CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. ATHANASIOS RANTOS
présentées le 25 janvier 2024 ( 1 )
Affaire C‑743/22
DISA SUMINISTROS Y TRADING SLU (DISA)
contre
Agencia Estatal de la Administración Tributaria
[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne)]
« Renvoi préjudiciel – Taxation des produits énergétiques et de l’électricité – Directive 2003/96/CE – Article 5 – Droit d’accise sur les huiles minérales – Taux régional des droits d’accise sur les huiles minérales venant s’ajouter au taux national – Taux différenciés des droits d’accise sur le territoire d’un État membre en fonction de la région dans laquelle le produit est consommé »
I. Introduction
1. La présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5 de la directive 2003/96/CE ( 2 ).
2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant DISA Suministros y Trading SLU (ci-après « DISA » ou « la requérante ») à l’Agencia Estatal de la Administración Tributaria (agence d’État de l’administration fiscale, Espagne) à la suite des demandes de la requérante visant au remboursement des taxes supportées au titre du taux d’imposition supplémentaire d’une communauté autonome sur le droit d’accise sur les huiles minérales (impuesto especial sobre hidrocarburos) (ci-après
l’« IEH »).
3. Cette affaire offre à la Cour l’occasion de clarifier la question de savoir si, indépendamment du respect des niveaux minimaux de taxation imposés par la directive 2003/96, cette directive impose un niveau de taxation uniforme sur l’ensemble du territoire d’un État membre ou si elle laisse une marge de manœuvre aux États membres aux fins de prévoir des taux d’accise différents pour un même produit et un même usage, en fonction de la partie du territoire national dans laquelle ce produit est
destiné à être consommé.
II. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
1. La directive 2003/96
4. Les considérants 2 à 5, 9, 10, 15 et 24 de la directive 2003/96 énoncent :
« (2) L’absence de dispositions communautaires soumettant à une taxation minimale l’électricité et les produits énergétiques autres que les huiles minérales peut être préjudiciable au bon fonctionnement du marché intérieur.
(3) Le bon fonctionnement du marché intérieur et la réalisation des objectifs des autres politiques communautaires nécessitent que des niveaux minima de taxation soient fixés au niveau communautaire pour la plupart des produits énergétiques, y compris l’électricité, le gaz naturel et le charbon.
(4) D’importants écarts entre les niveaux nationaux de taxation de l’énergie appliqués par les États membres pourraient s’avérer préjudiciables au bon fonctionnement du marché intérieur.
(5) La fixation à des niveaux appropriés des minima communautaires de taxation peut permettre de diminuer les écarts actuels entre les niveaux nationaux de taxation.
[...]
(9) Il convient de laisser aux États membres la flexibilité nécessaire pour définir et mettre en œuvre des politiques adaptées aux contextes nationaux.
(10) Les États membres souhaitent introduire ou maintenir différents types de taxes sur les produits énergétiques et l’électricité. Il y a lieu, dans ce but, de permettre aux États membres de respecter les niveaux minima communautaires de taxation par le cumul de l’ensemble des impôts indirects de leur choix (à l’exception de la TVA).
[...]
(15) La possibilité de différencier le niveau national de taxation pour un même produit doit être autorisée dans certaines circonstances ou à titre permanent, sous réserve du respect des niveaux minima communautaires et des règles du marché intérieur et de la concurrence.
[...]
(24) Il y a lieu de permettre aux États membres d’appliquer certaines autres exonérations ou des niveaux réduits de taxation, lorsque cela ne nuit pas au bon fonctionnement du marché intérieur et n’entraîne pas de distorsions de concurrence. »
5. L’article 1er de cette directive dispose :
« Les États membres taxent les produits énergétiques et l’électricité conformément à la présente directive. »
6. L’article 2, paragraphe 1, sous b), de ladite directive se lit comme suit :
« 1. Aux fins de la présente directive, on entend par “produits énergétiques” les produits :
[...]
b) relevant des codes NC 2701, 2702 et 2704 à 2715 inclus. »
7. L’article 3 de la même directive prévoit :
« Dans la directive 92/12/CEE, les termes “huiles minérales” et “droits d’accises”, dans la mesure où ils se rapportent à des huiles minérales, couvrent tous les produits énergétiques, l’électricité et tous les impôts indirects nationaux visés respectivement à l’article 2 et à l’article 4, paragraphe 2, de la présente directive. »
8. L’article 4 de la directive 2003/96 prévoit :
« 1. Les niveaux de taxation que les États membres appliquent aux produits énergétiques et à l’électricité visés à l’article 2 ne peuvent être inférieurs aux niveaux minima prévus par la présente directive.
