Vu : 1° La requête de la Compagnie générale transatlantique ; 2° la requête de la Compagnie de navigation mixte, tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler une décision en date du 29 août 1904, par laquelle le ministre des Postes a mis à la charge des deux Compagnies, conjointement avec la Société générale des transports maritimes à vapeur, une somme de 52.000 francs, montant des amendes encourues par ces trois sociétés concessionnaires des services maritimes postaux entre la France, l'Algérie, la Tunisie, la Tripolitaine et le Maroc, pour retards apportés aux départs de leurs paquebots ou inexécution de service, pendant la grève des états-majors de la marine marchande à Marseille en avril et mai 1904 ; Vu le décret du 11 juin 1806 et la loi du 24 mai 1872 ;
Considérant qu'aux termes des articles 24 et 100 du cahier des charges annexé à la convention du 16 décembre 1896 passée entre l'Etat et les deux Compagnies générale transatlantique et de navigation mixte pour l'exécution des services maritimes postaux, tout retard au départ des paquebots rend les Compagnies passibles d'une amende, sauf les cas de force majeure dûment constatés ;
Considérant que la grève générale des états-majors de la marine marchande du port de Marseille n'a pas eu pour effet de rendre impossible pour les deux Compagnies l'exécution du service postal qui leur était confié entre la France d'une part, et, d'autre part, l'Algérie, la Tunisie, la Tripolitaine et le Maroc ; qu'en effet, dès le début de la grève, l'Etat leur a offert de mettre à leur disposition, pour assurer les services qui étaient menacés d'être interrompus, des officiers et des mécaniciens de la marine nationale en nombre suffisant pour combler les vides existants dans l'état-major des paquebots à la veille de partir. Que la Compagnie générale transatlantique a, en ce qui la concerne, opposé à l'offre de l'Administration un refus formel ; qu'en ce qui touche la Compagnie de navigation mixte, la prétention émise par elle de faire supporter par l'Etat la responsabilité générale et absolue de toutes les conséquences pouvant résulter pour elle de la substitution des officiers de l'Etat à son propre personnel, sans aucune distinction entre les divers risques possibles quelle qu'en fût la nature, avait pour effet de subordonner son adhésion à une condition inacceptable pour l'Etat, et devait la faire regarder comme équivalant, de la part de ladite Compagnie, à un refus. Que l'offre de l'Etat, tout en laissant subsister des difficultés sérieuses pour les deux Compagnies de navigation, n'en avait pas moins pour effet, étant donné la navigation à accomplir, de faire disparaître l'empêchement absolu qui s'opposait au départ des paquebots ; que, si les compagnies ont cru devoir refuser cette offre en raison de la gêne et des responsabilités éventuelles qui pouvaient en découler pour elles, elles l'ont fait à leurs risques et périls ; qu'elles ont perdu par là même le droit de soutenir que la grève des états-majors de la marine marchande a créé un obstacle insurmontable à l'exécution de leur service, et d'invoquer le cas de force majeure pour se soustraire à l'application des clauses pénales qu'elles ont encourues en exécution des articles 24 et 100 de leur cahier des charges ;
DECIDE : Article 1er : Les requêtes susvisées de la Compagnie générale transatlantique et de la Compagnie de navigation mixte sont rejetées. Article 2 : Expédition de la présente décision sera transmise au ministre des Postes et Télégraphes.