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06/03/2025 | CJUE | N°C-41/24

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Waltham Abbey Residents Association contre An Bord Pleanála e.a., 06/03/2025, C-41/24


 ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

6 mars 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2011/92/UE – Évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement – Article 2, paragraphe 1, et article 4, paragraphe 2 – Projets relevant de l’annexe II – Travaux d’aménagement urbain – Article 4, paragraphes 4 et 5 – Obligations du maître d’ouvrage et de l’autorité compétente lorsque l’État membre concerné décide d’exiger la détermination prévue à ces paragraphes 4 et 5

pour de tels projets – Prise en compte des
observations soumises par un tiers, faisant état d’un impact potentiel du projet co...

 ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

6 mars 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2011/92/UE – Évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement – Article 2, paragraphe 1, et article 4, paragraphe 2 – Projets relevant de l’annexe II – Travaux d’aménagement urbain – Article 4, paragraphes 4 et 5 – Obligations du maître d’ouvrage et de l’autorité compétente lorsque l’État membre concerné décide d’exiger la détermination prévue à ces paragraphes 4 et 5 pour de tels projets – Prise en compte des
observations soumises par un tiers, faisant état d’un impact potentiel du projet concerné sur une espèce animale relevant de la protection stricte prévue à l’article 12 de la directive 92/43/CEE »

Dans l’affaire C‑41/24,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la High Court (Haute Cour, Irlande), par décision du 1er décembre 2023, parvenue à la Cour le 22 janvier 2024, dans la procédure

Waltham Abbey Residents Association

contre

An Bord Pleanála,

Ireland,

The Attorney General,

en présence de :

O’Flynn Construction Co. Unlimited Company,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. D. Gratsias, président de chambre, MM. J. Passer (rapporteur) et B. Smulders, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour Waltham Abbey Residents Association, par M. J. Devlin, SC, M. J. Kenny, BL, et M. D. Healy, solicitor,

– pour An Bord Pleanála, par M. B. Foley, SC, Mme A. Carroll, BL, et M. P. Reilly, solicitor,

– pour l’Irlande, par Mme M. Browne, Chief State Solicitor, Mmes S. Finnegan, K. Hoare et M. A. Joyce, en qualité d’agents, assistés de M. D. McGrath, SC, M. F. Valentine, SC, et Mme E. O’Callaghan, BL,

– pour la Commission européenne, par MM. M. Noll-Ehlers et N. Ruiz García, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO 2012, L 26, p. 1), telle que modifiée par la directive 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014 (JO 2014, L 124, p. 1) (ci-après la « directive 2011/92 »).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Waltham Abbey Residents Association, une association de résidents, à l’An Bord Pleanála (Agence d’aménagement du territoire, Irlande) (ci-après l’« agence »), à l’Ireland (Irlande) et à l’Attorney General (procureur général, Irlande) au sujet d’une autorisation, accordée par l’agence, concernant un projet d’aménagement stratégique pour la construction de logements résidentiels.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2011/92

3 Les considérants 7 à 9 de la directive 2011/92 énoncent :

« (7) L’autorisation des projets publics et privés susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ne devrait être accordée qu’après évaluation des incidences notables que ces projets sont susceptibles d’avoir sur l’environnement. [...]

(8) Les projets appartenant à certaines classes ont des incidences notables sur l’environnement et ces projets devraient en principe être soumis à une évaluation systématique.

(9) Des projets appartenant à d’autres classes n’ont pas nécessairement des incidences notables sur l’environnement dans tous les cas et ces projets devraient être soumis à une évaluation lorsque les États membres considèrent qu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement. »

4 L’article 2, paragraphe 1, de cette directive prévoit :

« Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences sur l’environnement. Ces projets sont définis à l’article 4. »

5 Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive :

« L’évaluation des incidences sur l’environnement identifie, décrit et évalue de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d’un projet sur les facteurs suivants :

[...]

b) la biodiversité, en accordant une attention particulière aux espèces et aux habitats protégés au titre de la directive 92/43/CEE [du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7), telle que modifiée par la directive 2013/17/UE du Conseil, du 13 mai 2013 (JO 2013, L 158, p. 193) (ci-après la “directive 92/43”),] et de la directive 2009/147/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009,
concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO 2010, L 20, p. 7)] ;

[...] »

6 L’article 4 de la directive 2011/92 dispose :

« 1.   Sous réserve de l’article 2, paragraphe 4, les projets énumérés à l’annexe I sont soumis à une évaluation, conformément aux articles 5 à 10.

2.   Sous réserve de l’article 2, paragraphe 4, pour les projets énumérés à l’annexe II, les États membres déterminent si le projet doit être soumis à une évaluation conformément aux articles 5 à 10. Les États membres procèdent à cette détermination :

a) sur la base d’un examen cas par cas ;

ou

b) sur la base des seuils ou critères fixés par l’État membre.

Les États membres peuvent décider d’appliquer les deux procédures visées aux points a) et b).

3.   Pour l’examen au cas par cas ou la fixation des seuils ou critères en application du paragraphe 2, il est tenu compte des critères de sélection pertinents fixés à l’annexe III. Les États membres peuvent fixer des seuils ou des critères pour déterminer quand les projets n’ont pas à être soumis à la détermination prévue aux paragraphes 4 et 5 ou à une évaluation des incidences sur l’environnement, et/ou des seuils ou des critères pour déterminer quand les projets font l’objet, en tout état de
cause, d’une évaluation des incidences sur l’environnement sans être soumis à la détermination prévue aux paragraphes 4 et 5.