2. Aux fins de la présente directive, on entend par “niveau de taxation” le montant total d’impôts indirects (à l’exception de la TVA) perçu, calculé directement ou indirectement sur la quantité de produits énergétiques et d’électricité au moment de la mise à la consommation. »
9. L’article 5 de cette directive énonce :
« À condition qu’ils respectent les niveaux minima de taxation prévus par la présente directive et soient conformes au droit communautaire, des taux de taxation différenciés peuvent être appliqués sous contrôle fiscal par les États membres dans les cas suivants :
– lorsque les taux différenciés sont directement liés à la qualité du produit,
– lorsque les taux différenciés dépendent des niveaux quantitatifs de consommation de l’électricité et des produits énergétiques pour le chauffage,
– pour les utilisations suivantes : les transports publics locaux de passagers (y compris les taxis), la collecte des déchets, les forces armées et l’administration publique, les personnes handicapées, les ambulances,
– entre la consommation professionnelle et non professionnelle des produits énergétiques et de l’électricité visés aux articles 9 et 10. »
10. L’article 6 de ladite directive dispose :
« Les États membres ont la faculté d’accorder les exonérations ou les réductions du niveau de taxation prévues dans la présente directive :
a) directement ;
b) sous la forme d’un taux de taxe différencié
ou
c) sous la forme d’un remboursement total ou partiel du montant de la taxe. »
11. L’article 19, paragraphes 1 et 3, de la même directive prévoit :
« 1. Outre les dispositions des articles précédents, en particulier les articles 5, 15 et 17, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser un État membre à introduire des exonérations ou des réductions supplémentaires pour des raisons de politique spécifiques.
Tout État membre souhaitant introduire une telle mesure en informe la Commission et lui communique également toutes les informations pertinentes et nécessaires.
La Commission examine la demande en prenant en considération, notamment, le bon fonctionnement du marché intérieur, la nécessité d’assurer une concurrence loyale et les politiques communautaires de la santé, de l’environnement, de l’énergie et des transports.
[...]
3. Si la Commission considère que les exonérations ou réductions visées au paragraphe 1 ne peuvent plus être maintenues, notamment pour des raisons de concurrence déloyale ou de perturbation du fonctionnement du marché intérieur, ou pour des motifs liés à la politique communautaire de la santé, de protection de l’environnement, de l’énergie ou des transports, elle présente des propositions appropriées au Conseil, qui statue à l’unanimité à leur sujet. »
2. La directive 2008/118/CE
12. L’article 1er, paragraphes 1 et 2, de la directive 2008/118/CE ( 3 ) est libellé comme suit :
« 1. La présente directive établit le régime général des droits d’accises frappant directement ou indirectement la consommation des produits suivants, ci-après dénommés “produits soumis à accise” :
a) les produits énergétiques et l’électricité relevant de la [directive 2003/96] ;
[...]
2. Les États membres peuvent, à des fins spécifiques, prélever des taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise, à condition que ces impositions respectent les règles de taxation communautaires applicables à l’accise ou à la taxe sur la valeur ajoutée pour la détermination de la base d’imposition, le calcul, l’exigibilité et le contrôle de l’impôt, ces règles n’incluant pas les dispositions relatives aux exonérations. »
B. Le droit espagnol
13. L’article 50 ter de la Ley 38/1992 de Impuestos Especiales (loi 38/1992, sur les accises) du 28 décembre 1992 (ci-après la « loi sur les accises »), intitulé « taux d’imposition de la communauté autonome », dispose, dans sa version applicable au litige au principal :
« 1 Les communautés autonomes peuvent établir un taux régional du droit d’accise sur les huiles minérales, aux fins de la taxation supplémentaire des produits auxquels s’appliquent les taux d’imposition visés aux points [...], et qui sont consommés sur leurs territoires respectifs. L’application du taux régional se fait conformément aux dispositions de la présente loi et dans les limites et conditions prévues par les règles de financement des communautés autonomes.
2. Le taux d’imposition régional à appliquer est celui correspondant à la communauté autonome sur le territoire de laquelle a lieu la consommation finale des produits taxés. Aux fins du présent article, il est entendu que les produits sont consommés sur le territoire d’une communauté autonome lorsqu’ils sont reçus dans l’un des lieux suivants :
[...] »
14. L’article 50 ter de la loi sur les accises a été en vigueur au cours des exercices 2013 à 2018. Il a été abrogé à compter du 1er janvier 2019 par la Ley 6/2018 de Presupuestos Generales del Estado para 2018 (loi 6/2018, relative au budget général de l’État pour 2018) du 3 juillet 2018, dont l’exposé des motifs indique notamment :
« En matière d’accises, le taux régional du droit sur les huiles minérales est intégré au taux spécial de l’État afin de garantir l’unité du marché dans le domaine des combustibles et des carburants, sans que cette mesure porte atteinte aux ressources des communautés autonomes, et ce dans le cadre juridique communautaire. »
III. Le litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour
15. Les entités CLH, TEPSA et SECICAR, qui sont des opérateurs logistiques assujettis à l’IEH, ont présenté des auto-liquidations relatives aux périodes comprises entre les années 2013 et 2015 et répercuté le montant de l’IEH sur DISA. Cette dernière est active dans le domaine de l’achat, de la vente, de l’importation et de la commercialisation en gros de produits pétroliers.
16. Ayant supporté l’IEH, DISA a demandé à l’administration fiscale de rectifier les auto-liquidations présentées par CLH, TEPSA et SECICAR et a réclamé le remboursement des montants correspondant au taux régional supplémentaire des droits d’accise sur les huiles minérales, tel que fixé par la communauté autonome concernée (ci-après le « taux régional des droits d’accise sur les huiles minérales » ou « taux régional de l’IEH »).
