Recours du Garde des Sceaux, ministre de la justice tendant :
1° à l'annulation du jugement du 24 janvier 1983 du tribunal administratif de Nice condamnant l'Etat à verser à Madame Henry épouse Y..., fille et héritière de Mme veuve X... une indemnité de 160 000 F en réparation du préjudice résultant du meurtre de M. X... par un détenu bénéficiaire d'une permission de sortir ;
2° au rejet de la demande de première instance ;
3° à la condamnation de la partie adverse aux dépens ;
Vu le code de procédure pénale, et notamment son article 722 ; la loi n° 72-1226 du 29 décembre 1972 ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la recevabilité : Considérant qu'il résulte de l'instruction que le recours susvisé a été signé par une autorité administrative à ce dûment habilitée par délégation du Garde des Sceaux, ministre de la justice publiée au Journal officiel du 26 mars 1983 ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de qualité de l'auteur du recours doit être rejeté ;
Sur la responsabilité : Cons. qu'il ressort des pièces du dossier que M. Edmond X... a été tué le 8 avril 1976 par un détenu qui n'avait pas regagné la maison d'arrêt où il était incarcéré, à l'issue d'une permission de sortir accordée pour la période du 27 au 30 septembre 1975 ;
Cons. qu'en vertu de l'article 722 du code de procédure pénale dans sa rédaction issue de l'article 37 de la loi du 29 décembre 1972, applicable aux faits de l'espèce, " le juge de l'application des peines détermine pour chaque condamné les principales modalités du traitement pénitentiaire, en accordant notamment ... les permissions de sortir " ; que la responsabilité de l'Etat peut être engagée même sans faute en raison du risque spécial créé à l'égard des tiers par des détenus bénéficiaires d'une permission de sortir ;
Cons. toutefois qu'il ne résulte pas de l'instruction que, dans les circonstances de l'affaire, un lien direct de cause à effet ait existé entre le fonctionnement du service et le dommage dont Mme veuve X... demandait réparation devant le tribunal administratif de Nice ; que, par suite, le Garde des Sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a retenu la responsabilité de l'Etat et l'a condamné au paiement d'une indemnité de 160 000 F ;
annulation du jugement ; rejet de la demande .N
1 Rappr. en matière de mineurs délinquants placés dans des établissements de rééducation : Garde des Sceaux c/ Trouillot, 9 mars 1966, p. 201 ; Sect., Etablissements Delannoy, 19 déc. 1969, p. 595 ; Garde des Sceaux c/ Schmitt, 12 nov. 1975, p. 562.