4.   Lorsque les États membres décident d’exiger une détermination pour les projets énumérés à l’annexe II, le maître d’ouvrage fournit des informations sur les caractéristiques du projet et sur les incidences notables qu’il est susceptible d’avoir sur l’environnement. La liste détaillée des informations à fournir est indiquée à l’annexe II.A. Le maître d’ouvrage tient compte, le cas échéant, des résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement réalisées en
vertu d’actes législatifs de l’Union autres que la présente directive. Le maître d’ouvrage peut également fournir une description de toutes les caractéristiques du projet et/ou les mesures envisagées pour éviter ou prévenir ce qui aurait pu, à défaut, constituer des incidences négatives notables sur l’environnement.

5.   L’autorité compétente procède à sa détermination sur la base des informations fournies par le maître d’ouvrage conformément au paragraphe 4 en tenant compte, le cas échéant, des résultats des vérifications préliminaires ou des évaluations des incidences sur l’environnement réalisées en vertu d’actes législatifs de l’Union autres que la présente directive. La détermination est mise à la disposition du public et :

a) indique, lorsqu’il a été décidé qu’une évaluation des incidences sur l’environnement était nécessaire, les raisons principales de la décision d’exiger une telle évaluation au regard des critères pertinents énumérés à l’annexe III ; ou

b) indique, lorsqu’elle dispose qu’une évaluation des incidences sur l’environnement n’est pas nécessaire, les principales raisons de ne pas exiger une telle évaluation par rapport aux critères applicables figurant à l’annexe III, ainsi que, sur proposition du maître d’ouvrage, toutes les caractéristiques du projet et/ou les mesures envisagées pour éviter ou prévenir ce qui aurait pu, à défaut, constituer des incidences négatives notables sur l’environnement.

6.   Les États membres veillent à ce que l’autorité compétente procède à sa détermination aussi rapidement que possible et dans un délai ne dépassant pas 90 jours à partir de la date à laquelle le maître d’ouvrage a présenté toutes les informations requises en vertu du paragraphe 4. Dans des cas exceptionnels, par exemple liés à la nature, à la complexité, à la localisation ou à la dimension du projet, l’autorité compétente peut prolonger ce délai pour procéder à sa détermination ; dans ce cas,
l’autorité compétente informe par écrit le maître d’ouvrage des raisons justifiant la prolongation et de la date à laquelle elle prévoit de procéder à sa détermination. »

7 L’annexe II.A de cette directive comprend la liste des « [i]nformations à fournir par le maître d’ouvrage sur les projets figurant à l’annexe II ». Elle est ainsi libellée :

« 1. Une description du projet, y compris en particulier :

a) une description des caractéristiques physiques de l’ensemble du projet et, le cas échéant, des travaux de démolition ;

b) une description de la localisation du projet, en accordant une attention particulière à la sensibilité environnementale des zones géographiques susceptibles d’être affectées.

2. Une description des éléments de l’environnement susceptibles d’être affectés de manière notable par le projet.

3. Une description de tous les effets notables, dans la mesure des informations disponibles sur ces effets, que le projet est susceptible d’avoir sur l’environnement résultant :

a) des résidus et des émissions attendus ainsi que de la production de déchets, le cas échéant ;

b) de l’utilisation des ressources naturelles, en particulier le sol, les terres, l’eau et la biodiversité.

4. Il est tenu compte des critères de l’annexe III, le cas échéant, lors de la compilation des informations conformément aux points 1 à 3. »

8 L’annexe III de cette directive prévoit les « [c]ritères visant à déterminer si les projets figurant à l’annexe II devraient faire l’objet d’une évaluation des incidences sur l’environnement ».

La directive 2014/52

9 Aux termes des considérants 11 et 29 de la directive 2014/52 :

« (11) Les mesures prises afin d’éviter, de prévenir, de réduire et, si possible, de compenser les incidences négatives notables sur l’environnement, en particulier sur les espèces et les habitats protégés en vertu de la [directive 92/43] et de la directive [2009/147], devraient contribuer à éviter toute détérioration de la qualité de l’environnement et toute perte nette de biodiversité, conformément aux engagements pris par l’Union [européenne] dans le contexte de la convention [des Nations unies
sur la diversité biologique, signée à Rio de Janeiro le 5 juin 1992,] et aux objectifs et aux actions de la stratégie de l’Union en faveur de la biodiversité à l’horizon 2020 établis dans la communication de la Commission [au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions] du 3 mai 2011 intitulée “La biodiversité, notre assurance-vie et notre capital naturel – Stratégie de l’Union européenne à l’horizon 2020” ([COM(2011) 244 final]).

[...]

(29) Pour déterminer si des incidences notables sur l’environnement sont susceptibles d’être causées par un projet, il convient que les autorités compétentes définissent les critères les plus pertinents à prendre en compte et tiennent compte des informations pouvant être obtenues à la suite d’autres évaluations requises par la législation de l’Union en vue d’appliquer la procédure de vérification préliminaire de manière efficace et transparente. À cet égard, il y a lieu de préciser le contenu de
la détermination réalisée dans le cadre de la vérification préliminaire, en particulier lorsque aucune évaluation des incidences sur l’environnement n’est requise. En outre, il est de bonne pratique administrative de tenir compte des observations spontanées susceptibles de parvenir d’autres sources, telles que des particuliers ou des autorités publiques, même s’il n’est pas obligatoire au stade de la vérification préliminaire de procéder à des consultations officielles. »