17. À l’appui de ses demandes, DISA a fait valoir que ce taux régional, visé à l’article 50 ter de la loi sur les accises, en vigueur depuis le 1er janvier 2013, était contraire au droit de l’Union en ce qu’il contrevenait à certaines dispositions de la directive 2003/96 et en particulier à l’article 5 de celle-ci, au motif qu’il ne correspondait pas aux dérogations prévues par cette disposition aux fins de l’application des taux d’imposition différenciés et qu’il était contraire à l’objectif de
taxation unifiée de cette directive.
18. L’administration fiscale a rejeté ces demandes en estimant qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la question de savoir si la réglementation espagnole enfreignait ou non le droit de l’Union.
19. La requérante a alors introduit des réclamations contre ce rejet devant le Tribunal Económico-Administrativo Central (tribunal économique administratif central, Espagne).
20. La requérante a par la suite formé un recours contre le rejet de ses réclamations devant la chambre du contentieux administratif de l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne), qui a été rejeté par arrêt du 25 novembre 2020. Tout en observant que les doutes juridiques que soulève l’interprétation de la directive 2003/96 pourraient l’amener à présenter une demande de décision préjudicielle, l’Audiencia Nacional (Cour centrale) a rejeté la demande de remboursement des sommes versées au motif que
DISA n’avait pas démontré qu’elle n’avait pas répercuté ces sommes sur d’autres personnes, ce qui aurait pu donner lieu à un enrichissement sans cause de la requérante.
21. La requérante s’est pourvue en cassation contre l’arrêt de l’Audiencia Nacional devant le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), la juridiction de renvoi.
22. Cette juridiction souligne que l’issue du litige au principal dépend de l’interprétation de la directive 2003/96 eu égard au taux régional des droits d’accise sur les huiles minérales. Elle estime, à cet égard, que ni cette directive ni la jurisprudence de la Cour ne fournissent une interprétation claire de l’article 5 de ladite directive quant au point de savoir si, et dans quelles conditions, celle-ci s’oppose à ce que, en matière de taxation des produits énergétiques et de l’électricité,
soient institués au sein d’un État membre, pour un même produit, des taux de taxation différenciés en fonction du territoire concerné.
23. Dans ces conditions, le Tribunal Supremo (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« La directive [2003/96], notamment son article 5, [doit-elle] être interprété[e] en ce sens qu’[elle] s’oppos[e] à une règle nationale, telle que l’article 50 ter de la [loi sur les accises], qui autorise les communautés autonomes à fixer, pour un même produit, des taux d’accises territorialement différenciés sur les huiles minérales ? »
24. Des observations écrites ont été soumises à la Cour par la requérante, le gouvernement espagnol ainsi que la Commission européenne.
IV. Analyse
A. Sur la recevabilité de la question préjudicielle
25. Avant de procéder à l’analyse de l’unique question préjudicielle formulée par la juridiction de renvoi, il y a lieu de se prononcer sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par le gouvernement espagnol.
26. En effet, ce gouvernement soutient que la question préjudicielle devrait être déclarée irrecevable en raison de son caractère hypothétique. Selon lui, la question de la compatibilité de la disposition nationale en cause avec le droit de l’Union n’aurait jamais été débattue devant les juridictions antérieures saisies du litige au principal ni même dans le cadre du pourvoi devant la juridiction de renvoi, puisque ce pourvoi aurait été initialement limité à la question de la qualité de la
requérante pour engager une procédure en répétition de l’indu.
27. À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les questions relatives à l’interprétation du droit de l’Union posées par le juge national dans le cadre réglementaire et factuel qu’il définit sous sa propre responsabilité, et dont il n’appartient pas à la Cour de vérifier l’exactitude, bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît
de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées ( 4 ).
28. Or, en l’espèce, la question posée par la juridiction de renvoi a un rapport direct avec la réalité ou l’objet du litige au principal, dans la mesure où celui-ci concerne une demande de la requérante tendant au remboursement du montant correspondant à la tranche régionale de l’IEH qu’elle a supportée, au motif que cette tranche régionale serait contraire à la directive 2003/96, notamment à son article 5. La juridiction de renvoi relève, par ailleurs, que l’issue du litige au principal dépend de
l’interprétation de cette directive puisqu’elle sera tenue de statuer sur le fond de la plainte en vertu du droit national régissant le pourvoi en cassation ( 5 ). Il ressort, enfin, clairement, de la décision de renvoi, sans que cela ne soit contesté par le gouvernement espagnol, que les demandes de remboursement introduites par la requérante portent sur une période au cours de laquelle l’article 50 ter de la loi sur les accises était en vigueur.
29. Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par le gouvernement espagnol.
B. Sur le fond
30. Par son unique question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 2003/96, en particulier l’article 5 de celle-ci, s’oppose à une règle nationale, telle que l’article 50 ter de la loi sur les accises, qui autorise les communautés autonomes à fixer des taux d’accises sur les huiles minérales territorialement différenciés, alors même que les taux minima de taxation requis par cette directive sont respectés.
1. Observations liminaires
31. À titre liminaire, il convient d’observer que la présente affaire est caractérisée par le fait que la disposition nationale en cause permettait à chaque communauté autonome espagnole de fixer son propre taux régional des droits d’accises sur les huiles minérales, lequel venait s’ajouter au taux d’accises national ( 6 ).
