Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 mai 1986 et 10 septembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour GAZ DE FRANCE, dont le siège est ..., représenté par ses représentants légaux, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 6 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 520 579,36 F hors taxe, valeur décembre 1981, avec indexation sur l'indice du coût de la construction au jour du paiement, avec intérêts de droit, en réparation du préjudice causé par l'installation défectueuse des lignes téléphoniques desservant la résidence "Les Jardins de la Rize" à Vaulx-en-Velin (Rhône) rendant impossible toute intervention ultérieure sur les conduites de gaz,
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 520 579,36 F hors taxe, valeur décembre 1981 avec indexation sur l'indice du coût de la construction, intérêts de droit et intérêts des intérêts,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dubos, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du GAZ DE FRANCE,
- les conclusions de Mme Leroy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, dans le cadre de la construction de la résidence "Les Jardins de la Rize" à Vaulx-en-Velin, la réalisation des divers réseaux a été confiée par l'entreprise SABE, entrepreneur principal, à la société chimique de Gerland ; que celle-ci a d'abord procédé à la pose des canalisations de gaz puis de celles du téléphone ; que les canalisations et chambres de tirage du téléphone ont été construites de telle façon que les interventions sur les conduites de gaz ont été rendues impossibles, obligeant GAZ DE FRANCE à reposer ces conduites et à refaire les branchements ; que GAZ DE FRANCE demande le remboursement des frais ainsi engagés à l'administration des PTT sur le fondement de la responsabilité sans faute pour préjudice à un tiers résultant de l'exécution et de l'existence d'un ouvrage public ;
Considérant que si le ministre des PTT soutient que l'Etat n'est pas propriétaire de l'ouvrage en cause et que son administration n'a pris aucune part aux études non plus qu'à leur réalisation, il résulte de l'instruction que les chambres de tirage et les canalisations associées sont exclusivement destinées à l'usage du service public du téléphone ; qu'au surplus l'administration des PTT assure l'entretien desdits ouvrages ; que ces ouvrages doivent donc être regardés comme des ouvrages publics à l'égard desquels GAZ DE FRANCE a la qualité de tiers ; qe le ministre ne peut utilement demander l'exonération de l'Etat en arguant de la faute d'un tiers ou de l'entretien normal de l'ouvrage ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que GAZ DE FRANCE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a écarté la responsabilité de l'Etat dans les dommages en cause ;
Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expert ordonné par les premiers juges, que les chambres de tirage ont été mises en place immédiatement après les canalisations de gaz ; que, les représentants de GAZ DE FRANCE présents sur le chantier n'ayant relevé aucune anomalie, ce service a commis une faute de nature à limiter la part de responsabilité incombant à l'Etat dans les désordres survenus ;
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en laissant à la charge de GAZ DE FRANCE le quart du préjudice ; que le montant de travaux et de frais de 520 579,36 F n'est pas contesté ; que, dès lors, compte tenu du partage de responsabilité, il y a lieu de fixer à 390 434,52 F le montant de l'indemnité due par l'Etat à GAZ DE FRANCE ; que si celui-ci réclame l'indexation de cette somme sur l'indice du coût de la construction cette revalorisation ne peut se cumuler avec l'octroi des intérêts légaux ;
Considérant que GAZ DE FRANCE a droit aux intérêts de la somme susmentionnée à compter du 19 février 1982, date d'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif de Lyon ; qu'il a demandé les 16 mai 1986 et 2 novembre 1989 la capitalisation des intérêts de la somme à laquelle il a droit ; qu'à ces dates il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, par application de l'article 1154 du code civil il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : Le jugement en date du 6 mars 1986 du tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à GAZ DE FRANCE la somme de 390 434,52 F avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 1982, les intérêts échus les 16 mai 1986 et 2 novembre 1989 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de GAZ DE FRANCE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à GAZ DE FRANCE et au ministre des postes, des télécommunications et de l'espace.