:217, point 24) ; du 16 mars 1999, Castelletti (C‑159/97, EU:C:1999:142, point 41), et Coreck (point 23).
( 30 ) Arrêt Coreck (point 25 et jurisprudence citée).
( 31 ) Arrêt Coreck (point 26).
( 32 ) Arrêt Refcomp (point 35).
( 33 ) Au point 37 de l’arrêt Refcomp, la Cour a jugé que, dans une chaîne de contrats translatifs de propriété, le rapport de succession entre l’acquéreur initial et le sous‑acquéreur, c’est-à-dire le tiers qui acquiert les marchandises à la fin de la chaîne de contrats, ne s’analyse pas dans la transmission d’un contrat unique, ni dans la transmission de l’intégralité des droits et obligations qu’il prévoit. Les obligations contractuelles des parties peuvent varier d’un contrat à l’autre, de sorte
que les droits que le sous-acquéreur peut faire valoir à l’encontre de son vendeur immédiat ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux que le fabricant avait assumés dans son contrat avec le premier acquéreur. La Cour a conclu, au point 38 de cet arrêt, que les effets de la cession d’un connaissement à un tiers ne s’appliquent pas aux contrats translatifs de propriété des marchandises, puisque les droits des États membres diffèrent quant à la nature des rapports entre le fabricant et le
sous-acquéreur.
( 34 ) Arrêt CDC Hydrogen Peroxide (point 65).
( 35 ) Arrêt du 20 avril 2016, Profit Investment SIM (C‑366/13, EU:C:2016:282, point 37).
( 36 ) À supposer que la clause attributive de juridiction soit valide entre le transporteur et le chargeur, ce qui est constant dans les présentes affaires.
( 37 ) Arrêt Coreck (point 30) et arrêt CDC Hydrogen Peroxide (point 65).
( 38 ) Pour une critique de l’arrêt DelayFix, voir Larribère, L., « Note sous CJUE, 18 novembre 2020, Ryanair DAC c. DelayFix, aff. C‑519/19 », Journal du droit international, 2021, p. 1043, et Wołodkiewicz, B., « The Enforceability of a Jurisdiction Clause against an Assignee », Journal of European Consumer and Market Law, 2021, p. 206.
( 39 ) Voir point 44 des présentes conclusions.
( 40 ) Voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2022, Tilman (C‑358/21, EU:C:2022:923, point 34). La Cour est parvenue à la même conclusion en ce qui concerne l’article 17, premier alinéa, de la convention de Bruxelles et l’article 23, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I, qui sont rédigés en des termes quasiment identiques (voir, entre autres, arrêt Refcomp, points 18 et 19).
( 41 ) Voir, entre autres, Ahmed, M., « The Validity of Choice of Court Agreements in International Commercial Contracts under the Hague Choice of Court Convention and the Brussels Ia Regulation », dans Furmston, M. (dir.), The Future of the Law of Contract, Informa Law, Routledge, 2020, no 4, p. 217 ; Fallon, M., et Francq, S., « L’incidence de l’entrée en vigueur de la Convention de La Haye de 2005 sur les accords d’élection de for sur l’article 25 du règlement Bruxelles I bis », J.T., 2016,
no 22, p. 169 ; Hartley, T., Choice-of-court agreement under the European and international instruments, Oxford University Press, Oxford, 2013, no 7.05, p. 130‑131 ; Musseva, B., « Opposability of choice-of-court agreements against third parties under the Hague choice-of-court Convention and Brussels Ibis Regulation », p. 76, disponible à l’adresse https://www.prf.unze.ba/Docs/Anali/Analibr18god9/4.pdf ; Ratković, T., et Zgrabljić Rotar, D., « Choice-of-Court Agreements under the Brussels I
Regulation (Recast) », Journal of Private International Law, vol. 9, 2013, p. 253‑255.
( 42 ) Voir note en bas de page 19 des présentes conclusions, Rapport explicatif (point 126).
( 43 ) De même, cette notion n’inclut pas l’interprétation d’une clause attributive de juridiction (voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 1997, Benincasa, C‑269/95, EU:C:1997:337, point 31 et jurisprudence citée). En ce qui concerne les conditions de validité formelle de la clause, l’article 25, paragraphes 1 et 2, du règlement Bruxelles I bis les établit de telle sorte que le droit national, y compris les règles de conflit de lois, ne sauraient s’appliquer.
( 44 ) Allianz et Mapfre adoptent le même point de vue. Maersk soutient que les règles de conflit de lois du droit espagnol renvoient au droit péruvien.
( 45 ) Voir également point XI du préambule de la LNM, cité au point 6 des présentes conclusions.