32. Par ailleurs, ainsi qu’il ressort de la description du cadre juridique national présentée au point 14 des présentes conclusions, le gouvernement espagnol a modifié l’article 50 ter de la loi sur les accises, qui était en vigueur en Espagne au cours des années 2013 à 2018, en abrogeant le taux régional supplémentaire à compter du 1er janvier 2019 ( 7 ). Depuis son abrogation, le Royaume d’Espagne a mis en place un autre système de financement des communautés autonomes, prévoyant un taux uniforme
sur l’ensemble de son territoire ( 8 ).
2. Les principaux éléments du régime de taxation harmonisée prévu par la directive 2003/96
33. Il y a lieu d’observer que, en prévoyant un régime de taxation harmonisée des produits énergétiques et de l’électricité, la directive 2003/96 vise, ainsi qu’il ressort de ses considérants 2 à 5 et 24, à promouvoir le bon fonctionnement du marché intérieur dans le secteur de l’énergie, en évitant, notamment, les distorsions de concurrence ( 9 ). Cette directive entend ainsi réduire les écarts entre les niveaux nationaux de taxation de l’énergie, dans la mesure où il a été constaté qu’il
s’agissait d’un facteur préjudiciable au bon fonctionnement du marché intérieur ( 10 ).
34. Pour atteindre cet objectif, le législateur de l’Union a procédé à une harmonisation non pas exhaustive mais partielle des règles de taxation des produits énergétiques et de l’électricité, dans la mesure où ladite directive se borne à fixer des niveaux minimaux de taxation harmonisés ( 11 ). À cette fin, en vertu de son article 4, paragraphe 1, celle-ci exige que les niveaux de taxation que les États membres appliquent aux produits énergétiques et à l’électricité visés à l’article 2 de la même
directive ne soient pas inférieurs aux niveaux minima prévus par cette dernière.
35. Toutefois, reconnaissant tant la nécessité de laisser aux États membres la flexibilité nécessaire pour définir et mettre en œuvre des politiques adaptées aux contextes nationaux que le fait que les régimes instaurés dans le cadre de la mise en œuvre de la directive 2003/96 relèvent de la compétence de chacun des États membres, cette directive a reconnu une marge de manœuvre et d’appréciation aux États membres en matière de droits d’accise ( 12 ). Ladite directive contient ainsi une série de
dispositions (parmi lesquelles notamment les articles 5 et 7 ainsi que 15 à 19) qui prévoient la possibilité pour les États membres d’instaurer, sous certaines conditions, des taux de taxation différenciés, des exonérations de taxation ou des réductions fiscales des droits d’accise ( 13 ).
3. La conformité de l’IEH avec l’article 5 de la directive 2003/96
36. En ce qui concerne l’article 5 de la directive 2003/96, il convient de constater que cette disposition énumère les cas de figure dans lesquels les États membres peuvent appliquer à un même produit des taux de taxation différenciés.
37. Or, force est de constater, d’emblée, que l’application de taux différenciés entre différentes régions au sein d’un même État membre n’entre pas, a priori, dans les cas de figure prévus par ladite disposition. En effet, aucun des cas énumérés à l’article 5 de cette directive ne prévoit la possibilité d’appliquer une différenciation régionale des droits d’accise. Par ailleurs, l’utilisation de l’expression « dans les cas suivants », pour désigner les cas de figure dans lesquels une
différenciation du niveau de taxation serait possible selon cette disposition, ne semble laisser aucun doute quant au caractère exhaustif de la liste des cas dans lesquels les États membres peuvent appliquer des taux de taxation différenciés à un même produit ( 14 ). Une telle interprétation ressort, en outre, également du considérant 15 de ladite directive qui prévoit que « [l]a possibilité de différencier le niveau national de taxation pour un même produit doit être autorisée dans certaines
circonstances ou à titre permanent, sous réserve du respect des niveaux minima communautaires et des règles du marché intérieur et de la concurrence » ( 15 ).
38. À cet égard, la jurisprudence de la Cour semble avoir également confirmé le caractère exhaustif des cas de figure énumérés à l’article 5 de la directive 2003/96, en précisant que cette disposition prévoit des taux de taxation différenciés dans certains cas « limitativement énumérés à cet article » ( 16 ).
39. Toutefois, ainsi que l’observe, à juste titre, la juridiction de renvoi, il convient de constater que la jurisprudence actuelle de la Cour relative à la directive 2003/96, et notamment à son article 5, n’a pas examiné explicitement la question de l’uniformité des taux d’accises pour un même produit et un même usage au sein d’un État membre.
40. Si, dans le cadre de deux recours en manquement dans lesquels des taux d’accise territorialement différenciés analogues à ceux du litige au principal ont été considérés comme litigieux eu égard à la directive 2003/96 par la Commission ( 17 ), la question de savoir si cette directive autorisait ou non une telle différenciation régionale a été débattue entre les parties, la Cour ne s’est pas explicitement prononcée sur cette question dans les arrêts correspondants. Ainsi, dans l’arrêt
Commission/France, la Cour a simplement constaté le manquement de la République française au motif que celle-ci n’avait pas adapté son système de taxation de l’électricité à la directive 2003/96 dans le délai imparti. Il en a été de même dans l’arrêt Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants), dans lequel la Cour, considérant que le manquement allégué par la Commission n’avait pas été démontré par cette dernière ( 18 ), n’a pas eu besoin de prendre position sur la question.
