Requête de la société anonyme Boussac Saint-Frères tendant :
1° à l'annulation du jugement du 24 décembre 1980 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a déclaré régulière la délibération du conseil municipal de Neuf-Brisach du 22 mai 1978, à la demande de ladite commune ;
2° au rejet de la demande présentée par la commune de Neuf-Brisach en exécution d'un jugement rendu le 14 mars 1980 par le tribunal de grande instance de Colmar ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; le code des communes ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu'à la suite du litige né de l'inexécution d'un contrat de droit privé que la commune de Neuf-Brisach soutient avoir passé avec la société Coframaille, département du Consortium général textile qui a pris ultérieurement le nom de Boussac Saint-Frères, le tribunal de grande instance de Colmar, saisi par la commune, a sursis à statuer " jusqu'à ce que le tribunal administratif de Strasbourg compétent se soit prononcé sur la question de savoir si la commune de Neuf-Brisach, demanderesse, peut prétendre à une quelconque rémunération pour avoir trouvé à la défenderesse, la société Boussac Saint-Frères, un successeur pour son usine de Neuf-Brisach " ; que, par un jugement en date du 24 décembre 1980, le tribunal administratif de Strasbourg saisi de cette question préjudicielle par la commune de Neuf-Brisach a, par des motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de son jugement, affirmé la réalité de l'obligation qui aurait été contractée par la société Boussac Saint-Frères et reconnu le droit pour la commune d'en poursuivre l'exécution et s'est ainsi prononcé sur des questions qui relevaient du seul juge du contrat ; qu'ainsi, la société requérente est fondée à soutenir que le tribunal administratif a excédé les limites de sa compétence et que, par suite, son jugement doit être annulé ;
Cons. que dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'évoquer et de se prononcer sur la question préjudicielle posée ;
Cons. que la société Boussac Saint-Frères ayant décidé de fermer une usine textile qu'elle exploitait à Neuf-Brisach, le conseil municipal a, dans une délibération du 22 mai 1978, décidé que la commune entreprendrait des démarches en vue de trouver une entreprise susceptible de maintenir l'usine en activité et de reprendre le personnel, démarche qui a d'ailleurs abouti, et de demander à la société Boussac Saint- Frères, qui se verrait ainsi dispensée du paiement d'indemnités de licenciement, la restitution à la commune, à laquelle ils avaient appartenu jusqu'en 1953, des bâtiments de l'usine pour le prix d'un franc symbolique ;
Cons. qu'en recherchant un industriel susceptible de reprendre l'établissement de Boussac Saint-Frères, le maire de Neuf-Brisach a agi dans un but d'intérêt général en vue de favoriser le maintien de l'activité économique et de l'emploi sur le territoire de la commune ; que le conseil municipal a pu légalement proposer à la société Boussac Saint-Frères, sans excéder les limites de sa compétence et sans porter atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie, la cession, au bénéfice de la commune, des terrains et des bâtiments de son établissement afin de favoriser toute implantation ultérieure d'entreprises nouvelles ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en formulant cette proposition, le conseil municipal ait agi exclusivement dans un intérêt financier ou pour obtenir la rémunération d'un service rendu ; ... annulation du jugement ; légalité de la délibération du conseil municipal de Neuf-Brisach .