Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour la commune de Monségur Gironde agissant poursuites et diligences de son maire en exercice, à ce dûment autorisé par délibération du conseil municipal, ladite requête et ledit mémoire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 6 juillet et 5 décembre 1911 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler un arrêté, en date du 2 juin 1911, par lequel le conseil de préfecture du département de la Gironde l'a condamnée à payer une somme de 10.000 francs au sieur Raoul X... à raison d'un accident survenu dans l'église de ladite commune et a mis à sa charge les frais d'expertise, annuler en tant que de besoin, un arrêté, en date du 28 octobre 1910, par lequel le conseil de préfecture a ordonné l'expertise sur la réclamation du sieur X... ; Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ; Vu la loi du 9 décembre 1905 ; la loi du 2 janvier 1907 ; la loi du 13 avril 1908 ;
En ce qui concerne la compétence du conseil de préfecture : Considérant que la réclamation formée au nom du mineur Brousse contre la commune de Monségur était fondée sur ce que l'accident survenu au requérant dans l'église de ladite commune serait dû à un défaut d'entretien de l'église ; qu'il n'est pas contesté que l'église appartient à la commune de Monségur ; que, d'autre part, si, depuis la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat, le service du culte ne constitue plus un service public, l'article 5 de la loi du 2 janvier 1907 porte que les édifices affectés à l'exercice du culte continueront, sauf désaffectation dans les cas prévus par la loi du 9 décembre 1905, à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion ; qu'il suit de là que les travaux exécutés dans une église pour le compte d'une personne publique, dans un but d'utilité générale, conservent le caractère de travaux publics et que les actions dirigées contre les communes à raison des dommages provenant du défaut d'entretien des églises rentrent dans la compétence du conseil de préfecture comme se rattachant à l'exécution ou à l'inexécution d'un travail public ;
Au fond : Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jeune Brousse a été blessé, dans l'église de Monségur, par la chute d'un bénitier qu'il avait provoquée en se suspendant à son rebord avec deux de ses camarades ; que, dans l'ensemble des faits de la cause, tel qu'il est établi par les pièces jointes au dossier, il ne peut être relevé aucune circonstance de nature à engager la responsabilité de la commune ; que, par suite, c'est à tort que le conseil de préfecture l'a condamnée à la réparation du dommage subi par le jeune Brousse du fait de l'accident ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, de mettre à la charge de ce dernier, représenté par le sieur et la dame Y..., les frais d'expertise et les dépens exposés devant le conseil de préfecture ;
DECIDE : Article 1er : L'arrêté susvisé du conseil de préfecture du département de la Gironde, en date du 2 juin 1911, est annulé. Article 2 : La réclamation du mineur Brousse représenté par la dame et le sieur Y... est rejetée. Article 3 : Les frais d'expertise, ainsi que les dépens exposés devant le conseil de préfecture et devant le Conseil d'Etat, sont mis à la charge du mineur Brousse. Article 4 : Expédition ... Intérieur.