41. La question préjudicielle qui nous est posée dans la présente affaire se prête à deux interprétations possibles : une première interprétation, défendue par le gouvernement espagnol, selon laquelle l’article 5 de la directive 2003/96 ne s’oppose pas à l’existence de taux différenciés selon les régions de la taxe frappant les produits énergétiques, à condition que ces taux respectent les taux minimaux prévus par cette directive, et une seconde interprétation, soutenue par la requérante et la
Commission, selon laquelle l’obligation de respecter un niveau de taxation uniforme sur l’ensemble du territoire d’un État membre pour un même produit qui découle de l’article 5 de la directive 2003/96 vaut indépendamment du respect des niveaux minimaux de taxation imposés par cette directive.
42. Pour les raisons qui suivent, je suis d’avis qu’il convient de privilégier cette dernière interprétation.
43. En premier lieu, il convient de rappeler que, même si le domaine de la taxation des produits énergétiques et de l’électricité n’est que partiellement harmonisé et la directive 2003/96 reconnaît une certaine flexibilité et marge de manœuvre aux États membres afin de pouvoir mettre en œuvre des politiques adaptées aux contextes nationaux, il n’en demeure pas moins que cette marge de manœuvre est encadrée. Il s’ensuit que la possibilité offerte aux États membres d’instaurer des taux de taxation
différenciés, des exonérations de taxation, ou des réductions des droits d’accises, ne peut être mise en œuvre que dans le strict respect des conditions posées par les dispositions pertinentes de cette directive. En effet, en l’absence d’un tel encadrement, ladite directive serait dépourvue de tout sens.
44. L’article 5 de la directive 2003/96 ne fait pas exception à cette logique d’encadrement dans la mesure où le libellé même de cette disposition témoigne de la volonté du législateur d’encadrer la marge de manœuvre dont disposent les États membres pour procéder à l’application de différents taux pour le même produit, et cela indépendamment du respect des niveaux minimaux de taxation imposés par cette directive ( 19 ). Ainsi, contrairement à ce que soutient le gouvernement espagnol, ladite
directive ne confère pas aux États membres une liberté absolue de fixer les taux d’imposition différenciés qu’ils jugent appropriés en se prévalant du seul fait que le taux pratiqué reste supérieur au taux minimum imposé. Une telle interprétation priverait l’article 5 de la directive 2003/96 de toute raison d’être. Je partage, dès lors, la position exprimée par l’avocat général Richard de la Tour, dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants)
(C‑63/19, EU:C:2020:596, point 82), selon laquelle les dérogations au principe d’une taxation unique par produit et par usage ne peuvent être mises en œuvre par un État membre que dans les cas expressément énumérés par la directive 2003/96.
45. Il convient de préciser, par ailleurs, que l’article 5 n’est pas la seule disposition de la directive 2003/96 permettant des disparités en matière fiscale au sein d’un même État membre. En effet, l’article 19 de cette directive autorise les États membres à introduire des taux d’imposition différenciés par le biais d’exonérations ou de réductions supplémentaires pour des raisons de politique spécifiques à condition que le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, ne s’y
oppose pas. Il convient de constater, à cet égard, que le Conseil a déjà autorisé, en application de cette disposition, un certain nombre de réductions d’accises pour des régions ou des zones spécifiques à l’intérieur d’un État membre ( 20 ).
46. Si la Commission et la requérante considèrent que, pour appliquer un taux différencié dans une région déterminée, un État membre doit recourir à l’article 19 de la directive 2003/96 et demander une autorisation au titre de cette disposition, le gouvernement espagnol, quant à lui, soutient – sans se prononcer sur la nécessité d’obtenir ladite autorisation – que le fait que des réductions de niveaux de taxation aient été autorisées au titre de l’article 19 de ladite directive suffirait, à lui
seul, à démontrer que celle-ci permettrait bien des disparités régionales.
47. Bien qu’il ne ressorte pas clairement du libellé même de l’article 5 de la directive 2003/96 que le régime d’autorisation prévu par cette disposition couvre uniquement des hypothèses où la taxation différenciée résulterait d’une exonération ou d’une réduction allant au-delà des taux minima, ou si cet article 5 vise également des situations comme celle en cause dans l’affaire au principal dans laquelle la taxe régionale différenciée reste supérieure aux niveaux minimaux d’imposition, il n’en
demeure pas moins que, en tout état de cause, pour qu’un État membre puisse se prévaloir de cette possibilité, celui-ci est tenu d’obtenir l’autorisation préalable du Conseil conformément à l’article 19 de cette directive, ce que le gouvernement espagnol n’a pas fait en l’occurrence.
48. Il convient d’analyser, en second lieu, l’argument soulevé par le gouvernement espagnol selon lequel l’article 50 ter de la loi sur les accises, en tant que manifestation de l’autonomie politique des communautés autonomes, reconnue par la Constitution espagnole et protégée par l’article 4, paragraphe 2, TUE ( 21 ), justifierait l’interprétation de la directive 2003/96 telle que préconisée par ce gouvernement.