La directive 92/43

10 L’article 6, paragraphe 3, de la directive 92/43 dispose :

« Tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d’affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d’autres plans et projets, fait l’objet d’une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux objectifs de conservation de ce site. Compte tenu des conclusions de l’évaluation des incidences sur le site et sous réserve des dispositions du paragraphe 4, les autorités nationales compétentes ne marquent
leur accord sur ce plan ou projet qu’après s’être assurées qu’il ne portera pas atteinte à l’intégrité du site concerné et après avoir pris, le cas échéant, l’avis du public. »

11 L’article 12, paragraphe 1, de cette directive prévoit :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant :

a) toute forme de capture ou de mise à mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature ;

b) la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d’hibernation et de migration ;

c) la destruction ou le ramassage intentionnels des œufs dans la nature ;

d) la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos. »

12 L’annexe IV, point a), de ladite directive mentionne « [t]outes les espèces » de chauves-souris appartenant au sous-ordre des « microchiroptera ».

Le droit irlandais

Le règlement de 2001 sur l’aménagement et le développement

13 L’article 109 des Planning and Development Regulations 2001 (règlement de 2001 sur l’aménagement et le développement), dans sa version applicable au litige au principal, dispose :

« [...]

(2B) (a) Lorsqu’une demande pour un aménagement se situant en dessous du seuil fixé n’est pas accompagnée d’un rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement, mais est accompagnée des informations spécifiées dans l’annexe 7A et au paragraphe (2A), ou lorsqu’un demandeur soumet ces informations à l’agence conformément à une exigence posée en vertu du paragraphe (2)(b)(ii), l’agence procède à un examen, au moins, de la nature, de la dimension ou de la localisation du projet aux fins de
l’examen.

(b) L’agence procède à une détermination dans le cadre de la vérification préliminaire et

(i) si elle détermine qu’il n’y a pas de probabilité réelle d’incidences notables sur l’environnement résultant du projet proposé, elle décide qu’une évaluation des incidences sur l’environnement n’est pas nécessaire, ou

(ii) si elle détermine qu’il y a une probabilité réelle d’incidences notables sur l’environnement résultant du projet proposé, elle

(I) constate que ce projet est susceptible d’avoir de telles incidences, et

(II) par un avis écrit notifié au demandeur, lui demande de lui présenter une évaluation des incidences sur l’environnement et de se conformer aux exigences de l’article 112.

[...]

(4) (a) En procédant à sa détermination dans le cadre de la vérification préliminaire au titre du paragraphe (2B) pour déterminer s’il y a ou non une probabilité réelle d’incidences notables sur l’environnement résultant de l’aménagement proposé, l’agence tient compte

(i) des critères posés dans l’annexe 7,

(ii) des informations présentées conformément à l’annexe 7A,

(iii) des informations supplémentaires, s’il y en a, mentionnées au paragraphe (2A)(a) et de la description, s’il y en a, mentionnée au paragraphe (2A)(b),

(iv) des résultats disponibles, lorsqu’ils sont pertinents, des vérifications préliminaires ou des évaluations des incidences sur l’environnement réalisées en vertu d’actes législatifs de l’Union autres que la [directive 2011/92], et

(v) des incidences notables sur un site, une zone, un espace, un lieu ou un élément dans la mesure appropriée en ce qui concerne un projet qui se trouverait sur ou dans, ou avoir un impact potentiel sur

(I) un site européen,

(II) une zone objet d’une communication au titre de l’article 16(2)(b) du Wildlife (Amendment) Act 2000 (No. 38 of 2000) [loi no 38 de 2000 sur la faune et la flore (modification)],

(III) une zone désignée comme une zone de patrimoine naturel en vertu de l’article 18 de la loi no 38 de 2000 sur la faune et la flore (modification),

(IV) des terres établies ou reconnues comme une réserve naturelle, au sens des articles 15 ou 16 du Wildlife Act 1976 (No. 39 of 1976) (loi no 39 de 1976 sur la faune et la flore),

(V) des terres désignées comme un refuge pour la faune ou la flore en vertu de l’article 17 de la loi no 39 de 1976 sur la faune et la flore,

(VI) un espace, un site ou élément d’intérêt écologique dont la préservation, la conservation ou la protection est un objectif d’un plan d’aménagement ou d’un plan local d’urbanisme, d’un projet de plan d’aménagement ou d’un projet de plan local d’urbanisme, ou d’une variation proposée du plan d’aménagement pour la zone dans laquelle l’aménagement est proposé, ou

(VII) un plan ou site qui a été inclus par le ministre de la Culture, de l’Héritage et du Gaeltacht dans une liste proposée de zones de patrimoine national publiée sur le site Internet du service des parcs nationaux et de la vie sauvage.

(b) La détermination réalisée par l’agence dans le cadre de la vérification préliminaire en vertu du paragraphe (2B), quant au point de savoir s’il y a ou non, selon le cas, une probabilité réelle d’incidences notables sur l’environnement résultant du projet d’aménagement, y compris les principales raisons et considérations au regard des critères pertinents énumérés dans l’annexe 7 sur lesquelles cette détermination est fondée, et toute notification en vertu du paragraphe (2C)(c), sont
placées et conservées avec les documents relatifs à la demande d’aménagement.

(5) Lorsque la détermination réalisée dans le cadre de la vérification préliminaire en vertu du paragraphe (2B) indique que l’aménagement proposé n’est pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement et que le demandeur a fourni, en vertu du paragraphe (2A)(b), une description des éléments, s’il y en a, de l’aménagement proposé et des mesures, s’il y en a, envisagées pour éviter ou prévenir ce qui aurait pu autrement constituer des incidences négatives notables sur
l’environnement, l’agence précise ces éléments, s’il y en a, et ces mesures, s’il y en a, dans cette détermination.

