Requête du docteur Y... tendant :
1° à l'annulation de la décision du 10 février 1982 de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins lui infligeant une peine de suspension de trois mois et au constat que les faits sont amnistiés ;
2° au renvoi de l'affaire devant la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins ;
Vu le code de la santé publique ; la loi du 4 août 1981 ; le décret du 26 octobre 1948 ; le décret du 28 juin 1979 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la régularité formelle de la décision attaquée : Considérant, d'une part, qu'en énonçant que le docteur Y... s'était fait remettre par M. X... un chèque sans indication du nom du bénéficiaire qu'il a ensuite utilisé pour payer une dette personnelle, qu'il s'était immiscé dans des conditions irrégulières, dans le règlement des sommes dues par M. X... à la clinique Saint-Roch et qu'il n'avait pas fixé ses honoraires avec tact et mesure, la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins, qui n'était pas tenu de suivre le docteur Y... dans le détail de son argumentation, a suffisamment motivé sa décision ;
Cons., d'autre part, que le moyen tiré par le docteur Y... de ce que la convocation qui lui a été adressée par le conseil régional n'aurait pas été motivée et de ce qu'il n'aurait pas été averti, devant le même conseil, des griefs retenus à son encontre n'a pas été soulevé devant la section disciplinaire ; que, dès lors, cette dernière n'avait pas à y répondre ;
Sur la régularité de la procédure suivie devant la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins :
Sur le moyen tiré de la violation de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Cons. que si, aux termes de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ratifiée par la France en vertu de la loi du 31 décembre 1973 et publiée au Journal officiel par décret du 3 mai 1974 : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ", les juri- dictions disciplinaires ne statuent pas en matière pénale et ne tranchent pas de contestations sur des droits et obligations de caractère civil ; que, dès lors, les dispositions précitées de l'article 6-1 de la Convention européenne susvisée ne leur sont pas applicables ; qu'aucun principe général du droit n'impose pas la publicité des débats dans le cas où une juridiction statue en matière disciplinaire ; qu'il suit de là que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que la décision de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins, prise, après que les débats aient eu lieu, conformément à l'article 26 du décret du 26 octobre 1948, en audience non publique, serait intervenue dans des conditions irrégulières ;
Sur le moyen tiré de ce que la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins ne pouvait retenir des griefs écartés par le conseil régional sans mettre le docteur Y... en mesure de les discuter : Cons. que la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins peut légalement se fonder sur des griefs qui n'ont pas été dénoncés dans la plainte ou qui ont été écartés par les premiers juges à condition d'avoir, au préalable, mis l'intéressé en mesure de présenter utilement sa défense sur ces griefs ;
Cons. que si la section disciplinaire a retenu, à l'encontre du docteur Y... les griefs de n'avoir pas fixé ses honoraires avec tact et mesure et de s'être immiscé dans les rapports de M. X... avec la clinique Saint-Roch dans des conditions irrégulières, il ressort des pièces versées au dossier soumis aux juges du fond que l'intéressé a pu prendre connaissance de l'ensemble du dossier de la poursuite et a présenté des observations sur ces griefs dans son mémoire devant la section disciplinaire ; qu'il suit de là que le moyen tiré d'une violation des droits de la défense n'est pas fondé ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Sur le moyen tiré de ce que les griefs retenus n'étaient pas de nature à justifier une sanction disciplinaire : Cons. qu'il ressort des pièces versées au dossier soumis aux juges du fond que le docteur Y... a demandé à son patient de lui établir un chèque sans indication du nom du bénéficiaire qu'il a, ensuite, utilisé pour régler une dette personnelle, qu'il a payé lui-même les frais d'hospitalisation de M. X... sur les sommes que ce dernier lui avait versées ; que ses honoraires n'ont pas été fixés avec tact et mesure ; que ces faits étaient de nature à justifier une sanction discipli- naire ;
Sur le moyen tiré de ce que la sanction retenue serait excessive : Cons. que l'appréciation à laquelle se livre la section disciplinaire pour décider d'une sanction déterminée, compte tenu des faits reprochés à l'intéressé n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
Sur le moyen tiré de ce que le point de départ des effets de la suspension décidée par la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins ne pouvait être fixé à une date autre que la notification de la décision : Cons. que, par une première décision du 10 février 1982, la section disciplinaire a pris, à l'égard du docteur Y..., une sanction de suspension de trois mois à compter du 1er mai 1982 ; que, statuant sur des faits distincts elle a, par la décision attaquée, pris à l'encontre du docteur Y..., une autre décision de suspension pour trois mois ; que, dans ces conditions, elle a pu légalement décider, afin d'assurer le caractère effectif de ces deux suspensions, que la deuxième ne prendrait effet qu'à l'expiration de la première ;
Sur la violation du principe du non-cumul des peines : Cons. que la règle de droit pénal, de confusion des peines en cas de concours réel d'infractions ne trouve pas d'application en matière disciplinaire ; qu'il suit de là que, saisis successivement de deux plaintes contre le docteur Y..., pour des faits différents, le conseil régional du Languedoc-Roussillon puis, en appel, la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins ont pu prononcer, à l'encontre du requérant, deux sanctions distinctes ;
Sur le moyen tiré de ce que les griefs retenus étaient couverts par la loi d'amnistie du 4 août 1981 : Cons. qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 4 août 1981 : " Sauf mesure individuelle accordée par décret du président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévu par le présent article les faits constituant des manquements à la propriété, aux bonnes moeurs ou à l'honneur " ;
Cons. que les faits reprochés au docteur Y... sont contraires à la probité et à l'honneur ; qu'il en est ainsi, en particulier, de ce que ses honoraires n'ont pas été fixés avec tact et mesure, compte tenu du mode de paiement exigé par lui ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que la section disciplinaire les a considérés comme exclus du bénéfice de l'amnistie ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que le docteur Y... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ... rejet .N
1 Rappr. Ass., Y..., 11 juill. 1984.