49. Il convient de rappeler à cet égard que la répartition des compétences au sein d’un État membre bénéficie de la protection conférée par l’article 4, paragraphe 2, TUE, selon lequel l’Union est tenue de respecter l’identité nationale des États membres, inhérente à leurs structures fondamentales politiques et constitutionnelles, y compris en ce qui concerne l’autonomie locale et régionale ( 22 ). Il ressort, par ailleurs, d’une jurisprudence constante de la Cour que chaque État membre est libre de
répartir les compétences sur le plan interne et de mettre en œuvre les actes de droit communautaire qui ne sont pas directement applicables au moyen de mesures prises par les autorités régionales ou locales, pourvue que cette répartition des compétences permette une mise en œuvre correcte des actes de droit communautaire en cause ( 23 ).
50. Force est de constater, toutefois, qu’aucune des dispositions de la directive 2003/96, y compris son article 5 (même interprétée dans le sens proposé au point 44 des présentes conclusions) ne saurait remettre en cause les principes reconnus au titre de l’article 4, paragraphe 2, TUE. En effet, en prévoyant une série de dispositions permettant aux États membres de s’écarter, sous certaines conditions, des taux minima prévus par cette directive, celle-ci non seulement vise, en substance, à prendre
en considération les traditions fiscales des États membres, mais leur permet également de mettre en œuvre des politiques adaptées aux contextes nationaux ( 24 ). J’estime ainsi qu’aucun État membre ne saurait se prévaloir de la protection conférée par l’article 4, paragraphe 2, TUE, ni, notamment, invoquer son organisation interne et la répartition des compétences pour justifier une violation du droit de l’Union. Par ailleurs, toutes les différenciations fiscales au niveau régional,
indépendamment de leur importance, ne peuvent être interprétées comme une manifestation de l’identité nationale d’un État membre, ni être justifiées inconditionnellement à ce titre. Il ne pourrait en être autrement que si, le cas échéant, chaque région autonome avait, en vertu de la Constitution, la possibilité d’établir un régime fiscal totalement différent, défini de manière autonome par elle-même.
51. En troisième lieu, il convient de noter que la directive 2003/96 vise à promouvoir le bon fonctionnement du marché intérieur dans le secteur de l’énergie. Or, si cette directive permet, en principe, la possibilité d’avoir des taux différents entre États membres (à condition que les taux minima soient respectés), reconnaître la possibilité à chaque État membre d’appliquer sur son territoire national et dans ses différentes régions des taux différenciés – même lorsque ceux-ci respectent les taux
minima – sans aucun encadrement ou mécanisme de contrôle, serait de nature à porter atteinte au bon fonctionnement du marché intérieur en le fragmentant davantage, compromettant ainsi la libre circulation des marchandises, sans que l’on puisse par ailleurs exclure le risque de fraude fiscale.
52. En quatrième lieu, la directive 2008/118, qui régit le régime général des droits d’accises, prévoit, à son article 1er, paragraphe 2, que les produits soumis auxdits droits peuvent faire l’objet d’autres impositions indirectes. Cet article, combiné avec certaines dispositions de la directive 2003/96, qui laisserait explicitement aux États membres la possibilité de taxer l’électricité et les produits énergétiques avec d’autres impôts ( 25 ), permettrait, selon le gouvernement espagnol, le
prélèvement d’une taxe supplémentaire, à l’instar de l’IEH.
53. Cependant, il convient de rappeler que si l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118 laisse la possibilité aux États membres de prélever sur les produits soumis à accise des taxes indirectes, distinctes des accises, un tel prélèvement ne peut avoir lieu que si deux conditions cumulatives sont réunies. D’une part, de telles taxes doivent être prélevées à des fins spécifiques et, d’autre part, ces impositions doivent respecter les règles de taxation de l’Union applicables à l’accise ou
à la TVA pour la détermination de la base d’imposition, ainsi que pour le calcul, l’exigibilité et le contrôle de l’impôt ( 26 ).
54. S’agissant, plus précisément, du critère relatif à la finalité spécifique, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que s’il n’est pas nécessaire que les recettes d’une taxe additionnelle soient affectées à la finalité spécifique poursuivie, encore faut-il que la taxe en question soit conçue, en ce qui concerne sa structure, notamment la matière imposable ou le taux d’imposition, d’une manière telle qu’elle influence le comportement des contribuables dans un sens permettant la
réalisation de la fin spécifique invoquée, par exemple en taxant fortement les produits en cause afin de décourager leur consommation ou en encourageant l’utilisation d’autres produits dont les effets sont moins nocifs par rapport à l’objectif poursuivi ( 27 ).
55. Cependant, il n’est pas possible d’établir, sur la base des éléments du dossier dont dispose la Cour, dans quelle mesure les recettes perçues par la tranche d’imposition supplémentaire sont destinées à une finalité spécifique ou si cette taxe est aménagée d’une manière à permettre la réalisation de la finalité spécifique invoquée (dans l’hypothèse où une telle finalité existerait). Tel ne semble, pour autant, pas être le cas de l’IEH. En effet, ainsi qu’il ressort des observations écrites
présentées par le gouvernement espagnol, le taux régional de l’IEH est destiné à financer de manière générale les compétences des communautés autonomes afin que celles-ci puissent, par la suite, disposer de ces recettes à une échelle régionale dans les domaines choisis par ces communautés.