[...] »

14 L’article 299B, paragraphe 2, de ce règlement prévoit :

« (b) (i) Lorsque les informations visées au paragraphe (1)(b)(ii)(II) ont été fournies par le demandeur, l’agence procède à un examen, au minimum, de la nature, de la dimension ou de la localisation de l’aménagement aux fins d’une détermination réalisée dans le cadre de la vérification préliminaire.

(ii) L’agence procède à une détermination réalisée dans le cadre de la vérification préliminaire et

(I) si elle détermine qu’il n’y a pas de probabilité réelle d’incidences notables sur l’environnement résultant de l’aménagement proposé, elle décide qu’une évaluation des incidences sur l’environnement n’est pas nécessaire, ou

(II) si elle détermine qu’il y a une probabilité réelle d’incidences notables résultant de l’aménagement proposé, elle

(A) constate que l’aménagement aurait probablement de telles incidences, et

(B) refuse d’interagir avec le demandeur conformément à l’article 8(3)(a) du Planning and Development (Housing and Residential Tenancies) Act 2016 [loi de 2016 sur la planification et le développement (logement) et les locations résidentielles (ci-après la “loi de 2016”)]. »

La loi de 2016

15 L’article 8, paragraphe 3, de la loi de 2016 est ainsi libellé :

« (a) L’agence peut décider de refuser de donner suite à une demande présentée en vertu de l’article 4(1) lorsqu’elle estime que le demandeur d’une autorisation, ou le rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement ou la déclaration d’incidences Natura si tel est le cas, est insuffisant ou incomplet, compte tenu notamment des règlements d’autorisation et de toute réglementation prise en vertu de l’article 12 ou de l’article 177 du [Planning and Development Act 2000 (loi de 2000 sur
l’aménagement du territoire et le développement)], ou de toute consultation menée au titre de l’article 6.

[...] »

16 L’article 9 de la loi de 2016 prévoit, à son paragraphe 5 :

« Lorsque l’agence n’a pas exercé ses fonctions en vertu de l’article 8(3) pour refuser de donner suite à une demande, aucune disposition de ce paragraphe ne doit être interprétée comme empêchant l’agence de refuser d’accorder une autorisation pour un projet d’aménagement stratégique de logements en ce qui concerne une demande au titre de l’article 4 lorsqu’elle estime que l’aménagement du type proposé serait prématuré en raison du caractère inadéquat ou incomplet du rapport d’évaluation des
incidences sur l’environnement ou de la déclaration d’incidences Natura soumis avec la demande d’autorisation, si cela est nécessaire ».

Le litige au principal et les questions préjudicielles

17 Le litige au principal concerne un projet d’aménagement stratégique pour la construction de 123 appartements et les travaux qui y sont relatifs, à Ballincollig (Irlande).

18 En vue de la demande d’autorisation de ce projet, une étude des arbres a été effectuée et deux rapports d’examen préalable ont été préparés au nom du maître d’ouvrage, le premier aux fins de l’évaluation des incidences dudit projet sur l’environnement visée par la directive 2011/92 (ci-après l’« EIE ») et le second aux fins de l’évaluation appropriée des incidences du même projet sur les sites désignés comme étant des zones spéciales de conservation ou des zones de protection spéciale, prévue à
l’article 6, paragraphe 3, de la directive 92/43.

19 Le premier rapport ne comporte pas d’analyse particulière de la faune et de la flore, ne fait pas référence à l’impact du même projet sur les chauves-souris et le tableau d’évaluation qu’il comprend ne fait pas référence à la biodiversité. Dans le second rapport, il n’y aurait pas non plus de mention particulière de l’impact effectif de celui-ci sur les chauves-souris, ce second rapport ne comprenant qu’une référence générale au fait que « les perturbations causées à la faune peuvent résulter,
directement de la perte d’habitat (par exemple les nichoirs à chauve-souris), ou indirectement du bruit, des vibrations et de l’accroissement d’activités associés à la construction et à l’exploitation ». La seule référence à la biodiversité se trouverait dans ledit second rapport, lequel ferait toutefois uniquement référence aux sites Natura 2000 plutôt qu’à l’écosystème du site d’aménagement lui‑même.

20 Quant à l’évaluation arboricole, celle-ci a été réalisée pendant une seule journée et a identifié treize arbres qui devaient être abattus. Dans le cadre de cette évaluation, l’utilisation effective ou potentielle des arbres par les chauves-souris ou la question de savoir si le site concerné était utilisé par celles-ci pour la recherche de nourriture ou les déplacements n’auraient pas été prises en considération. Cependant, alors que le rapport d’examen préalable relatif à l’EIE proposerait la
conservation de la végétation existante sur ce site « dans la mesure du possible » et affirmerait que son amélioration par de nouvelles mesures d’aménagement paysager conduirait à un impact positif du projet en cause au principal sur la biodiversité, un certain nombre d’arbres seraient en fait abattus, dont un certain nombre de cyprès et deux des six chênes présents sur ledit site.

21 Le 7 juillet 2020, la requérante au principal a présenté à l’agence des observations indiquant que le site d’aménagement proposé était situé à proximité immédiate d’un couloir biologique sur la rivière Lee, rapportant des observations visuelles de chauves-souris sur le même site et signalant, en se fondant sur une étude de la faune des chauves-souris réalisée en 2016, notamment, que « [l]es relevés actuels des chauves-souris dans les parages immédiats [indiquaient] qu’il existe une variété
d’espèces diverses de chauves-souris qui utilisent le couloir riverain et [que] les impacts décisifs sur ces animaux [découlaient] de la perte potentielle de nichoirs, de la perte de zones d’alimentation et de la perturbation des itinéraires de déplacement ».

22 Le 11 septembre 2020, l’examinateur a recommandé l’octroi d’une autorisation. Il a estimé que, de manière générale, le site concerné n’offrait pas d’habitats adéquats pour les animaux sauvages ou les espèces dignes de conservation, mais a affirmé que l’abattage des arbres devait être réalisé conformément aux conseils d’un écologue dûment qualifié afin d’éviter un impact potentiel du projet en cause au principal sur les chauves-souris. L’examinateur n’a pas procédé à un examen préalable relatif à
l’EIE, écartant la nécessité d’un tel examen préalable après une étude préliminaire.

23 Par une décision du 16 septembre 2020, l’agence a autorisé ce projet sans avoir exigé une EIE et sans avoir recueilli d’autres informations concernant la présence de chauves-souris. En effet, sur la base de son propre examen préalable relatif à la nécessité de soumettre le projet à une EIE, elle a considéré que « le rapport à ce sujet, présenté par le maître d’ouvrage, [identifiait] et [décrivait] adéquatement les effets directs, indirects et cumulatifs de l’aménagement proposé sur
l’environnement » et a conclu que, « du fait de la nature, des dimensions et de la localisation du site concerné, l’aménagement proposé n’aurait probablement pas d’incidences notables sur l’environnement ». Aucune information supplémentaire n’a été demandée au maître d’ouvrage à la suite des observations de la requérante au principal. Cependant, conformément à une recommandation formulée par l’examinateur, l’autorisation ainsi accordée comporte la condition suivante :

« 21. Les arbres à enlever sur le site doivent être abattus à la fin de l’été ou à l’automne. Toute nuisance subie par les chauves-souris sur le site doit avoir lieu d’une manière à convenir par écrit avec l’autorité compétente en matière d’urbanisme, sur l’avis d’un écologue qualifié.

Motifs : Dans l’intérêt de la préservation de la nature. »

24 Saisie par la requérante au principal d’un recours contre cette décision, la High Court (Haute Cour, Irlande), qui est la juridiction de renvoi, s’interroge, en premier lieu, sur le point de savoir si la directive 2011/92 exige, notamment, que le maître d’ouvrage recueille toutes les informations pertinentes sur les espèces ou habitats qui pourraient être affectés par le projet concerné en réalisant ou en recueillant des études scientifiques adéquates pour écarter tout doute quant à des
incidences notables de celui-ci sur de telles espèces ou de tels habitats. Elle s’interroge, en outre, sur les obligations qui s’imposent, le cas échéant, au maître d’ouvrage et à l’autorité compétente dans l’hypothèse où une partie tierce fournit à cette dernière des informations supplémentaires objectivement de nature à faire naître un doute quant aux incidences de ce projet sur l’environnement.

25 À cet égard, la juridiction de renvoi se demande quel est le seuil à appliquer, à savoir si l’agence doit écarter tout doute raisonnable quant aux incidences notables dudit projet sur l’environnement ou simplement adopter une décision « raisonnable » sur le fondement des documents dont elle dispose. Selon cette juridiction, si une décision d’exclure la nécessité d’une EIE dépend de l’exclusion de tout doute raisonnable, la décision de ne pas procéder à une EIE dans le cas d’espèce serait
illégale. En revanche, il y aurait des facteurs qui rendraient la décision de l’agence raisonnable si le test portait simplement sur le caractère raisonnable d’une telle décision plutôt que sur l’exclusion de tout doute.

26 En second lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’incidence, sur les aspects visés aux points 24 et 25 du présent arrêt, du fait que les doutes soulevés dans les observations de la requérante au principal du 7 juillet 2020 concernent des espèces relevant de la protection stricte prévue à l’article 12 de la directive 92/43.

27 Dans ces conditions, la High Court (Haute Cour) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’article 4, paragraphe 4, et/ou le point 3 de l’annexe II.A de la [directive 2011/92] et interprétée à l’aune du principe de précaution, ont-ils pour effet, dans une affaire où des informations au titre de cette annexe doivent être fournies et où l’autorité compétente dispose de documents d’après lesquels une espèce ou un habitat pourraient être affectés par un projet, que le maître d’ouvrage concerné devrait recueillir toutes les informations pertinentes sur les espèces ou habitats qui
pourraient être affectés par ce projet en réalisant ou en recueillant des études scientifiques adéquates pour écarter tout doute quant à des incidences notables sur de telles espèces ou de tels habitats, et que, en l’absence de résultats de telles études, l’autorité compétente devrait être informée de l’absence d’informations suffisantes pour exclure tout doute quant au point de savoir si ledit projet aura des incidences notables sur l’environnement et être tenue d’agir sur le fondement de
cette circonstance ?

2) L’article 4, paragraphe 4, et/ou le point 3 de l’annexe II.A de la [directive 2011/92] et interprétée à l’aune du principe de précaution, ont-ils pour effet, dans une affaire où des informations au titre de cette annexe devraient être fournies, que l’autorité compétente est tenue de lever tout doute quant à la possibilité d’incidences notables d’un projet sur l’environnement si elle propose de ne pas soumettre ce projet à une évaluation en vertu des articles 5 à 10 de cette directive, et où
donc ledit projet devrait être soumis à une évaluation en vertu des articles 5 à 10 de ladite directive lorsque, au cours d’une détermination en vertu de l’article 4, paragraphe 2, de la même directive, une autorité compétente n’a objectivement pas suffisamment d’informations pour exclure tout doute quant au point de savoir si le même projet aura des incidences notables sur l’environnement ?