56. En cinquième et dernier lieu, la jurisprudence récente de la Cour relative à l’application de la directive 2003/96 semble aller à l’encontre de l’application d’une taxe différenciée par territoire au sein d’un même État membre ( 28 ). En effet, si la directive 2003/96 reconnaît aux États membres la faculté d’introduire des taux de taxation différenciés, des réductions et des exonérations fiscales, la jurisprudence de la Cour exige que ce pouvoir discrétionnaire dont les États membres disposent
en vertu des dispositions pertinentes de cette directive (y compris l’article 5 de celle-ci) soit exercé dans le respect du droit de l’Union et de ses principes généraux et, notamment, dans le respect du principe de l’égalité de traitement ( 29 ). Cela ressort d’ailleurs du libellé même de l’article 5 de ladite directive, qui prévoit expressément que les taxations différenciées peuvent être appliqués « [à] condition qu’[elles] [...] soient conformes au droit [de l’Union] ».
57. Il convient de relever à cet égard que le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié ( 30 ). Or, hormis l’hypothèse où cela serait objectivement justifié, ce qui ne semble pas être le cas dans la présente affaire, la situation a priori comparable de deux assujettis producteurs d’huiles
minérales dans un même État membre pourrait ne pas être traitée de manière égale s’ils sont tenus de supporter des niveaux de taxation différents sur la seule base d’un critère géographique, sans que ce traitement soit objectivement justifié.
58. À la lumière de tout ce qui précède, il convient de répondre à l’unique question préjudicielle posée par la juridiction de renvoi que la directive 2003/96, en particulier son article 5, doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce que les États membres prévoient un taux d’accise régional différencié sur les hydrocarbures qui entraînerait l’application d’une imposition régionale différente pour un même produit et une même utilisation, en dehors des cas prévus de manière exhaustive par
cette directive.
V. Conclusion
59. Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à l’unique question préjudicielle posée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) de la manière suivante :
La directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité, en particulier son article 5,
doit être interprétée en ce sens que :
elle s’oppose à ce que les États membres prévoient un taux d’accise régional différencié sur les hydrocarbures qui entraînerait l’application d’une imposition régionale différente pour un même produit et une même utilisation, en dehors des cas prévus de manière exhaustive par cette directive.
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( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) Directive du Conseil du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité (JO 2003, L 283, p. 51). La demande de décision préjudicielle ne fait référence qu’à la directive 2003/96 dans sa version applicable au litige au principal, qui porte sur les années 2013 à 2015, sans mentionner les modifications et révisions ultérieures de cette directive.
( 3 ) Directive du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE (JO 2009, L 9, p. 12).
( 4 ) Arrêt du 12 janvier 2023, DOBELES HES (C‑702/20 et C‑17/21, EU:C:2023:1, point 47 et jurisprudence citée).
( 5 ) La juridiction de renvoi souligne, à cet égard, que DISA a demandé, par la voie administrative, le remboursement des droits qu’elle a payés au titre du taux régional de l’IEH, en faisant valoir qu’ils étaient contraires au droit de l’Union, et qu’elle a maintenu sa demande devant l’Audiencia Nacional (Cour centrale) et devant la juridiction de renvoi.
( 6 ) La réglementation nationale en vigueur prévoyait deux tranches d’imposition, à savoir, d’une part, une tranche nationale, dont le taux était uniforme sur l’ensemble du territoire national, et, d’autre part, une tranche régionale additionnelle, dont le taux était fixé par chaque communauté autonome pour les huiles minérales consommées sur son territoire.
( 7 ) La requérante ainsi que la Commission soutiennent que le Royaume d’Espagne a abrogé la disposition de l’article 50 ter de la loi sur les accises à la suite du dialogue mené entre cet État membre et la Commission, au cours duquel cette dernière lui aurait fait part des doutes qu’elle nourrissait quant à la compatibilité de ce taux régional différencié avec la directive 2003/96.
( 8 ) Selon les observations de la Commission, en vertu de la nouvelle réglementation nationale, un seul taux d’accises sur les huiles minérales est appliqué et les recettes sont réparties entre l’État (42 %) et les communautés autonomes (58 %).
( 9 ) Arrêt du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano (C‑513/18, EU:C:2020:59, point 30 et jurisprudence citée), ainsi que mes conclusions dans l’affaire RWE Power (C‑571/21, EU:C:2022:780, point 25).
( 10 ) Voir, en ce sens, considérant 4 de la directive 2003/96 et conclusions de l’avocat général Richard de la Tour dans l’affaire Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants) (C‑63/19, EU:C:2020:596, point 78).
( 11 ) Voir arrêt du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano (C‑513/18, EU:C:2020:59, point 26).
( 12 ) Voir arrêt du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano (C‑513/18, EU:C:2020:59, point 28 et jurisprudence citée).
( 13 ) Voir arrêts du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano (C‑513/18, EU:C:2020:59, point 26), et du 14 janvier 2021, Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants) (C‑63/19, EU:C:2021:18, point 75 ainsi que jurisprudence citée).