3) Dans l’hypothèse où il serait en général répondu à la première question par la négative, les conséquences mentionnées se produisent-elles dans la mesure où les incidences notables potentielles sur l’environnement concernent des espèces qui pourraient être affectées par le projet concerné lorsque de telles espèces ont droit à une protection stricte en vertu de l’article 12 de la [directive 92/43], eu égard notamment à l’importance de telles espèces telle que reconnue à l’article 3,
paragraphe 1, sous b), de la [directive 2011/92] et au considérant 11 de la directive [2014/52 ?

4) L’article 4, paragraphe 4, et/ou le point 3 de l’annexe II.A de la [directive 2011/92] et interprétée à l’aune du principe de précaution, ont-ils pour effet que, si, à la suite de la fourniture par le maître d’ouvrage d’informations en vertu de cette annexe, une autre partie fournit à l’autorité compétente des informations supplémentaires objectivement de nature à faire naître un doute quant aux incidences du projet concerné sur l’environnement, soit le maître d’ouvrage est tenu de fournir des
informations supplémentaires à l’autorité compétente excluant un tel doute ou d’informer l’autorité compétente de l’absence de ces informations, soit l’autorité compétente est elle-même tenue de recueillir des informations supplémentaires qui excluraient un tel doute ou de déterminer que l’évaluation en vertu des articles 5 à 10 de la [directive 2011/92] est nécessaire en l’absence d’informations suffisantes pour exclure tout doute quant au point de savoir si ce projet aurait des incidences
notables sur l’environnement ?

5) Dans l’hypothèse où il serait en général répondu à la quatrième question par la négative, les conséquences mentionnées se produisent-elles dans la mesure où les incidences notables potentielles du projet concerné sur l’environnement concernent des espèces qui pourraient être affectées par ce projet lorsque de telles espèces ont droit à une protection stricte en vertu de l’article 12 de la [directive 92/43], eu égard notamment à l’importance de telles espèces telle que reconnue à l’article 3,
paragraphe 1, sous b), de la [directive 2011/92] et au considérant 11 de la directive [2014/52] ? »

Sur les questions préjudicielles

28 Par ses questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 4, paragraphes 4 à 6, de la directive 2011/92 doit être interprété en ce sens que, dans l’hypothèse où, dans le cadre d’une procédure de vérification préliminaire menée au titre de cette disposition, une partie tierce a fourni à l’autorité compétente des informations objectivement de nature à faire naître un doute quant aux incidences notables potentielles de ce projet sur
l’environnement, en particulier sur une espèce protégée au titre de la directive 92/43, le maître d’ouvrage ou, le cas échéant, l’autorité compétente elle-même doit recueillir toutes les informations pertinentes pour écarter tout doute quant à ces incidences et que cette autorité doit décider qu’une EIE est nécessaire si un tel doute ne peut pas être exclu.

29 Il convient de rappeler que l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2011/92 impose que les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, au sens de l’article 4 de celle‑ci, lu en combinaison avec les annexes I ou II de cette directive, soient soumis à une EIE avant l’octroi de l’autorisation (arrêt du 28 février 2018, Comune di Castelbellino, C‑117/17, EU:C:2018:129, point 24 et jurisprudence citée).

30 L’article 4, paragraphe 1, de la directive 2011/92 précise que, sous réserve de l’article 2, paragraphe 4, de cette directive, les projets énumérés à l’annexe I de celle-ci sont soumis à évaluation, conformément aux articles 5 à 10 de ladite directive. Ces projets sont ainsi considérés comme présentant nécessairement un risque d’incidences notables sur l’environnement.

31 Pour les projets énumérés à l’annexe II de la directive 2011/92, l’article 4, paragraphe 2, de celle-ci prévoit que les États membres déterminent si le projet concerné doit être soumis à une EIE sur la base d’un examen au cas par cas ou sur la base des seuils ou des critères fixés par l’État membre concerné ou encore, le cas échéant, sur la base des deux procédures. Ainsi qu’il ressort d’une lecture combinée de cette disposition et du considérant 9 de cette directive, ces projets n’ont pas
nécessairement des incidences notables sur l’environnement dans tous les cas, de sorte qu’ils ne devraient être soumis à une évaluation que si les États membres considèrent qu’ils sont susceptibles d’avoir de telles incidences.

32 À cet égard, l’article 4, paragraphe 3, de la directive 2011/92 précise que les États membres peuvent fixer des seuils ou des critères pour déterminer quand les projets n’ont pas à être soumis à la détermination prévue aux paragraphes 4 et 5 de cet article ou à une EIE, et/ou des seuils ou des critères pour déterminer quand les projets font l’objet, en tout état de cause, d’une EIE sans être soumis à la détermination prévue à ces paragraphes 4 et 5.

33 Enfin, lorsque les États membres décident d’exiger une telle détermination, lesdits paragraphes 4 et 5 prévoient une procédure de vérification préliminaire qui se déroule de la manière suivante.

34 Premièrement, le maître d’ouvrage fournit des informations sur les caractéristiques du projet concerné et sur les incidences notables que ce dernier est susceptible d’avoir sur l’environnement. La liste détaillée des informations à fournir est indiquée à l’annexe II.A de la directive 2011/92. Ces informations doivent inclure une description des éléments de l’environnement susceptibles d’être affectés de manière notable par le projet ainsi qu’une description de tous les effets notables, dans la
mesure des informations disponibles sur ces effets, que le projet est susceptible d’avoir sur l’environnement. Le maître d’ouvrage peut également fournir une description de toutes les caractéristiques du projet et/ou les mesures envisagées pour éviter ou prévenir ce qui aurait pu, à défaut, constituer des incidences négatives notables sur l’environnement.

35 Deuxièmement, l’autorité compétente procède à sa détermination sur la base des informations ainsi fournies par le maître d’ouvrage, en tenant compte des critères de sélection pertinents fixés à l’annexe III de la directive 2011/92.

36 Dans ce cadre, il est également tenu compte, le cas échéant, d’une part, par le maître d’ouvrage, des résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences du projet concerné sur l’environnement réalisées en vertu d’actes législatifs de l’Union autres que la directive 2011/92 et, d’autre part, par l’autorité compétente, des résultats des vérifications préliminaires ou des évaluations des incidences sur l’environnement réalisées en vertu de tels actes législatifs.

37 Troisièmement, la détermination est mise à la disposition du public et indique, notamment, les raisons principales de la décision d’exiger ou de ne pas exiger une EIE au regard des critères pertinents énumérés à l’annexe III de la directive 2011/92.

38 En revanche, la directive 2011/92 ne prévoit pas expressément une obligation de consultation du public au cours de cette procédure de vérification préliminaire. En effet, le considérant 29 de la directive 2014/52, qui explicite l’objectif poursuivi à l’article 4, paragraphes 4 à 6, de la directive 2011/92, précise qu’« il est de bonne pratique administrative de tenir compte des observations spontanées susceptibles de parvenir d’autres sources, telles que des particuliers ou des autorités
publiques », tout en indiquant qu’« il n’est pas obligatoire au stade de la vérification préliminaire de procéder à des consultations officielles ».

39 De même, la directive 2011/92 ne définit pas les hypothèses dans lesquelles l’autorité compétente pourrait ou devrait demander au maître d’ouvrage qu’il fournisse des informations supplémentaires.

40 Par conséquent, la directive 2011/92 ne prévoit pas explicitement l’obligation, pour l’autorité compétente, à la suite des observations qui lui ont été soumises par une partie tierce concernant d’éventuelles incidences notables du projet concerné sur l’environnement, de demander au maître d’ouvrage des informations supplémentaires ou de recueillir elle-même ces informations.

41 Cependant, selon la jurisprudence de la Cour, il se déduit de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2011/92 qu’une EIE doit être réalisée dès qu’il existe une probabilité ou un risque que le projet concerné ait des incidences notables sur l’environnement. Compte tenu du principe de précaution, qui est l’un des fondements de la politique de protection d’un niveau élevé poursuivie par l’Union dans le domaine de l’environnement, à la lumière duquel doit être interprétée la directive 2011/92, il
est considéré qu’un tel risque existe lorsqu’il ne peut être exclu, sur la base d’éléments objectifs, que ce projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement (voir, en ce sens, arrêt du 31 mai 2018, Commission/Pologne, C‑526/16, EU:C:2018:356, points 66 et 67 ainsi que jurisprudence citée).

42 Il en découle que, dans le cadre de la procédure de vérification préliminaire, qui vise à déterminer si une EIE est nécessaire, il appartient à l’autorité compétente de prendre en compte toutes les informations pertinentes dont elle dispose, y compris des informations qui lui ont été soumises de manière spontanée par une partie tierce, lorsque ces informations comportent des éléments objectifs lui permettant d’apprécier l’existence d’un risque que le projet ait des incidences notables sur
l’environnement.

43 Par ailleurs, dans l’hypothèse où, sur la base des informations qui sont mises à sa disposition par une partie tierce, l’autorité compétente considère qu’il ne peut pas être exclu que le projet concerné soit susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, elle doit permettre au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires avant de décider qu’une EIE est nécessaire ou non pour ce projet. En effet, ainsi qu’il ressort du libellé de l’article 4, paragraphes 4
et 5, de la directive 2011/92, le maître d’ouvrage a un rôle prépondérant en ce qui concerne la fourniture des informations permettant à l’autorité compétente de procéder à sa détermination. Or, à cette fin et, en particulier, en vue de limiter l’obligation de réaliser une évaluation des incidences sur l’environnement aux seuls projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, cette autorité doit disposer des informations les plus complètes possibles.

44 En outre, l’autorité compétente ne peut conclure qu’il y a un risque que le projet ait des incidences notables sur l’environnement au motif que les informations fournies par le maître d’œuvre sont incomplètes sans lui avoir demandé, au préalable, de fournir des informations supplémentaires.

45 En revanche, dans l’hypothèse où, malgré les éléments soumis par une partie tierce, l’autorité compétente peut exclure, sur la base d’éléments objectifs, que le projet en cause est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, cette autorité peut décider qu’une EIE n’est pas nécessaire, sans qu’elle soit tenue de demander au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires.

46 Il convient d’ajouter, d’une part, que, conformément à la jurisprudence de la Cour, un projet est considéré comme étant susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement lorsque, en raison de sa nature, il risque de transformer de façon substantielle ou irréversible des facteurs d’environnement, tels que la faune et la flore, le sol ou l’eau, indépendamment de ses dimensions (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Pologne, C‑526/16, EU:C:2018:356, point 65 et jurisprudence citée).