( 14 ) Une lecture des différentes versions linguistiques de la directive 2003/96 semble confirmer que l’article 5 de cette directive contient une liste exhaustive des cas dans lesquels les États membres peuvent créer des taux de taxation différenciés pour un même produit. Il convient de noter, à cet égard, qu’il ne semble pas y avoir de différences significatives dans les différentes versions linguistiques de cette disposition en ce qui concerne l’utilisation des termes « dans les cas suivants »
qui ont été traduits par « in den folgenden Fällen » dans sa version en langue allemande, « στις ακόλουθες περιπτώσεις» dans sa version en langue grecque, « in the following cases » dans sa version en langue anglaise, ou encore « nei seguenti casi » dans sa version en langue italienne.
( 15 ) Mise en italique par mes soins.
( 16 ) Voir, en ce sens, arrêts du 2 juin 2016, ROZ-ŚWIT (C‑418/14, EU:C:2016:400, point 29), et du 16 novembre 2023, Tüke Busz (C‑391/22, EU:C:2023:892, point 47). Si, au point 23 de son arrêt du 22 décembre 2022, Shell Deutschland Oil (C‑553/21, EU:C:2022:1030), la Cour a utilisé l’expression « dans certains cas énumérés à cet article » sans utiliser le terme « limitativement », ce dernier a été repris au point 47 de son récent arrêt du 16 novembre 2023, Tüke Busz (C‑391/22, EU:C:2023:892). Mise
en italique par mes soins.
( 17 ) Voir, en ce sens, les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 25 octobre 2012, Commission/France (C‑164/11, EU:C:2012:665), et du 14 janvier 2021, Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants) (C‑63/19, EU:C:2021:18).
( 18 ) Il ressort, toutefois, des constatations effectuées par l’avocat général Richard de la Tour, au point 80 de ses conclusions dans cette affaire, qu’il était « constant entre les parties [y compris le Royaume d’Espagne qui était intervenu au soutien de la République italienne] que la directive 2003/96 impose le respect d’un niveau de taxation minimal et unique par produit et par usage sur l’ensemble du territoire d’un même État membre » (C‑63/19, EU:C:2020:596).
( 19 ) Voir, en ce sens, arrêt du 16 novembre 2023, Tüke Busz (C‑391/22, EU:C:2023:892, points 46 et 47).
( 20 ) Voir, en ce sens, décision d’exécution 2011/38/UE du Conseil, du 18 janvier 2011, autorisant la France à appliquer des niveaux de taxation différenciés sur les carburants, conformément à l’article 19 de la directive 2003/96/CE (JO 2011, L. 19, p. 13) ; décision d’exécution 2013/193/UE du Conseil, du 22 avril 2013, autorisant la République française à appliquer des niveaux différenciés de taxation aux carburants, en vertu de l’article 19 de la directive 2003/96/CE (JO 2013, L 113, p. 15), et
décision d’exécution 2016/358/UE du Conseil, du 8 mars 2016, autorisant la République française à appliquer des niveaux réduits de taxation à l’essence et au gazole utilisés comme carburants en vertu de l’article 19 de la directive 2003/96/CE (JO 2016, L 67, p. 35).
( 21 ) Le gouvernement espagnol soutient que le système mis en place, qui repose sur les principes d’autonomie et de coresponsabilité fiscale, dote les communautés autonomes du pouvoir de décider du niveau de certaines formes d’imposition, et que le taux régional de l’IEH financerait les compétences des communautés autonomes, qui incluent la gestion des services publics essentiels de la santé, de l’éducation et des services sociaux.
( 22 ) Arrêt du 21 décembre 2016, Remondis (C‑51/15, EU:C:2016:985, point 40 et jurisprudence citée).
( 23 ) Arrêt du 16 juillet 2009, Horvath (C‑428/07, EU:C:2009:458, point 50 et jurisprudence citée).
( 24 ) Voir, en ce sens, points 43 à 46 des présentes conclusions.
( 25 ) Le gouvernement espagnol se réfère à cet égard aux considérants 9 et 10 de la directive 2003/96, ainsi qu’à l’article 4 de celle-ci.
( 26 ) Ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, points 21 et 22).
( 27 ) Voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 2023, Endesa Generación (C‑833/21, EU:C:2023:516, point 46), et mes conclusions dans l’affaire f6 Cigarettenfabrik (C‑336/22, EU:C:2023:718, points 49 à 51).
( 28 ) Voir arrêt du 9 septembre 2021, Hauptzollamt B (Réduction fiscale facultative) (C‑100/20, EU:C:2021:716, points 31 à 34).
( 29 ) Voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2021, Hauptzollamt B (Réduction fiscale facultative) (C‑100/20, EU:C:2021:716, point 31 et jurisprudence citée), et conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Hauptzollamt B (Réduction fiscale facultative) (C‑100/20, EU:C:2021:387, points 73 et 74).
( 30 ) Arrêts du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano (C‑513/18, EU:C:2020:59, point 37 et jurisprudence citée), et du 9 septembre 2021, Hauptzollamt B (Réduction fiscale facultative) (C‑100/20, EU:C:2021:716, points 32 à 34).