47 D’autre part, ainsi que la Cour l’a jugé, le libellé de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2011/92 est en substance semblable à celui de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 92/43 (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2004, Waddenvereniging et Vogelbeschermingsvereniging, C‑127/02, EU:C:2004:482, point 42).

48 À cet égard, selon la jurisprudence de la Cour, la condition énoncée à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 92/43 implique que, en cas de doute quant à l’absence d’effets significatifs, il y a lieu de procéder à une telle évaluation (voir, en ce sens, arrêt du 26 mai 2011, Commission/Belgique, C‑538/09, EU:C:2011:349, point 41 et jurisprudence citée). Cependant, la Cour a également jugé que cet article 6, paragraphe 3, doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une autorité compétente d’un
État membre décide d’autoriser un plan ou un projet susceptible d’affecter un site protégé au titre de cette directive sans exiger une évaluation appropriée, au sens de cette disposition, cette autorité doit indiquer à suffisance les motifs qui lui ont permis, préalablement à l’octroi d’une telle autorisation, d’acquérir la certitude, malgré les avis contraires et les doutes raisonnables éventuellement exprimés dans ceux-ci, que tout doute scientifique raisonnable quant à la possibilité que ce
projet affectât ce site de manière significative était exclu (arrêt du 15 juin 2023, Eco Advocacy, C‑721/21, EU:C:2023:477, point 43).

49 Il y a lieu d’en déduire que, dans le contexte d’une procédure de vérification préliminaire effectuée au titre de la directive 2011/92, deux conditions sont requises pour que, compte tenu des observations qui lui ont été soumises par une partie tierce, l’autorité compétente soit tenue de demander au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires. D’une part, ces observations doivent porter sur des incidences potentielles « notables » du projet concerné sur l’environnement.
D’autre part, il est nécessaire que lesdites observations soient effectivement de nature à faire obstacle à la conclusion selon laquelle tout doute scientifique raisonnable quant à la possibilité d’incidences notables de ce projet sur l’environnement est exclue.

50 Il appartiendra à la juridiction de renvoi de déterminer si, compte tenu des éléments dont disposait l’agence au moment de l’adoption de la décision du 16 septembre 2020, y compris ceux qui lui avaient été soumis par la requérante au principal dans le cadre de ses observations du 7 juillet 2020, cette agence pouvait acquérir la certitude, malgré les éléments contenus dans ces observations, que tout doute scientifique raisonnable quant à la possibilité que le projet en cause au principal ait des
incidences notables sur l’environnement, en particulier sur des espèces protégées au titre de la directive 92/43, était exclu.

51 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’article 4, paragraphes 4 à 6, de la directive 2011/92 doit être interprété en ce sens que, dans l’hypothèse où, dans le cadre d’une procédure de vérification préliminaire menée au titre de cette disposition, une partie tierce a fourni à l’autorité compétente des éléments objectifs quant aux incidences notables potentielles de ce projet sur l’environnement, en particulier sur une espèce
protégée au titre de la directive 92/43, cette autorité doit demander au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires et en tenir compte avant de décider qu’une EIE est nécessaire ou non pour ledit projet. En revanche, dans l’hypothèse où, malgré les observations soumises à ladite autorité par cette partie tierce, il peut être exclu, sur la base d’éléments objectifs, que ce projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, la même autorité peut
décider qu’une EIE n’est pas nécessaire, sans qu’elle soit tenue de demander au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires.

Sur les dépens

52 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :

  L’article 4, paragraphes 4 à 6, de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, telle que modifiée par la directive 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014,

  doit être interprété en ce sens que :

dans l’hypothèse où, dans le cadre d’une procédure de vérification préliminaire menée au titre de cette disposition, une partie tierce a fourni à l’autorité compétente des éléments objectifs quant aux incidences notables potentielles de ce projet sur l’environnement, en particulier sur une espèce protégée au titre de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, telle que modifiée par la
  directive 2013/17/UE du Conseil, du 13 mai 2013, cette autorité doit demander au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires et en tenir compte avant de décider qu’une évaluation des incidences sur l’environnement est nécessaire ou non pour ledit projet. En revanche, dans l’hypothèse où, malgré les observations soumises à ladite autorité par cette partie tierce, il peut être exclu, sur la base d’éléments objectifs, que ce projet est susceptible d’avoir des incidences notables
sur l’environnement, la même autorité peut décider qu’une évaluation des incidences sur l’environnement n’est pas nécessaire, sans qu’elle soit tenue de demander au maître d’ouvrage de lui fournir des informations supplémentaires.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.


Synthèse
Formation : Dixième chambre
Numéro d'arrêt : C-41/24
Date de la décision : 06/03/2025
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court (Irlande).

Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2011/92/UE – Évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement – Article 2, paragraphe 1, et article 4, paragraphe 2 – Projets relevant de l’annexe II – Travaux d’aménagement urbain – Article 4, paragraphes 4 et 5 – Obligations du maître d’ouvrage et de l’autorité compétente lorsque l’État membre concerné décide d’exiger la détermination prévue à ces paragraphes 4 et 5 pour de tels projets – Prise en compte des observations soumises par un tiers, faisant état d’un impact potentiel du projet concerné sur une espèce animale relevant de la protection stricte prévue à l’article 12 de la directive 92/43/CEE.

Environnement


Parties
Demandeurs : Waltham Abbey Residents Association
Défendeurs : An Bord Pleanála e.a.

Composition du Tribunal
Avocat général : Kokott
Rapporteur ?: Passer

Origine de la décision
Date de l'import : 11/03/2025
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2025:140

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